𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟎𝟗











— 𝐁 𝐀 𝐍 𝐀 𝐍 𝐀   𝐁 𝐑 𝐄 𝐀 𝐃 —











𝐑𝐄𝐂𝐄𝐓𝐓𝐄 𝐃𝐔 𝐁𝐀𝐍𝐀𝐍𝐀 𝐁𝐑𝐄𝐀𝐃

𝑰𝒏𝒈𝒓𝒆́𝒅𝒊𝒆𝒏𝒕𝒔 :

𝟔𝟎 𝐺𝑟𝑎𝑚𝑚𝑒𝑠 𝑑𝑒 𝑏𝑒𝑢𝑟𝑟𝑒 / 𝟒 𝐵𝑎𝑛𝑎𝑛𝑒𝑠 / 𝟐 𝑂𝑒𝑢𝑓𝑠 / 𝟖𝟎 𝐺𝑟𝑎𝑚𝑚𝑒𝑠 𝑑𝑒 𝑠𝑢𝑐𝑟𝑒 / 𝟓𝟎 𝐺𝑟𝑎𝑚𝑚𝑒𝑠 𝑑𝑒 𝑝𝑜𝑢𝑑𝑟𝑒 𝑑'𝑎𝑚𝑎𝑛𝑑𝑒𝑠 / 𝟏𝟓𝟎 𝐺𝑟𝑎𝑚𝑚𝑒𝑠 𝑑𝑒 𝑓𝑎𝑟𝑖𝑛𝑒 / 𝟔 𝐺𝑟𝑎𝑚𝑚𝑒𝑠 𝑑𝑒 𝑙𝑒𝑣𝑢𝑟𝑒 𝑐ℎ𝑖𝑚𝑖𝑞𝑢𝑒 / 𝟏𝟎𝟎 𝐺𝑟𝑎𝑚𝑚𝑒𝑠 𝑑𝑒 𝑝é𝑝𝑖𝑡𝑒𝑠 𝑑𝑒 𝑐ℎ𝑜𝑐𝑜𝑙𝑎𝑡 / 𝟏𝟎𝟎 𝑀𝑖𝑙𝑖𝑙𝑖𝑡𝑟𝑒𝑠 𝑑𝑒 𝑙𝑎𝑖𝑡











Debout dans sa cuisine, Max s'occupe comme il peut en réalisant scrupuleusement la recette du pain maison.

Lando l'a finalement déposé chez lui quelques heures plus tôt après le petit-déjeuner improvisé chez Daniel et depuis, les paroles de ce dernier tournent dans son esprit sans qu'il ne parvienne à les sortir de sa tête.

À grand renfort de persuasion, de promesses et d'un chouia de menace, il est parvenu à convaincre l'Australien de ne pas rentrer à Monaco, Max s'en serait terriblement voulu de l'empêcher de profiter de sa famille à cause de ses petits problèmes de cœur. Surtout qu'il sait à quel point cette période est importante pour le mental de son ami qui n'a pas la chance de pouvoir rentrer chez lui autant qu'il le souhaiterait.

Lando quant à lui, lui a prodigué une tonne de conseil plus ou moins utile pour parvenir à mettre le grappin sur Charles, comme lui écrire un poème qui dévoile ses sentiments, écrire une déclaration sur des panneaux à la Love Actually, ou carrément utiliser les réseaux sociaux de Red Bull pour faire une déclaration publique.

Rien de réellement crédible ou efficace en définitivement, mais c'est l'intention qui compte et, du point de vue de Max, si cet handicapé du bon sens qu'est Lando arrive à entretenir une relation saine et heureuse avec Carlos, c'est bien la preuve que n'importe qui peut y arriver.

Il salue d'ailleurs le courage de l'Espagnol qui doit supporter cet hurluberlu au quotidien.

Il y a des héros que l'on ne soupçonne pas.

Tout en réfléchissant aux conseils et aux encouragements de ses amis, le Néerlandais pétri la pâte, la replie sur elle-même pour la rendre souple et élastique avant d'ajouter la bonne proportion de sel.

Une fois fait, il essuie ses mains sur son tablier et laisse la préparation reposer sans oublier d'ajouter un torchon au-dessus pour la couvrir.

Les mains encore pleines de farine et de pâte, il pose le bol sur le comptoir pour le laisser reposer pendant deux bonnes heures.

Max passe ses mains sous le robinet et saisit une éponge avant de commencer à nettoyer le plan de travail, rangeant les différents ingrédients à leur place et faisant un coup de propre dans la cuisine.

Fier de lui, il repose l'éponge et entreprend de se laver les mains, retirant avec une petite brosse les résidus coincés sous ses ongles.

Certains pourraient dire qu'il est maniaque, Max préfère se qualifier de perfectionniste, un perfectionniste qui aime bien que les choses soient à leurs places.

Il replace le pot de farine de blé dans le placard tournant destiné aux céréales, rangés dans l'ordre alphabétique avant les gruaux, le maïs, le riz et la semoule, mais après les flocons d'avoine quand son téléphone se met à sonner.

Aussitôt, il reconnaît la sonnerie spécifiquement attribuée à Charles, enfin, la sonnerie que Daniel s'est permis d'attribuer à Charles un jour où il avait chipé le téléphone de Max.

Can't Take My Eyes Off Of You par Franki Valli.

Douloureusement réaliste.

Pourtant, le blond hésite un instant.

Le regard fixé sur l'écran du téléphone sur lequel clignote un petit téléphone et le nom de Charles, il se demande s'il ne doit pas juste ignorer l'appel. Après tout, ne s'est-il pas promis à lui-même de prendre ses distances malgré les encouragements de Daniel ?

Charles ne lui en voudra certainement pas de ne pas avoir répondu, lui aussi à une vie et le Monégasque est, de toute façon, trop gentil pour en vouloir à quelqu'un plus de quelques heures.

Il n'a qu'à ignorer l'appel et envoyer un message d'ici une heure ou deux, c'est une option acceptable. Le temps de remettre ses idées en place, de dormir un peu et d'établir un nouveau plan.

Max n'a pas dormi de la nuit, se pointer chez Charles maintenant reviendrait à un suicide pur et simple, l'assurance de dire ou de faire quelque chose de tellement évidemment que Charles, aussi aveugle et sourd puisse-t-il être, ne pourrait tout simplement pas manquer l'évidence.

C'est ça, il va le faire, il va ignorer l'appel, Charles laissera un message, ou peut-être que non et Max lui répondra en début d'après-midi qu'il n'a pas pu répondre parce qu'il était occupé, logique, personne ne douterait qu'un champion comme lui puisse avoir des obligations à respecter même pendant ses vacances.

L'excuse est toute trouvée, le plan tient la route et pourtant, Max ne peut s'empêcher de fixer l'écran du petit appareil qui clignote encore et encore.

