⛧ 𝟎𝟎𝟒

La vie n'était qu'une vaste blague.

La semaine précédant ma rencontre avec mes nouveaux voisins avait été chargée ; je ne cessai de me faire trimballer à gauche et à droite par ma mère, ou par Evy. Ma nouvelle voisine était devenue en très peu de temps mon amie, (la seule, en réalité), et ma confidente. Nous avions découvert que nous avions beaucoup de choses en commun, dont les félins. Ces petites créatures, parfois plutôt grosses, néanmoins, me fascinaient et me rendaient complètement gaga. J'étais comme l'un de ses gosses qui rencontrait le père Noël, les étoiles pleins les yeux. J'avais aperçu, la première fois en rentrant chez elle, qu'elle collectionnait des figurines en papier mâché. J'avais trouvé ça plutôt original, comme décoration.

Sa maison était plutôt jolie et simple de l'extérieur ; mais l'intérieur nous emmener dans plusieurs pays à la fois. Nous pouvions voir des sculptures japonaises sur les grandes armoires du salon, comme nous pouvions retrouver un style complètement différent, comme des petits bouddhas près de la cafetière, dans l'une des autres pièces. Cela me donnait l'impression que chaque salle avait eu sa propre vie. J'en avais fait part à Evy, qui m'avait souri et disait que c'était l'œuvre de leur mère, qui était malheureusement trop peu souvent à la maison, mais qui avait décoré à son goût l'entièreté de leur demeure. Elle avait épargné la chambre d'Evy et de son frère. Frère qui, d'ailleurs, n'a pas pointé le bout de son nez depuis l'incident de la dernière fois. Ce n'était pas faute d'avoir essayé ; j'avais toqué à la porte de sa chambre, et je me suis même résignée à demander son numéro de téléphone à sa sœur. J'avais la simple impression qu'il avait tout bonnement disparu, sans rien dire. Pourtant, ce n'était qu'un soutien-gorge, non ? Il avait déjà dû en voir des dizaines, si ce n'est pas plus...

Je secouai la tête face à mes pensées totalement obscènes. Peu m'importe son expérience sexuelle avec les femmes, je voulais simplement m'excuser pour la situation cocasse, voilà tout ! Alors il avait mal choisi son jour pour disparaître des radars.

Je continuai à déposer les boites d'aliments dans le cadis, tout en les triant par couleur. Je laissais rarement mon côté maniaque prendre le dessus, mais en ce qui concernait les courses ; c'était au-dessus de mes forces. C'était un petit côté de ma personnalité que les gens aimaient, ou détestait. La plupart du temps, je trouvais que c'était l'une de mes qualités primaires. Je continuai de faire avancer mon chariot devant le rayon "alcool". J'entrepris d'attraper un pack de bière blonde, que m'avait recommandé Evy.

Elle m'avait invitée à l'une de ses soirées qu'elle organisait et où tout son bahut y était convié. Celle où tout le monde finissait saoul jusqu'à ne plus se souvenir de son nom, ce genre de fête où les garçons tiraient leurs coups d'un soir et où les filles tentaient d'aguicher le plus beau mec de la soirée. Ça ne m'enchantait pas tellement ; j'évitais la foule, et tout ce qui était groupe d'ailleurs. Je n'étais pas très douée pour m'intégrer ; et j'avais honnêtement peu de sujets de conversation. La parfaite insociable. J'avais décidé de l'aider pour les achats alimentaires. Chips, biscuits apéritifs, bière, vodka... Tout y passait. Elle m'avait laissé un gros billet avant de m'envoyer à la supérette la plus proche. 

« Tu verras, ça va être la fête du SIÈCLE ! En attendant que je cherche un argument impa-ra-ble pour te faire venir à ma soirée ultra dingue, tu pourrais aller chercher de quoi se mettre sous la dent ? Il y a un petit market à 500 mètres ! », s'était-elle exclamée, bloc note à la main.

Devant tant d'enthousiasme, il m'était difficile de lui dire non. Alors me voilà ; smartphone à la main avec toute la petite liste, notée par les soins d'Evy. J'arrivais sur la fin, il nous manquait seulement du cocoroco. Chanceuse que j'étais, je ne pris pas longtemps à le trouver.

