chapitre quinze
AVANT-DERNIER SOIR dans ce paradis sur Terre avant que Pierre ne regagne Rouen durant quelques jours, pour profiter de sa famille, revoir ses parents, frères, neveux... récupérer le maximum d'amour possible afin d'être regonflé à bloc pour la seconde moitié de la saison, qui démarre par le grand prix qu'il redoute le plus depuis plusieurs années maintenant : Spa Francorchamps.
Hella a travaillé toute la journée pour avoir sa soirée de libre, et justement, c'est à son tour d'emmener Pierre dans un endroit qu'elle affectionne particulièrement. La jeune femme est ravie lorsque le français la laisse conduire le magnifique SUV loué pendant ces semaines en Italie.
Ils font une virée à deux avant et apprécient une énième fois ces paysages qui vont manquer lorsque l'un regagnera le nord de la France, et l'autre la capitale de la Finlande.
- Où est-ce que madame m'emmène ce soir ?
- Dans un endroit qui pourrait te plaire. Ça ne te dérange pas qu'il y ait du monde évidemment ?
- Si ça m'avait dérangé, on aurait dû annuler toutes les activités que l'on a faites depuis que l'on est ici, alors...
- C'est vrai. Question bête.
- Donc tu ne veux vraiment pas vendre la mèche ?
- Hors de question, une surprise est une surprise !
Hella sourit, satisfaite que Pierre ne bronche pas afin de lui tirer les vers du nez concernant ce qu'elle lui prépare. Après une balade en bord de mer, la finlandaise gare la voiture dans une rue fréquentée de Palerme.
Les touristes et locaux italiens traînent encore dans ces rues alors que la nuit est pratiquemment tombée, tandis que la jeune femme traîne le châtain dans un bar où le chant émane de toute part.
Pierre l'interroge du regard, et comprend mieux tout ce qui se trame sous son nez lorsqu'il aperçoit deux personnes s'approcher de micros avant de se mettre à chanter de manière très approximative.
Pierre a compris.
- Tu sais que je chante comme un pied quand même ?
- Moi aussi, ce n'est pas une raison ! Prépare ta voix, maestro.
Le pilote pouffe bêtement avant de suivre jusqu'au comptoir la blonde, commandant pour eux deux. Boissons à la main après deux minutes d'attente, Hella a hâte de profiter de ce moment en compagnie du rouennais.
En effet, ils étaient de piètres chanteurs... en fait, ils n'étaient pas doués dans grand chose. Néanmoins, à chaque opportunité ils y mettaient du leur, et c'est certainement pour cela qu'ils s'entendent autant.
Hella récupère le micro après le passage de quelques personnes. Elle en tend un deuxième au pilote qui le prend avec un peu d'appréhension, mais lorsque la chanson démarre, il ne voit qu'elle.
Les lumières tamisées du bar-karaoké reflètent leurs âmes dansant au rythme de leurs voix stridentes et fausses, elles entrent en pleine synchronisation.
Pierre ne pense plus au mal qui le ronge.
Au mal qui occupe ses songes.
Hella, un peu plus, succombe.
Hella, un peu plus, vers l'hécatombe.
Leurs voix s'emmêlent durant trois minutes qui semblent une éternité. Ils sortent de leur bulle quand les applaudissements surgissent. Uniquement par respect pour avoir participé, puisque forcément, ils ne feront pas de la chanson leur métier principal.
Suite à ce désastre, ils se font discrets durant le reste la soirée. Ils rient ensemble, c'est tout ce qui compte.
- C'était désastreux, intervient-il en buvant une gorgée de sa boisson non alcoolisée.
- Oh, n'importe quoi ! Tout le monde a adoré écouter ta douce voix pas du tout irritante pour nos oreilles voyons, taquine-t-elle alors qu'elle se fait pincer la peau de son ventre pour avoir fait cette blague.
Pierre observe, analyse Hella et la sent plus à l'écart que les fois précédentes. Il hésite entre deux options : ne rien faire, ce qui serait plausible et surtout la meilleure option, ou alors lui demander ce qui ne va pas et la réconforter.
Qui serait pire, étant donné la situation dans laquelle il se trouve et surtout ses plans pour la suite.
Pourtant, les mots quittent sa bouche sans qu'il ne puisse les retenir, et directement, il s'en veut.
- Est-ce que ça va ?
- Oui, soupire la finlandaise en passant une main dans ses cheveux. Je suis juste déçue que tu t'en ailles dans si peu de temps.
Le pilote grimace. Que faire ?
Simplement, il passe son bras autour de ses épaules et la rapproche de lui. Le rouennais ne sait pas tellement réconforter autrui, alors il se contente de faire au mieux.
Et Hella soupire d'aise.
Heureuse, qu'elle est.
Amoureuse, qu'elle est.
Candeur, qu'elle est.
La jeune femme croit en ces rencontres qui amènent le soleil dont les rayons chassent les nuages les plus noirs et chargés d'émotions et sentiments négatifs.
