𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟎𝟕
— 𝐀 𝐅 𝐓 𝐄 𝐑 𝐋 𝐈 𝐅 𝐄 —
« 𝐒𝐢 𝐭𝐮 𝐬𝐚𝐯𝐚𝐢𝐬 𝐜𝐨𝐦𝐛𝐢𝐞𝐧 𝐣𝐞 𝐭'𝐚𝐢𝐦𝐞, 𝐜𝐨𝐦𝐛𝐢𝐞𝐧 𝐭𝐮 𝐞𝐬 𝐧𝐞́𝐜𝐞𝐬𝐬𝐚𝐢𝐫𝐞 𝐚̀ 𝐦𝐚 𝐯𝐢𝐞, 𝐭𝐮 𝐧'𝐨𝐬𝐞𝐫𝐚𝐢𝐬 𝐩𝐚𝐬 𝐭'𝐚𝐛𝐬𝐞𝐧𝐭𝐞𝐫 𝐮𝐧 𝐬𝐞𝐮𝐥 𝐦𝐨𝐦𝐞𝐧𝐭, 𝐭𝐮 𝐫𝐞𝐬𝐭𝐞𝐫𝐚𝐢𝐬 𝐭𝐨𝐮𝐣𝐨𝐮𝐫𝐬 𝐚𝐮𝐩𝐫𝐞̀𝐬 𝐝𝐞 𝐦𝐨𝐢, 𝐭𝐨𝐧 𝐜𝐨𝐞𝐮𝐫 𝐜𝐨𝐧𝐭𝐫𝐞 𝐦𝐨𝐧 𝐜𝐨𝐞𝐮𝐫, 𝐭𝐨𝐧 𝐚̂𝐦𝐞 𝐜𝐨𝐧𝐭𝐫𝐞 𝐦𝐨𝐧 𝐚̂𝐦𝐞. »
- 𝐕𝐢𝐜𝐭𝐨𝐫 𝐇𝐮𝐠𝐨
𝟏𝟎 𝐣𝐮𝐢𝐥𝐥𝐞𝐭 𝟐𝟎𝟐𝟐
𝐁𝐨𝐢𝐭𝐞 𝐝𝐞 𝐍𝐮𝐢𝐭 𝐂𝐥𝐮𝐛 𝐐
𝐆𝐫𝐚𝐳 – 𝐀𝐮𝐭𝐫𝐢𝐜𝐡𝐞
- Elle est canon hein !
- Quoi ?
- Lorenz ! Sacré bout de femme !
La musique est assourdissante dans le club, les spots de lumière rouges et bleus tournoient au-dessus de leurs têtes et flash dans les yeux du pilote Monégasque qui doit se pencher un peu plus vers l'ingénieur à ses côtés pour être sûr de bien saisir le sens de ses paroles.
Il ne connaît pas vraiment ce gars, un ingénieur mécanique de chez Redbull en face duquel il est assis depuis le début de la soirée et qui lui semble un peu trop à l'aise au goût du pilote.
L'homme, un grand brun à l'accent néerlandais lui indique d'ailleurs la piste de danse du menton et le regard de Charles suit son geste. Sans surprise, il tombe sur Casilia, étincelante dans sa courte robe en satin couleur champagne, couleur de victoire comme celle qu'elle célèbre ce soir.
Elle saute sur place, les bras tendus vers le ciel, perché sur des talons affreusement haut, une coupe de champagne à la main, déesse de la victoire. Entourée de Max, Daniel et Lando qui se trémoussent comme des zouaves autour d'elle, Charles parvient à entendre son rire cristallin au-dessus de la musique qui tambourine.
Bien sûr que Casilia est belle, elle est magnifique, rayonnante de mille feux, il faudrait être aveugle pour ne pas le voir. Pourtant, Charles déteste la manière prédatrice dont ce type la regarde, la détaillant de haut en bas comme s'il s'agissait de son prochain repas.
- Ouais, grince le pilote. Elle est mignonne.
- Mignonne ? C'est une bombe mon pote ! Pas à la hauteur de ce que tu te tapes évidemment, mais j'en croquerais bien un bout !
Le visage de Charles perd toute couleur alors qu'il serre la mâchoire et repose un peu brusquement son verre vide sur la table.
Cela ne semble pourtant pas alerter l'autre qui poursuit dans son fantasme, inconscient de la tempête qui menace de se déchaîner à ses côtés.
- Ah, si je pouvais me la faire ! En plus avec tous les exercices qu'elle fait, elle doit être super souple, le pied !
Charles fulmine. Que l'univers lui en soit témoin, il n'a jamais été un homme violent, mais le porc assis en face de lui est en passe de découvrir un nouvel aspect de sa personnalité.
- Tu devrais faire attention, gronde Charles. Tu parles du pilote pour qui tu travailles. Ça pourrait te coûter cher.
Mais l'autre éclate de rire, sans prendre au sérieux la menace à peine dissimulée du Monégasque.
- Le pilote pour qui je travaille ? Ne me fais pas rire ! Tu veux que je te dise un truc, ces filles-là, ce sont toutes les mêmes, rien que du bluff. Un joli minois et un petit cul à dandiner ! Dès qu'elle aura trouvé un vrai mec pour la baiser bien comme si faut, tu peux être sûr qu'elle mettra fin à sa carrière.
Moins d'un flash de lumière plus tard, Charles a attrapé le col du t-shirt de l'autre homme qu'il tire au-dessus de la table sous les regards surpris des autres convives.