J'entrepris de prendre la bouteille, mais à la place de trouver la surface froide et dure du verre, je touchai une main ferme. Je relevai mon regard et je rencontrai deux yeux lumineux, avec une lueur délicate au fond de ses pupilles. Il y avait quelque chose de chaleureux et de rassurant dans la façon dont ils me fixaient. Je regardai plus attentivement le visage de l'inconnu, qui était un homme ayant peut-être la vingtaine. Il avait un sourire plaqué sur les lèvres, dévoilant des dents blanches et bien alignées. Il avait des sourcils et une mâchoire bien dessinés, avec un grain de beauté sur la joue gauche, notais-je. Ses joues creuses lui donnait ce côté Christian Grey. Je piquai du nez ; il lui ressemblait étrangement. Malgré ses cheveux mi-long blond, et sa barbe naissante.

« Excuse-moi », rigolait-il, « Tu souhaitait prendre cette bouteille ?

- Eu-euhm... », balbutiais-je, « Oui, mais tu peux la prendre si tu veux ».

Il rigolait et secoua la tête. Ses mèches lui tombèrent devant les yeux.

« Ne t'en fais pas pour moi. Je pense que je pourrai me passer d'alcool pour ce soir ». Répondit-il, replaçant ses cheveux correctement.

Je hochai la tête, ne sachant quoi dire. Mon cadis était fin prêt, Evy allait être contente. Je sortais mon téléphone et lui envoya un petit texto, qu'elle y répondit presque instantanément par des émojis heureux. Je souriais tendrement puis repris mon chemin, mais une main se posa sur mon bras, me coupant dans mon élan.

« Je suis désolé... », s'excusa le blondinet, sa main trifouillant nerveusement sa mèche. « Je me demandai s'il était possible que je puisse avoir ton numéro de téléphone. À vrai dire, j'essayais de t'accoster depuis que tu es entrée dans le magasin alors...». 

Attendant ma réponse, il me regardait fixement et semblait être timide. Je trouvai cela très louche, et surtout pas très rassurant d'apprendre que je me faisais fixer pendant que je faisais tranquillement mes emplettes. J'hésitai à la manière de répondre ; cinglante ou amicale ?

« Pas de soucis », souriais-je, ayant finalement choisi l'option numéro deux. « Je m'appelle Alison.

- Enchanté. Asher, pour ma part. » Il termina sa phrase par un clin d'œil et un sourire satisfait. Sa timidité avait totalement disparu de son visage, et avait été remplacée par une assurance implacable.

Je hochai la tête et entrai mon numéro dans ses contacts. Bien qu'il m'ait semblé être un psychopathe aux premiers abords, il était peut-être juste maladroit.

« Alors à bientôt, Alison », se réjouit-il.

Je mimai un au revoir avec ma main, tandis qu'il disparaissait dans les rayons d'à côté. Je pus enfin payer à la caisse, et je me demandai comment j'allais justifier mon retard auprès d'Evy. Elle n'avait cessé de m'envoyer des messages, et je ne lui avais pas répondu. Mes mains étaient désormais remplies de sacs de plusieurs couleurs, remplis de toute la liste que mon amie avait soigneusement préparée. Le super market était à quelques mètres de nos maisons. Il suffisait de traverser le bois en coupant par une petite rivière, où on trouvait très souvent un petit groupe de pêcheur habitué aux environs. Toutes les habitations, part chez nous, étaient surplombés par les sapins et les pics des montagnes supérieurs. Ma mère aimait appeler cet endroit "Stranger Ville", je n'ai toujours pas compris pourquoi.

Arrivée dans notre quartier, je sonnai à la porte de ma voisine, et la porte s'ouvrit presque immédiatement. La puce qui avait piqué Evy devait l'avoir atteint au cerveau, car mon amie me sauta presque dessus.

« Les courses ! », m'écriais-je, la stoppant dans son élan.

« Oups... » Grimace t-elle, avant de reprendre, de nouveau pleine d'énergie, « J'ai beaucoup trop de chose à te montrer ! Ce soir sera LE soir !

- Pourquoi ça ?

- Parce que... », elle réfléchit un instant, le regard perdu dans le vide. « J'ai un ami d'enfance qui vient de revenir en ville. On va donc lui faire une fête de bienvenu digne de lui ».

