𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟕
— A M E A S S E R V I E —
武士は食わねど高楊枝
• S 0 2 E 1 2 •
LE SILENCE EST reposant. Seules nos respirations résonnent dans l'espace confiné. Ce qui n'était que embarras s'est doucement mué en une chaleur légère et dépourvue de mots. Presque apaisante.
Assise sur un banc de métal, dans le même endroit que tantôt, là où ma voix a craqué et j'ai achevé d'expier ma rage contre Eraser Head, dans cet endroit où celui-ci a, à son tour, haussé légèrement le ton et imposé son point de vue, la différence entre l'ambiance de maintenant et celle de tout à l'heure est saisissante. Mais j'en fais abstraction.
Il est juste à côté de moi sur la surface froide. Ou plutôt, en face. Nos jambes sont dispersées de chaque côté du siège et je laisse mes muscles se raidir en le voyant approcher la main vers moi mais ne dis rien. Une douleur sourde nait dans ma poitrine pourtant, je fais le choix de conserver le silence.
Elle n'est pas encore très intense. Et même si je sais qu'elle va amplifier quand Eraser Head va me toucher, même si j'ai compris ce qu'il comptait faire, que je suis tout à fait consciente que ses doigts s'apprêtent à saisir mon poignet, je n'oppose aucune forme de résistance.
Ma colère est vive dans ma poitrine. Je n'oublie rien du corps de Han chutant de ce toit, de mes mains tendues pour créer un pont de pierre le réceptionnant et de mes pouvoirs effacés par Eraser Head. Jamais mon cœur ne se remettra de ce que ce héros m'a faite subir, endurer.
Deux années de prison. Vingt-quatre mois dans une cellule à ressasser chaque seconde de chaque minute de chaque heure de cette maudite soirée. Des nuits entières écoulées à frapper un matelas encrassé, l'imaginant à sa place, des larmes roulant sur mes joues.
Cet homme. Là. Juste devant moi. Assis sur ce même banc. Sa main s'approchant de la mienne.
Il m'a poussée à tuer mon mari.
Mon cœur rate un battement. Mon souffle se coupe. Mes yeux s'écarquillent. Non. Comment ai-je pu délaisser si facilement une telle part de vérité ?
Il m'a poussée à tuer mon mari.
La douleur dans ma poitrine s'intensifie mais je l'ignore. Elle est justifiée. Un rappel, une piqure, un guide afin de m'orienter dans le droit chemin. Une alliance éternelle à mon défunt époux. Une promesse de lui rester fidèle, même veuve de lui.
Mon menton tremble. Je sens les vapeurs de l'amertume monter en moi. Je me dégoute.
Eraser Head m'a menée à tuer mon mari. Il m'a condamnée à porter les pires des chaines.
Et, sous prétexte que ses élèves ont l'air sympathiques, que je trouve en eux certains points communs avec moi, qu'une empathie certaine nait dans ma poitrine et que ce héros de pacotille assassin sous mes yeux fait mine de s'intéresser à moi, ai-je vraiment faillit à ma tâche ? Rompu une si belle promesse après deux simples jours de liberté ?
Mon cœur rate un battement. Je n'ai pas fraternisé avec l'ennemi dans le sens propre du terme. Je suis distante avec les élèves, me compare aux femmes pour devenir le meilleur de moi-même et n'adresse que très rarement la parole à la gent masculine. Comme Han et sa famille me l'ont enseignée. Oui, je n'ai pas encore atteint un point de non-retour.
Mais cette main qui se rapproche de la mienne et que je n'arrête pas, cette connexion qui est sur le point de se créer...
Tout cela insulterait sa mémoire.
— NON ! je lâche précipitamment, me levant brutalement du banc.
Mes genoux se font tremblants et manquent de rompre sous mon poids, vestige des vives brûlures éparpillées sur mes jambes. Le noiraud me suit du regard, sa main en suspend dans les airs tandis que l'autre tient l'aguille aseptisée.
Ses cheveux ramenés en queue de cheval, il a un air plus éclairé qui me rappelle notre tête-à-tête dans les douches. Une dense chaleur me prend et ma douleur au cœur s'intensifie.
