Chapitre 108


Le ciel étoilé recouvrait Busan, laissant libre cours à ces amoureux de la nuit de vaquer à leur occupation jusqu'au lever du soleil. Dans l'appartement en bord de mer, cinq hommes dégustaient leur repas autour de la table de la salle à manger. Le petit groupe s'était réuni après le dîner, chacun ayant apporté un petit quelque chose qui remplirait leur estomac pendant qu'ils échangeraient sur la suite des évènements.

Vous êtes devenus meilleurs potes à ce que je vois, les taquina Lian, amusé par les aventures que Jungkook et Namjoon avaient vécues.

Tss, tu rêves, répliquèrent les deux hommes en levant les yeux au ciel.

Cette répartie fit rire le reste du groupe, surtout Jimin qui nota les oreilles rougies de son amant. Assis à ses côtés, il laissa sa tête retomber contre son épaule et posa une main sur l'intérieur de sa cuisse.

Je n'arrive pas à croire que vous vous soyez déguisés en agent technique. Vous auriez pu vous faire choper, lança Taehyung.

C'est ce que je lui ai dit, mais ce mec n'écoute jamais, s'indigna Namjoon.

Tu as failli chier dans ton froc quand le garde a commencé à poser des questions, se moqua Jungkook en riant à gorge déployée.

Le hacker grommela dans sa barbe, mais fut rapidement rassuré par Lian qui vint presser son épaule.

Franchement, je suis fier de toi. Tu as fait du bon boulot pour quelqu'un qui n'avait jamais fait ce genre de chose.

Bon, j'avoue qu'il a très bien géré la situation. Je crois que sans lui, je serais revenu bredouille et puis, on s'est bien marré, confessa le commandant.

T'es en train d'avouer que tu m'aimes bien ? lança le hacker en levant les sourcils de manière subjective.

Ne pousse pas le bouchon.

Encore une fois, toutes les personnes présentes dans la salle à manger se mirent à rire. Quand le calme revint, Jimin offrit un sourire reconnaissant à son ami et leva sa bière afin de trinquer à ce moment.

À Namjoon, sans qui on serait encore dans une impasse.

À Namjoon, répéta Lian en venant claquer sa bière contre celle de son ancien beau-frère.

Les deux autres l'imitèrent, et rapidement, le petit groupe trinqua au dernier arrivant de la bande.

Et maintenant, qu'est-ce qu'on fait ? questionna le médium.

J'ai parlé à Lim ce matin, commença le tatoué. Je lui ai donné toutes les informations nécessaires pour rouvrir l'enquête.

Alors, on attend ? demanda Lian.

Pourquoi ne pas les confronter ? ajouta Jimin tout en continuant de manger. Tu as dit qu'ils étaient à mille lieues de savoir qu'on était remonté jusqu'à eux. C'est le moment idéal.

Je ne suis pas sûr que ce soit une bonne idée, intervint Taehyung. Il vaudrait mieux qu'on fasse les choses dans les règles non ?

Jungkook observa son amant quelques secondes et son cerveau se mit à réfléchir à vive allure. Peu importe la décision de leur capitaine, l'enquête pourrait durer des mois, voire des années, dès que Dae-kun saura que la police le suspecte, il fera tout pour couvrir ses arrières. Tout ça n'apporterait que plus de morts et beaucoup trop de personnes avaient déjà souffert par la faute de ce monstre.

Non, il était temps que cet homme ait aussi peur que ses victimes.

Il a raison, lança le commandant.

Sa réponse planta un certain suspense dans la pièce. De qui parlait-il ? Qui avait raison ? En voyant le regard interrogateur de ses quatre compagnons, Jungkook laissa échapper un petit rire avant de prendre la parole.

Jimin a raison, précisa ce dernier.

Les yeux du concerné s'écarquillèrent tant il était étonné par ce qu'il venait d'entendre. Reconnaissant d'être écouté, il posa délicatement sa main sur la cuisse de son amant et la pressa légèrement.