Elle avait l'air hésitante dans ses paroles, ce qui ne me convaincu pas sur le début. Je l'analysai, tandis qu'elle était occupée à ranger là où devait se trouver les apéritifs et les alcools, ainsi qu'un tas d'autres babioles que j'ai ramené. Elle était là, parmi nous, mais son esprit était loin. Très loin.

« Evy, est-ce qu'il y a quelque chose qui ne va pas ? », la questionnais-je, soucieuse.

Elle tourna son regard vers moi, et m'accorda un sourire franc.

« Tout va bien, merci Ali. Mon frère me préoccupe un peu, c'est tout ».

Je n'osai pas en demander plus, de peur d'être trop envahissante. Une semaine sans nouvelle de son frère, il n'était pas étonnant qu'elle était inquiète. J'espère qu'il fera réapparition vite, je n'aimais pas voir mon amie dans cet état. Et j'avoue que j'étais secrètement inquiète pour lui, d'une manière. Chassant ces pensées loin de moi, je décidai de changer de sujet.

« Et donc cet ami... ami-ami ou plutôt ami-amoureux ?

- Ami-ami », ricana-t-elle. « Je ne le verrai jamais plus qu'un ami. Ce n'est vraiment pas possible autrement ! Il est trop imbu de lui-même.

- Et... il s'appelle comment ? », demandais-je, ma curiosité piquée à vif.

« J'adore l'appeler Ash, mais il ne trouve pas ça jolie », bouda-t-elle.

Ce nom me disait quelque chose, bizarrement.

« Ash comme... Asher ?

- Tu le connais ? », me questionna-t-elle, une lueur de surprise au fond de ses prunelles ambrées.

« Oui... », je fronçai les sourcils et m'asseyais sur son canapé, « Il m'a avoué m'avoir fixé pendant tout le long de mes achats, avant de s'être décidé à m'accoster et me demander mon numéro téléphone de manière très... Spéciale.

- Ça, je n'en doute pas ! », s'exclama-t-elle, s'installant à côté de moi, un paquet de chips à la main. « Si je peux te donner un conseil d'amie, ne fricote pas avec ce don juan. Il a beau être un très bon ami, en affaire amoureuse, c'est le pire des crétins.

- Je prends note ! », souriais-je. « D'autres conseils ?

- Il est timide aux premiers abords, mais il ne faut pas du tout se fier à ça. Derrière cette façade, c'est un grand séducteur aux disquettes encore plus nombreuses que ses connaissances en matière de sexe. Et pourtant, il en a de l'expérience... », chuchota-t-elle.

Je rougissais, me sentant très concernée par ce sujet-là ; moi qui n'avais aucune expérience, ni en rencard, ni en quoi que ce soit d'autre qui touchait les relations.

« Et toi alors ? », me taquina-t-elle, « Intéressée par ce blondinet aux allures de bon garçon ? »

Elle approchait son visage du mien, un sourire narquois collé sur sa bouille. Je n'eu pas le temps de répondre, qu'elle renchérissait ;

« Ou alors... tu préfères les mauvais et vilains, garçons ? », murmura-t-elle suavement, au creux de mon oreille.

Elle était penchée sur moi, dévoilant son décolleté plongeant, me laissant une vue vertigineuse sur ce qui pouvait avoir sous son t-shirt. Ses yeux étaient brillants et me regardaient attentivement. Elle dégageait une aura puissante, excitante. Elle tentait de me séduire, usant de ses charmes et moi qui était hétéro, eut du mal à me sortir de son étreinte. Reprenant mes esprits, je toussai et manquais de m'étouffer, n'ayant jamais rien vécu de tel. Evy s'écarta et rigola de moi, à tel point qu'elle toussotait elle aussi, et manqua de s'étrangler.

« Tu aurais vu ta tête ! », s'exclama-t-elle, au bord de la crise de rire.

« Ce n'est pas drôle ! », bégayais-je, ne sachant comment réagir à une pareille situation.

Si on m'avait dit que j'allais vivre une expérience pareille ; je n'y aurai jamais crû.

« Désolé, Ali' », s'excusa-t-elle. « C'est un peu ma façon de voir si tu es bien hétéro, ou hétéro curieuse ».