- Et moi aussi j'ai quelque chose à te dire, mon « pote », cingle le pilote. La vérité, c'est que les filles comme elle ne s'abaisseront jamais à regarder une tâche comme toi, mais par contre, tu peux compter sur moi pour ne pas oublier ton visage.
Puis d'un mouvement du poignet, il le repousse en arrière et l'autre s'écrase dans le canapé, l'air choqué de quelqu'un qui ne comprend pas ce qui lui arrive plaqué sur le visage et Charles ajoute :
- Je pense que tu devrais dégager d'ici et te trouver un autre métier.
Et sans demander son reste, Charles quitte l'espace VIP pour s'enfoncer dans la foule en direction de Casilia.
La jeune femme est dos à lui et Lando est le premier à le voir. Le Britannique fronce légèrement les sourcils devant l'air ronchon du pilote de la Scuderia avant d'esquisser un sourire narquois et de lever les yeux au ciel.
Charles hausse un sourcil devant l'air étrange de son ami qui se penche en direction de Daniel, juste à côté de lui et donne un coup de coude dans les côtes de l'Australien avant de hurler par-dessus la musique.
- J'ai déjà donné Dan ! Ce soir, c'est ton tour !
L'Australien grince de douleur, le visage plein d'incompréhension avant que son regard ne croise celui de Charles toujours plus proche et qu'il ne lève les yeux à son tour.
- Oh, OK, il ricane. Je vois le genre.
Puis il lui tourne le dos, attrape rapidement le bras de Max, qui perd l'équilibre sous le coup de la surprise, et hurle dans un grand rire, bien plus fort que la musique :
- Qui veut me voir arracher le t-shirt de Max ?!
Un concert de hurlements, principalement féminins, lui répond et Charles hausse vaguement un sourcil, surpris par la folie manifeste de son ami, mais pas longtemps cependant parce qu'il rejoint enfin Casilia qui pleure de rire à côté de Lando.
Avec précipitation, il attrape sa main et la traîne littéralement à travers la boîte de nuit jusqu'à une porte barrée du logo « réservé au personnel » qu'il pousse sans ménagement. En l'espace d'un instant, la musique assourdissante disparaît, remplacée par un vacarme de fond et ils ne sont plus éclairés que par la lumière blafarde du petit boîtier de sortie de secours.
Charles a enfin l'impression de pouvoir respirer normalement, il n'avait pas conscience d'avoir retenu sa respiration.
- Charles ? Est-ce que tout va bien ?
Casilia est soucieuse et il s'en veut immédiatement de l'avoir inquiété, mais c'est plus fort que lui.
La seconde d'après il écrase ses lèvres contre celles de la jeune femme, approfondissent immédiatement le baisé lorsqu'elle lui donne l'accès. L'une de ses mains vient saisir son menton en coupe tandis que l'autre accroche l'arrière de sa nuque pour la rapprocher encore plus de lui.
Sans douceur, il la pousse jusqu'au mur contre lequel elle s'écrase dans une plainte qu'il étouffe contre sa bouche quémandeuse. La main qui maintenait l'arrière de sa nuque glisse contre le tissu le long de la courbe de son dos et agrippe sa taille alors qu'il pousse son bassin contre elle, créant un contact qui arrache un soupir de plaisir à la jeune femme.
Toujours agrippée à sa taille, la deuxième main du pilote quitte son visage pour aller saisir l'une de ses cuisses, juste sous la barrière de sa robe, et y imprimer l'empreinte de ses doigts avant de la relever, créant plus de contacts entre leurs corps.
- Charles....elle gémit.
Casilia s'agrippe à ses épaules lorsqu'il pose deux mains sous ses fesses et la soulève précipitamment avant d'enrouler ses jambes autour de son bassin. Elle fredonne de plaisir lorsqu'il suce le petit point sensible à la jonction de sa nuque et de son épaule et perd son souffle lorsqu'il imprime un mouvement de bassin, créant une friction entre ses cuisses.
Elle rejette la tête en arrière, lui donnant un meilleur accès à sa nuque et il la contemple de tout son soûl, alangui contre lui, avide du moindre de ses contacts.
- Tu es la meilleure pilote que je connaisse, il souffle contre sa peau.
- Je suis la seule pilote que tu connais, elle ricane.
Casilia comprend un peu tard qu'il est mortellement sérieux et embrasse délicatement ses lèvres en guise d'excuse, mais Charles n'a pas fini de parler.
- Tu es talentueuse, terriblement douée et personne ne peut remettre en question ta place de pilote de Formule 1.
- Charles...elle sourit.
- Personne n'a le droit de te manquer de respect, peu importe la raison, je ne les laisserais pas faire.
- Charles...
- Tu n'as rien à leur prouver et s'ils ne sont pas foutus de voir quel génie tu es alors c'est qu'ils sont tous trop...
- Charles !
Casilia pose deux doigts sur les lèvres du Monégasque pour le contraindre au silence et il ne peut que s'abreuver du sourire lumineux qu'elle lui offre avant de l'embrasser doucement.
- Je me fiche de ce que pensent les autres, Charles. Ça n'a pas d'importance pour moi.
- Mais je... !
Le sourire de Casilia s'accentue encore un peu alors qu'il persiste à vouloir prendre sa défense et elle serre un peu plus les cuisses créant une nouvelle friction qui l'empêche de continuer. Délicatement, elle se penche vers lui pour susurrer à son oreille d'une voix suave :
- Ramène-moi à l'hôtel...J'ai très envie que tu me montres à quel point je suis extraordinaire...
Un long frisson traverse l'échine du Monégasque qui hésite pourtant un instant.
- Mais...et la fête ?
- Charles, ramène-moi à l'hôtel, elle insiste.