Ces rencontres qui heurtent. D'abord physiquement, le cœur bat à vive allure, le ventre se noue.
Puis mentalement, les sentiments évoluent constamment. Laissant place à l'amour de son côté. Aimer fort. Aimer trop.
Hella n'a jamais appris, n'a jamais su aimer correctement. Il y a toujours eu cette part de 'trop'. Trop de ressentis en elle.
Pierre, dans ses yeux, se noie. Ses sens son aux abois et elle, comme lui, s'y sont pris à deux fois pour porter leur paille à leur bouche correctement. Ils rient de gêne.
Pierre est tiraillé par un trop plein de pensées qui finiront par le détruire définitivement. Il a besoin de boire pour ne plus penser de trop. Il commande deux autres verres alors que Hella est aux toilettes, et le termine rapidement.
Par chance, il n'a pas besoin d'énormément d'alcool pour en ressentir les effets : étant sportif, les dégâts ne sont pas bons pour le corps et ce n'est pas compris dans leur régime alimentaire.
Hella revient et ils commandent de nouveau. Rient. Discutent comme s'ils avaient de nouvelles choses croustillantes à se raconter. Comme s'ils venaient de se rencontrer. Comme s'ils s'aimaient à ce que l'un en crève.
Quelques heures après, ils rentrent chez le français. Se déshabillent jusqu'à ce que leurs sous-vêtements soient la dernière barrière. Ils semblent découvrir la piscine pour la première fois, comme s'ils n'avaient jamais plongé auparavant.
La finlandaise ressent le besoin profond d'un contact physique avec le châtain. Elle s'agrippe à lui et capture vivement ses lèvres charnues dans une danse endiablée et savoure ces instants précieux.
Sans savoir que peut-être, ces baisers seraient les derniers.
Toute possibilité est probable après tout.
Hella n'en a pas la moindre idée. Elle ne pense qu'à Pierre et sa voix rauque, Pierre et son humour décalé, Pierre et ses petites attentions.
Pierre et ses mains de plus en plus baladeuses alors que leurs corps chauffent en moins de temps qu'il n'en faut pour prononcer de brefs mots. Pierre met ses maux de côté et soulève les cuisses de la blonde afin de la porter hors de l'eau.
Leurs corps encore dégoulinant entre en contact avec le lit et ne font qu'un pour une énième fois en deux semaines.
Leurs corps étaient fait pour se rencontrer. Fait pour se désirer. Fait pour s'aimanter. Fait pour s'aimer.
□□□
Hella sort de la salle de bain après être passée aux toilettes. Prête à dormir après cette fin de soirée épuisante, elle est surprise de ne pas retrouver Pierre dans le lit. La porte fenêtre est ouverte, et le normand est accoudé à la balustrade, observant avec émerveillement les étoiles.
La jeune femme le rejoint, vêtue d'un de ses t-shirts et encercle la taille du pilote de ses petits bras. Il frissonne. Elle sourit.
- Tu ne voulais pas dormir ?
- Non, je voulais prendre un peu l'air. Le ciel est dégagé, j'adore observer les étoiles.
- Je ne savais pas que tu aimais autant le faire. Tu connais un peu les constellations ?
- Légèrement. Je ne prends pas réellement le temps malheureusement. Mais regarde. Cette étoile, là, il pointe du doigt une étoile que Hella met du temps à apercevoir, tu penses que c'est laquelle ?
- La seule que je connais c'est ce que vous appelez l'étoile du Berger.
- C'est celle-ci. Mais en réalité, ce n'est pas une simple étoile, il s'agit de la planète Vénus.
- J'ai toujours pensé que c'était une étoile.
Pierre sourit. Tout le monde pense ça évidemment, même lui avant qu'il ne s'informe. Il passe plusieurs minutes à lui parler des constellations et différentes étoiles, alors qu'un tout autre sujet lui brûle les lèvres.
La jeune femme l'écoute avec plaisir, mais le sent se tendre et se perturber au fur et à mesure de son discours. Elle sent que regarder les étoiles n'était pas son but premier. Pourtant, il ne dira rien de plus.
Il l'invitera à s'endormir dans ses bras protecteurs et Hella se sentira bien.
Puis le châtain cogitera toute la nuit, comme à son habitude. Nuit entrecoupée de pensées néfastes, sanglots refoulés pour ne pas réveiller la blonde dormant contre lui, et craintes de la briser.
Hella est porcelaine. Plusieurs fêlures profondent la fragilisent.
Pierre est le coup de vent qui la fera tomber de haut. Pour la laisser en mille morceaux sans qu'aucun ne puisse être recollé à l'identique.
□□□
hello, il reste donc 2 chapitres avant l'épilogue + le bonus, qui ne seront pas postés aux jours habituels puisque je veux terminer la fiction avant 2023 !
<3 <3
-alcools
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