Je pose ma main sur celui-ci, reconnaissante envers cette souffrance aigue qui me perce et me guide sur le chemin de la fidélité.
— Je peux comprendre que vous ayez peur des aiguilles, dit-il, mais il va falloir vous recoudre si vous ne voulez pas que ça s'inf...
— Je me fiche des aiguilles ou mêmes des infections, je crache en retour, reculant à petits pas tandis que le sang continue de couler le long de ma peau.
— Si c'est la douleur, vous pouvez mordre dans un...
— Je ne veux pas que vous me touchiez, je le coupe ardemment.
Ces derniers jours, j'ai trop fauté. Je ne peux donc pas le laisser franchir cette étape-là. Il me faut sauver les restes de ma fidélité et de mon honneur.
Mon cœur se serre, encore endolori. Je suis tellement désolée, Han.
Les sourcils d'Eraser Head, à mes mots, s'haussent légèrement. Ses lèvres demeurent statiques mais la surprise est visible sur son visage. Il ne s'attendait sûrement pas à une telle remarque.
— Je vais appeler une femme pour s'occuper de cela, me déclare-t-il vraiment.
Je me maudis d'apprécier sa réponse. Car une voix souffle dans mon esprit que jamais Han n'aurait respecté une telle demande de ma part. Il aurait éclaté d'un rire assorti de quelques remarques sarcastiques et humiliantes et, après avoir essuyé plusieurs refus de ma part, aurait lancé la trousse de soin à mes pieds et m'aurait ordonné de me soigner seule en ajoutant sûrement que je ne mérite pas d'aide, de toute façon.
Écœurante est la façon dont je me surprends à songer que je préfère la réaction d'Eraser Head à celle d'Han.
Mais que dis-je ? Non. Han était juste un peu maladroit, ne savait pas comment s'exprimer. Il y a deux heures, il m'a déclaré qu'il m'aimait. Je l'ai toujours su, au fond, mais j'en ai maintenant la preuve. Et, même si cela ne soulève pas autant de papillons dans mon ventre que ce à quoi je m'attendais, je suis tout de même particulièrement heureuse d'avoir eu une telle conversation avec lui.
Alors non, sur aucun plan je ne peux me dire que je préfère quelque chose provenant de l'usurpateur qu'est Eraser Head à mon mari.
Car ce gars-là n'est sûrement pas un héros.
Et, comme par besoin de marquer le coût, de cracher quelque chose d'intentionnellement méchant, histoire de bien lui faire comprendre — mais aussi à moi-même — j'ouvre les lèvres et rétorque seulement :
— Femme, homme, je m'en fiche. Il est hors de question que vos mains salies par le sang de mon mari ne me touchent.
Il ne semble étonnamment pas surpris par ma réponse. Se contentant d'un soupir, à peine perceptible sous ses bandages, il repose les outils de soin qu'il tenait sur le banc, se contentant de me regarder impassiblement.
Mais je le sais, je le sens, à la façon qu'il a de prendre soudainement une profonde inspiration, de poser ses mains sur la surface de métal, de chaque côté de ses cuisses et d'ancrer ses pupilles dans les miennes : il ne va pas y aller de main morte.
— Je n'ai pas tué votre mari.
Je secoue la tête, prête à nier.
— Vous avez poussé votre mari du haut d'un toit, mademoiselle (T/N)..., hausse-t-il légèrement le ton.
— Madame Halmes, je le corrige.
— (T/N) ! crit-il.
Mes yeux s'écarquillent légèrement, surprise de l'entendre insister avec tant de véhémence sur mon nom de jeune fille, effaçant mon mariage avec Han. Et, même si une douleur s'éveille dans ma poitrine, je ne sais pas réellement pour quelle raison je ne m'offusque pas de son intonation.
Pourquoi ce nom, pourtant le mien, me semble si étranger et familier à la fois ?
