༄ Chapitre 52
— Prête ?
— Absolument pas.
Aurios était en train de m'équiper d'un vêtement proche du corps à la teinte bleu marin, le tout accompagné de protections au niveau de la poitrine principalement, ainsi que des membres. Les protections semblaient souples, mais lorsque j'avais donné un léger coup dedans, la matière noire qui les composait avait durci instantanément. Je ne comprenais pas l'utilité de cela si c'était un combat à mort, peut-être était-ce dans le but de faire durer le plaisir, chose qui ne me surprendrait même pas avec eux. Pourquoi me regarder me faire tailler en pièce instantanément alors qu'en m'offrant une protection, même légère, ils pourraient savourer la vision de Veerky qui me briserait comme du verre en prenant son temps ?
— Et voilà, lâcha Aurios en reculant pour m'admirer des pieds à la tête, une vraie guerrière.
— Ne raconte pas n'importe quoi, on sait tous les deux que c'est complètement faux.
— Je ne trouve pas, tu as démonté que tu étais plus forte que ce qu'on pouvait s'imaginer au premier coup d'œil.
Il était vrai que j'avais démontré un talent à manier les armes impressionnant, j'en avais été moi-même surprise. Mais il ne fallait pas se leurrer, je n'étais pas de taille, mais la seule mission était de gagner de temps, pas cet affrontement. Aurios avait eu grandement raison, un mois ce n'était rien, c'était pitoyablement court même. Parfois, cela paraissait durer une éternité, mais dans des situations comme celle-ci, le temps s'enfuyait à une vitesse effrayant. Nous nous étions entraînés tous les jours, dans la salle et même dans l'océan lui-même, mon formateur étant persuadé que l'affrontement se ferait dans une arène remplie d'eau. Mais si je ne pouvais remporter cet affrontement, nous avions tout de même mis au point des tactiques et autres petites surprises qui me permettraient de ne pas finir en miette trop rapidement.
Le prince me tendit mon arme qui arborait cette fois ses lames cobalt. Je m'en saisis et l'observai attentivement. Deux grandes mains chaudes s'emparèrent de mon visage sans crier gare, me tirant un léger sursaut, mes iris plongèrent alors dans deux lacs émeraude. J'entre ouvrir les lèvres pour parler, mais celles de mon ami s'approchèrent ce qui me fit retenir mon souffle pendant un instant. Ce fut mon front qui cueillit un doux baiser, même si mon cœur palpitait à toute vitesse dans ma poitrine, j'avais réellement cru qu'il fut sur le point de m'embrasser. Légèrement secouée, je ne sus que dire alors qu'il me caressait doucement les joues avec ses pouces, il était d'une douceur exceptionnelle, celui ou celle qui obtiendrait le cœur de ce prince serait certainement la personne la plus heureuse.
— Tout ira bien, me rassura-t-il en souriant légèrement, je te le promets. Maintenant, va, il est temps.
Je ne pus que hocher la tête de façon affirmative tandis que ses mains quittaient ma peau et qu'il tournait les talons pour s'éloigner. Je ne le lâchai pas du regard jusque'à ce qu'il disparaisse de ma vue, maintenant seule, je me retournai pour observer le fond du couloir devant moi. Je n'avais aucune idée de ce qui m'attendait, le stress était de plus en plus présent, mais je ne pouvais faire demi-tour. Resserrant ma prise sur mon arme, je me mis alors à avancer jusqu'à atteindre le fond et à peine fus-je installée sur la large dalle au sol, le plafond au-dessus de ma tête s'ouvrit pour laisser entrer des litres d'eau salée. Aurios ne s'était visiblement pas trompé, une fois de plus. Ma chevelure ébène se plaqua en premier sur mon crâne avant de se mettre à flotter mollement derrière moi. Je m'échappai par l'ouverture pour ensuite me retrouver dans une arène carrée, remplie de stalagmites de pierre gigantesques un peu partout et entourée de gradins remplis d'Atlantes, de tritons et de sirènes – certainement pas des artificielles – tous venues pour me voir mordre la poussière.
