c h a p i t r e t r o i s

□ SUJET SENSIBLE : drogue, suicide □

LE TEMPS ÉTAIT PLUVIEUX sur Paris, malgré ce début de mois de septembre. Arrivés en plein cœur de la capitale, Amalia avait dû porter ses cartons jusqu'au dernier étage -le cinquième- sans ascenseur. Heureusement, Charles l'avait gentiment aidé et avait d'ailleurs fait les trois quarts du travail pour elle. Il était maintenant temps pour les deux anciens inconnus de se séparer.

La brune resta gentiment accoudée contre la porte de son immeuble. Charles l'observa quelques instants. Ses cheveux lisses étaient attachés avec un simple crayon noir, et elle portait un énorme pull gris avec un jogging de la même couleur. Des cernes bleutées étaient creusées sous ses yeux, mais elle continuait malgré tout de sourire.

- C'était un plaisir de t'avoir rencontré, même si le contexte était plutôt bizarre. Mais j'ai passé l'une des meilleures soirées de ma vie à tes côtés.

- C'est gentil, j'ai passé une très bonne soirée aussi. Bonne chance pour ton téléphone au fait.

- Je vais m'en sortir t'inquiètes.

- Attends.

Le brun prit le crayon dans les cheveux de Amalia qui le regardait, surprise, alors qu'il prit son bras pour y noter son numéro de téléphone. La jeune femme s'attendait à tout, sauf à ça. Ses joues étaient désormais rouges, voire cramoisies, alors qu'elle fixait les chiffres gravés sur son bras gauche.

- C'est pour quand tu auras ton nouveau téléphone. Achètes-en un vite ! Salut Amalia.

- Au-au-revoir Charles...

La brune observa le pilote de formule un rentrer dans sa voiture et quitter la place juste devant son immeuble parisien. Cette journée hors du temps était à présent terminée, et Amalia devait maintenant revenir à sa sombre réalité. Son sourire se transforma en grimace, et des larmes vinrent se poser, inexorablement, sur ses joues encore rosées par les actes de Charles.

***

En reniflant grossièrement, elle retourna dans son petit appartement et appela le patron de son restaurant afin de la mettre en arrêt.

Après quelques explications, le patron accepta avec toute la bonté du monde, et il se promit même de venir la visiter pour prendre de ses nouvelles, ce qui lui fit chaud au cœur. Les employés de ce restaurant étaient tous plus gentils et généreux les uns des autres, et cela se prouvait encore et encore.

Amalia avait encore toute l'après-midi devant elle, alors elle décida, avec ses économies, de se payer un autre téléphone. Bien évidemment, elle n'avait pas l'argent pour s'acheter le dernier iphone, alors la jeune femme en prix un, avec un rapport qualité/prix plutôt correct, et ne dépassant pas deux-cent cinquante euros. La brune en était fière. Il lui restait encore un peu d'argent, mais elle allait devoir sauter quelques douches et quelques repas afin de pouvoir finir le mois correctement.

Après avoir reconfiguré son téléphone et récupéré sa carte sim sur celui cassé, Amalia sortit à la nuit tombée dans les rues parisiennes, capuche sur la tête. Tout le monde savait que malheureusement, pour les femmes -également les hommes, même si le pourcentage est moins élevé-, sortir dans Paris la nuit était plutôt dangereux. À quelques rues d'ici, elle entra dans un immeuble après avoir tapé le code. Ce chemin, elle le connaissait par cœur. Troisième étage, porte de droite.

Elle entra sans toquer et ses narines furent remplies d'une odeur qu'elle ne connaissait que trop bien. Amalia retrouva un de ses amis, nommé Enzo, qui était allongé sur son canapé à compter quelques liasses de billet.

- Amalia, quelle surprise.

- J'ai besoin d'autres médicaments.

- Tranquille, je pense pas qu'on soit si pressé. Viens fumer avec moi, fit Enzo en tapotant la place à ses côtés sur le canapé.