— Votre mari vous poussait à commettre des crimes, je vous ai poursuivi et vous ai coincé sur un toit. Vous avez poussé votre époux de celui-ci pour le sauver en le réceptionnant avec un pont de sable afin de lui permettre de s'échapper et il s'est passé ce qu'il s'est passé. Mais au lieu de vous concentrer sur ça, reprend-t-il d'une voix calme, pourquoi ne vous demandez-vous pas pourquoi, dans cette situation, vous avez préférez sauver sa liberté que la vôtre ? Lui permettre, à lui, de s'en aller et pas à vous ?
— Parce que je préfère me demander pour quelle raison vous avez effacé mon pouvoir quand j'essayais de créée ce pont, pourquoi vous m'avez poussée à tuer mon époux, pourquoi lorsque j'ai sauté à sa suite, vous m'avez sauvé avec votre maudite écharpe et n'avez pas fait de même pour lui ! je cingle de ma voix acerbe.
Mes yeux sont brillants lorsqu'ils se posent sur lui. Je veux le faire réagir, expier mes peines, vomir ma douleur.
Mais il n'y semble pas le moins du monde sensible.
— Qu'importe les situations, vous avez toujours mis votre époux en avant, affirme Eraser Head. Et aurais-je tort de dire que la douleur qui vous a traversé lorsque vous avez touché votre blessure à la cuisse n'est pas la première que vous avez ressenti de ce genre ?
Mes yeux, toujours mouillés de larmes et écarquillés, fixent le vide tandis que mon nez s'échauffe, menaçant de couler. Un grand vide se creuse en moi. Car je souhaite lui hurler qu'il a tort, juste parce que c'est lui, parce qu'il m'a pris l'homme que j'aimais.
Mais le souvenir de toutes ces fois où j'ai voulu quitter Han, où ma poitrine est devenue si douloureuse que j'en ai souvent craché du sang me reviennent en tête. A vrai dire, cette souffrance m'a toujours traversée quand je remettais en cause mon mariage avec lui. Comme une punition.
Et le maudit héros face à moi voit clair en quelque chose que je ne comprends pas.
— Je..., je laisse ma phrase en suspens, incapable de poursuivre.
— Vous pensez que votre mari n'avait pas d'alter, je vous dis qu'il en a un et que des théories en parlent depuis plus de deux décennies.
Il se lève, je ne sais pas quoi répondre et le fixe seulement, abasourdie. Malgré les blessures, ma douleur, mes yeux le suivant quand il me rejoint, je n'oppose aucune forme de résistance quand je le vois réduire la distance entre nous.
— Une légende raconte qu'un être capable de se changer en serpent plante ses crocs dans la peau d'humains pour asservir ceux-là à jamais.
Mon cœur rate un battement. Malgré moi, je songe à la cicatrice sur ma cuisse.
— Généralement, ses esclaves sont convaincus de l'aimer profondément mais, s'ils commencent à s'éveiller, à s'émanciper, le venin de ses crocs projette une douleur si grande dans leurs corps qu'ils en oublient la raison de leur colère contre le Serpent, poursuit-il.
Il est maintenant debout à un mètre de moi. Immobile.
— Et je pense que votre mari vous a simplement réduite à l'état d'esclave et que c'est la raison pour laquelle, là où n'importe qui aurait fait ses bagages, vous persistez à lui être fidèle et le défendre.
Malgré les bandages, je devine l'austérité sur ses traits quand il déclare simplement :
— Vous êtes l'Âme Asservie.
ꕥ
Assise sur le banc des vestiaires, je fulmine. Ma peau me tiraille de partout, à vif, et mes dents serrer ne peuvent rien contre la douleur. Les brûlures me cuisent, jalonnant mon corps affaibli. Ma chair me donne la sensation de n'être que des bandes de films plastiques. Jamais je n'ai connu telles souffrances.
Seulement celles-ci sont à des lieux de mes pensées, présentement. Car je ne me remets toujours pas de ce qu'Eraser Head m'a dit, il y a une trentaine de minutes. Des cinq mots qu'il a murmuré sous mes yeux effarés.
« Vous êtes l'Âme Asservie. »
Je suis encore furieuse et ce, même s'il a quitté la pièce dès lors que l'une de mes veines a commencé à palpiter sur mon front.
