𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟐𝟖















—    A  M  E    A  S  S  E  R  V  I  E    —
















武士は食わねど高楊枝
















— NOUS Y SOMMES enfin.

             La voix d’Aizawa résonne dans mon dos tandis qu’il fait glisser mon fauteuil roulant dans ce qui sera à présent ma nouvelle chambre. Malgré l’alter — ou le pouvoir, aux vus des dernières révélations — d’Edward, celui-ci m’a préconisé de minimiser la marche durant un certain temps. Alors naturellement, le professeur m’a dégoté un fauteuil roulant.

             L’espace est assez agréable, ici. Le rez-de-chaussée fait office de salle commune tandis que les étages sont occupés par des chambres. J’ai d’abord cru que nous dormirions avec les autres professeurs mais les directives sont claires : nous devons pouvoir intervenir le plus vite possible en pleine nuit.

             Alors, dès demain quand ils poseront leurs valises, nous vivrons en leur compagnie sans arrêt.

— Oh…, je réalise en observant la chambre devant moi.

— Elle n’est pas décorée mais si tu veux on peut aller dans une boutique de décoration dès cette après-midi, m’assure-t-il en bloquant mon fauteuil, avançant dans la pièce pour y déposer mon sac.

             Vide. Entièrement vide. Très large et spacieuse, parée de murs blancs et parquets et seulement traversée d’un matelas avec deux oreillers et une couverture. Etant donné que les élèves ont reçu pour directive de décorer seul leur chambre, je suppose qu’il est normal qu’elle ait cet aspect avant l’emménagement.

             Mais ce n’est pas ce qui me surprend.

— Non, c’est juste que… Tu dors plus dans la même pièce que moi pour me surveiller ? Les élèves sont à côté, pourtant. Il y a un risque.

             Mon ventre se tord tandis que je réalise les phrases que je prononce.

             Aizawa, de son côté, se raidit. Bien que dos à moi, sa queue de cheval me permet de voir sa nuque virer au rouge. Je détourne les yeux, embarrassée.

— Tu es une femme, tu as le droit à un peu d’intimité. Surtout que ton combat contre All for One m’a prouvé de quel côté tu étais réellement, répond-t-il d’une voix bougonne. Je n’ai vraiment pas besoin de te surveiller.

             Mes lèvres se pince. Je ne sais pas réellement pourquoi mais cette annonce me déplaît. Je vais pourtant enfin pouvoir être seule, à l’aise pour dormir comme je l’entends, ronfler, baver ou même avoir une tête odieuse au petit matin.

             Enfin, inutile de me mentir. Même avec lui, je pouvais faire tout cela. Il n’est pas homme à juger les autres.

— Ah…, je lâche simplement. Merci.

— Tu n’as pas l’air très enchantée par cette idée, fait-il remarquer en se tournant vers moi.

             Mes sourcils se froncent et je nie aussitôt.

— Si, si ! Un peu d’intimité, ça va me faire du bien !

             Il acquiesce, m’observant tout de même quelques instants entre ses paupières mi-closes. Puis, se redressant enfin, il rejoint la porte de ma chambre et s’y arrête un instant. Je le regarde faire, tournant mon fauteuil à l’aide d’une main pour lui faire face.

— C’est le dernier jour sans enfant qu’on passe ensemble, t’es sûre que tu veux pas aller faire les magasins ou… Enfin qu’importe ce qui te ferait plaisir ?

             Un sourire étire mes lèvres sans que je ne parvienne à l’empêcher. Sa voix morose et son air agacé tranchent tellement avec la douceur de ses paroles que mon cœur bat à vive allure. Et je peux maintenant apprécier mon estomac se tordant dans mes entrailles sans qu’une vive douleur ne perce mon cœur.

             Secouant la tête de droite à gauche, je refuse.

— J’ai vraiment envie de passer du temps avec toi mais gaspille pas ton argent pour moi, on peut faire autre chose, si tu veux ?

— Je ne gaspille rien. J’aime bien te voir essayer des vêtements, souligne-t-il.

             Ma gorge s’assèche brutalement. Pourquoi des frissons me parcourent-ils ?

— Ah bon ? je répète dans un rire embarrassé. Je croyais que tu… Fin t’avais pas l’air d’être emballé…

— J’aime bien ta présence, répond-t-il simplement.

             Sans même me laisser le temps de dire quoi que ce soit de plus, il jette un coup d’œil à l’extérieur du couloir. Les joues enflammées par son compliment, je ne pipe mot. Se tournant à nouveau en ma direction, il ajoute :

— On peut cuisiner, si tu veux. Ou regarder un film, ou faire les deux en même temps.