Tout ce monde formait un méli-mélo de couleurs divers et varié qui s'agitait au tour de moi. Et ce fut sans mal que je perçus des insultes, des sifflements et des huées, mais ça ne me fit ni chaud ni froid. Je ne m'attendais pas à être bien accueillie dans tous les cas. Je continuai mon inspection pour voir, sur une sorte de terrasse en hauteur, les membres du conseil ainsi que Kori et Emäris. Je pouvais voir cette bande de nobles bavasser entre eux en me lançant par moment des regards moqueurs, ils étaient si sûrs de leur victoire. Si je n'avais pas confiance en Aurios, j'aurais compris leur comportement, mais ils risquaient de tomber de sacrément haut. Je pris cela comme une consolation et un petit sourire discret étira mes lèvres, ce ne serait pas moi la perdante de toute cette histoire. Je fus brusquement arrachée à mes pensées par un tonner d'applaudissement et un brouhaha digne des plus grands stades de foot. J'en compris rapidement la raison.
Veerky venait de faire son entrée dans l'arène, vêtue d'une tenue similaire à la mienne, sauf que celle-ci arborait une belle couleur vert forêt. Ses cheveux roux flottaient derrière elle alors qu'elle saluait la foule avec le sourire, elle ne semblait nullement inquiète vis-à-vis de la suite. Je savais qu'il me fallait garder mon calme, mais le simple fait de voir celle responsable, littéralement, de tous mes malheurs ne me mettait clairement pas en joie. Surtout à la voir parader de la sorte, à croire qu'elle venait d'être couronnée reine. Après ce qui me parut durer une éternité, elle daigna finalement m'adresser un regard, même si elle ne manqua pas de l'accompagner d'un sourire narquois qui ne la rendait que plus détestable encore. Lorsqu'elle alla poser pied sur un plateau en pierre se situant pile au centre de l'arène. Je vins l'y rejoindre, m'approchant jusqu'à ce qu'à peu près deux mètres nous séparent l'une de l'autre. Ma future adversaire regarda une nouvelle fois au tour de nuit, toujours ce sale petit sourire collé aux lèvres.
— Tout ce monde venu pour te voir perdre, à ta place j'en aurais été particulièrement vexée.
— À quoi bon ? la questionnai-je sur un ton ennuyé. Je savais avant même d'entrer dans cette arène avec toi que cela se passerait ainsi. Ils ont tous adhéré à ta politique inhumaine, alors évidemment qu'ils ne veulent pas que cela change, ils n'en tirent que des avantages.
Oui, je parlai bien de SA politique à elle et pas celle de Dagon, parce que depuis le début, c'était elle qui avait mis en place ce plan et qui ensuite avait glissé l'idée à Dagon. Alors ça ne venait pas de lui, tout ça, c'était arrivé uniquement à cause de la soif de reconnaissance et de pouvoir de cette sale rouquine.
— J'imagine que tu connais aussi l'issu de ce match alors ? continua-t-elle alors qu'elle jouait avec son épée.
Je fronçai légèrement les sourcils, même si mes lèvres restèrent closes. Je ne lui ferais pas le plaisir de répondre à cette question, parce que c'était exactement ce qu'elle voulait. Ce n'était pas l'envie qui me manquait de répondre à ses provocations, mais il fallait que je garde la tête froide, sinon tout était foutu. Je resserrai alors ma prise sur le manche de mon arme, arme sur laquelle son regard de saphir se posa ensuite.
— Étonnant comme choix, je pensais que tu prendrais quelque chose de plus facile à manier ou plutôt que ce merdeux d'Aurios aurait eu la présence d'esprit de te conseiller autre chose, lui qui est si malin.
— Oh ! Mais il est malin.
Je la vis arquer un de ses parfaits sourcils, me montrant ainsi à quel point elle était septique vis-à-vis de ce que je venais de lui rétorquer.
— Enfin, fit-elle, ne perdons pas plus de temps, j'aimerai en terminer rapidement, perdre mon temps avec une mauvaise copie d'Atlante n'est pas ce que je préfère faire.
