𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟐𝟐
— A M E A S S E R V I E —
武士は食わねど高楊枝
• S 0 2 E 0 5 •
— TIENS, TIENS MAIS que fais la pute d’Han ici ?
Les yeux écarquillés, je sens mes moindres muscles s’atrophier. Cette voix, je la reconnaitrais entre mille. Depuis trop longtemps, je ne l’ai pas entendue. Alors, le temps d’un instant, je crois à une hallucination.
Mais, au loin, les flammes sont bleues et dévorent la forêt. Et l’air est devenu brûlant, étouffant. Je ne parviens même pas à respirer.
— Bah alors ? Tu ne fais pas un gros câlin à ton beau-frère ?
Un frisson me parcourt ainsi qu’une vague de sueurs froides. David. Le frère d’Han. Ou plutôt, le fils unique de la famille qui a adopté mon mari. L’un de mes plus viles tortionnaires, un homme qui a, par le passé, pris goût dans l’idée de m’humilier.
Mon cœur bat à toute vitesse dans ma poitrine. Diverses images me reviennent. Sa main s’abattant sur ma joue. Ses rires le jour où j’ai essayé une robe de marié ne m’allant pas. Les multiples photographies qu’il avait prises de moi, dans mon sommeil, se moquant de mon visage gonflé et ma bouche ouverte laissant filer des ronflements.
Lui et mon ex-époux se sont plus dans les humiliations cuisantes. Jamais je n’oublierai la froide nuit d’hiver où, m’ayant volé toutes mes protections hygiéniques, j’ai dû marcher, les fesses en sang, jusqu’à la pharmacie. Et, à mon retour, David m’attendait, ses lèvres étirées en un sourire moqueur.
Jamais je n’ai pu lui pardonner de commettre ce qu’il considérait n’être que des blagues enfantines. Quand bien même j’oubliais systématiquement les actions déplacées de mon mari, je ne me suis pas résolue à faire de même pour son frère.
J’ai aimé Han. Pas lui.
— Allez, (T/P), ce n’est pas poli d’ignorer un membre de sa famille…
Cet homme est une véritable ordure. Et si je me suis tue durant ces dernières années, ce n’était que par respect pour Han.
Mais je suis libre à présent.
Et je ne respecterai plus que moi-même.
— Tempête de sable, je murmure entre mes dents sans même me retourner.
Mes doigts s’écartent. Aussitôt, un violent vent s’élève dans un bruissement sonore. Je ferme les yeux, savourant cette sensation.
Plus loin, à quelques mètres, la falaise s’élève dans l’obscurité de la nuit. J’ai fragmenté celle-ci pour obtenir le sable que je fais à présent voyager jusqu’au corps de mon ennemi. Car je ne peux pas créer la matière. Seulement la manipuler.
Mais mes adversaires savent que j’excelle dans cet art.
Un cri étouffé retentit derrière moi. Un sourire me prend. Mes yeux s’ouvrent. La chaleur amplifie. Au loin, la lueur bleutée des flammes éclaire la nuit. L’incendie ne cesse de s’étendre. Je ne vais pas pouvoir m’attarder bien longtemps ici.
— La pute de Han, comme tu dis…
Je me retourne, l’observant enfin. Et mes lèvres se tordent d’un sourire carnassier en observant son corps surélevé dans les airs. A quelques mètres au-dessus de moi, un rocher énorme formé par mes grains de sables laisse voir en son sommet un visage aussi anguleux qu’un cube et parsemé de cheveux filandreux noués en un chignon gras. David. Prisonnier de la pierre que j’ai créée.
Ses yeux enfoncés dans leurs orbites me dévisagent avec hargne, prêts à me briser au moindre moment d’inattention de ma part.
— …Est bien plus douée que toi.
L’alter de David est redoutable. Mais il ne peut pas s’en servir si ses bras sont immobilisés. Car il nécessite certains mouvements. Ses gestes sont amples, saisissant et percutants. Cependant lui n’est rien sans eux.
La tête penchée en arrière et le poing serré, je le fixe. Il grogne de rage au sommet de la pierre, ses yeux écarquillés et sa peau virant au rouge.
— Durant les années que tu as passés à m’humilier, David, saches que de mon côté, je t’ai étudiée. Toi et ton alter si terrifiant et désarçonnant. Toi, l’homme qui aidait tant Han, le meilleur ami de ce connard d’Overhaul, je crache. Je t’ai appris par cœur.
Mes yeux se plissent tandis que je le fixe, un brin de malice dans les yeux.
— Ton alter est la manipulation de l’air. Tu peux en faire des vents violents qui soulèvent des êtres de terre, des lames coupantes qui déchiquètent la chair sans que personne ne puisse rien y faire mais aussi une simple brise agréable, je lance.