Et elle lui adresse l'un de ces sourires, ceux qui vous promettent monts et merveilles.
Dans ses veines, son sang s'enflamme alors qu'elle avale l'espace entre leurs lèvres et qu'il murmure :
- Tout ce que tu veux.
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𝟐 𝐅𝐞𝐯𝐫𝐢𝐞𝐫 𝟐𝟎𝟐𝟑
𝐌𝐨𝐧𝐭𝐞-𝐂𝐚𝐫𝐥𝐨 𝐆𝐨𝐥𝐟 𝐂𝐥𝐮𝐛
𝐌𝐨𝐧𝐭𝐞-𝐂𝐚𝐫𝐥𝐨 – 𝐌𝐨𝐧𝐚𝐜𝐨
Rencontrer Lando est beaucoup plus compliqué que ce que Charles avait d'abord imaginé. Lui qui avait pensé passer chez son ami à l'improviste, il est le premier surpris en mettant les pieds sur le green du Monte-Carlo Golf Club en ce début d'après-midi.
Le fait de trouver le pilote McLaren dans la principauté n'a rien de surprenant, le jeune homme y habite depuis quelques mois maintenant et ils sortent régulièrement avec Max pendant les week-ends où ils n'ont pas de Grand Prix à disputer. Il n'est pas surpris non plus de le trouver sur un terrain de golf, tout le monde sait qu'après la formule 1 et les jeux vidéo, le golf est l'une des plus grandes passions du pilote britannique.
En revanche, ce qui le surprend lorsqu'il descend de sa voiturette, c'est la présence de Carlos aux côtés de l'Anglais. Charles ne comprend pas bien pourquoi il l'a invité à se joindre à eux, il a pourtant prévenu le jeune homme qu'il souhaitait s'entretenir avec lui d'un sujet privé et personnel.
Sur ses gardes, il extirpe son caddie du véhicule de location et entreprend de rejoindre les deux amis déjà engagés dans une partie. Distraitement, il observe la vue sublime que lui offre l'endroit, un panorama magnifique de la principauté baignée dans le froid soleil de février. Aujourd'hui est une belle journée, le ciel est découvert et le vent faible, des conditions favorables même s'il est encore tôt dans la saison pour venir jouer ainsi.
En quelques enjambées, il rejoint les deux autres pilotes qu'il salue sobrement avant d'enfoncer sur son crâne une casquette bleu marine frappée du logo de son écurie.
S'il y a bien une chose que Charles déteste, c'est l'imprévu.
Dans la vie de tous les jours, il aime avoir le contrôle, que les plans se déroulent comme il les a prévus. Une petite manie perfectionniste rudement mise à l'épreuve par Casilia et son agaçante habitude de tout improviser à la dernière minute.
La présence de Carlos le met mal à l'aise. Évidemment, il adore son coéquipier, mais depuis la mort de Casilia, la seule chose qui lui donne la sensation de garder le contrôle, ce sont les lettres qu'elle lui a laissées. Il organise des entrevues avec les autres pilotes, fixe une date, une heure, prend le temps de se préparer. Charles s'est préparé à voir Lando aujourd'hui, à lui parler de Casilia, à lui donner sa lettre. Carlos lui fait perdre le contrôle des événements.
- Tu tires une sale gueule mon pote.
Il relève la tête au commentaire de Lando, les sourcils froncés, il est agacé.
- Je pensais qu'il n'y aurait que toi et moi, mon pote.
La dernière partie de la phrase est acerbe, piquante, Charles ne cache pas son mécontentement. Carlos hausse les sourcils, un léger sourire étire le bord de ses lèvres alors qu'il fait semblant de ne pas leur prêter attention, les doigts bien enroulés autour de son club, prenant son swing comme si de rien n'était.
Lando, lui, à au moins le mérite d'esquisser une grimace mal à l'aise alors qu'il lève ses deux mains gantées en signe de paix.
- Hé, tu viens parler de Casilia pas vrai ? J'ai pensé qu'il me fallait un témoin, c'est tout !
Charles ouvre de grands yeux, surpris.
- Quoi ? Mais de quoi tu parles ?
Lando baisse les bras, un curieux air d'incompréhension plaqué sur son visage.
- Bah... Tu as dit que tu voulais me parler d'un sujet personnel, j'imagine que tu as découvert qu'on se voyait avec Casilia, non ?
L'incompréhension la plus totale se reflète sur le visage de Charles tandis qu'il essaye d'analyser les paroles de Lando. Casilia voyait Lando. Lando voyait Casilia. Quoi ?!
Son esprit tourne en boucle sur la définition de l'expression « voir quelqu'un » tandis qu'en face de lui, le pilote Britannique passe une main désespérée sur son visage et jette un œil à Carlos qui se retient de rire à grand mal.
- Bordel, Casi, marmonne l'Anglais. Dans quel foutoir tu as réussi à nous mettre cette fois.
Puis, sans rien ajouter d'autres, il range son club dans le caddie prêté par le golf avant de passer un bras autour des épaules de Charles, toujours en pleine tourmente, et d'ajouter.
- Allez, viens, je crois qu'on a besoin d'un verre.
- Il est quinze heures, note Carlos derrière eux.
Lando lève les yeux au ciel.
- Je te paierais une grenadine, il se moque.
Ils montent tous les trois dans la voiturette conduite par le pilote McLaren qui les mène jusqu'au Club House quelques centaines de mètres plus loin. Charles ne dit pas un mot de tout le trajet, perdu dans ses pensées.
