༄ Chapitre 15
Assise, j'essuyai mes mains au tissu de ma jupe, comme si elles étaient moites, alors qu'il n'en était rien. Le stress me comprimait les entrailles et faisait battre mon cœur plus vite que de raison. Pourtant, rien ne me mettait en danger ou ne me menaçait. Au contraire, j'étais même bien installée, ça faisait depuis mon arrivée ici que je n'avais pas été aussi bien traitée. Cette étrange femme m'avait fait installer avant de me dire de l'attendre. J'avais obéi, quelque chose chez elle me dissuadait de lui désobéir, mon esprit rebelle se cachait tout au fond de moi en sa présence. Mon hôtesse ne tarda pas à revenir, ses cheveux coiffés vers l'arrière et vêtue d'une robe à la couleur rouge sang, elle était somptueuse dans cette tenue. Je remarquais quelque chose de surprenant, cette femme était de sang royal, pourtant, je ne voyais aucun tatouage sur elle. J'étais pourtant certaine que Dagon m'avait certifié que c'était la marque de sa famille. Enfin peut-être qu'elle n'était pas de la famille de Dagon. Avec élégance, elle s'installa en face de moi et croisa les jambes, ses yeux verts scrutaient chaque parcelle de mon être, c'était quelque peu embarrassant, mais, une fois de plus, je tins ma langue.
— Tu es superbe, me complimenta-t-elle, difficile de croire que tu es une artificielle.
— Je vous remercie, vous n'êtes pas la première... à le dire.
J'avais la gorge et la bouche sèches, je craignais tellement de faire une erreur. Je ne voulais pas finir avec la tête arrachée. Même si je ne portais pas ces créatures dans mon cœur, je n'avais pas saisi la raison de cette exécution si brutale.
— Tu t'appelles Aesma, n'est-ce pas ?
— Oui, comment vous... ?
— Disons que les gens sont bavards ici, surtout Tiiana. Je pensais que mon fils aurait fini par jeter définitivement son dévolu sur Kawena, mais, visiblement, tu sembles bien plus l'intéresser que cette prétentieuse.
Je restai coite face à ce que je venais d'apprendre. Cette femme était la mère de Drago, ce qui voulait dire que c'était la reine. Mon stress grimpa en flèche, si je me sentais insignifiante avant, à cet instant, j'avais réellement l'impression d'être un vulgaire insecte. Déglutissant avec peine, je repris la parole d'une voix peu assurée.
— Et bien, ces rumeurs sont... infondées, il n'y a rien entre votre fils et moi. Tiiana a dû mal interpréter certaines choses.
— Je m'en doute, m'avoua-t-elle, tu n'as pas l'air d'être le genre de femme qui se laisse faire, donc mon fils doit souvent te brutaliser, rien qui donne envie de l'aimer. Au fait, pas besoin d'être aussi intimidée.
Mes joues s'empourprèrent, j'aurais espéré que ce ne soit pas si visible qu'elle m'effrayait.
— Je suis désolée...
— Ne le sois pas, ce n'est pas grave. Je ne vais rien te faire, si j'avais souhaité mettre fin ton existence, tu ne serais déjà plus de ce monde, ma chère.
Était-ce censé me rassurer ? Si c'était le cas, c'était raté.
— Pour être franche, poursuivit la souveraine, tu m'intrigues. Mon fils ne s'intéresse que rarement à des femmes, il ne nous aime pas vraiment, mais tu as dû te rendre compte de cela.
— Oui, mais je ne comprends pas la raison de cette haine. — C'est à cause de moi.
J'étais certaine d'une chose, cette femme était bien plus causante et honnête que son rejeton.
— Comment ça ? me risquai-je, curieuse.
— Il y a bien longtemps, j'avais un roi, mais lasse de nos océans et il a décidé de rejoindre la surface, emmenant nombre d'entre nous, dont la grande sœur de Dagon. Il ne m'a jamais pardonné d'avoir laissé partir son père et sa sœur. Il m'a accusée d'avoir été trop faible, une incapable qui n'a pas su garder son mari et sa fille. Une créature dérisoire et sans volonté.
— Ce que vous êtes en train de me dire, c'est qu'il reporte la colère et la frustration qu'il a contre vous, sur nous ?