Il n'est pas lâche, il ne fait que se protéger, il n'y a rien de mal à ça.

Pourtant, Charles a promis de l'appeler s'il avait un problème, Max ne peut tout simplement pas ignorer la possibilité que le Monégasque soit en danger ou mal en point, seul, dans son grand appartement désert.

S'il devait arriver quelque chose au brun alors qu'il aurait pu intervenir et l'éviter, Max ne s'en remettrait jamais, la culpabilité finirait même probablement par avoir raison de lui.

Dans l'esprit du blond, les pires scénarios s'enchaînent, à grands coups de chute mortelle, d'incendie involontaire, de malaise surprise, il y a tellement de possibilités pour Charles d'accidentellement attenter à sa vie, il ne peut même pas les compter.

Rapidement, un nouveau plan germe dans l'esprit du pilote Red Bull : il décroche le téléphone, s'assure que Charles n'est pas en danger de mort imminente et si ce n'est pas le cas, il lui dit qu'il est occupé ailleurs et qu'il le rappelle plus tard.

Simple, efficace, un plan qui fonctionne à coup sûr.

Confiant, il tend le bras en direction de l'appareil et le porte à son oreille, prenant une grande inspiration salvatrice.

Tout va bien se passer.

- Allô ? Il parle.

- Non à l'huile !

Oh.

Alors celle-là, il ne l'a pas vu venir.

- Je vais raccrocher Charles, il soupire.

- Roh, ne le prends pas comme ça Maxy, c'est juste une blague.

Max, qui est déjà en train de décoller l'appareil de son oreille dans l'idée de mettre fin à l'appel quand un détail attire son attention et lui fait immédiatement froncer les sourcils.

Concentré pour essayer de confirmer ce qu'il croit avoir décelé, il tend l'oreille.

- Pourquoi est-ce que tu m'appelles ?

- Je n'ai pas de raison particulière, grince l'autre. Je n'ai pas le droit de vouloir prendre des nouvelles d'un ami ?

Max tique sur le mot « ami » comme à chaque fois et pourtant, c'est toujours aussi douloureux.

- Si, il répond avec prudence. Je trouve simplement ça surprenant que ça soit moi.

- Eh bien, rassure-toi, j'appelais juste pour savoir comment tu allais depuis hier, ce que tu faisais de beau, ce genre de chose, des banalités.

- Tu m'en diras tant, marmonne le blond, plus concentré sur les sons en arrière-plan que sur la voix du Monégasque.

- Du coup, hésite Charles. Tu fais quoi ?

Mais Max a à peine écouté sa question, un bruit de klaxon vient de raisonner en arrière-plan.

- Tu es où ? Il demande, les sourcils froncés.

- Comment ça ?

La fausse naïveté dans le ton de Charles fait d'autant plus se hausser les sourcils du Néerlandais.

Il y a définitivement anguille sous roche.

- Charles...Max s'agace doucement. J'entends le bruit des voitures en arrière-plan.

- La fenêtre est ouverte.

- Tu habites dans une impasse.

- C'est le son de la télévision, contre-attaque l'autre.

- Oh, je vois, ricane le blond. Quoi comme film ?

- Star Wars.

La stupidité de Charles le surprend toujours, même après toutes ces années.

- C'est marrant, je ne me rappelle pas le moment où Anakin Skywalker remonte le Boulevard Albert Ier à bord de son X-Wing.

Tout en parlant, il n'a aucun mal à imaginer l'expression hébétée de Charles de l'autre côté du fil.

- Mais de quoi est-ce que tu parles ? Bégaie le plus jeune.

- Charlie, soupire Max. Je crois que tu as tendance à oublier que, moi aussi, je vis à Monaco depuis plusieurs années. Je sais parfaitement reconnaître le bruit d'un moteur V6 qui remonte le boulevard juste derrière toi alors arrête de me baratiner et dis-moi où tu es.

Ce n'est pas vraiment que Max s'inquiète, après tout, Charles n'a pas l'air souffrant ou physiquement en danger de l'autre côté du combiné, mais il l'a appelé et pour que ce borné de pilote Ferrari se décide à faire appel à lui, c'est forcément que quelque chose a dû capoter.

Devant le silence du malade, le blond prend une grande inspiration et tente de réunir le peu de patience qu'il lui reste.

L'expérience de ces derniers jours lui a prouvé que pousser Charles dans ses retranchements apporte rarement un résultat positif.

- Tu n'es pas obligé de me le dire si tu ne veux pas, il tente d'amadouer. Mais dis-moi au moins où tu es et si tu as besoin de quelque chose.

L'autre ne répond toujours pas et il commence à perdre patience, à quoi bon l'appeler si c'est pour le laisser en plan et impuissant ?

- Tu as dit que je devais t'appeler, marmonne le plus jeune.

À cause du bruit environnant et de son four qui choisit le pire moment pour sonner, Max a du mal à entendre l'autre garçon.

- Quoi ?

Un lourd soupir gêné lui répond.

- Tu as dit que je pouvais t'appeler si ça n'allait pas trop, bougonne Charles.

Amusé, Max s'appuie contre son plan de travail et coince son smartphone entre son épaule et sa joue pendant qu'il dénoue son tablier.

- Petit père, il se moque. Raconte à bibi ce qui ne va pas.

- Sérieusement ? S'exaspère le brun.

Charles parle légèrement du nez et renifle discrètement de temps à autre, signe que la grippe est encore loin d'être un mauvais souvenir.

- Parle, Charles, ou je raccroche, il menace narquoisement.

Tout en parlant, le Néerlandais glisse hors de ses chaussons et enfile une paire de mules doublées en fourrure qui feront largement l'affaire avec ses grosses chaussettes.

- Très bien ! S'agace l'autre.

Mais rien ne vient pour autant et le blond active le haut-parleur avant de poser le téléphone sur le meuble de l'entrée et d'attraper son manteau et une écharpe.

- Charles...

- Tu peux venir me chercher ?

Le ton emprunté par l'autre garçon fait doucement redescendre le sourire de Max, Charles à l'air gêné, mal à l'aise et honteux.

Quelle que soit la situation dans laquelle s'est mis le Monégasque, il est maintenant coincé et appeler Max doit lui coûter beaucoup. Il ne le fait pas par gaieté de cœur.

Aussi, il décide de ne pas pousser le bouchon plus loin.

- Où est-ce que tu es ? Il demande doucement.

Charles lui donne sans hésiter avant de raccrocher, prétextant un double appel et, après avoir saisi un bonnet et une paire de gants, le Néerlandais referme la porte de son appartement derrière lui.

La logique voudrait que Max prenne l'une de ses voitures pour aller chercher le grand malade et le ramener chez lui sain et sauf, mais c'est sans compter sur la position que Charles lui a donnée, en plein milieu de l'une des artères les plus passantes de la principauté Monégasque et de l'impossibilité absolue de trouver une place de stationnement dans cette partie de la ville.