Les paroles de Lando sont pour le moins équivoques, lui et Casilia se voyaient en secret et il n'en avait aucune idée. Évidemment, il n'envisage pas qu'elle ait pu le tromper, l'idée lui paraît si inconcevable qu'il refuse même d'y penser, Casilia n'aurait jamais fait une telle chose, elle ne lui aurait jamais fait de mal. Qui plus est, Charles a du mal à imaginer que Lando puisse lui annoncer ça juste avant de l'inviter à prendre un verre comme si de rien n'était. Il y a forcément autre chose.
Toujours plongé dans ses pensées, légèrement plus déstabilisé que ce qu'il ne voudrait bien l'admettre, il prend place autour de l'une des tables du club presque vide. Il faut dire qu'en cette saison, seuls les amateurs les plus motivés se risquent sur les greens.
Silencieusement, ils attendent que la serveuse apporte leurs boissons.
- Je peux presque voir les rouages de ton cerveau s'activer, ricane Lando.
Le Monégasque relève les yeux vers lui, les sourcils froncés.
- Je cherche ce que j'ai manqué, il explique.
Maintenant qu'il regarde son ami, Charles le trouve changé. Ce n'est pas réellement flagrant, mais Lando lui semble vieilli, plus sarcastique, moins enfantin. Il ne manque pas non plus les petits regards que Carlos lui jette de temps en temps, un peu comme s'il cherchait quelque chose dans les prunelles assombries de son ancien coéquipier.
Face à lui, Lando se laisse glisser dans son siège, ses doigts jouant distraitement avec le bord de la nappe avant de prendre une gorgée de sa bière.
- Certainement pas grand-chose, il répond. Rien que tu aurais pu remarquer en tout cas.
- Mais vous étiez amis ? Il insiste.
Le plus jeune esquisse un bref sourire où se mêlent amusement et nostalgie.
- Amis ? Je crois que c'est un peu plus compliqué que ça, il ricane.
- Lando...
Carlos menace, mais il a l'air plus amusé qu'autre chose.
- Quoi ? Il faut bien que je crée un peu de suspense, non ?
Charles fronce les sourcils, n'appréciant pas vraiment d'être mis à l'écart. Lando semble s'en rendre compte puisqu'il lâche un soupir ennuyé avant de reprendre.
- Casi et moi, on ne peut pas vraiment dire qu'on était proches. Entre la course pour la tête du championnat, toi qui étais tout le temps fourré dans ses pattes et mes résultats prometteurs avec la voiture, on n'a pas vraiment eu le temps de faire copain-copain.
Charles s'empourpre légèrement et passe une main distraite devant son visage pour dissimuler sa gêne.
- J'ai l'impression que tout le monde savait pour nous, il marmonne.
- Mais c'est parce que tout le monde le savait ! Ricane Lando. Tous les pilotes se sont plus ou moins mis d'accord pour garder le secret et faire diversion devant la presse pendant que vous vous regardiez avec des yeux de merlan frit, il ajoute.
- À ce point ?!
- Si tu savais ! La moitié des grands moments de Carlando 2022 existent uniquement pour dissimuler le fait qu'en arrière-plan, tu es en train de baver sur ta belle ou qu'elle matte ton déhanché.
- Okay, maintenant, je suis vraiment gêné.
Charles, rouge de honte, dissimule son visage entre ses mains. Lui qui pensait être un minimum discret, il faut croire qu'il s'est lourdement fourvoyé.
- Bah, tu sais, commence Carlos. La moitié du paddock vous regardait comme si vous étiez la chose la plus mignonne qu'ils aient jamais vue alors que l'autre pariait sur qui portait la culotte dans le couple. C'était assez amusant.
Clairement, il ne sait plus où se mettre.
- Est-ce qu'on peut revenir à l'histoire de Lando, s'il vous plaît ? Il marmonne.
Les deux autres ris doucement, avant que le calme ne revienne doucement et Charles en profite pour siroter un peu de sa bière.
- Comme je le disais avant d'être interrompu, ironise-t-il. On ne s'était jamais vraiment côtoyés, groupes d'amis différents, lieux de vie différents, au mieux, nous étions de vagues connaissances. Enfin ça, c'est jusqu'à ce qu'elle frappe à la porte de ma chambre d'hôtel complètement en furie la veille du Grand Prix d'Australie pour me dire que ma copine était la pire des pestes.
Charles s'étouffe avec sa gorgée de bière alors que Carlos ricane discrètement dans sa grenadine.
- Elle a fait quoi ?
- Je te jure, une vraie démone ! J'ai bien cru qu'elle n'allait jamais lâcher le morceau.
- Pourquoi est-ce que je n'ai jamais entendu parler de ça ?
- T'étais déjà complètement dingue d'elle, je n'allais pas venir te parler du fait qu'elle a menacé de me défigurer, raille-t-il.
Charles secoue la tête, un timide sourire aux lèvres.
- J'ai du mal à comprendre, qu'est-ce qu'il s'est passé avec ta copine ?
- Ex-copine, il précise, amer.
- Lucinda ?
- Ouais.
Lando semble soudain beaucoup plus sombre et Charles hésite à insister, mais l'autre ne lui en laisse pas le temps.
- Casilia est venue me voir pour me dire qu'en gros, Lucinda lui avait interdit de s'apporter de moi, pour la menacer de ruiner son image sur les réseaux sociaux et sous-entendre qu'il est facile de devenir femme pilote lorsque l'on couche avec les bonnes personnes. Je t'épargne les détails.
Les dernières rougeurs quittent le visage de Charles qui se fige, le regard incrédule posé sur un Lando visiblement contrarié par l'évocation de ce souvenir.
- Charmant, il cingle.