Elle approuva d'un mouvement de la tête, alors que son regard vert m'avait quittée pour aller se fixer sur un point invisible dans les fonds marins se trouvant à quelques mètres de là. Je discernai une profonde mélancolie dans son regard et je ressentis une certaine compassion pour elle. Elle avait perdu son mari et sa fille et son fils lui avait tourné le dos.
— Je pense que Dagon...
La phrase resta en suspens alors qu'elle paraissait chercher ses mots.
— Non, en fait, je suis certaine que si mon fils s'intéresse autant à toi, c'est parce qu'il a dû retrouver quelque chose qu'il croit éteint en moi.
— Quelque chose ? Mais quoi ?
— À toi de me le dire, répliqua la reine d'une voix calme.
Je n'avais pas de réponse à cette question. Et je ne savais pas ce que je devais penser de la situation. J'avais l'impression que cette histoire si simple devenait bien trop compliquée. Ces questionnements n'avaient rien à faire là, tout ce que je devais normalement faire, c'était trouver une solution pour m'enfuir avec Cadence et Azura. Pourtant, j'avais envie d'en savoir plus, de comprendre ce qui me rendait spéciale pour Dagon. Comprendre ce qui s'était passé quand
j'avais voulu échapper à l'emprise d'Azura.
— Si vous le permettez, puis-je connaître votre nom ? la questionnai-je de manière peu assurée, la peur d'avoir dépassé les limites étant présente.
— Emäris.
— C'est un beau prénom.
Je le pensais réellement. Depuis que j'étais ici, c'était le prénom que je trouvais le plus agréable à l'oreille et le plus original aussi. Elle le portait bien. J'eus droit à un sourire, ce qui me coupa le souffle un instant avant que mes joues ne s'empourprent de nouveau. Je détournai les yeux, ne voulant pas être plus gênée que je ne l'étais déjà.
— Au fait, relançai-je, vous approuvez... ce qui se passe ici.
— Oui, mais pas les méthodes employées.
Du coin de l'œil, je la scrutai, attendant qu'elle développe son propos.
— J'estime que la violence n'est pas nécessaire. Comme ceux de mon peuple, j'en veux à l'espèce humaine de polluer nos océans et faire mourir ses habitants, sans compter que nos femmes sont devenues incapables de donner la vie. Nous aussi, nous voulions continuer à avoir des enfants, alors il fallait bien trouver une solution. Mais je crois que certaines de vos femmes auraient accepté sans avoir besoin qu'on les kidnappe et qu'on les séquestre en plus de les violenter.
— Pourquoi vous ne faites rien alors ?!
J'avais haussé le ton sans m'en rendre compte. Réalisant rapidement mon erreur, je baissai rapidement la tête.
— Pardonnez-moi, je...
— C'est bon, je peux comprendre ta colère, me rassura Emäris, une autre réaction aurait été surprenante. Je ne peux rien faire, parce que la quasi-totalité de mon peuple soutient les intentions de mon fils, c'est lui qui a donné l'idée de ces méthodes. Pour lui, les humaines valent encore moins que nos femelles. Avec tout ce que vous faites, il estime que vous méritez pareil traitement : l'humiliation et la mort.
C'était logique, un roi ou une reine, sans le soutien de son peuple n'avait aucune autorité. C'était Dagon qui tenait les rênes et personne d'autre. Un long soupir m'échappa, c'était trop compliqué pour moi, tout ça. Une reine sans pouvoir, un prince tyrannique et une ancienne humaine au milieu de tout ça, c'était presque digne d'un film. Quelque chose me revint soudainement à l'esprit alors que mes yeux se posèrent sur les jambes de la souveraine.
— Puis-je vous poser une autre question? lui demandai-je, poliment.
— Je t'en prie.
— Pourquoi vous ne changez pas au contact de l'eau ? Je sais ce qui se passe, je l'ai vécu et je l'ai vu avec l'homme que vous avez... décapité avant. Pourtant, vous et Dagon, vous ne changez pas, je voudrais savoir pourquoi. Et aussi, vous n'avez pas de tatouages ?
— Non, je n'ai pas voulu me faire tatouer.