Vraiment, quoi que Charles ait bien pu vouloir faire, Max espère qu'il a une bonne raison, parce qu'il ose à peine penser à la galère que ça va être de le ramener chez lui à pied.

Ne parlons même pas de le porter.

Malgré toutes ses précautions, le vent glacial de l'hiver lui brûle le visage douloureusement lorsqu'il met le nez dehors.

Une brume blanche s'échappe de ses lèvres alors qu'il baisse les yeux sur l'écran de son téléphone pour se guider dans les rues.

Au-dessus de sa tête, brille un soleil froid et sec qui l'oblige à plisser les yeux et rapprocher l'appareil de son visage. Max s'humidifie les lèvres et enfonce les mains dans ses poches avant de reprendre son chemin, inspirant lentement par le nez et expirant tout aussi calmement, essayant de temps à autre de former les formes avec la fumée de son souffle.

Monaco, trois-cents jours d'ensoleillement par an, une température rarement en dessous des huit degrés en hiver bien qu'il semble qu'aujourd'hui fait exception. Précisément le jour où Charles se décide à tenter l'aventure d'une sortie en plein air, Max pourrait trouver cela drôle tant c'est ironique.

Avec la force de l'habitude, il emprunte les petites rues qui lui font éviter la place du casino, pas la peine de tenter le diable, croiser des fans ou pire, des paparazzis, est la chose qu'il souhaite absolument éviter actuellement.

Il lui faut une petite quinzaine de minutes pour rejoindre l'emplacement que Charles lui a indiqué face à la marina.

Certain de l'endroit, il lève la tête à la recherche d'une silhouette bien connue qu'il met quelques instants à trouver, recroqueviller sur un banc à quelques mètres de là.

Un petit sourire paisible aux lèvres, il entreprend d'avaler la distance entre lui et la forme tremblotante. À force, il ne devrait plus s'étonner, mais l'inconscience de Charles semble être l'une de rares choses qui parvienne toujours à le surprendre.

Le garçon, transit de froid, ne porte qu'un sweat-shirt dont la capuche, rabattue sur la tête, dissimule à peine ses lèvres bleuies, les mains cachées dans la poche ventrale et les genoux, couvert d'un bas de jogging tressaute au rythme de ses tremblements.

Aux yeux de Max, le diagnostic est plutôt simple, Charles a voulu, pour une raison X ou Y sortir faire un tour, il a sous-estimé la fraîcheur de l'hiver sur la principauté et maintenant, rattrapé par les symptômes de sa grippe, sans doute épuisé et glacé jusqu'aux os, il ne peut plus faire un pas de plus.

Du grand Charles, en gros.

Il ne devrait même pas s'étonner.

- Qu'est-ce qui t'arrive, frimousse, il souffle une fois arrivé assez proche.

Ne l'ayant pas entendu arriver, Charles sursaute et relève rapidement la tête en direction du Néerlandais qui lui sourit doucement.

- J'ai froid, il claque des dents.

- Je vois ça, ne bouge pas.

Lentement, Max retire son bonnet et son écharpe, avec douceur, il tire sur la capuche du brun qui se laisse faire, hypnotisé par les mouvements du plus âgé, dévoilant sa chevelure indomptable.

Tendrement, le blond ajuste le bonnet sur le crâne de l'autre homme avant de remettre la capuche et enroule l'écharpe autour de son cou, veillant à ne pas serrer trop fort.

Une fois fait, Max recule d'un pas pour admirer son chef d'œuvre, les épaules frissonnantes du pilote Ferrari attire son regard et le blond pousse un soupir avant de commencer à défaire la fermeture de son manteau.

- Qu'est-ce que tu fais ?

- J'apporte une solution, il retient un frisson.

Charles fronce les sourcils alors que Max tire sur les manches du blouson pour s'en défaire.

- Arrête, tu vas attraper froid.

Max lève les yeux au ciel en terminant de se dévêtir, c'est l'hôpital qui se fout de la charité.

- Dis celui qui est déjà malade et qui est quand même sorti sans vêtement d'hiver.

Le brun ouvre la bouche, prêt à riposter, mais la referme finalement, à court de répartie.

Max esquisse un petit sourire avant de prendre place à côté de Charles et étend le manteau pour les recouvrir tous les deux. Le plus jeune se laisse faire, allant même jusqu'à pousser un soupir de soulagement lorsque la chaleur du corps de Max vient réchauffer le sien.

- Alors ? Questionne Max. Qu'est-ce que l'on attend ?

Tout en parlant, le Néerlandais observe les passants autour d'eux à la recherche d'une personne connue ou d'un éventuel détail qui attirerait son attention, mais rien de particulier ne lui saute aux yeux.

- On n'attend personne, déclare platement Charles.

Surpris et curieux, Max tourne le regard en direction du Monégasque qui a enfoui son nez dans la doublure de l'épais manteau.

- Aucune raison en particulier ? Il questionne.

- Rien du tout, assure l'autre.

Le blond hausse un sourcil avec incompréhension, qu'est-ce qui pourrait bien pousser le pire malade de l'univers à mettre les pieds dehors pour aller s'asseoir sur un banc quelconque et ne rien y attendre du tout.

Cette histoire commence à prendre des allures de Cluedo qui lui donne des nœuds au cerveau.

- Alors pourquoi est-ce que tu...?

- Je voulais aller voir ma mère.

Oh.

Tout d'un coup, l'énigme lui semble bien moins compliquée à résoudre et les joues de Charles un peu plus rouges aussi.

C'est vrai qu'à bien y réfléchir, ils ne sont pas si loin du salon de coiffure de la matriarche des Leclerc, mais cela ne répond pas à toutes ses questions. Heureusement pour lui, le brun collé contre lui semble un peu plus loquace que d'habitude.

- Prendre la voiture ne me semblait pas très... raisonnable, souffle le brun. Donc j'ai pensé que je pourrais y aller à pied, mais le résultat n'est pas très concluant non plus.

Tout en exposant son échec, le Monégasque laisse retomber sa tête contre l'épaule de Max, qui se fige comme une statue de marbre, grappillant un peu plus de sa chaleur réconfortante pour tenter de récupérer quelques couleurs.

Dans la poitrine du Néerlandais, son cœur rate un battement, trébuche et manque de se décrocher alors qu'un Daniel imaginaire en tenue de pom-pom girl réalise un saut périlleux en hurlant à qui veut l'entendre que c'est l'heure de marquer un Touchdown.

- Il y a une raison particulière ? Il demande, essayant d'ignorer le rouge de ses joues. Pour que tu veuilles la voir aujourd'hui en particulier ?

Charles secoue la tête, frottant sa joue contre l'épaule de Max par la même occasion.