Sérieusement, à qui croit-il avoir à faire ? Une simple débutante ? Une banale criminelle sans la moindre distinction ?
Evidemment que je connais la légende de l'Âme Asservie et du Venin Asservisseur mais de là à penser que je suis la première... Il serait mieux d'insulter directement mon intelligence, pendant qu'il y ait. Car insinuer que je suis assez faible pour me laisser enchainer mentalement à un homme n'est qu'une critique de mes capacités réflectives et physiques.
— Je protégeais Han, je fulmine dans ma barbe, c'était un mec sans alter et dépendant de moi pour survivre, il serait mort sans mon aide. Alors, moi, soumise à lui ?
Je maugrée à voix basse, consciente que personne ne m'entend dans ce vestiaire vide. Et, profondément, je sais aussi tout à fait que nous n'étions pas sur un rapport d'égalité. Mais cela me ferait du mal de l'admettre.
Car, bien que ces derniers jours, certains aspects du comportement de mon époux me soient apparus comme particuliers et pouvant laisser matière à réflexion, que je sais qu'il a pu agir d'une façon possiblement qualifiable d'humiliante, je refuse de me laisser appeler « asservie ». Je m'en serais rendue compte si cela avait réellement été le cas.
Je suis une femme gorgée d'un alter qu'elle a appris à maitriser dans sa quasi-totalité. Me qualifiée d'asservie et remettre en cause ma puissance est de la pure condescendance.
— Quel abruti, je maugrée.
Et dire que, pour la première fois depuis mon retour à la vie active, je me suis laissée bernée par l'idée que je pourrais peut-être m'intégrer auprès des professeurs. Bon sang, qu'avais-je dans la tête ? Je fulmine.
Eraser Head a tué mon mari. Il m'a empêché de lui sauver la vie au moment où son corps a basculé de ce toit.
Me poussant, non seulement à l'homicide, mais aussi à contempler la faucheuse percuter son corps.
Jamais je n'oublierai mes mouvements circulaires pour créer un pont de pierre. Jamais je n'oublierai la surprise en voyant que rien n'émergeait du sol. Jamais je n'oublierai mon corps se tournant vers l'homme dans mon dos. Jamais je n'oublierai le regard rougeâtre d'Eraser Head derrière ses lunettes tandis qu'il annulait mon pouvoir. Jamais je n'oublierai mon hurlement de rage en réalisant ce qu'il venait de faire. Jamais je n'oublierai le moment où je me suis élancée du toit, sautant à mon tour.
Car, si Han devait mourir, il me semblait évident que ma mission était de le rejoindre.
Alors, lorsque, mon cœur remontant le long de ma gorge, le vent plaquant les tissus de mes vêtements sur moi, mon corps rejoignant celui de mon époux qui continuait de tomber, quelques mètres plus bas, l'écharpe d'Eraser Head s'est enroulée autour de mes membres et m'a figée en plein vol, j'ai senti mon cœur se briser en moi.
Là, suspendue dans les airs à cause de ces liens grisâtres, immobilisée à quelques étages du sol, j'ai vu avec horreur la dépouille d'Han s'écraser au sol dans une marre de sang, au milieu d'une foule curieuse amassée là.
Et, quand Eraser Head m'a remontée jusqu'au toit, qu'il a enroulé ses bras autour de mon buste pour m'empêcher de sauter à nouveau, qu'il a essayé de me murmurer des paroles à l'oreille afin de m'apaiser, j'ai réalisé.
Cet homme venait de me faire tuer mon mari. A jamais je le haïrai pour le fardeau qu'il me poussait à porter.
Une larme roule sur ma joue à ce souvenir.
La vision du cadavre, démembré par l'impact, de mon mari ne me quitterait jamais. Et celle de ma cellule — car j'ai été incarcérée pour son meurtre sans qu'Eraser Head, pour sa part, ne subisse le moindre châtiment — me donnait la nausée.
Soit, j'ai poussé Han du haut de ce toit. Mais j'avais ferme intention de la sauver et, sans l'intervention de cette enflure, je serais aujourd'hui encore l'épouse comblée de mon amant. Non une veuve.