Puis son regard émeraude me sonda pendant de très longues secondes, m'arrachant une chair de poule discrète. Finalement, je la vis se lever et se diriger vers la sortie de la pièce où nous étions installées. Je restai bêtement assise à la regarder avancer, l'avais-je vexée avec ma question? Emäris s'arrêta après avoir soulevé le tissu qui servait de séparation et me jeta un coin d'œil par-dessus son épaule.
— Viens, je vais te montrer quelque chose.
Mon cœur se mit à battre la chamade alors que je me levais pour la suivre. Nous retournâmes à l'endroit où se trouvait le bassin, l'eau avait repris une couleur claire, plus de trace de sang. J'aurais pu en soupirer de soulagement, parce que je devais avouer que j'allais avoir du mal à oublier la tête tranchée et l'expression de terreur qui était restée figée sur ses traits même après la mort. La génitrice du prince entra dans l'eau jusqu'à la poitrine avant d'attendre que je l'imite. Même si la curiosité me dévorait, j'étais assez réticente, la transformation était si douloureuse que je n'avais pas envie de la revivre. Ce n'était arrivé que deux fois jusqu'ici et ça m'avait suffi.
— N'aie pas peur de la douleur, elle n'est qu'éphémère. — Facile à dire pour vous, marmonnai-je.
Après encore quelques instants d'hésitation, je vins à mon tour me glisser dans la nappe liquide et je fus tout de suite saisie par la souffrance. Je me débattis comme une folle, même si c'était inutile, c'était plus fort que moi, j'essayai de chasser la douleur. Au terme de plusieurs minutes qui m'avaient semblé durer une éternité, la douleur s'effaça pour laisser place à l'apaisement. Complètement immergée, j'observai autour de moi avant de tomber nez à nez avec Emäris.
— Suis-moi, m'ordonna-t-elle.
Elle se mit à nager en direction du fond du bassin qui donnait sur une ouverture. Nous la traversâmes, nous retrouvant au milieu de l'océan. La reine se mit alors à nager à grande vitesse, surprise, je me lançai à sa suite. Ma queue de poisson me propulsant à une vitesse que je n'aurais pas crue possible, j'avais la sensation d'être une torpille. Mais un sentiment de liberté que je n'avais jamais ressenti s'empara de moi. Je n'avais jamais pu nager aussi librement avant ce jour, ils s'assuraient de nous garder le plus loin de l'eau possible. Je stoppai brusquement, à quelques centimètres près, j'aurais percuté Emäris.
—Tu ne vas pas essayer de t'enfuir ? m'interrogea-t-elle, curieuse que je la suive si docilement.
— Non, un jour, mais pas maintenant. Étonnamment, ma réponse lui arracha un sourire.
— Où est-ce qu'on va ?
— Patience, nous y sommes bientôt.
Je n'avais aucune idée de l'endroit où elle m'emmenait. Ça faisait bien un quart d'heure que nous nagions en direction de la surface. Néanmoins, grâce à cela, je me rendis bien vite compte que nous étions vraiment cachées tout au fond de l'océan. Personne ne descendrait à cette profondeur et les imprudents qui s'y oseraient... je ne voulais pas imaginer le sort qui leur serait réservé. Mes yeux captèrent soudainement de la lumière, quelque chose de plutôt vif et plus nous nous rapprochions, plus je me rendais compte qu'il y avait une grande structure juste au-dessus de nous. Nous fîmes encore quelques mètres avant que tout ne soit exposé à ma vue. J'en restai ébahie.
— Comment... ?
— Bienvenue dans mon royaume, se contenta de me dire Emäris.
Devant moi s'étendait une multitude de structures réalisées avec soin et décorées à la manière des plus grands palais qu'on pouvait voir sur Terre, des créatures marines qui semblaient sorties d'un film de science-fiction nageaient entre les bâtiments, tout comme des tritons et des sirènes. En fait, tout ici semblait venu tout droit d'un block- buster hollywoodien. Il semblait y faire bon vivre. Cette constatation me serra le cœur et me noua la gorge, si j'avais eu forme humaine, j'en aurais pleuré de frustration. Pourquoi vivions-nous cachés sous terre alors que nous pourrions vivre là ? Ça ne changerait rien au fait que nous étions du bétail, mais la vie aurait paru moins compliquée.