- Je voulais la voir, c'est tout, il parle d'une petite voix. Elle me manque.

- Pourquoi ne pas lui avoir demandé de passer à l'appartement dans ce cas ?

- Je n'ai pas vraiment réfléchi sur le coup, marmonne-t-il avec gêne.

- Je pense que je pourrais compter sur les doigts d'une seule main les moments où tu as réfléchi ces derniers jours, ricane Max.

Sous le manteau, Charles lui met un coup de coude qui a le don de transformer le ricanement de Max en véritable rire, l'obligeant à relever la tête pour éviter de rebondir sur son épaule.

Perdu dans la contemplation d'un Max hilare, Charles met quelques instants de trop avant de répondre un simple.

- Arrête.

Qui parvient à peine à dissimuler le sourire qui prend discrètement place sur ses lèvres.

- Je n'y peux rien, rit l'autre. C'est toi qui prends des décisions étranges.

Max rigole encore pendant quelques secondes avant de prendre une grande inspiration pour parvenir à se calmer un peu et à retrouver son calme. Charles est à présent ventousé à lui, plaqué contre son côté gauche et il essaie du mieux qu'il peut de ne pas trop y penser parce que sinon son cœur ne s'en remettra pas.

- Je suis content, il reprend finalement. Que tu m'aies appelé.

Le brun hausse les épaules.

- Je ne suis peut-être pas le plus réfléchi, il ajuste sa joue contre l'épaule de l'autre homme. Mais au moins, je tiens mes promesses.

- Ça me semble être un bon compromis, il acquiesce doucement.

Les deux hommes restent silencieux quelques instants, dans l'esprit de Max, raisonne la conversation qu'il a eue ce matin avec Daniel et Lando.

Peu importe à quel point ces deux guignols peuvent essayer de le persuader que Charles pourrait être intéressé par les hommes, il y a de toute façon encore un immense fossé entre être intéressé par les hommes et être intéressé par lui en particulier.

Charles ne peut pas le voir comme autre chose qu'un rival, si ça avait dû être le cas, il y a bien longtemps que cela aurait été fait.

Et peu importe à quel point la présence du préservatif que Lando a glissé dans sa poche avant de partir ce matin se fait palpable, son cerveau, lui, refuse purement et simplement d'envisager l'idée.

Refroidi autant par ses propres pensées que par le climat extérieur, Max exhale une dernière bouffée de vapeur qui se disperse dans l'air salé avant de se relever.

Profitant du fait que l'autre garçon ne peut pas voir son visage, il prend une seconde pour gommer ses doutes et toute trace de tristesse avant de se retourner.

Un sourire doux plaqué sur le visage, il tend la main en direction du brun qui le regarde avec de grands yeux.

- Tu viens, il propose. On rentre à la maison.

Charles reste bouche bée une seconde avant qu'un éclair d'hésitation ne traverse ses traits.

- Mais, il souffle avec incertitude. Et ma mère ?

Le sourire de Max s'agrandit, amusé.

- Tu veux vraiment avoir à lui expliquer que tu viens de passer une heure sur un banc sans manteau ? On l'appellera quand on sera rentré.

La grimace du brun vaut toutes les réponses du monde et Max doit se retenir de rire à nouveau. Finalement, le plus jeune accepte sa main tendue et titube un instant sur ses pieds avant de se stabiliser, le tout, sous la vigilance du triple champion du monde qui ne le laisserait pas se blesser.

- Je te rends ton manteau ? Je me suis réchauffée.

- Garde-le, le temps que l'on rentre, insiste Max.

- Tu es sûr ?

- Mais oui, il lève les yeux au ciel. Allez, laisse-moi t'aider à l'enfiler, on ira plus vite comme ça.

Malgré ses joues cramoisies, Charles ne riposte pas et Max décide de prendre son silence pour un accord. Méthodiquement, il l'aide à enfiler une manche après l'autre et remonte la fermeture éclair jusque sous son nez, poussant l'écharpe contre son visage pour former un cocon de chaleur protectrice.

- Eh, voilà, souffle le blond, fier de lui. On dirait un bonhomme Michelin.

- Très drôle, chouine Charles.

Max passe aussi dessus de ses pleurnichements parce qu'il sait très bien que Charles apprécie ses bons traitements et s'il a besoin d'une preuve, il lui suffit de regarder discrètement la manière dont le plus jeune enterre son visage dans l'écharpe qu'il lui a prêté, ne laissant plus apparaître que le haut de son nez, une paire d'yeux à vous en couper le souffle et quelques mèches rebelles, définitivement indomptables échappées du bonnet malgré ses précautions.

- Ça va aller pour marcher ? Il s'inquiète. On peut toujours prendre un taxi si tu ne le sens pas.

- Mais oui, je vais très bien, râle le Monégasque. J'ai même trop chaud maintenant.

- Les Français, ricane Max. Jamais content.

- Je ne suis pas Français, je suis Monégasque !

- Mais oui, mais oui, il lève les yeux au ciel. Avance Lutin Grognon, si tu ne veux pas qu'on couche ici.

Charles lui lance un regard mauvais, mais n'enchaîne pas sur une nouvelle raillerie et préfère le dépasser pour prendre le chemin de l'appartement sans l'attendre, histoire de bien lui faire sentir tout son agacement.

Max frissonne à cause des températures, mais ne se départit pas de son sourire, surtout lorsqu'au bout de quelques mètres à peine, la cadence de Charles commence déjà à ralentir, preuve qu'il n'a pas retrouvée tant d'énergie que ça.

Il ne lui faut que quelques foulées rapides pour rattraper le fuyard et attraper l'un de ses bras, s'y accrochant suffisamment pour l'empêcher de tomber en cas de besoin.

- Tu es pire qu'un gosse Charles, tu le sais ça ? Il se moque. Tu m'étonnes que tes conquêtes finissent toujours par prendre la poudre d'escampette.

Mais contre toute attente, sa pique ne semble pas faire mouche, au contraire, Charles s'appuie un peu plus contre lui et ne décroche pas un mot pendant plusieurs minutes, faisant se questionner Max.

Il semblerait qu'il ait accidentellement mis les pieds dans un plat qu'il n'avait même pas vu.

- Charles ? Il souffle doucement. Tout va bien ?

Contre lui, le corps du Monégasque se fait plus lourd, reposant presque entièrement contre l'épaule de Max qui le soutient sans grande difficulté.

Dans leur position actuelle, le Néerlandais ne peut pas voir le visage de l'autre garçon, tourné vers le sol. Mais à en juger par ses épaules basses et sa nuque tendue, les pensées du plus jeune ne doivent pas être très brillantes.

Ils marchent ainsi quelques minutes encore, silencieusement pressés l'un contre l'autre dans les rues ensoleillées de la principauté Monégasque.

- Ouais, soupire finalement Charles. C'est juste que ça me fait réfléchir.