La brune souffla avant de s'asseoir, et de fumer le joint que lui tendait son ami. Depuis son arrivée dans la capitale quelques temps auparavant, Amalia avait fait beaucoup de rencontres. Dont ce Enzo. Très rapidement, elle avait été mise au courant de ce qu'il trafiquait en douce en plus de ses études, cependant jamais elle ne s'y était mêlée, jusqu'au déclic.

Malgré le fait d'avoir eu sa licence en staps, la jeune femme avait très mal vécu son année et son médecin lui avait prescrit des amphétamines. Ces substances sont considérées comme des stupéfiants, dont l'ordonnance se renouvelle toutes les quatre semaines. Néanmoins, la dose que lui procurait le médecin n'était jamais assez. Il lui en fallait plus.

Ces amphétamines lui permettent d'être énergique, de ne plus avoir besoin de beaucoup de sommeil afin d'être en forme, d'être productive... en d'autres termes, tout ce dont elle rêvait. C'est pourquoi elle s'est très rapidement tournée vers son ami Enzo, qui n'avait pas hésité une seule seconde à lui refiler des stupéfiants contre de l'argent.

Après avoir fumé, elle sortit de sa poche quelques billets.

- Je suis endettée ?

- Avec cette somme ça devrait aller. T'auras aucun soucis. Il lui tendit un sac avec tout ce dont elle avait besoin.

- Merci beaucoup.

Elle l'étreignit doucement avant de s'en aller. Même si cette amitié était toxique, dans tous les sens du terme, ces deux-là s'aimaient énormément. Évidemment, comme genre de fréquentations, Amalia méritait mieux. Mais elle l'adorait, voilà tout. En rentrant chez elle, elle découvrit tout ce qui était à sa disposition. Avec tout cela, Amalia pourrait tenir sûrement deux bons mois. Au moins, elle avait de la marge. Surtout avec ses doses prescrits par son médecin.

Eh oui... chacun possède ses secrets. Et il ne sont pas tous bons à être révélés.

***

Dans la pénombre de sa chambre, au beau milieu de la nuit, Charles se réveilla en sursaut dans un hurlement de terreur, ayant certainement réveillé ses voisins logeant dans les autres chambres de l'hôtel dans lequel il avait réservé. Couvert de sueur, il se recroquevillait sur lui-même, les membres tremblants.

Toutes les nuits, le même cauchemar se répétait. Sans discontinuer, il n'avait littéralement pas de fin. Les scènes se répétaient dans sa tête comme un mauvais film. Ces souvenirs le firent pleurer, instantanément. Il n'en pouvait plus de tout ça.

Que son cœur et son âme pleurent tous les jours et toutes les nuits ses proches défunts. Jules, son père, Anthoine... en l'espace de quatre ans, il avait tant perdu. Peut-être était-il le chat noir finalement. Du moins, c'était ce qu'il pensait, oui. Être la personne ayant causé tout cela. Penser être le problème. C'était ce que Charles pensait à chaque instant, cette sensation étrange de se rejeter la faute, de se sentir coupable du départ de certaines personne alors qu'en fait, ils étaient destinés à laisser leur place sur terre.

Mais Charles ne le comprenait pas. Et chaque nuit, il rêvait -rêve qui se transformait en fait en cauchemar- du décès de ces trois personnes, tellement importantes dans sa vie. Jules était son parrain sportif. Il l'accompagnait depuis quelques années avant de décéder suite à son tragique accident au Japon, à Suzuka en deux-mille quatorze -d'abord dans le coma, puis décédé quelques mois plus tard en deux-mille quinze-. Il peinait tellement à s'en remettre. La formule un était cruelle. Absolument cruelle.

Deux ans plus tard, c'était au tour de son père, Hervé Leclerc, de mourir des suites de ses états de santé plus qu'instables. Pilote de formule trois dans les années quatre-vingt dix, lui et sa femme avaient donné naissance à de magnifiques enfants, dont le prodige Charles Leclerc qui avait un avenir plus que prometteur en formule un. Lui qui souhaitait tant réaliser le rêve de son père. Il était tout pour lui, avant que la mort ne l'emporte avant même qu'il n'atteigne la plus haute marche du podium.

