༄ Chapitre 4

DAGON

Ça aurait été mentir de dire que je n'avais pas été surpris par la réaction de cette artificielle.

Habituellement, les femmes ne reculaient pas, elles restaient tétanisées devant moi ou alors admiratives. Il n'en fut rien pour celle que je tenais fermement par les cheveux. Il n'y avait eu que de l'animosité dans son regard quand mes doigts l'avaient effleurée, bien plus que de la peur d'ailleurs. C'était intrigant. Après avoir fait passer le message qu'elle était mienne, je l'entraînai hors de cette salle, laissant les autres finir leur petit marché.

Il y avait des avantages à être prince.

Ils devaient obligatoirement céder la place quand j'arrivais, bien que voilà un moment que je n'eusse remis les pieds en ces lieux. Je n'étais, au départ, venu que par pure curiosité. Et voilà que je repartais avec une femelle. Stoppant notre progression, je m'agrippai un peu plus à son épaisse tresse noire, lui enjoignant de pencher la tête vers l'arrière. Elle opposa de la résistance, mais sa force était moindre à côté de la mienne. Elle fut donc contrainte de basculer la tête vers l'arrière pour soulager la tension dans son cuir chevelu. Nos regards s'accrochèrent, il y avait quelque chose d'insolent dans ses yeux. Cela me faisait penser à cette lueur qui brillait dans les yeux de certains animaux.

— Ton nom, ordonnai-je d'une voix posée.

— Crève !

Cette remarque glaciale me fit hausser un sourcil.

J'allais lui apprendre à cette petite insolente.

D'un geste vif, je la fis se positionner face à moi. Et avant qu'elle n'ait pu faire le moindre geste, ma main cogna durement son visage, la faisant chuter comme une poupée désarticulée. Un gémissement de douleur me parvint. Posément, je m'accroupis près d'elle, pas le moins du monde désolé pour ce que je venais de faire. Ce n'était qu'un objet pour mon bon plaisir et une femme, si elle voulait éviter ce genre de chose, n'avait qu'à connaître sa place.

— Mets-toi bien dans le crâne que tu n'es rien, ici. Rien de réellement important, tout du moins, je vais seulement me servir de toi pour faire un enfant ou simplement quand j'aurai envie de baiser. Quand je me serai lassé de toi, je te jetterai et j'en prendrai une autre, est-ce que tu comprends ?

Sur la fin, mon ton avait été volontairement infantilisant. Je ne savais pas si elle était idiote ou non, mais, en tout cas, je ne privais pas de me moquer d'elle en lui parlant ainsi.

Un rire résonna.

— Jamais, murmura-t-elle.

— Pardon ?

Tout doucement, elle relevait le visage vers moi. Je pus alors voir du sang goutter au coin de sa bouche.

— Je ne porterai jamais l'enfant d'une ordure de ton espèce. Je préfère mourir. Observant l'artificielle en face de moi, je me rapprochai jusqu'à me saisir de sa gorge délicate, l'obligeant à s'allonger sur le dos. La surplombant de toute ma stature, je fis fortement pression sur sa trachée, la privant petit à petit d'oxygène. S'il n'y eut pas de réelle réaction au début, je vis petit à petit la panique emplir ses yeux insolents.

Pourtant, l'insolence ne déserta pas face à la peur.

Elle resta présente aux côtés de la terreur.

Un grognement guttural m'échappa. Ce n'était pourtant pas de la colère ni de la frustration, mais du désir. Je me demandais si je pourrais briser cette insolente créature, et combien de temps cela prendrait avant qu'elle ne rampe à mes pieds en me suppliant de lui pardonner. C'était excitant. Relâchant un peu ma prise sur elle, je me penchai tout près de son visage devenu blafard.

— Je pourrais te prendre dans ce couloir, lui fis-je savoir, te baiser si fort que tu n'arriverais même plus à te remettre debout ensuite. En as-tu seulement conscience ?

Une grimace de dégoût prit place sur son visage. Elle savait très bien que je ne lui mentais pas, sinon elle n'aborderait pas pareille expression. Je ne mis pourtant pas ma menace à exécution. Je me remis droit, ma main toujours fermement agrippée à sa gorge. Notre différence de taille lui avait fait quitter le sol, ses orteils frôlaient tout juste le parterre en pierre. J'aurais pu me contenter de la garder les pieds sur le sol, mais c'était moins amusant. Il ne fallut que peu de temps pour qu'elle se mette à battre des jambes dans le vide. La laissant se fatiguer inutilement pendant quelques minutes, je lâchai finalement prise, la laissant de nouveau heurter le sol et cracher ses poumons avant d'avaler de grandes gorgées d'air.

— Allez, déclarai-je en revenant m'emparer de sa tresse, assez joué.