- Quoi ? Ma réflexion sur tes conquêtes ? S'interroge le blond. Respire, ce n'est pas comme si je t'avais demandé ton body count non plus.

Max espère que cette taquinerie détendra un peu l'atmosphère qu'il sent devenir pesante, mais tout ce qu'il obtient à la place, c'est un regard vaguement surpris et un pauvre sourire sur les lèvres de Charles qui secoue la tête.

- Tu serais déçu, il laisse échapper un rire sans joie.

Le triple champion du monde hausse les sourcils, partagé entre l'envie de se moquer du côté Calimero du garçon contre lui et celle de creuser un peu plus cette nuance de tristesse qu'il croit percevoir dans ses yeux clairs.

- Je suis sûr que non, il sourit gentiment. Et puis ça n'a même pas vraiment d'importance, tant que tu y trouves ton compte.

- C'est bien là le problème.

Max hausse les sourcils avec interrogation, il a du mal à imaginer que Charles, aussi beau et gentil et incroyable en tout point qu'il soit, puisse ne pas être satisfait de sa vie amoureuse. Il n'a littéralement qu'à sourire pour que les plus belles femmes du monde lui tombent dans les bras.

- Tu ne trouves pas chaussure à ton pied, Cendrillon ? Il te suffit de changer de pair.

Le blond tente de garder un air léger et taquin, mais en réalité, il est surtout extrêmement mal à l'aise à l'idée d'écouter Charles lui parler de ses anciennes relations.

Étant lui-même dangereusement amoureux de l'homme accroché à son bras, il a l'impression de ne pas être sincère, de profiter de la confiance que l'autre lui accorde pour en tirer profit.

Ça et le fait qu'écouter l'homme dont il se languit secrètement lui dire qu'il ne parvient pas à trouver l'amour, c'est vraiment cruel.

Une part de lui a envie de saisir Charles par les épaules et de le secouer de toutes ses forces en lui hurlant qu'il est là, lui, qu'il n'attend que de pouvoir remplir ce rôle pour lui, poser son cœur sur un plateau et le lui offrir sans contrepartie.

Mais tout le reste, tout ce qui constitue le Max introverti, secret, timide, l'empêche de ne serait-ce que penser à l'idée de lui avouer la vérité. Il préférerait même mourir que de devoir se confesser, c'est juste, beaucoup trop lui demander.

Alors il se rabat sur ce qu'il maîtrise à la perfection la taquinerie, mais il semblerait que cette fois, cela ne soit pas suffisant.

Charles esquisse une petite grimace qui dévoile ses dents blanches.

- Le problème n'est pas vraiment de trouver quelqu'un, il grince. Je sais que je plais.

- Doucement sur les compliments, on sera emmerdés si tes chevilles ne passent plus la porte de l'appartement.

Charles laisse échapper un autre rire un peu forcé, Max déteste ce rire.

- Sérieusement Maxy, je suis sûr que, même à toi, je te plais.

Le blond manque de s'étouffer avec sa salive, il ferme les yeux une seconde, le temps de prendre une grande inspiration. Il espère que Charles mettra ses joues rouges sur le compte du froid mordant.

Que répondre à ça, franchement ?

Optons pour une vérité sarcastique.

- Tu n'imagines pas à quel point, il lève les yeux au ciel.

Amusé, le Monégasque le dévisage un instant, ses yeux accrochant une brève seconde l'éclat délicat du soleil d'hiver dans ses cheveux blonds cendrés, lui donnant des airs d'ange déchu du ciel.

- Tu vois, il parle comme si c'était une évidence. Je n'ai jamais de problème pour trouver quelqu'un. C'est après que ça coince.

- Laisse-moi deviner, Max fait semblant de réfléchir. Je dirais qu'ils prennent peur en découvrant ta capacité innée de mettre le feu à tout aliment comestible ?

Charles lui pince les côtes en représailles.

- Je t'ai dit d'arrêter de te moquer, il glousse malgré lui.

- Je ne fais que dire la vérité ! Il se justifie. C'est toi qui n'arrêtes pas de tourner autour du pot depuis tout à l'heure.

Charles a envie de se confier, Max le voit bien alors il secoue brièvement la tête, pour se remettre les idées et place, détourne le regard et prend une grande inspiration.

- Allez, il souffle comme pour s'encourager lui-même. Raconte-moi tes malheurs, bourreau des cœurs.

L'effet est immédiat sur le Monégasque qui, en pleine confiance, ouvre les vannes, abreuvant le blond de détails plus ou moins croustillants.

- À chaque fois, les premiers mois se déroulent bien, commence le plus jeune. Et puis dès que l'on commence à devenir plus sérieux, j'ai l'impression que ça bloque, que l'on n'est pas sur la même longueur d'onde. Alors je fais des efforts, plus de temps ensemble, plus de dates, plus de cadeaux, plus de tout, mais c'est comme essayer de faire rentrer un rond dans un carré et au final, j'ai l'impression de ne plus reconnaître la personne que j'ai rencontrée.

Max prend une bonne minute pour réfléchir au sens des paroles de l'autre homme. Ils marchent tous les deux silencieusement, s'engageant dans une nouvelle ruelle étroite pour éviter les grandes artères, toujours pressés l'un contre l'autre, en quête d'un peu de chaleur humaine.

- Peut-être que tu as trop d'attente concernant la relation que tu veux avoir, débute Max. Tu veux peut-être que tout corresponde à l'idée que tu te fais de ta relation idéale et que voir qu'il ou elle agit différemment te déçois et te sort du cadre protecteur que tu as créé ?

Charles prend une mine pensive, analysant sérieusement les paroles de l'autre pilote avant de répondre.

- Je pense que je vois ce que tu veux dire, le problème viendrait de moi.

Max secoue la tête.

- Je n'ai pas dit que c'était un problème, il contredit. Mais je suis bien placé pour comprendre que lorsque l'on est quelqu'un de connu et de très observé, on puisse vouloir avoir le contrôle.

- Je ne sais pas si c'est tellement une question de contrôle, Charles fronce les sourcils. C'est juste que, quand je ne suis pas malade, il plaisante. Ma vie tourne à cent à l'heure et parfois, j'ai besoin de couper court à tout, de disparaître quelques jours avant de repartir de plus belle. Je crois qu'au fond de moi, je cherche quelqu'un qui puisse comprendre ça, vivre cette frénésie avec moi et pas la supporter ou s'y adapter pour moi.

Max tire une belle grimace, il comprend parfaitement ce à quoi Charles fait référence et pour cause :

- Tu sais Charlie, si tu cherches quelqu'un qui te comprenne à 100% et qui te suive les yeux fermés partout autour du monde, c'est un pilote de F1 qu'il faut que tu te tapes !