— Oui ! je réponds aussitôt, sentant mon estomac gargouiller.

             Ses yeux se plissent et il m’offre un sourire attendri qui aggrave ma tachycardie. Puis, avançant en ma direction, il se place derrière mon fauteuil et en saisit les poignées. Je frissonne à l’idée qu’il soit là, tout près, mon crâne manquant de frôler son torse.

— Alors allons-y. Quelque chose te tente ? demande-t-il.

— Niveau recette ou film ? je réponds tandis que nous franchissons le couloir au sol vert et murs jaunes, jusqu’à l’escalier.

— Les deux. Pour être honnête j’ai envie de sucré mais je te laisse choisir le genre du film.

             Arrivés au sommet de celui-ci, mes entrailles se tordent. A nouveau, nous allons faire ce qui m’a demandé une grande maitrise de moi-même, tout à l’heure. Mon cœur battait si fort et si vite que j’ai bien fini par croire qu’Aizawa n’entendait que lui.

             Cependant il n’a fait aucun commentaire.

— Je peux descendre, tu sais, je dis seulement en le voyant arrêter le fauteuil.

— Laisse-moi m’en occuper, le médecin a dit de ménager ta jambe.

             Un frisson me prend et mon estomac se soulève quand, terminant sa phrase, il pose un genou devant moi. Son visage arrive à hauteur de mon ventre, me laissant voir ses cheveux noirs maintenant brillant noués en une queue-de-cheval, ses yeux bruns encadrés de longs cils ainsi que la cicatrice striant sa pommette.

             Un léger sourire rassurant étire ses lèvres.

— Je ne vais pas te laisser tomber, ne t’en fais pas.

— Ce n’est pas ce qui me pose problème, je réponds en toute hâte, fuyant un contact visuel.

             Mais il retient mon attention en posant sa main sur mon genou. Aussitôt, mes cuisses se serrent dans un réflexe incontrôlable. La honte me cuit, dévorante. Je le regarde à nouveau, tentant de deviner s’il a remarqué mon geste. Mais son visage inexpressif ne me donne aucun indice.

             Je préfère imaginer qu’il croit que je me suis simplement replacée sur le fauteuil.

— Que se passe-t-il ? demande-t-il alors.

             Ma gorge s’assèche et mon entrejambe me démange dès qu’il pose la main sur moi. Encore plus maintenant que le croc a été retiré de ma jambe. Plus rien ne me retient.

— Euh… Je ne veux pas être un poids.

— Mais tu n’en es pas un, assure-t-il. Allez, assez discuté.

             Se redressant, il passe un bras sous mes genoux et l’autre, autour de mon dos. Mon corps quitte le fauteuil tandis que je me retrouve pressée à son torse. Aussitôt, d’épais capitons de chaleur éclosent en moi. Cet homme est profondément machiavélique ou alors il n’a strictement aucune idée du charme qu’il opère sur moi.

             Il commence à dévaler les marches, observant celles-ci précautionneusement afin de minimiser les risques de chute. Quant à moi, lovée contre lui, je tente dé déglutir en inspirant son parfum suave mêlant eau de Cologne et très légère sueur.

— Depuis quand tu te parfumes ? je demande, tentant de changer le sujet de conversation.

             Il ne répond pas, ignorant royalement ma question. Tout d’abord, j’imagine qu’il ne m’a pas entendue. Mais lorsqu’il me dépose sur une chaise qu’il a laissé intentionnellement aux pieds de marche pour moi, je réalise qu’il serait stupide de la poser à nouveau.

             Embarrassée, je le regarde remonter les escaliers pour attraper le fauteuil. Tentant de rattraper ce moment de solitude, je lance après m’être raclée la gorge :

— Pourquoi pas un brownie devant un film de super-héros ?

             Saisissant mon moyen de locomotion, il s’arrête un instant avant de me rejoindre pour acquiescer. Aussitôt, mon cœur se réchauffe.













             J’ai hâte de passer l’après-midi avec lui.








































             Le film est déjà considérablement avancé et nous n’avons pas beaucoup discuté. Se contentant de nous lister mutuellement les ingrédients et gestes à exécuter, nous ne nous égarons pas pour autant.

             Bien qu’être avec lui soit agréable, je m’avoue tout de même déçue par ce moment. Je crois que, maintenant débarrassée du venin, j’aurais aimé avoir le courage de prendre les devants. Mais, aussitôt, une réalité me traverse. Un fait que j’avais occulté de ma mémoire.

             Joke. La petite-amie d’Aizawa.