Alors pourquoi diable ai-je été condamnée quand lui est demeuré libre ? Sans craindre la moindre sanction.
Ma poitrine se compresse. Je sais que nous n'avons jamais été des modèles de citoyenneté, organisant quelques petits crimes à droite et à gauche pour vivre. Mais Han n'avait pas d'alter, il était innocent, incapable d'agir dans ce monde gorgé de super-héros.
Jamais il n'aurait représenté un danger pour quiconque. Il ne méritait pas de mourir.
— (T/P) ?
Je redresse vivement la tête, surprise par cette soudaine interruption. Et, ouvrant la bouche pour lancer un sujet de conversation quelconque, espérant que le nouveau venu n'est rien vu de la larme sur ma joue à l'instant et tentant de le distraire, je me fige soudainement.
Mes yeux s'écarquillent en se posant sur le visage de l'homme devant moi. Mon souffle se fige brièvement dans ma poitrine.
Deux yeux bruns surplombés de fins sourcils teints en blond et une barbe naissante de quelques jours. Autour d'une mâchoire carrée et affutée s'étend une toison dorée, de longs cheveux eux aussi colorés, soulignant l'aspect élégant et presque majestueux du nouveau venu.
Mon cœur se fige un instant. Je crois halluciner une poignée de secondes.
Depuis combien de temps n'ai-je pas vu cet homme ? Avant mon mariage avec Han, sans nul doute. Il y a plusieurs années.
— Edward ? j'appelle, désarçonnée de le voir planté dans l'encadrement de la porte.
Il ne répond pas tout de suite, ses lèvres muées en un « o » surpris et ses sourcils légèrement haussés. Visiblement, après tant d'années l'un loin de l'autre, il ne s'attendait pas non plus à tomber de nouveau sur moi.
Quelques instants passent tandis que, habillé d'un uniforme bleu marine d'ambulancier, une boite blanche sertie d'une croix rouge à la main, il n'exécute le moindre geste.
Puis, après ce court laps de temps, il brise enfin le silence d'une voix légèrement enrouée :
— Tu es brûlée donc on fait appel à mon alter pour ce genre d'intervention.
J'acquiesce légèrement. Cela ne me surprend guère. Malgré moi, une dense joie me prend à la vision de cet homme. Il m'a affreusement manqué. Lui, mais aussi Dan et Bosuard, nos deux autres amis avec qui j'ai souvenir d'avoir passé d'excellentes journées, par le passé.
J'avoue être soulagée. Le pouvoir d'Edward étant la reproduction organique — il est capable de produire une copie parfaite et fonctionnelle d'organe ou même de plante — il va pouvoir récrée une peau neuve sur celle endommagée par les brûlures. Tout comme, il y a quelques années, quand un de ses collègues a eu besoin d'une greffe de poumon, il a contourné le protocole et lui en a donné un.
Il a été radié de l'ordre des médecins pour une telle faute professionnelle mais gardé en tant qu'ambulancier.
Jamais je ne pardonnerai à l'hôpital de l'avoir écarté de son métier de rêve, un emploi pour lequel il était naturellement talentueux — qu'il s'agisse de son alter ou de ses capacités naturels — sous prétexte qu'il avait contourné les règles. Car, même si cela était une implication personnelle, que rien ne disait que l'organe qu'il avait créé serait viable dans les années à venir, le fait était qu'il avait aidé son collègue.
Seulement, les seules greffes qu'il n'ait jamais été autorisé à exécuter sont celles d'os et de peau. Car s'il se permettait de créer un rein et que celui-ci lâchait au bout d'une semaine, l'hôpital subirait des poursuites pour avoir « ouvert inutilement » un patient.
— T'y es pas allée de main morte, souligne-t-il en s'approchant. Combien de fois je vais devoir te répéter de pas jouer les grosses dures, surtout avec les connards ?
Malgré moi, un rictus étira mes lèvres en voyant avec quel naturel il venait d'entrer dans la salle et s'asseyait maintenant à côté de ma personne, sur le banc de métal.