Penchant la tête sur le côté, je soutiens son regard.
— Mais tu ne peux pas te servir de ton alter si tes mains sont immobilisées.
Il est furieux, je le vois. Et je ne fais que profiter du spectacle qu’il m’offre. Des années se sont écoulées sous ses humiliations, des mois à ronger mon frein et pleurer en silence, des semaines passer à encaisser les pires châtiments.
Mais, aujourd’hui, il n’est plus rien.
Seulement ma joie est de courte durée. Car, alors que je croyais l’avoir enfin attrapé, pouvoir l’humilier en le forçant à me regarder, impuissant, me pavaner, son visage vient tout juste de changer. En un battement de cil.
Sa colère s’est muée en un sourire carnassier. Ses yeux viennent de se plisser et un rire secoue la pierre l’entourant.
— Tu oublies quelque chose, (T/P)… Tu es l’Âme Asservie…
Mes yeux s’écarquillent à ces deux derniers mots. Ce n’est pas la première fois que je les entends. Aizawa les a déjà utilisés mais je me suis contentée de l’ignorer, agacée. Je croyais alors qu’il ne cherchait qu’à se dédouaner de son geste sur mon époux.
Mais David l’utilise à nouveau, à présent. Et cela ne présage rien de bon.
Il remarque mon désarroi et son sourire s’accentue tandis que ses yeux s’allument d’une lueur vile et malicieuse. Il prend goût à ma douleur, ma peine, ma surprise. Il se délecte comme il avait coutume de le faire, auparavant.
— Cela veut dire que tu dois obéissance à Han, crache-t-il.
Mon poing toujours serré, je tente de garder la face en entendant cette phrase. Mais mes yeux s’humidifient soudain.
— Tu n’as jamais remarqué que ta poitrine te faisait mal à chaque fois que tu lui désobéissais ? Que ton cœur se rétractait sur lui-même ? siffle-t-il dans un rictus joueur.
Je bats des paupières, me sentant faiblir. Si, bien sûr que si. Et il le sait d’ailleurs. J’en suis sûre.
— (T/P), Han avait un alter. Il t’a mordu et son venin s’est mêlé à ton sang, siffle-t-il. Alors à chaque fois que tu lui désobéis, tu as mal car il est dans ta nature profonde, ton âme, de lui être soumise.
Mes doigts tremblotent ainsi que mes épaules.
Non. Ce n’est pas possible. Il ment. Ou du moins, il ne révèle qu’une partie de la vérité. Je sais que mon époux ne s’est pas forcément bien comporté avec moi et ce, à bien des égards. Mais il m’aimait. Il essayait de m’aimer.
Bien sûr, je n’oublie rien des humiliations. Mais qu’en est-il des jours où il me serrait dans ses bras ? De la douceur avec laquelle il séchait mes larmes ? De ses mots doux lorsque, la bouche en sang, je gisais sur le sol ?
Et même s’il me frappait, il était le seul à poser une poche de glace sur mon hématome, après. Dans ma si grande solitude, il a été mon ami. Qu’importe ses mauvaises actions, certains moments étaient doux, délicats.
— T’es qu’une putain et il se servait de toi !
Je ne regarde plus David, fixant le sol. Ses mots sont douloureux. J’aimerai penser qu’il ment mais je dois avouer qu’ils font trop mal pour n’être qu’affabulations. Et quand bien même Han a pu parfois me tendre la main, ces derniers temps, quand je pense à mon ex-époux, je ne peux m’empêcher aussi de laisser mes songes glisser jusqu’à Aizawa.
La douceur avec laquelle il m’a étreinte lorsqu’il a appris qu’Han me battait, la gentillesse dans ses gestes au quotidien, la chaleur de ses bras quand j’ai dormi contre lui, ses petites attentions chaque jour…
J’ai réalisé hier que chaque soir avant de dormir, il m’arrive de m’imaginer ce qu’aurait été ma vie si, au lieu d’épouser Han, j’avais marié Aizawa.
Et dans aucun scénario je ne me suis attendue à un quotidien fait d’humiliation et anxiété comme celui qu’il a été en compagnie de mon défunt époux.
— Han ne t’aimait pas…
Malgré moi, une larme coule sur ma joue. Mes lèvres s’ouvre et je prends la parole :
— Je crois que moi non plus.
Le vent semble s’arrêter. Un silence envahi les lieux. Au loin, la chaleur des flammes bleues ne me parvient même plus. Mes pensées sont trop éloignées de cela. Car chacun de mes muscles vient de se détendre. Mes doigts se sont écartés, les traits de mon visage, affaissés et mon cœur bat à une cadence plus soutenue.