C'est le maximum qu'il puisse faire pour ne pas envenimer la situation. Un bref rire désabusé échappe à Lando et Charles comprend qu'il y a sans doute plus que ça.
- À l'époque, j'ai été un gros con avec elle, il avoue.
- C'est-à-dire ?
- Il l'a envoyé chier.
- Carlos !
Devant la mine outrée du plus jeune, Carlos lève les yeux aussi ciel.
Carlos et Lando. Il y a toujours eu quelque chose entre ces deux-là, une amitié qui dépasse la franche camaraderie, une véritable connexion dont Charles se rappelle un peu honteusement avoir été jaloux au début de sa collaboration avec le pilote espagnol.
Lando a clairement l'air de ne plus savoir où se mettre, mais Charles ne lui en veut pas, s'il avait été à sa place, il n'aurait certainement pas été très agréable avec Casilia non plus. Malgré tout l'amour qu'il lui porte, il doit bien reconnaître qu'elle n'était pas vraiment un modèle de délicatesse. Quelques-unes de leurs plus violentes disputes lui reviennent en tête et il esquisse un petit sourire nostalgique.
Charles donnerait n'importe quoi pour pouvoir se disputer à nouveau avec Casilia, n'importe quoi.
- Lucinda était ma première relation sérieuse et je n'ai pas su comment...
- Tu n'as pas à te justifier Lando, je comprends.
- Non, il insiste. Ce qu'a dit Lucinda ce jour-là et tout ce qu'elle a fait par la suite, c'était dégueulasse et rien n'excuse ça. Surtout quand je la vois retourner sa veste aujourd'hui et publier des messages de condoléances sur les réseaux sociaux.
Charles grimace, il n'a pas consulté ses réseaux sociaux depuis la disparition de Casilia, mais cela ne le surprend pas vraiment.
- Je me rappelle encore ce qu'elle a dit ce jour-là, souffle Carlos. Quelle femme.
- Tu étais là ? Demande Charles.
- Je suis toujours là lorsque les choses deviennent spicy.
Il ponctue son commentaire d'un clin d'œil et Charles lève les yeux au ciel, amusé.
- Donc Lucinda a été horrible, et après ? J'ai du mal à imaginer que votre amitié ait pu commencer à ce moment-là.
- Tu as raison, j'étais même plutôt remonté contre elle, mais elle a dit quelque chose ce jour-là que je n'ai jamais oublié.
- Qu'est-ce qu'elle a dit ?
- Que je mérite mieux qu'une grâce qui m'utilise pour alimenter son feed Insta et que le jour où je m'en rendrais compte, elle serait là pour moi.
Charles recule dans sa chaise, il reconnaît bien là sa Casilia. Elle avait un caractère terrible, mais elle faisait partie de ces gens incapables de rester fâchés bien longtemps et toujours prêt à tendre la main à une personne en difficulté.
Casilia avait essayé d'aider Lando, à sa manière, maladroitement, brusquement, mais sincèrement.
Cela ne fait que renforcer la fierté qu'il éprouve d'avoir un jour eu à son bras une femme telle que Casilia. Le genre de celle qui marque l'histoire, qui vous marque à tout jamais.
- Et tu l'as appelée, conclut Charles.
En face de lui, le jeune pilote reprend une gorgée de sa bière avant d'esquisser un sourire nostalgique, comme s'il revivait la scène.
- Je l'ai appelé, il sourit.
Carlos lui presse doucement le bras et Charles remarque enfin les larmes qui menacent de déborder des yeux du Britannique. Pourtant, il n'en est pas moins intarissable.
- À partir de ce moment-là, il commence. Elle s'est donnée pour mission de coacher ma vie amoureuse, elle était tellement drôle, excentrique, impertinente, vivante. Elle disait toujours que je méritais le monde et qu'elle s'assurerait en personne que je sois l'homme le plus heureux de tous les temps.
- Je pensais que ça allait lui passer, intervient Carlos. Qu'elle s'était fixé un objectif, mais qu'elle finirait par se lasser au bout d'un moment. Ou qu'elle finirait par comprendre que Lando est un vrai tue l'amour à lui tout seul.
- C'est mal connaître Casilia.
Les trois amis ricanent, ils savent tous très bien de quoi Charles parle. Casilia était un modèle de persévérance, d'acharnement. Une fois qu'elle avait décidé quelque chose, il était quasiment impossible de la faire changer d'avis.
Charles se sent bien, léger. Il y a si longtemps qu'il n'a pas ri ainsi, qu'un souvenir de Casilia ne lui a pas tiré autre chose que des larmes, c'est inespéré.
- Elle s'est donnée pour mission de me remonter le moral et de me redonner confiance en moi, poursuit Lando. Je dois bien admettre qu'elle a réussi, à grand renfort de pop-corn et de soirée pyjama.
- De soirée pyjama ?
- Oui ! Elle faisait en sorte de nous libérer une soirée à chaque week-end de course. Elle choisissait un film, souvent une romance des années 80, quelque chose de cliché, un film à l'eau de rose et on passait la soirée devant à manger des gâteaux, boire des cocktails de sa création et rire des clichés des films de ces années-là.
- Elle connaissait par cœur tous les dialogues de « La revanche d'une blonde », c'était hilarant, plaisante Carlos.
- Haaaa, si tu savais combien de fois elle m'a fait regarder ce film !
Les trois amis entrechoquent leurs verres en riant au souvenir de toutes les fois où Reese Witherspoon gagne le procès du siècle dans son tailleur rose.
- Et sans que je ne m'en rende compte, elle m'avait convaincue d'adopter une routine beauté et on s'appelait des heures pour qu'elle me raconte vôtre dernier date et à quel point tu étais le mec de ses rêves.