Je m'attendais à ce que quelqu'un annonce le début de combat et le pourquoi du comment de notre présence à tous. Mais rien de tout cela. La seule chose qui arriva, ce fut l'attaque vive et brutale de Veerky que je parvins à esquiver de justesse, même si quelques-uns de mes cheveux y passèrent. Je contre-attaquais droit derrière pour ne pas lui offrir une ouverture supplémentaire, passant outre le fait que personne ne prenait réellement cela au sérieux. Mais avant toute chose, il fallait que je me mette à mon avantage. Esquivant un nouveau coup d'épée et profitant de l'ouverture que m'offrait celui-ci, mon tibia heurta avec violence le ventre de la rousse qui s'était attendue à parer un coup de glaive. La propulsant à plusieurs mètres de moi, je repris place sur la surface en pierre avant de faire s'écarter l'eau de manière à ce que cette zone en soi complètement dépourvue, ainsi nous serions obligées de nous battre à l'air libre.
— C'est ça ton plan pour me vaincre ? M'obliger à te combattre hors de l'eau ? C'est pathétique, je t'écraserai, peu importe les conditions !
— Alors arrête de bavasser.
Il n'en fallut pas plus pour qu'elle se jette à nouveau sur moi, maniant avec adresse son arme, j'en sentis la pointe me frôler à plusieurs reprises et cela toujours là où il n'y avait aucune protection. Cette fille savait parfaitement ce qu'elle faisait, elle était forte, je ne pouvais le nier. Ses coups étaient puissants, fluides et faits pour tuer, même si j'avais beaucoup appris avec Aurios pendant ce mois, je sentais la différence de niveau entre nous. Pour accentuer la portée de mes attaques, je fis venir de l'eau en quantité suffisante pour qu'elle soit balancée en direction de mon adversaire à chaque mouvement de manière précise à la manière de balles qui fileraient pour abattre une cible. Les premières firent mouche, mais il ne lui fallut pas bien longtemps pour comprendre mon stratagème.
— Tu penses que des tours de passe-passe dignes d'un enfant te garderont en vie ?! Tu es vraiment une idiote !
Elle leva une main et la quantité d'eau attirée depuis une des parois pour venir à la lame de mon arme gela au tour d'une des deux lames de celle-ci. Veerky leva alors son épée pour m'asséner un coup qui aurait dû faire mouche. Oui, il aurait dû, mais pourtant cela n'arriva jamais. Lors de nos entraînements, Aurios m'avait montré quelque chose avec cette arme et ce quelque chose allait me servir maintenant. La lame de l'épée de Veerky avait tranché du vide, alors que mon double glaive s'était séparé par le milieu pour me permettre d'esquiver l'assaut de mon ennemi et devenir une arme jumelle. Profitant de sa confusion, j'envoyais mon pied percuter son estomac pour la faire reculer de quelques mètres. La partie de l'arme libre vint percuter la glace qui retenait l'autre prisonnière pour la briser et me permettre de rendre au double glaive sa forme d'origine.
Sans attendre, je lançais un assaut sur l'Atlante en face de moi, encore légèrement déstabilisée par mon action précédente, je ne manquai aucune des ouvertures qu'elle m'offrit, agitant souplement mon arme, je parvins à faire mouche. Un cri de douleur s'éleva dans l'arène alors qu'un silence de mort s'était soudainement abattu tout au tour de nous, quelques gouttes de sang s'étaient répandues sur le sol alors qu'un mur d'eau s'était dressé entre moi et la rousse, celui-ci gela avant de tomber en morceau. Je ne pouvais pas distinguer son visage à cause de sa chevelure de feu qui barrait son faciès, mais je vis très clairement du sang couler le long de son poignet alors que sa main couvrait son visage. Sa respiration était forte et je pouvais voir ses phalanges blanchir sous la force qu'elle mettait à serrer le manche de son épée. Lorsqu'elle releva la tête, j'écarquillai les yeux. Mon coup avait effectivement fait mouche, une plaie sanguinolente traversait le visage de Veerky de la pommette droite jusqu'à la gauche, créant un rideau de sang sur la partie basse de son faciès.
Son regard me fit froid dans le dos et je me remis immédiatement en position, mais j'avais le sentiment que je venais de réveiller un monstre et ses mots me le confirmèrent :
— Parfait, finis de jouer maintenant.
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