— C'est injuste, lâchai-je, accidentellement.
— Oui, je suis d'accord, on ne vous offre que les ténèbres. Même si j'aime le calme qu'offrent les abysses, il fait meilleur vivre ici. Et autrefois, c'était encore plus somptueux.
— Autrefois ?
Une ombre voila le superbe visage de la souveraine et elle me zieuta du coin de l'œil.
— Cette cité existe depuis très longtemps et elle voyageait entre terre et mer avant que la décision ne soit prise que nous restions dans les eaux.
— Vous viviez avec les humains par le passé ?
— Non, notre civilisation est toujours restée à l'écart des autres, ne me demande pas pourquoi, je n'en ai aucune idée.
J'arquai un sourcil face à ses mots.
— Vous êtes la reine pourtant.
— Je n'étais pas reine à cette époque, seulement une petite fille.
— Oh, je comprends mieux. Cependant... en quoi tout ceci est censé répondre à mes questions ?
—Tu ne m'as pas l'air d'être stupide, Aesma, alors, fais un peu fonctionner ta tête.
Cette légère pique me tira un discret tic nerveux au coin de la bouche. Mais je ne répliquai pas, me contentant de faire fonctionner mes méninges comme elle me l'avait si bien conseillé. Mon regard glissa vers ses jambes qu'elle agitait lentement de l'avant vers l'arrière. Un peuple qui allait entre terre et mer et qui s'était ensuite exilé au fond des océans... une mutation génétique qui ne s'était pas appliquée à tous? Non, ce n'était probablement pas ça, c'était une piste, mais mon instinct me disait que c'était autre chose.
La solution me frappa alors que je repensais à un de mes cours sur la Grèce antique.
— Est-ce que c'est... la cité de l'Atlantide ?
— Tout à fait, me répondit la mère de Dagon.
— Attendez, êtes-vous en train de me dire que ce n'est pas une légende ?!
— Tu l'as sous les yeux, avec tout ce que tu as vécu, est-ce si difficile d'y croire ?
Elle n'avait pas tort. Je ne devrais pas être étonnée par ce que je venais d'apprendre, pourtant, c'était plus fort que moi. Savoir que je me trouvais dans cette cité qui divisait les chercheurs quant à son existence, c'était juste incroyable.
— Alors c'est pour ça que vous ne vous transformez pas, commentai-je, et pourtant, tous les autres...
— C'est une question d'évolution, me coupa la blonde, ces sirènes et ces tritons que tu vois sont des descendants des premiers Atlantes. Au fil des générations, leurs gènes ont muté pour qu'au contact de l'eau, ils prennent cette forme. Ce n'est pas mon cas ni celui de mon fils, nos gènes sont restés tels qu'ils l'ont toujours été.
Elle marqua une pause dans ses explications, se mettant à nager, le tissu de sa robe rouge flottait élégamment autour d'elle. Je la suivis pour continuer d'écouter.
— Mon mari non plus n'avait rien perdu de ses gènes d'Atlante, nous sommes pures.
— Mais le fait que Dagon ait eu une descendance avec des sirènes... cela a altéré la pureté des gènes, n'est-ce pas ?
— Oui, c'est exact, me confirma Emäris. Cependant, il arrive que le gène atlante prenne le dessus et que l'enfant en soit un, même s'il porte en lui des gènes de sirène également. C'est le cas de l'aînée des filles de mon fils.
Je stoppai net ma progression. Et le souvenir de ce qui s'était produit un peu plus tôt s'imposa de nouveau à mon esprit. Trop choquée par ce qui était arrivé, je n'avais pas fait attention au fait qu'Azura ne s'était pas transformée ou n'avait même pas eu une grimace de douleur. C'était pour ça alors.
— Que t'arrive-t-il ? m'interpella la reine.
— Rien, juste un souvenir qui m'est revenu, je vous en prie, continuez.
Elle plissa légèrement les yeux face à ma réponse, elle ne semblait pas particulièrement convaincue, mais, heureusement pour moi, elle ne chercha pas à me tirer les vers du nez.