- Je crois que Casilia n'a jamais eu beaucoup d'amies filles, analyse Carlos. Après tout, la course est un milieu très masculin et les seules femmes que l'on y croise sont presque toujours les petites-amies des pilotes. Ça ne doit pas être facile de trouver quelqu'un à qui parler sans devoir faire attention à tout ce que l'on dit.
Charles regarde Carlos, les sourcils haussés de surprise. Il ne savait pas que son ami s'intéressait autant à la situation de Casilia. Celui-ci semble se rendre compte de l'étonnement de ses amis et hausse simplement les épaules avant de se justifier simplement.
- C'est Isabel qui m'a fait remarquer que cela ne devait pas être facile pour elle.
- Je n'y avais jamais pensé, avoue Charles.
- Personne n'y avait pensé, c'est bien pour ça qu'elle était si seule.
Les trois amis plongent dans un silence contemplatif, le temps de faire le point. Leur conversation en apparence légère soulève bien plus de questionnement que ce qu'ils auraient pu imaginer.
- Je crois qu'elle était un peu comme ma meilleure amie, débute Lando. Bien sûr, j'ai Max et mes autres amis, mais avec Casi, c'était différent. Elle était plus jeune que moi et on ne parle pas des mêmes choses avec une fille. J'appréciais les moments avec elle parce que je savais qu'elle ne me jugerait jamais, qu'elle serait toujours là pour écouter jusqu'à la plus stupide de mes insécurités et me rassurer.
- Elle me faisait cet effet-là aussi, souffle Charles. Elle avait cette manière de me regarder qui me donnait l'impression d'être le centre du monde, c'était un sentiment incroyable.
- Il y a des gens qui vous marquent à tout jamais de leur empreinte.
- Je ne crois pas que l'on ait déjà eu une conversation aussi profonde, ricane Lando. Il n'y a bien que Casilia pour nous obliger à ouvrir nos cœurs comme ça.
- Et moi, je n'en reviens pas que tu aies demandé à Carlos de te servir de garde du corps contre moi.
- Hé, mais ! Je ne savais pas ce que tu savais, imagine si tu étais venue pour me casser la gueule ou un truc du genre ?
- Parce que tu crois que Carlos m'aurait empêché de t'en mettre une ?
Comme un seul homme, ils se tournent vers le pilote espagnol bien silencieux depuis quelques minutes. Le Madrilène, lunettes de soleil vissées sur le crâne, la paille de son diabolo coincée entre les dents, les analyses un instant de son regard blasé avant de pousser un soupir à fendre l'âme.
- Je l'aurais laissé te cogner une fois avant d'intervenir, répond-il.
- Carlos ! Faux frère ! S'offusque Lando.
Charles esquisse une mimique narquoise de vainqueur avant d'aviser ses deux amis, visiblement en pleine dispute de couple face à lui.
Rien qu'à voir la manière dont il parle d'elle, on a aucun mal à imaginer l'impact que Casilia a eu sur Lando, à la manière d'une sœur ou d'une meilleure amie. Et même s'il est beaucoup plus discret que son ancien coéquipier, Charles à bien remarqué l'attention particulière et la touchante délicatesse de Carlos lorsqu'il s'agit de Casilia. Rien qu'à la manière dont il assure toutes les représentations Ferrari depuis plus d'un mois pour pouvoir lui laisser le temps de faire son deuil, Charles ne le remerciera jamais assez pour ça.
Charles est chanceux d'avoir des amis comme eux, comme Pierre qui lui envoie des messages tous les jours pour prendre des nouvelles ou comme Lewis qui lui envoie des photos de toutes les avancées de leur projet secret. Malgré tout ce qu'il a pu ressentir, Charles n'a jamais été seul, pas un instant.
Un léger sourire étire ses lèvres et il le dissimule derrière son verre à moitié vide, mais c'est sans compter sur le regard observateur de Carlos à qui aucun détail n'échappe.
- Et toi Charles, comment ça va ?
Le sourire du Monégasque fane légèrement tandis qu'il repose son verre.
- Je me sens vide et seul. Je sais que je ne le suis pas, que vous être là, mais sans Casilia ce n'est pas pareil. Elle est encore tellement présente, tellement indispensable, à chaque fois que j'ai l'impression de faire un pas en avant, il y a toujours quelque chose qui me rappelle qu'elle n'est plus là et c'est comme si tout ce que j'avais fait n'avait servi à rien.
C'est difficile à expliquer, le manque. Cette sensation immatérielle et pourtant tellement physique, l'impression que l'on nous a arraché quelque chose qu'on n'avait pas conscience d'avoir et qui, une fois retiré laisse un vide intolérable.
Charles est en manque de Casilia, il est en manque de son rire, de sa façon de sourire, de le toucher, de l'aimer.
- Elle m'a offert des fleurs pour mon anniversaire, avoue l'Espagnol. Personne ne m'avait jamais offert de fleur avant, c'était excentrique et peut-être même un peu risqué, mais elle était là, devant la porte de ma chambre d'hôtel le 1er septembre avec son énorme bouquet de tulipes. Elle était terriblement en retard pour sa conférence de presse, mais elle a attendu que je sorte pour me donner les fleurs.
- Elle adorait les fleurs, sourit Charles.
- Quand je lui ai dit qu'elle était bizarre, poursuit l'autre. Elle a simplement souri et haussé les épaules en disant que les tulipes violettes lui avaient fait penser à moi et qu'elles étaient trop jolies pour ne pas en profiter.