— Endeavor est un con, aller l'affronter c'est pas très malin, me rappelle-t-il en posant la boite à côté de lui, saisissant délicatement l'un de mes bras.
Un frisson me parcourt dès lors que ses doigts rentrent en contact avec ma peau. Ma chair à vif me fait mal, un simple contact avec l'air est douloureux alors, avec des mains non désinfectées, c'est encore pire.
La sensation qu'on vient de jeter du sel sur une de mes plaies me saisit le poignet et je retiens ma respiration, tentant d'affronter la douleur.
— Putain..., je lâche entre mes dents serrées.
— La douleur est normale, répond le faux-blond sans s'alarmer plus que cela de mes grimaces. L'autre connard t'a quand même bien amochée donc je vais avoir besoin d'un bout de temps pour te soigner intégralement. Et, même si je vais copier certaines de tes cellules pour récréer une peau intacte, je vais surtout régénérer la majorité d'entre elles, ce qui va être particulièrement fatiguant.
— Regénérer ? je demande, étonnée. Je croyais que ton alter n'était que de la copie.
— Tout comme le tien ne consistait qu'à manipuler du sable et te permet maintenant de créer du ciment, du verre et de la pierre, le mien a évolué, explique-t-il simplement.
J'acquiesce, tout de même surprise. En l'espace de quelques années seulement, Edward a fait d'étonnants progrès dans la maitrise de son alter.
Celui-ci étant délicat, je me souviens des longs mois passés à ses côtés à essayer de lui montrer comment contrôler son pouvoir, vainement. Les alters les plus intéressants sont souvent les plus compliqués à appréhender. Et le sien lui a fait défaut un nombre incalculable de fois.
Je me souviens encore du jour où, voulant réparer un bras strié d'une plaie béante, il a essayé de faire pousser de la peau à la place du trou gorgé de sang et que son patient avait fini avec une main sur le coude, à la place de la blessure.
Si Dan et moi avions cru nous pisser dessus de rire, à l'époque, je sais qu'Edward n'a jamais été aussi embarrassé.
Mais, aujourd'hui, je ne crains rien. Je sais qu'il est doué et maitrise son pouvoir. J'ai confiance en lui.
— Tu vas le faire maintenant ? je demande.
— Oui, répond-t-il simplement.
J'acquiesce. Il fouille dans sa trousse et en sort une bande noire plastifiée.
Légèrement surprise, je hausse un sourcil devant l'objet.
— Pour cacher tes seins. Tu vas devoir te mettre en culotte si ça ne te gêne pas. Cela me facilitera les soins.
J'opine de la tête, tout de même embarrassée. Edward n'est pas le genre à abuser de son statut et, étant donné l'étendu de mes brulures, je sais que cela sera plus facile et rapide pour lui de tout traiter en une seule fois et qu'il lui faut regarder toutes mes plaies visibles pour cela.
Mais une douleur me prend au niveau du cœur en songeant à ce que Han dirait si je me retrouvais dans la pièce, à moitié nue, avec un autre homme que lui.
Le faux-blond doit remarquer mon air gêné car, saisissant ma main et la caressant d'un geste tendre, il déclare simplement, me regardant droit dans les yeux :
— Ecoute, on peut y aller pas à pas si tu le préfère, traiter une zone à la fois et te découvrir d'un membre à chaque fois. Mais je dois te prévenir qu'il y a des chances que le résultat ne soit pas uniforme et lisse même si je ferais du mieux que possible, murmure-t-il doucement. Je ne veux pas te mettre mal à l'aise, (T/P).
Je souris légèrement, la gorge nouée. Non, bien sûr, je sais qu'il ne veut pas me gêner. Je suis aussi consciente du fait qu'il doit à chaque fois utiliser son pouvoir dix minutes et que, s'il traite tout en une fois, cela ne durera que ce laps de temps alors que, s'il découpe chaque soin sur chaque membre, la séance prendra sans nul doute plus d'une heure.
Il me fait une fleur car il ne dispose pas de tout ce temps, il a d'autres patients à aller voir.
— Non, ne t'inquiètes pas, je réponds simplement en me levant, ignorant les tiraillements de mes brûlures.