Je l'obligeai à avancer malgré les feulements de colère qu'elle poussait. Ce n'était qu'un bruit comme les autres pour moi. Elle cesserait quand elle aurait compris que c'était inutile. Quittant cet endroit morne et déprimant, je m'engageai dans un couloir bien plus coloré, car ouvert sur les fonds marins. Les sons agressifs de l'artificielle cessèrent net. Curieux, je me penchai sur elle et je vis ses yeux s'agiter, observant tout ce qu'elle voyait. Des poissons d'une grande beauté, des baleines, des requins et d'autres créatures marines. À la profondeur où nous vivions, nous ne recevions que rarement la visite des humains, ce qui avait permis à la faune de se développer correctement et si, par hasard, des intrus s'invitaient ici, ils ne regagnaient généralement jamais la surface.

— Habitue-toi, c'est ce que tu verras pour le restant de tes jours, lui annonçai-je d'une voix moqueuse. Je ne reçus qu'un regard en coin méprisant pour toute réponse.

— Ça, il va vite falloir arrêter, sinon ce ne sera pas une gifle que tu recevras à l'avenir. La menace était claire, elle détourna les yeux, je ne vis pourtant pas la lueur assassine qui illuminait les deux orbes, presque rouges, disparaître. Soit, ce n'était pas le moment de donner une correction à cette petite chose irrespectueuse. Ce qui l'attendait serait une punition largement suffisante pour l'instant. Reprenant notre avancée, nous traversâmes trois couloirs richement décorés, d'or et de cristaux, jusqu'à ce que je la fasse pénétrer dans ce qui se rapprochait d'une... comment les humains appelaient-ils ça déjà ? Ah, oui, une salle de bains. Là se tenaient quatre sirènes d'âge plutôt mûr, bien que l'âge fût quelque chose de particulièrement relatif chez ceux de notre espèce. Nous ne vieillissions pas comme les hommes de la surface.

— Tiens, commença l'une des trois femmes, je ne m'attendais pas à ce que vous rameniez une nouvelle concubine, mon prince.

— Ne pose pas de questions, Tiiana, grognai-je en lui balançant la fille. Tu sais ce que tu dois faire.

La concernée m'adressa un sourire en coin en tenant fermement ma nouvelle possession. Tiiana était une amie de ma mère. Grande et belle. Ses longs cheveux gris semblaient être faits d'argent pur. Les quelques rides qui apparaissaient au coin de ses yeux en amande, à la couleur améthyste, ne la rendaient pas moins belle. Mais ce qui m'impressionnait le plus dans ce regard, c'était sa soi-disant capacité à pouvoir sonder n'importe quelle âme. Je m'installai dans un fauteuil présent dans la pièce, observant les deux autres femelles présentes dans la pièce, une brune, une rousse et une blonde platine. Aucun intérêt. Mes yeux se reposèrent sur l'artificielle qui était étrangement calme. Non, pas calme : elle était résignée à subir ce qui allait arriver. Étonnant pour une acharnée comme elle.

J'observais Tiiana l'allonger à plat ventre sur la table en marbre qui trônait au centre de la pièce. Avant de lui retirer le soutien-gorge qu'elle portait pour le jeter près de mes pieds. Cela me fi t gronder de manière sourde. La femme aux cheveux d'argent gloussa face à cela. Elle se moquait, je le savais très bien. Je ne comprenais pas en quoi me voir revenir avec cette fille était amusant.

— Elle est superbe, commenta la sirène malicieuse, des artificielles aussi belles, c'est devenu très rare. Ces dernières années, elles sont devenues bien fades, alors, c'est une belle trouvaille. Enfin, vous avez toujours eu bon goût. Néanmoins, je pense que vous avez conscience que Kawena va très mal le prendre, n'est-ce pas ?

À peine eut-elle terminé sa phrase que je fus sur elle, son cou prisonnier de ma poigne. Aucun mot ne passa la barrière de mes lèvres, mon regard devait être bien plus parlant que n'importe quelle menace que j'aurais pu proférer à cet instant. Je savais très bien qu'elle avait raison, mais j'avais une sainte horreur qu'elle se mêle de mes affaires.

— À ce que je sache, c'est moi qui commande, Kawena n'aura pas son mot à dire. Toi, contente-toi de faire ce que tu dois faire et, surtout, mêle-toi de tes affaires.

— Je vous demande pardon..., s'excusa-t-elle péniblement à cause de ma main toujours sur sa gorge.

Je la libérai de mon emprise sans la moindre douceur, regagnant mon fauteuil. Mes yeux croisèrent les pupilles magenta de l'impertinente. Elle m'observait sévèrement, alors que sa bouche s'était légèrement tordue en signe de... désapprobation ? Cela me tira un sourire, j'avais hâte que Tiiana commence, elle allait perdre cette espèce de pseudo-compassion qu'elle venait d'avoir pour l'argentée, et très rapidement.

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