Le brun lui lance un regard incrédule, cherchant à jauger le sérieux de sa réponse avant d'éclater d'un rire franc, incontrôlable et tonitruant qui l'oblige à s'arrêter et à se plier en deux, mêlant fou rire et toux maladive.

Max ne peut s'empêcher d'être un peu fier de lui, rares sont les fois où il a pu voir le Monégasque rire avec autant de gaieté, ça lui rappelle leurs années de karting où ils étaient alors ennemis mortels, mais où les éclats de rires étaient également plus nombreux, moins maîtrisés, vrais et authentiques.

C'était avant, le bon vieux temps. Du temps où Charles se baladait partout en petit prince des paddocks, flanqué de Jules et de son père, arrogant à souhait et pourtant impossible à détester. Du temps aussi où Max aurait bien aimé le fuir, le sien de père, qui l'empêchait de se faire des amis, l'empêchait de penser à autre chose qu'à la victoire, l'étouffait de son amour toxique et faisait de lui une machine plutôt qu'un enfant.

Max y repense parfois, au passé, aux choses qu'il aimerait changer, aux efforts qu'il aimerait faire et aux consignes qu'il n'aurait pas dû respecter.

Mais si sa vie ne devait être faite que de si, eh bien, il ne serait sans doute pas champion du monde à l'heure actuelle alors, il est trop tard pour se morfondre.

Et Charles qui n'en finit plus de rire, pendu à son bras.

- Tu as raison ! Il exhale au bout d'un moment, des larmes de rire au bord des yeux. Pourquoi est-ce que je n'y ai pas pensé plutôt ?

- Parce que tu es un idiot, ricane le blond.

- Hé ! Le sourire sur les lèvres du brun ne diminue pas. Je te trouve un peu dur avec moi Maxy.

- C'est parce que tu te laisses faire, rétorque l'autre.

Contre lui, Charles hausse simplement les épaules sans le contredire, un petit air mutin fiché sur les lèvres, il s'appuie un peu plus sur Max.

- J'imagine que l'on peut élargir le cercle de mes potentiels prétendants aux gens travaillant dans le paddock à l'année, propose le Monégasque. Parce que si je dois m'en tenir à mes dix-neuf concurrents, le choix risque d'être vite fait.

- Plutôt oui, ricane le blond. Checo est marié, tout comme Magnussen et Hulkenberg. Esteban, Valtteri, Alex, Pierre, Lance, Dany, Oscar, George, Carlos et Lando sont en couple. De ce que je vois, tu as le choix entre Lewis, Fernando, Yuki, Zhou et Logan.

Une grimace peu enjouée étire les traits du plus jeune des deux avant qu'une lueur amusée ne vienne briller dans ses yeux.

- Ou toi, il murmure avec un air moqueur.

Max hausse un sourcil.

- Moi ?

- Tu ne t'es pas cité dans la liste, tu ne me laisses même pas une chance ?

Le blond ricane avec surprise, s'il s'attendait à ce que Charles note le fait qu'il s'est auto-censuré dans la liste.

- Je suis trop bien pour toi Leclerc, il prend un air suffisant.

Charles lève les yeux au ciel.

- Toutes mes excuses, il ricane. Sa majesté est trop bien pour les pauvres petites gens comme moi.

- Et encore, il enfonce le clou. Si tu n'avais pas gagné quelques Grand Prix par-ci par-là, je ne t'adresserais même pas la parole.

L'autre porte une main à son cœur.

- Outch ! Moi qui comptais justement te proposer un date.

Ha ha ha, si seulement Max n'avait pas intérieurement envie de se jeter sous une voiture.

- Je te ferai savoir quand tu l'auras mérité, ironise-t-il à la place.

- je suis sûr que je pourrais te convaincre, refuse de lâcher Charles.

Le Néerlandais lève les yeux au ciel et remercie les températures hivernales de faire naturellement rougir son visage, sinon, il lui aurait été compliqué de se justifier.

Mais si pousser Max dans ses retranchements semble être un jeu que Charles apprécie tout particulièrement, abandonner ne fait pas partie du vocabulaire de Max.

- Oh, mais bien sûr que tu pourrais, il raille avec impertinence. Si tu te mettais à genoux et que tu implorais sincèrement pour mon attention.

Loin de se laisser abattre, le brun penche la tête dans sa direction, forçant la rencontre de leurs regards avant d'esquisser une moue insolente qui fait s'emballer le cœur du Néerlandais.

- Maxy, si pour t'avoir, je dois me mettre à genoux, il lui sourit presque tendrement. Sache que je ne ferais pas qu'implorer.

Oh, le petit con.

Malgré toute sa préparation, Max s'étouffe violemment avec sa propre salive et tousse furieusement, plié en deux sur le trottoir pour éviter de s'auto-asphyxier pendant que Charles éclate d'un grand rire machiavélique, absolument fier de sa répartie.

- Espèce de taré ! S'exclame le blond en reprenant sa respiration laborieusement.

- Tu devrais voir ta tête !

- Non, mais tu veux ma mort ?!

Trop choqué pour penser correctement, Max porte une main à son front brûlant de gêne et d'une autre émotion qu'il fait de son mieux pour masquer derrière son embarras.

- Je rigole Maxy, respire, s'amuse Charles.

- Tu ne peux pas regarder les gens, droit dans les yeux, et balancer des trucs pareils, Charles.

- Bien sûr que si, il contredit. Surtout si c'est toi, c'est encore plus drôle si c'est toi.

- Me torturer fait donc partie de tes passe-temps ? Ravi de l'apprendre, il lève les yeux au ciel.

Amusé, Charles resserre encore un peu plus l'emprise de son bras autour de celui de Max, posant doucement sa tête sur son épaule alors qu'ils reprennent leur chemin.

- Voyons Maxy, tu sais bien que je ne te ferais jamais de mal, tu es mon meilleur rival après tout.

- Le Charles de treize ans ferait une crise s'il t'entendait, il s'amuse.

- Je ne sais pas de qui tu parles, glousse Charles. Le gosse que je connais était plus obsédé par toi qu'autre chose.

Max rougit de nouveau, Charles ne peut pas lui dire des choses comme ça. Il ne peut pas lui balancer des bombes pareilles et penser que cela ne lui fasse rien, qu'il reste de marbre et continue comme si de rien n'était.

Max avale sa salive difficilement, son emprise sur la silhouette de Charles plus forte que jamais.

- Et pourquoi pas cette fille de chez Mercedes ? Il change de sujet. Théa, je crois ?

Surpris, le brun met quelques instants à comprendre qu'ils sont revenus à la discussion sur ses relations.

Il hausse un sourcil intrigué avant de réfléchir à la proposition.

- Sympa, mais je crois qu'elle est déjà en couple et puis il lui manque un petit truc.

- Un truc ? Tu ne peux pas être plus précis tant qu'on y est ? S'agace le blond. Parce que là, clairement, tu ne m'aides pas vraiment.