Carlos laisse échapper un petit rire touché et Charles comprend que, comme lui, il s'est renseigné sur le langage des fleurs pour comprendre les messages cachés de Casilia.
- J'ai oublié son anniversaire, grimace Lando. J'ai bien cru qu'elle n'allait jamais me le pardonner et j'ai eu peur quand elle a débarqué dans ma chambre d'hôtel pour me demander mon téléphone. Mais elle a simplement ouvert mon agenda et entré un rappel à la date de son anniversaire. En fait, elle a rentré un rappel pour toutes les dates d'anniversaire de nos proches, toutes sans exception. Je n'en ai jamais oublié un depuis.
Les anecdotes se succèdent et Charles comprend qu'il n'avait pas tort en trouvant Lando changé. L'homme en face de lui n'a plus rien à voir avec le garçon qu'il était, lui aussi a perdu Casilia, lui aussi s'est réveillé un jour avec un trou dans la poitrine à la place qu'elle occupait. Cette maturité subite, il ne l'a pas souhaité, elle s'est imposée à lui.
- Pourquoi est-ce que tu es là, Charles ? Demande-t-il finalement.
Il n'y a pas d'impatience dans la voix de Lando, pas de suspicion, pas de reproche, simplement la certitude qu'il y a quelque chose de plus, quelque chose qui n'a pas encore été dit.
- Elle m'a laissé une lettre, pour toi.
- Quoi ?
Lando se redresse dans sa chaise, incrédule, les yeux brillants d'un émouvant mélange d'espoir et d'impatience.
- Casilia, elle m'a donné une lettre à te remettre.
Et sans plus de cérémonie, il extirpe la lettre de la poche arrière de son jean. Sans hésitation, il la donne à son ami qui la saisit de ses doigts rendus tremblant par l'émotion.
Dans un mélange savant de précipitation et de douceur infinie, il arrache les bords de l'enveloppe avant de déplier une simple feuille couleur crème pliée en deux. Penché au-dessus de l'épaule de son ami, le regard de Carlos s'humidifie immédiatement tandis que le Britannique entreprend de lire à voix haute.
« Cher Lando,
Et parce qu'il ne doit sans doute pas être très loin, Cher Carlos.
J'espère que vous n'avez pas trop pleuré, ce serait vraiment un spectacle hideux et vous êtes tous les deux beaucoup trop beaux pour ça. »
Les trois amis esquissent un rire et Lando renifle à travers les larmes.
- Il lui aura fallu tout ce temps pour admettre que je suis le plus beau, il ricane.
- Tais-toi et lis, sermonne L'Espagnol.
- « Carlos. Je crois que tu sais parfaitement tout ce que j'aurais aimé te dire. Tu as toujours été le plus intelligent de nous deux de toute manière.
Je veux simplement que tu n'oublies jamais que t'offrir ces fleurs a été l'une des meilleures décisions que j'ai pu prendre et que je te souhaite sincèrement d'en recevoir encore et encore, tout au long de ta vie.
Tu mérites que l'on t'aime pour l'homme merveilleux, l'ami sincère et le pilote de génie que tu es. Tu n'as pas d'ennemis Carlos, pas de concurrent, pas de prodige à dépasser, tu es toi-même, entier et magnifique et c'est beaucoup plus que ce que le monde ne mérite.
Tu n'es pas le nom, tu n'es pas l'ombre, tu n'es la copie de personne, le deuxième pilote d'aucune écurie. Tu es toi, le génie, l'homme merveilleux, le pilote incroyable, l'ami que chacun voudrait avoir, le cœur de l'Espagne, le héros.
Carlos, tu sais parfaitement ce que j'ai toujours pensé de toi et j'espère au moins que ma mort t'aura permis de comprendre que rien n'est éternel, qu'il est temps de te soulever.
Arrête de survivre, il est temps de vivre. »
Carlos acquiesce à chacun des mots que récite Lando, presque comme si Casilia était là, à les répéter devant lui et Charles ne peut retenir la boule d'émotion qui monte dans sa gorge.
Lando essaie de s'éclaircir la voix malgré les larmes qui brouillent sa vision et il écarte légèrement la lettre pour être sûr de ne pas l'abîmer de ses larmes.
- Elle avait un sacré don pour nous faire la morale, insupportable, souffle Carlos.
Charles sait qu'il parle pour mieux ravaler ses sanglots, il ne connaît que trop bien cette technique.
- Elle a toujours été comme ça, mi-pilote, mi-Community manager, sans elle, on se serait tous entre-tué, ricane Charles.
- Taisez-vous, grogne Lando. Elle parle de moi.
- « À Lando, mon adorable et très handicapé des sentiments, meilleur ami.
Je n'ai rien à dire sur ta carrière de pilote, je crois que nous avons déjà trop longtemps bataillé à ce sujet et tu ne connais que trop bien mon avis sur la question alors je vais me contenter de te donner ma dernière grande leçon sur l'amour.
Aimer sincèrement quelqu'un, c'est une relation au-delà des réseaux sociaux, de l'image et du monde extérieur. On aime sincèrement qu'à deux, les yeux dans les yeux, cœur contre cœur, extérieurs au reste de l'univers.
Aimer réellement, c'est arrêter de penser que l'on est seul au monde, c'est donner son cœur, être prêt à aller si loin dans le sacrifice de soi et ne plus respirer que parce que l'autre respire.
Aimer pour de vrai, c'est penser à cette personne lorsque l'on ouvre les yeux le matin et lorsqu'on les ferme le soir, c'est avoir envie de partager chaque instant, chaque blague, chaque émotion positive avec l'autre.