Jamais il n'a vu de son vivant son fils atteindre ses rêves, les toucher, les frôler du bout des doigts. Et ce vide, en Charles, le freinait malgré tout dans tout ce qu'il faisait. Puisqu'il ne l'avait jamais vu réussir.

Enfin, deux ans après, ce fut le tour de son meilleur ami ; Anthoine. Il était un jeune pilote venant tout juste de signer en formule deux. Charles, lui et un autre pilote, Pierre Gasly, formaient un trio depuis leur plus jeune âge. Ils avaient les mêmes rêves, la même passion qui les animait. Ils vivaient pour se dire, qu'un jour, ils allaient se combattre tous les trois sur un circuit de formule un. Malheureusement, à Spa francorchamps, il y a une dizaine de jours, un gros accident a eu lieu.

Le jeune homme a succombé à ses douloureuses blessures, brisant tout espoir du trio de combattre un jour tous ensemble. Depuis, c'est la descente aux enfers pour Charles, qui ne parvenait pour le moment pas à se relever du décès de son ami. La culpabilité le rongeait amèrement, tout comme le chagrin et les remords.

Les larmes roulaient abondamment sur ses joues et son corps était secoué de sanglots. Il peinait à se lever afin de passer de l'eau sur son visage pour se remettre les idées au clair. Mais ses pensées virèrent soudainement au noir. Déconnecté de la réalité, il ne s'entendait même plus pleurer. Observant les objets sur son lavabo, il eut des pensées plus que néfastes en cet instant précis. Autant en finir non ? Les rejoindre une bonne fois pour toute, être en paix.

C'était tout ce qu'il désirait. La paix et la sérénité. Ses yeux dérivèrent sur le rasoir posé innocemment sur le rebord du lavabo. D'un geste monotone, il le prit en main, comme étant d'un seul coup, totalement émerveillé. Son regard faisait des allers-retours entre l'objet et ses veines. Alors qu'il allait commettre l'irréparable, son téléphone vibra. Pourquoi recevait-il une notification au beau milieu de la nuit ?

Ce petit bruit suffit au brun pour se reconnecter. En fronçant les sourcils, il reposa prudemment le rasoir sur son lavabo avant de retourner dans sa chambre et de prendre son téléphone. Il avait un nouveau message. En découvrant l'auteur, un sourire prit place sur son visage épuisé. Il essuya ses larme et renifla en lisant attentivement le message.

- Hey Charles ! C'est Amalia, désolée de t'envoyer un message si tard, mais j'ai eu mon nouveau téléphone. Sois fier d'être le premier à inaugurer mes contacts :)

Ce message anodin lui fit chaud au cœur. En sortant sur son balcon, il observa Paris illuminé par la Tour Eiffel, puis se décida à répondre à la jeune femme. La conversation dura jusqu'au bout de la nuit, et se fit naturellement. Le brun était soulagé d'avoir pu passer le reste de sa nuit paisiblement.

Dormir était un calvaire pour lui. Pourtant, personne n'était au courant dans son entourage, tout le monde pensait qu'il allait pouvoir de nouveau passer au-dessus de cette énième épreuve. Alors, pour ne pas décevoir, il n'en parle à personne. Pourquoi ?

Parce que chacun possède ses secrets. Et qu'ils ne sont pas tous bons à être révélés.

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Bonsoir, j'espère que tout va bien ! Voici le chapitre trois, où l'on découvre les premiers secrets des personnages. J'espère que cela vous plaît.
Dans cette fiction, Charles Anthoine et Pierre sont réellement meilleurs amis -dans la vraie vie, c'est surtout les deux derniers qui sont proches-. Mais j'ai voulu amplifier un mal-être.

D'ailleurs, j'ai enfin lu la lettre de Pierre adressée à Anthoine, elle est terriblement émouvante...

Ensuite, j'ai tout de même mis le sujet sensible du suicide. C'était subliminal, mais compréhensible donc je ne voulais blesser personne :)

Bon revenons-en aux faits : en espérant que cela vous plaise,

-alcools

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