Le brun ricane, amusé et cela exaspère totalement le champion du monde qui le fait bien sentir.

- Quoi ? Pourquoi tu te marres ? Qu'est-ce qui lui manque à cette pauvre fille qui te fasse ricaner comme une hyène.

Charles ne répond toujours pas, hilare, accentuant encore plus la gêne de l'autre homme. Déjà qu'il se retrouve pris à son propre piège en aidant Charles à trouver quelqu'un, si en plus il doit se foutre de lui, autant arrêter les frais maintenant.

- Bon écoute, il souffle. Si tu ne veux pas me le dire, c'est ton problème, mais ne vient pas te plaindre si jamais...

- Une queue, Max, Charles esquisse un sourire espiègle. Ce qu'il manque à cette fille, c'est une queue.

Oh.

Alors celle-là.

Il aurait dû la voir venir.

C'est Daniel qui va être content.

- Mais...Mais alors tu... ? Max bégaie clairement, cherchant ses mots. T'es plutôt...Enfin tu préfères... ? Hommes...?

Le Monégasque ricane encore un peu, fier de son coup avant de lentement hausser les épaules.

- Hommes, femmes, ça n'a pas vraiment d'importance. Disons que je suis ouvert à toutes les possibilités.

Il va falloir quelques minutes à Max pour digérer cette information de la plus haute importance.

Ce n'est pas tous les jours que Charles Leclerc fait son Coming Out bisexuel tout de même, c'est un jour à marquer d'une pierre blanche.

Max en tout cas, risque de se rappeler de cette journée jusqu'à la fin des temps.

- Et donc, comme en ce moment, je suis plutôt attiré par les hommes, tu comprends mieux pourquoi ce n'est pas facile de démêler tout ça, poursuit le brun.

- Je suis gay.

Les mots sont sortis d'eux-mêmes, Max n'a pas pu les retenir, c'est la première chose qui lui est venue dans le Big Bang qu'est son esprit actuellement.

Presque aussitôt, la gêne le rattrape, et même le froid mordant de l'air ne peut dissimuler le rouge cramoisi de son visage qu'il tente de cacher au regard surpris et quelque peu intéressé de Charles.

Le silence s'étire entre les deux hommes et Max pourrait pleurer tellement il est heureux de voir la porte de l'immeuble de Charles se profiler au loin. Il ne rêve plus que d'une chose, rentrer chez lui et rester caché sous ses couvertures jusqu'à la saison prochaine.

Mais bordel qu'est-ce qu'il lui a pris au juste ?!

Quel idiot.

Charles pourtant, n'a pas franchement l'air plus surpris que ça, c'est plutôt comme la confirmation de quelque chose qu'il soupçonnait déjà.

Il n'est pas moins conscient pourtant, de la force que cela a dû demander à Max, l'introverti originel pour déballer quelque chose d'aussi important à propos de lui-même. Il prend donc cette information comme ce qu'elle est : un précieux cadeau.

- Merci, il souffle. De me l'avoir dit.

Toujours écarlate, le triple champion du monde refuse de croiser son regard.

- C'est normal, il s'éclaircit la voix. Tu me l'as dit aussi.

- Non, le brun secoue la tête. Ce n'est pas parce que je l'ai fait, que tu me dois quelque chose, mais je suis quand même content que tu l'aies fait, ça représente beaucoup pour moi.

Mutique, Max se contente de hocher la tête rapidement.

Le meilleur moyen de ne pas dire de conneries, c'est de ne pas parler du tout.

Heureusement pour lui, l'immeuble de Charles arrive bien assez vite et bientôt, ils sont tous les deux devant la porte pendant que Charles cherche ses clés.

Prêt à partir aussi rapidement que possible, Max commence déjà à se décoller lentement du corps de Charles, déclenchant involontairement un long frisson chez ce dernier qui se retourne, surpris.

- Tu ne restes pas ? Il demande.

Max secoue la tête encore une fois, il ne veut toujours pas parler.

Le Monégasque pince les lèvres, ennuyé.

- J'insiste, au moins pour récupérer tes affaires.

- Je passerais les récupérer un autre jour.

Charles le regarde, les sourcils froncés, soucieux, pas décidé à le laisser s'échapper aussi facilement.

- S'il te plaît, tu es gelé...

Tout en parlant, les doigts du brun viennent effleurer les siens en une caresse aérienne, puis ne voyant aucune résistance de la part de son rival, les saisissant doucement pour les nouer.

Ne demandez pas à Max comme il s'est retrouvé dans l'entrée de l'appartement de Charles, lui-même ne saurait pas vous l'expliquer.

Le fait que, eh bah, il est là.

Debout au milieu du salon comme un pauvre manant sans savoir quoi faire d'autre que regarder Charles évoluer autour de lui silencieusement.

- Tu veux prendre une douche ? Propose le plus jeune. Je peux te prêter des vêtements et préparer quelque chose de chaud à boire pendant que tu es sous l'eau ?

Le regard équivoque que Max glisse en direction de ce qui fût, autrefois, un Tupperware de petits-pois carotte à la crème à présent carbonisé dans le fond dans l'évier et suffisant pour tirer une plainte agacée au brun.

- Je ne veux entendre aucune remarque, il prévient.

Max hausse les sourcils, pas impressionné pour deux sous.

- Pourquoi ne pas échanger les rôles ? Il propose en signe de paix. Je prépare des chocolats chauds pendant que tu vas prendre une douche.

- Tu es celui qui était dehors sans manteau.

- Et toi, tu es encore malade.

Car bien que Charles fasse de son mieux pour garder la face, Max parvient toujours à voir le tressaillement frigorifié de ses épaules alors qu'il se tourne vers lui, dépité.

- Pourquoi est-ce qu'on en revient toujours à toi qui me traites comme un gosse ? Il demande.

- Je ne te traite pas comme un enfant, Max tempère. J'essaie de m'occuper de toi et de ta santé à ta place parce que tu sembles physiquement incapable de te faire passer en premier.

Les joues de Charles rosissent subtilement tandis qu'il détourne le regard, bougon, et file vers la salle de bain sans demander son reste.

Max laisse échapper un soupir amusé en commençant à ranger le champ de bataille qu'est de nouveau la cuisine du pilote Ferrari, passant un coup d'éponge sur le plan de travail et disposant les couverts sales dans le lave-vaisselle avant de commencer à préparer les fameux chocolats chauds qui leur feront un bien fou à tous les deux.

Depuis l'endroit où il se trouve, il peut entendre le bruit de l'eau qui coule, créant un son diffus et relaxant qui l'aide à faire redescendre un peu la pression des dernières heures.

Chaque jour qui passe lui semble un peu plus fou que le précédent et à ce rythme, qui sait ce que demain leur réserve encore ?