Je crois que j’ai compris la vérité. Et elle est là.
Le décès de Han est la meilleure chose qui me soit arrivée.
— Je crois que je sais ce que c’est que d’aimer quelqu’un et…
Je lève la tête vers David.
— …et notre mariage n’a jamais rien eu d’amoureux.
Mon cœur bat avec force. Je me sens libre, enfin allégée d’un poids considérable. Je ne sais ce que vient faire David ici, j’ai même longtemps été convaincue qu’il était décédé. Mais qu’importe.
Sans même le vouloir, il vient de me rendre service.
Car finalement, discuter avec lui m’a fait réaliser que jamais mon cœur ne s’est mis à battre aussi fermement mais sûrement face à Han qu’il ne le fait quand Aizawa saisit ma main.
Mes yeux s’écarquillent. Aizawa. Son nom produit l’effet d’une claque. Prise dans mes propres émotions, le chamboulement de revoir mon beau-frère et de découvrir des vérités enfouies sur moi-même, mon esprit avait éclipsé le plus important.
Les élèves sont en train de se faire attaquer. Et à en juger par les flammes bleues, au loin, David n’est pas seul.
Mon regard se porte plus attentivement sur lui. Ma gorge se serre.
— Vois-tu, (T/P), je me fiche de savoir quels sentiments tu vouais à mon beau-frère. Tu n’as toujours été qu’une abrutie imbue d’elle-même et ses propres sentiments. Alors je savais que le meilleur moyen de te déconcentrer était de mentionner Han et le chien mouillé qui te sert de géôlier.
Mes muscles sont raidis tandis que j’observe les épaules larges de David. A ses pieds, un monticule de sable git. Le rocher s’est dissout. Mon cœur rate une série de battement.
Mon point faible. Il le connait.
— Tu n’es pas la seule à avoir observé l’alter de l’autre, petite sotte. Et si te regarder m’a bien appris quelque chose, c’est que toutes tes constructions sont instables. Les roches que tu construis ou même les plaques de béton et de verre nécessite une concentration maximale de ta part. c’est d’ailleurs pour ça que tu serrais le poing, depuis tout à l’heure.
Mes yeux se baissent vers ma main. Je n’y ai pas réellement songé mais, en effet, j’ai détendu mes doigts que j’avais fermé.
Et, à ce moment-là, le rocher s’est dissolu.
Car toute mes constructions requiert mon attention maximale. Et que, tout comme le jour où Shoto était en danger, si mes pensées dérivent de mes actions durant la moindre seconde, celles-ci s’effondrent sur elles-mêmes avant de retourner à m’état de sable. Là, en songeant à Aizawa, j’ai inconsciemment délibéré David du rocher.
— (T/P), tu n’as jamais été qu’un chien de garde. Une abrutie. Tu pensais réellement pouvoir me battre ?
Au moment où il lève la main, je l’imite. Aussitôt, le monticule de sable sous ses pieds se mut en un rocher qui s’élève devant moi pour me protéger. Mais il se brise. David a créé un coup de vent aussi aiguisé qu’une lame qui vient de le percuter. Son alter a pulvérisé le mien.
A nouveau, je lève la main. La pierre que je créée se brise encore, créant un souffle violent qui me fait reculer d’un pas.
Mes yeux s’écarquillent.
La force et la rapidité de cet homme surpassent la mienne. Je ne peux gagner un combat contre lui qu’en attaquant la première et là est la raison pour laquelle je l’ai faite. Mais il m’a eue. Comme une putain de débutante.
J’ai honte.
Un rempart de sable se matérialise devant moi. Aussitôt, il se brise. A nouveau, une autre tente de se former mais il n’a pas le temps de se créer. Il vole en éclat. David est trop rapide. Je lève la main. L’air file à côté de mon oreille, l’éraflant. Je me fige. Je le sais. C’est la fin.
Une douleur me déchire brutalement, partant de ma cuisse jusqu’à mon épaule, transperçant l’intégralité de mon buste.
Mes yeux s’écarquillent.
La souffrance est brûlante. Ma bouche s’entrouvre. Du sang coule sur mon menton. Je me sens basculer en arrière. Le mal est tel que je n’arrive même pas à riposter.
Soudain, le monde se tait autour de moi. Immobile, je ne parviens même plus à regarder mon adversaire. Devant mes yeux, seul un décor flou dont les traits se confondent les uns dans les autres se dessinent.
Le monde bascule autour de moi. Je suis en train de tomber. Le ciel remplace bientôt les arbres. Mon cœur remonte dans ma poitrine.
Mon dos touche le sol.
J’ai perdu.
武士は食わねど高楊枝
2250 mots
petit chapitre
de combat
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