𝕱𝔩𝔬𝔴𝔢𝔯 𝔬𝔫 𝔟𝔞𝔱𝔱𝔩𝔢𝔣𝔦𝔢𝔩𝔡
<< __ À l'i....n des unités .....ntes dans la zone A24. Vous ......vacuer ......diatement. Une.... corrompus ....igent dro..... vous. Je répète. À l'intention des... >>
Une horde de pas et un concert d'hurlements couvrent la voix robotique, déjà perturbée par de fortes interférences. En un rien de temps le champ de bataille tombe dans un silence glacial. Le vent rude fouette les ruines d'une ancienne civilisation et balaye l'épais nuage de poussière couvrant la terre aride.
Se révèlent sur le sol des armes brisées, des appareils abandonnés, une infinité de corps métalliques aux formes insolites tant ils ont êtes lacérés, des câbles surgissant de leurs carcasses tels des boyaux, qu'il s'agisse de corrompus ou de constructs.
Dans un coin du paysage retentissent subitement des coups de feu et des cris guturals.
Le soldat, haletant, peine à maintenir le viseur de son fusil sur la cible.
Un énième coup écorche le métal de la construct infectée. De nouveaux un silence, où le soldat peine à empêcher ses émotions se mêler à la réalité. Un instant d'hésitation lui coûterait la vie, peut être même celle de l'humanité. Il le sait. Pourtant sa mort lui parait préférable à sa victoire.
Une victoire qu'il obtiendrait au prix d'un sang familier.
Il n'a qu'à viser la tête et faire exploser sa base de données une bonne fois pour toutes. Mais décidément non, il s'obstine à handicaper la construct sans mettre fin à son fonctionnement. Pour quoi faire ensuite ? Peut-être ramener son cerveau à Baybylona, le soigner de ce foutu virus et retrouver son vrai ami ?
Il sait que c'est impossible.
Quelques secondes plus tôt ils étaient camarades, et en quelques instants le Punishing Virus a eu raison de son frère d'arme, ayant fait basculer sa conscience du côté de l'ennemi. Ces quelques instants ont suffit à éradiquer deux années d'amitié et fraternité comme un vulgaire insecte.
Tous deux sont grièvement blessés.
Alors avant qu'il ne s'effondre il est de son devoir d'emporter le corrompus dans sa mort. Dans le champ de bataille il n'y a pas de temps pour le regret ou le pardon, pas de place pour les adieux ou les sentiments. Au milieu de ce monde de sang, chair et d'os, de fluide vital, métal et squelettes bioniques pas d'espace pour l'humanité et l'espoir.
Pourtant son doigt hésite sur la gâchette. Pour la première fois.
Il ajuste la visière, inspire. Expire.
La base de données.
Pan !
Les deux silhouettes s'effondrent. Et alors, le rouge et le bleu deviennent noir.
༆
<< __ Tenez bon ! >>
Le soldat ouvre ses paupières avec peine. Est-ce une voix du paradis ?
Venue lui dire qu'il a servis l'humanité avec zèle et courage, qu'il a combattu jusqu'au bout pour la plus noble des causes. Elle est douce comme un rayon de soleil.
Ce qui veut tout dire.
Il peut enfin se reposer, oublier la calamité et ces histoires de guerres incessantes dont on ne voyait plus la fin, d'effusions de sangs et larmes que la nuit ne pouvait soigner. Maintenant il peut dormir, dormir; rêver peut être.
Lorsque sa vue se stabilise un peu plus il distingue une silhouette portant l'uniforme d'un personnel soignant. Elle l'appelle sans cesse et bande sa blessure. Le ciel qui se reflète au-dessus du soldat est toujours le même. Rouge, sanglant, meurtrier. Il comprend que cette voix ne vient pas lui annoncer le paradis et le repos éternel, mais le raccroche de force à l'enfer.
Il grimace. D'agacement et de douleurs. La Terre pour laquelle il combattait et souffrait ne voulait pas le libérer.
<< __ Avec cela vous devriez vous en sortir. >>
Le personnel soignant s'apprête à partir. Le soldat le rattrape par le poignet. Maintenant qu'il voit mieux, il s'agit d'une jeune recrue aux longs cheveux polaires. Son doux visage est écorché et boueux.
Si jeune... et pourtant elle doit affronter les affres du champ de bataille. Comme lui. Tous les jours, inlassablement.
Pourquoi s'embêter à réparer des poupées cassées ? Craquelées depuis longtemps à force d'espérer et de tomber. Brisées à force de ramper et de voir leurs coeurs réduits en miettes devant l'impitoyable réalité du champ de bataille.
Tant qu'à faire autant lâcher prise...
À quoi bon risquer sa vie pour des tas de chairs pourrissants ? Les soldats se remplacent facilement. Le personnel soignant est beaucoup plus important.
<< __ Laisse-nous... T-Tous ceux restés... sont aux portes de la mort... Sa toux l'interrompe et très vite du sang s'échappe de sa gorge. Tu peux sauver des tas de vies... t-ta survie est p-prioritaire...
__ Prenez soin de vous, souffle-t-elle avant de s'élancer vers le prochain blessé. >>
Le soldat a un rictus. Dans ce monde où l'on a pas le temps pour s'apitoyer sur les morts et pleurer ses camarades elle se tient, tenace devant l'adversité.
Même le vent tranchant ne la fait pas reculer. Elle avance, la tête fièrement levée, vers un avenir utopique. Ses cheveux d'un blanc immaculé fouettés par le vent tel un drapeau. Blanc sur le rouge du sang et du ciel, du monde. Dans cet environnement hostile et sauvage elle est forte et resplendissante.
Telle une fleur au milieu d'un champ de bataille.
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