« Verdict ?

- 100% hétéro ! Félicitations.


- Je ne sais pas si on peut appeler ça une victoire...»
, marmonnais-je pour moi-même.

Elle me répondit par un clin d'œil et me jeta un paquet de ballon au nez.

« Trêve de bavardage ; On se remet au boulot ! », s'impatienta-t-elle. « Il est quinze heures, et on doit avoir fini à 20h30. Sans oublier que je dois faire les toasts ! Nom d'Archam, je vais avoir du pain sur la planche. », se lamenta-t-elle.

« Archam ? C'est dans quelle religion, ça ? », la questionnai-je, alors que je commençai déjà à gonfler quelques ballons.

Une lueur de surprise traversa son regard, vite remplacée par cet éclat étincelant qui connaissait tant la prunelle de ses yeux.

« Le nom de mon ange gardien. J'ai vite remplacé le mot en D par ce prénom, ça m'a paru plus naturel. »

« Comment pouvons-nous connaître le nom de notre ange gardien ? J'aimerai bien remercier le mien, et peut-être même le rémunérer. Vu le nombre de fois qu'il me sort de situation périlleuse...

- Il faut le demander aux bonnes personnes ! Et certainement pas à Google, il n'y a que des bêtises là-dessus.

- Tu le connais, toi ? ».

Elle penchait sa tête sur le côté, pensive. Elle sourit finalement et ouvrit la bouche pour parler, mais un fracas dans la porte d'entrée la coupa en pleine lancée.

Nous nous regardons à tour de rôle avant de chacune, prendre une arme. J'avais une poupée russe dans la main, tandis qu'Evy, plus débrouillarde que moi, après attrapé un verre qui traînait sur la table basse. Nous faisions le tour, et, poussant un cri de guerrière à l'unisson, nous nous précipitâmes sur l'intrus.

« Oh, Oh ! Calme les tigresses. J'ai assez de place dans mon cœur pour deux femmes, vous savez », s'esclaffa Asher, les bras croisés sur son torse.

Tandis qu'Evy s'était arrêtée en cours de chemin, je n'arrivai pas, moi, à freiner et lui abattu mon arme sur le haut de son crâne. Il poussa un petit cri et se massa la zone douloureuse d'une main.

« Mais t'es folle ! », cria-t-il, alors qu'Evy se roulait par terre, de rire.

« Non mais ça ne va pas de rentrer chez les gens comme ça ! Tu connais la sonnette, tu sais, celle qui permet de nous prévenir que quelqu'un est là ?!

- Mais on est en pleine forêt ! Qui viendrez-vous faire quoi que ce soit sérieusement ! ».

Je lui remis un coup, plus doux, sur le haut de l'épaule.

« N'importe qui justement ! Imbécile ! La prochaine fois, ce n'est pas ton crâne d'oiseau que je viserai, ni ton épaule, mais ce qui te sert à te reproduire et à faire tes besoins primaires ! », le menaçais-je.

« D'accord, d'accord, excusez-moi les filles ! Tout, mais pas lui ! », me supplia-t-il.

Je hochai la tête de haut en bas, fière. J'espérai qu'il retienne la leçon. Je n'avais aucune envie de mettre mes menaces à exécution.

Evy se releva, désormais un peu plus calme. Elle donna en main propre des ballons à Asher, qui la dévisagea.

« Tu veux que je fasse quoi avec ça ?

- Simple. Tu prends, tu souffles dedans, tu boucles et magie ! Ça fait un ballon. », expliqua-t-elle avec de grands mouvements.

Je dus me reculer, à quelques millimètres et je me prenais un bras dans le pif.

« Mais c'est une fête pour moi ?


- Peu importe, tu es là maintenant donc tu vas nous aider à avancer ! » s'exclama Evy, les poings sur les hanches.

Elle était un peu comme une mini cheffe, bien qu'elle était bien plus grande que moi. Ses longs cheveux ébène lui retombaient sur le visage, pourtant, elle ne s'en préoccupa pas et continua de donner ses directives à Asher. Bientôt, chacun avait sa tâche et se mit au travail. Tout devait être parfait, c'était ce qui était censé se passer. Mais rien ne se passe comme prévu, pas vrai ?


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