Aimer, c'est avoir le cœur qui fait mal, l'esprit embrouillé, c'est avoir chaud puis froid, c'est être fier et jaloux, c'est sentir ses organes se consumer et exploser, c'est abandonner toute pensée cohérente simplement parce que l'autre existe et que l'univers ne pourra rien créer de meilleur.
Aimer avec un grand A, c'est avoir des centaines de choses à dire et pourtant ne pas pouvoir parler, c'est rire à des blagues pas drôles et passer des heures à chercher la bonne tenue simplement pour aller boire un café.
Aimer, c'est juste aimer tellement fort que le monde semble s'arrêter, avoir l'impression que la lune ne rayonnera jamais comme avant et que le soleil ne se lèvera plus tout à fait de la même manière.
Aimer, ça précipite un cœur, ça change une vie.
C'est un bouleversement si fort, si incontrôlé, si involontaire que s'en ai parfois douloureux. Mais ça fait mal d'aimer, de tout risquer, de donner son cœur et de prendre le risque de le voir être écrasé.
Et toi, Lando. Toi dans tout cela, tu mérites d'être aimé plus fort que les étoiles, plus fort que le monde et plus fort que l'amour lui-même.
Tu mérites quelqu'un qui saura reconnaître l'homme merveilleux que tu es, l'ami, le soutien de tout instant, le cœur généreux.
Lando, tu mérites d'être aimé, pas parce que tu es un pilote génial, ça, tout le monde le sait, mais parce que tu es l'incarnation même de l'amour. Tu mérites que l'on t'aime sincèrement, profondément, irrémédiablement et que l'on prenne soin de ton cœur comme d'une merveille.
J'espère que tu sauras voir quel être humain incroyable tu es et quelle chance j'ai eu de pouvoir t'aimer de tout mon cœur. Merci de m'avoir baigné de ta lumière, de m'avoir laissé entrer dans ta vie, d'avoir été à mes côtés tout ce temps, de m'avoir laissé pleurer sur ton épaule, de m'avoir consolé.
Je te souhaite une longue vie heureuse et pleine d'amour. Je te souhaite la vie dont tu rêves et que tu as tellement, tellement mérité d'avoir.
Merci d'avoir posé les yeux sur moi. Merci de m'avoir laissé vivre avec toi.
N'arrête jamais de croire en toi.
Reçois l'amour que tu mérites.
Casilia »
Le silence retombe doucement sur les trois amis alors que les mots de Casilia résonnent encore autour d'eux, en eux.
Charles contient à grand-peine ses larmes, tout ce qu'elle a dit trouve échos en lui et quelque part, il sait qu'elle parlait d'eux lorsqu'elle écrivait ces mots pour Lando.
Parce que Charles a aimé Casilia aussi fort que ça, peut-être même plus fort encore et c'est ça, le grand amour.
Quelque part à travers les larmes, Charles sourit, parce qu'il comprend enfin ce qu'elle avait compris bien longtemps avant lui. Casilia savait qu'elle avait trouvé le grand amour, le vrai, elle se savait aimée.
Même s'il n'a jamais eu le courage de le lui dire, elle le savait. Elle est morte en sachant qu'il l'aimait et qu'elle l'aimait aussi.
- Eh, bah, balbutie Carlos. Elle aurait pu être poète.
Lando et Charles laissent échapper un petit rire, toujours aussi bouleversé.
- Je crois que l'on peut ajouter ça à la liste des nombreux talents cachés de Casilia, approuve le Monégasque.
- On n'en fera plus jamais, des comme elle, termine le Britannique.
Charles hésite un instant avant d'esquisser un petit sourire amusé, le sourire de quelqu'un qui trouve un peu par hasard la réponse à une énigme insoluble.
- Moi, je crois que si, il sourit.
Les deux autres ne répondent rien, mais il n'y a rien à répondre à cela.
Casilia était une pionnière, la première femme pilote de Formule 1, la première à effleurer le titre du bout des doigts. Elle ne s'était pas arrêtée aux étoiles, elle voulait devenir le soleil, elle serait devenue le soleil.
Casilia a ouvert la voie, elle a montré au monde qu'être une femme en Formule 1 était une force, elle a montré au monde qu'elle en était capable et que d'autres le seraient après elle.
Et chaque jour qui passe, Charles est un peu plus fier d'avoir pu la voir à l'œuvre, d'avoir été témoin de son talent, de son combat et d'avoir pu l'aider à briller un peu plus fort.
Il s'est tenu aux côtés du soleil et cela vaut bien tous les titres du monde.
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Ce chapitre, c'est juste, la vie <3
C'est l'idée que peu importe à quel point il peut faire sombre, le soleil finit toujours par briller.
Ce chapitre, c'est des jours, des semaines de travail et beaucoup de réécriture parce que je voulais qu'il retransmette exactement l'idée que j'avais depuis de début de cette histoire. Quelque chose de léger, de beau et porteur d'espoir. Parce que l'on ne peut pas toujours être triste et qu'avancer n'est pas synonyme d'oubli.
Je suis fière du résultat et j'espère que vous l'aimerez autant que moi !
J'attends vos retours sur la lettre également, j'ai passé beaucoup de temps à réfléchir à ce que Casilia aurait pu dire et au message qu'elle souhaitait laisser après sa mort. J'espère que vous n'êtes pas déçu haha
La semaine prochaine, Charles retrouvera une personne importante pour lui et déterminante pour la suite de son parcours de rémission. Qui pensez-vous que cela puisse être ? Un indice, ce n'est pas un pilote !
Passez un bon weekend et on se retrouve pour Monaco !
Love
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