Pour toute réponse, il me sourie simplement avant de se lever, me montrant le dos et fermant la porte.
— Tu as besoin que je sorte ? demande-t-il tandis qu'il reste de face à l'entrée, s'empêchant ainsi de me voir, même pas inadvertance.
— Non, merci.
Je retire rapidement mon haut ainsi que mon bas avant de coller la bande sur mes seins afin de les cacher. Me voilà maintenant, en culotte et me tétons dissimulés derrière l'objet, frigorifiée et tiraillée à divers endroits par ces douloureuses brûlures.
Un petit effort, cela sera bientôt fini.
— C'est bon, je lance.
— Bien, rétorque-t-il en se tournant.
Aussitôt face à moi, son regard neutre et professionnel tombe sur mes jambes avant de remonter à mon ventre, inspectant soigneusement chaque plaie afin de convenir de la meilleure façon de déployer son alter autour de moi. Je frissonne.
L'expérience est pénible. Surtout après tant d'années sans se voir, Edward et moi, tandis que Han n'a pas manqué une occasion, en me voyant dénudée, de me faire savoir qu'il n'appréciait pas mon corps.
Mais je sais que les pensées du faux-blond sont à dix mille lieux d'un jugement esthétique et qu'il voit d'abord une peau blessée avant de regarder le corps d'une personne dans un appareil relativement simple. Celui que j'ai devant les yeux est le médecin, non l'homme traversé de désir.
Il se fiche de ma silhouette et, dans quelques instants d'ailleurs, quand il aura commencé à exercer son pouvoir, celle-ci ne sera plus visible.
Seulement je crois que les remarques de mon époux, au cours des dernières années, ont eu plus d'effets sur moi que ce que je croyais.
— Tu peux te tourner, s'il-te-plaît ?
J'obtempère. Mais il n'y a aucune blessure au niveau de mon dos donc, après une poignée de secondes seulement, il me demande :
— Il y a-t-il des plaies au niveau des endroits cachés ?
— Non, je réponds simplement.
— Bien.
Je lui fais de nouveau face. Il a attaché ses cheveux en un chignon lâche et remonté ses manches. Après un rapide clin d'œil réconfortant, il lève les mains à hauteur de de son visage, ses paumes tournées en ma direction, et lâche simplement :
— Tu connais la procédure, les yeux fermés.
J'obtempère aussitôt. La lumière produite par son pouvoir est tel qu'il vaut mieux garder les paupières closes un petit moment si l'on souhaite éviter d'être aveuglé durant de longues heures après l'intervention.
Je prends une profonde inspiration.
Aussitôt, derrière l'écran noir de mon regard fermé, je perçois une intense chaleur. Comme un souffle d'air chaud, une masse légère vient entourer mon corps immédiatement, apaisant la moindre de mes douleurs en m'enfermant dans un cocon délicat.
Mes muscles se détendent un à un, ma respiration se fait plus régulière, je me sens revigorée.
Quelques instants s'écoulent avant que, derrière mes paupières closes, je commence à percevoir une lumière naissante doucement, signe que le processus de guérison va débuter. Dans quelques minutes, j'aurais un corps neuf, intégralement soigné et pansé.
Puis, une fois habillée, je devrais me présenter devant les professeurs du lycée Yuei qui décideront si, oui ou non, je mérité de rester dans cette école.
Mais les chances qu'ils me renvoient en prison sont plus que conséquentes.
La voix d'Edward me tire de mes pensées quand la lumière et la chaleur montent brutalement d'un cran.
— C'est parti.
武士は食わねど高楊枝
4513 mots
bon le rapprochement entre
aizawa et (t/p) est long mais
le côté positif c'est qu'on en
a enfin fini avec l'arc du
championnat :)
le prochain chapitre se
tiendra en même temps
que l'épisode 13 et la
scène de l'opération nom
de code
j'espère que ça vous a
quand même plu, je suis
pas très satisfaite pour
l'instant mais ça va
s'arranger, il fallait finir
la partie du
championnat pour que les
choses s'accélèrent enfin
:)
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