In extremis, il se rappelle d'envoyer un passage à Pascale pour la tenir des derniers événements avant de revenir à l'instant présent.

Tranquillement, il réchauffe ses doigts en faisant fondre le chocolat en ajoutant le lait au fur et à mesure avant de le verser dans deux grands mugs, d'ajouter une noisette de crème chantilly et de saupoudrer un peu de poudre de cacao pour parfaire sa recette du chocolat chaud.

Charles revient dans la pièce pile au moment où Max dispose les deux tasses sur la table du salon et le Néerlandais ne retient pas une moue satisfaite en découvrant le gros pull et les chaussettes de ski dont le brun s'est affublé.

Le blond se redresse lentement, saisissant un plaid au passage et invitant d'un signe de tête Charles à venir s'installer dans le canapé avant de commencer à disposer la couverture sur lui.

- Je peux le faire moi-même, chipote le brun aux joues rouges. Je t'ai laissé des affaires dans la salle de bain, tu peux y aller.

Le Néerlandais ouvre la bouche pour le contredire, mais le Monégasque ne lui en laisse pas le temps.

- Sérieusement Maxy, si tu n'appliques pas tes propres conseils, comment tu peux espérer que je les respecte ?

L'expression du visage de Charles démontre bien que sa réplique n'attend aucune réponse et il va même jusqu'à pointer du doigt le couloir qui mène à la salle d'eau pour appuyer son propre.

Vaincu et vaguement amusé, le triple champion du monde secoue la tête avant de se redresser, obéissant sans rechigner.

- Je reviens vite, il souffle.

- Prends ton temps.

Et Charles à raison, l'eau chaude fait un bien fou à Max qui profite du jet d'eau pour dénouer ses muscles tendus par les émotions fortes et pas une nuit entière passée à se morfondre plutôt qu'à dormir.

Max ne s'en rend compte que maintenant, il est épuisé, physiquement et mentalement.

La serviette chaude lui donne l'impression d'être enroulé dans un cocon protecteur et ses paupières se font de plus en plus lourdes à mesure qu'il enfile les vêtements chauds que Charles a préparés pour lui, imprégnés de son odeur et terriblement confortable.

C'est presque une torture pour lui de devoir sortir du microclimat créé par la chaleur de la douche pour retrouver celui, plus froid du reste de l'appartement qui lui arrache un long frisson désagréable.

Comme prévu, Charles l'attend toujours, roulé en boule dans le canapé. Lui aussi à de nouveau l'air frigorifié et Max comprend qu'il n'est définitivement pas guéri de cette grippe.

Après s'être saisi de sa tasse, il le rejoint sur le canapé, se glissant suffisamment proche pour pouvoir profiter, lui aussi, du plaid, mais assez loin pour ne pas le toucher ou entrer dans son espace vital.

Une information que ne semble visiblement pas partager le plus jeune, parce qu'aussitôt Max assit, il vient se couler contre son flanc gauche, obligeant le Néerlandais à passer un bras autour de lui pour ne pas faire tomber son verre, pendant qu'il glisse son visage contre son épaule, soufflant doucement dans son cou :

- J'ai l'impression que je vais mourir de froid.

- Tu aurais dû retourner te coucher, murmure le blond.

- Non, il secoue doucement la tête. Je t'attendais.

Dévoré de fatigue, Max envoie bouler tous ses principes et toutes ses belles règles d'auto-préservation pour enfoncer ses doigts dans les cheveux de Charles, massant doucement son crâne et rapprochant le garçon de lui.

Totalement malléable, le pilote de la Scuderia se laisse faire, passant lui aussi un bras autour du blond et plongeant son nez dans son cou, fredonnant de plaisir sous les caresses de l'autre homme.

Charles est à présent presque allongé sur Max, avachi dans une position qui leur convient à tous les deux, Max profitant de son poids rassurant sur lui et Charles des bons traitements que le Néerlandais réserve à son crâne. Aucun des deux n'a la force ou l'envie de bouger, presque déjà endormi dans les bras de l'autre.

Le visage pressé contre le torse de son vis-à-vis, Charles se laisse bercer par les battements de son cœur qui ralentit progressivement à mesure que l'autre garçon tombe de sommeil.

Prévenant, il récupère la tasse de chocolat refroidie à peine entamée de Max pour la déposer sur le sol avant d'exercer une légère pression sur les épaules du blond pour le pousser à s'allonger un peu plus confortablement sur le divan.

Avec attention, il veille à poser un coussin sous la nuque du Néerlandais et prend le temps de l'observer une brève seconde, totalement abandonné et vulnérable sous ses yeux.

Tout malade et partiellement aveugle aux détails qu'il est, Charles n'a pas eu besoin d'une boule de cristal pour voir la fatigue dans les yeux et sur le visage de son camarade lorsqu'il la rejoint plus tôt.

Alors, peut-être qu'il est un sale gosse, un peu trop taquin et beaucoup trop fouine pour son propre bien, mais au moins, Max est là et il dort donc Charles considère cela comme une franche réussite.

Fier de lui, il se glisse contre le corps tiède de son ancien rival, rougissant à peine lorsque celui-ci adapte inconsciemment sa position pour lui donner un peu plus de place et enroule un bras autour de lui, avant de rabattre la couverture sur eux pour une sieste bien méritée.

Charles ferme les yeux et s'abandonne totalement au sommeil dans les bras de Max, fondu contre lui, créant un cocon de chaleur protectrice qui font se hausser très haut les sourcils de Pascale Leclerc lorsqu'elle les trouve dans cette position quelques heures plus tard.



🍌🍌🍌🍌🍌



Ce chapitre est si long que j'ai l'impression d'avoir commencé à l'écrire il y a mille ans, ce n'est pas une publication, c'est un accouchement à ce niveau :')

Mais bon, il se trouve que j'avais comme qui dirait un peu disparu donc bon, je vous donne un gros chapitre et vous me pardonnez ? Deal ?

Un paquet d'informations et de moments important pour Charles et Max dans ce chapitre, notre beau brun se confie sur ses difficultés amoureuses et sur sa bisexualité alors que de l'autre côté, Max lâche des bombes, comme à son habitude haha 

Un peu d'humour, un peu de sérieux et beaucoup de douceur et de tendresse pour vos beaux yeux, c'est définitivement le genre de chapitre que l'on aime !

Je vous jure que je fais de mon mieux pour reprendre un rythme normal, ça me soûle d'être une adulte avec des responsabilités, vous ne pouvez pas imaginer. Merci beaucoup pour votre patience et votre gentillesse, je suis trop fière d'avoir des lecteurs sympas comme vous <3

Du coup, j'annonce, dans le prochain chapitre, qu'il est enfin temps de justifier du rating mature de cette histoire ! Vous ne serez pas dépaysés, les choses s'enflamment, dans tous les sens du terme !

Bye les copains ♡  

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