— Vous m'avez dit que certains des vôtres étaient retournés à la surface, est-ce que vous pensez qu'ils ont eu des enfants avec des humains ? la questionnai-je pour détourner l'attention.
— Hum, c'est possible, bien que cela remonte à des siècles. Si c'est arrivé, certains humains doivent être porteurs du gène atlante sans le savoir, même s'il doit certainement être en hibernation si les croisements se sont multipliés.
Je me mis à réfléchir à ce qu'elle venait de théoriser. Je n'étais pas une spécialiste de la génétique, tout ce qui était scientifique ne m'ayant jamais particulièrement attirée. Mais je me rappelais avoir eu une amie au lycée qui en était passionnée et qui m'avait expliqué bon nombre de choses à ce sujet. Je me permis donc d'exposer mes pensées à la mère de Dagon.
— J'imagine que vous savez que les gènes peuvent sauter des générations et se réveiller chez certaines personnes. Alors serait-il possible que ce gène se réveille chez quelqu'un un jour et cela malgré les générations qui se sont succédé ?
— Il y a des chances, bien qu'elles soient très minces.
— Est-ce que le gène atlante prendrait le pas sur le reste ?
J'étais curieuse, c'était tellement improbable de faire face à une Atlante que j'avais envie de poser des milliers de questions. Et en dehors de Cadence, c'était la seule avec qui j'avais eu une discussion aussi... normale. Ça faisait du bien. Je me sentais... respectée, pas uniquement réduite au rang d'utérus.
— Je pense effectivement que la personne deviendrait bien plus Atlante qu'humaine.
— Et vous m'avez dit que vous viviez très longtemps, mais êtes- vous... immortels ou quelque chose de semblable ?
— Non, nous pouvons mourir de blessures, de faim ou d'un empoisonnement, et nous vieillissons, mais si lentement que ça prendrait des siècles avant que je n'aie ma première ride. Notre métabolisme est bien plus résistant que celui d'un humain, et même plus que celui des sirènes, même si elles se rapprochent de nous sur pas mal d'aspects. Nous sommes aussi plus forts et avons des aptitudes particulières.
Oui, ça, Azura me l'a fait comprendre. Sans oublier la multitude de coups que je m'étais prise de la part du père aussi bien que de la fille.
— Donc, il est aussi possible que les Atlantes qui ont rejoint la terre soient encore en vie quelque part.
— C'est certainement le cas, me confirma Emäris.
Des Atlantes qui vivaient avec des humains. Si Emäris ne m'avait pas parlé de tout cela, je n'y aurais jamais cru. J'aurais continué de penser que ces créatures ne pouvaient pas vivre avec les humains, que ce n'était que des bêtes sauvages. Mais certains l'avaient fait et avaient réussi. Même si la haine était encore présente et continuait de brûler comme la lave à l'intérieur d'un volcan, ma vision sur eux était un peu moins noire.
— Encore quelque chose...
— Tu es bien curieuse, jeune fille.
Je pinçai les lèvres, ce qui fit glousser mon interlocutrice.
— Ne fais pas cette tête, je ne fais que te taquiner. Pose donc ta question.
— Vous aussi vous mangez... des gens.
Le sourire de la souveraine mourut aussi vite qu'il était apparu, me donnant le sentiment d'avoir dit une énorme bêtise. J'allais lui demander d'oublier ma question, mais sa réponse fut plus rapide.
— Oui, on le fait aussi. Même si notre estomac peut digérer d'autres formes de nourriture, contrairement aux sirènes et aux tritons qui se sont habitués à manger de la chair humaine.
— Je vois...
J'étais dégoûtée, mais, en même temps, un sentiment de satis- faction, en sachant qu'ils pouvaient se passer de grignoter des humains, se mêlait au dégoût.
— Ai-je répondu à toutes tes questions, Aesma ?
— Oui, lui confirmai-je, merci. Me feriez-vous une faveur ?
— Ça dépend de quoi il s'agit.
— Nagez avec moi.
Je lui offris un sourire avant de m'élancer à toute vitesse à travers la faune et entre les bâtiments. Je fus rapidement rattrapée par Emäris, je comptais bien profiter de ce court moment de liberté.
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