             Faisant mine de me racler la gorge, je tente d’attirer le regard du noiraud. Il me lance un bref coup d’œil avant de se concentrer à nouveau sur les instructions. Mélangeant avec soin la mixture brune, je décide alors de briser le silence.

— Dis, tu me présenteras Joke un jour ? je demande.

             Il semble surpris, haussant les sourcils en ma direction.

— Pourquoi tu veux la rencontrer ? répond-t-il, visiblement pris de court.

— Bah ça me semble logique…

             Je mords aussitôt ma lèvre inférieure, regrettant mes paroles. La colère qui a animé ses traits, lorsqu’il m’a ordonné de ne plus jamais interférer dans sa vie privée me revient. Je ne suis pas son amie, il ne voudra sans doute pas que je me permettre de demander une telle faveur.

             Cependant, à ma grande surprise, il ne hausse pas le ton ni ne fronce les sourcils mais se content d’un bref mouvement d’épaules.

— Si ça te fait plaisir, cède-t-il.

             Non. Le terme est très mal employé. Rencontrer cette femme que je ne connais même pas mais considère déjà comme une garce est sans nul doute la dernière de mes envies. Mais je suis muée par une étrange curiosité que je ne parviens pas à résonner.

— C’est pas tant du plaisir, je lâche en essayant de paraitre la plus désintéressée possible. Je suis juste curieuse.

— Curieuse ? Je vois pas ce qu’il y a de bien curieux, souligne-t-il en se détachant de la recette de cuisine.

             Je m’efforce de ne pas le regarder, fixant la mixture brune que je touille avec attention, ne voulant rater mon plat. Et surtout, craignant qu’il puisse lire quoi que ce soit dans mes iris.

— Excuses-moi mais il est logique que je me pose des questions, surtout après la conversation qu’on a eu au camp d’entrainement.

— Laquelle ? Je te signale que ça a été étonnamment animé pour la courte période où nous y sommes restés.

— Et bien… Tu sais…, j’hésite, embarrassée.

             Il se redresse, visiblement perplexe.

— Non, je ne sais pas.

             Son ton est ferme. Je devine qu’au contraire, il sait pertinemment de quoi je parle. Mais il veut m’entendre le dire lui-même. Un juron manque de franchir mes lèvres. Quand il s’y met, Aizawa peut être une véritable enflure.

             Me replaçant difficilement sur le fauteuil roulant, je déglutis avec peine.

— Ta petite-amie. T’as été si furieux quand je t’en ai parlé que… Je me suis dit qu’elle devait être particulièrement spéciale pour que tu réagisses comme ça…

— Je n’ai pas réagis comme ça pour une histoire de petite-amie, répond-t-il simplement. J’étais agacée que tu te permettes de me hurler dessus et me trainer par le bras comme un enfant devant mes élèves. Même si je me fiche qu’on me considère avec un grand respect et une admiration sans borne, il y a des limites à ne pas franchir.

             Je ne réponds pas, prise au dépourvu. A vrai dire, je n’avais pas du tout envisagé les choses sous cet angle. Et celui-ci me surprend d’autant plus qu’il est le plus logique de tous. Bien qu’Aizawa soit d’ordinaire du genre à ne pas prêter attention à sa réputation.

             Soudainement, je me sens bien stupide.

— Je… Pardon…

— Ne t’en fais pas. Et puis, moi aussi je dois m’excuser.

             Prise au dépourvu, je lève enfin les yeux vers lui. Amassant nos déchets afin de les jeter dans la poubelle à côté de lui, il ne me regarde pas. Ses traits sont détendus, il ne semble pas embarrassé par ses propres paroles quand il répond :

— Je savais pertinemment que mes paroles prêtaient à confusion mais je me demandais comment tu réagirais en apprenant que j’avais quelqu’un dans ma vie.

             Mes épaules se raidissent et mon cœur se serre. Je trouve cela assez mesquin, pour être honnête. D’autant plus qu’il semble confirmer que cette Joke est sa petite-amie. Ou peut-être réfute-t-il cela ? Je ne sais pas, je ne comprends plus rien.

             La seule chose dont je suis certaine est que j’aimerai qu’il soit célibataire. Par pur égoïsme.

— Et pour ce qui est de savoir si elle est particulièrement spéciale ou pas.

             Son index et son pouce attrapent soudain mon menton, me forçant à me tourner vers lui. Prise au dépourvu, j’hausse la tête en sa direction et remarque son léger sourire en coin.














— Elle le sera jamais autant que toi.






















武士は食わねど高楊枝




















2152 mots

un peu de fluff avant
l'arc de l'examen

je vais être honnête
je ne sais pas trop
où arrêter cette
histoire

peut-être vers la saison
4 ?

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