On a attendu trop longtemps, reprit le tatoué d'un air plus sérieux. Si Lim accepte de rouvrir l'enquête, ce qui n'est pas gagné, il faudra attendre encore des mois avant d'avoir le droit de faire quelque chose. Quand il se sentira menacé, Dae-kun fera tuer tout le monde sans la moindre hésitation, et si par miracle, il jouait franc-jeu, il a une armée d'avocats qui n'aurait aucun mal à rendre toutes nos preuves irrecevables. Même si le capitaine m'a donné l'autorisation d'utiliser les micros et les caméras, rien de ce que nous avons entendu à Séoul n'est officiel, alors légalement, nous n'avons rien. Il faut qu'on ait des éléments solides, de véritables aveux, sinon il s'en sortira indemne et on se fera tous tuer, expliqua-t-il.

Lian et Taehyung se fixèrent un instant avant de soupirer à l'unisson. Jimin était têtu, mais si Jungkook se joignait à lui, ils n'avaient aucune chance de gagner.

Ok, concéda l'aîné des deux frères. À quoi tu penses ?

Murphy a parlé d'un enregistrement qui pouvait incriminer Dae-kun. Le sénateur Park s'en sert comme assurance vie pour se protéger, mais aussi pour te protéger, révéla le commandant en regardant son bien-aimé.

Celui-ci eut un mouvement de recul, surpris par ce qu'il venait d'entendre. Son père voulait le protéger ? Il avait presque envie de rire quand on savait qu'il était celui qui l'avait martyrisé toute sa vie.

Tu as dû mal entendre, ricana ce dernier pour tenter de cacher la tristesse qui venait de le frapper.

Non, affirma Jungkook d'une voix prudente. Cette discussion à laquelle tu as assisté durant la projection a été enregistrée par ton père. Apparemment, lui et le premier ministre ne sont pas si amis que ça. Jae-sok ne lui fait pas confiance, donc il se sert de ça pour assurer ses arrières, mais aussi les tiennes. S'il vous arrive quelque chose, cet enregistrement sera envoyé à toutes les chaînes d'info du pays.

Alors pourquoi il ne l'a pas fait quand j'ai été poignardé ? Ou quand Ramez a essayé de me tuer ? répliqua Jimin sans attendre une réelle réponse. Ce fils de pute ne pense qu'à lui et même si c'était vrai, ça n'excuse en rien ce qui s'est passé. Je ne veux pas de sa protection ! Ce que je veux, c'est qu'il paie pour ce qu'il a fait !

Je sais, et ça arrivera, mais ce que je veux dire, c'est que si on parvient à mettre la main sur cet enregistrement, on aura de quoi le faire tomber. Et avec des aveux complets, ce sera encore mieux. Peu importe les avocats qu'il engagera, Dae-kun ne pourra jamais s'en sortir si on est irréprochable, argumenta le tatoué en caressant tendrement la nuque de son cadet, tentant ainsi d'apaiser cette rancœur qui le gagnait.

Les trois autres hommes assistaient à cet échange tels des spectateurs devant un film, et impuissants face aux divers sentiments des personnages.

D'accord, admettons qu'on te suive, quel est le plan ? demanda le lieutenant.

Le commanditaire de cette idée sonda son amant un instant. Sans parler, le couple parvint à se comprendre. Ils savaient tous les deux ce qui leur restait à faire alors, ce fut le plus vieux qui prit la parole.

On va aller à Séoul, déclara Jungkook.

Rien que vous deux ? s'étonna Lian.

Oui. Je sais ce que vous allez dire, mais sur ce coup, il va falloir me faire confiance.

Kook, tu peux pas-

Tae, s'il te plaît, l'interrompit le concerné, las. Durant mon voyage à Séoul, j'ai appris qu'il y avait une taupe parmi nos hommes, je ne veux pas risquer d'autre dérapage.

Quoi ? s'exclamèrent les trois hommes qui étaient dans l'ignorance.

Jungkook jeta un coup d'œil à son camarade de voyage, et ce dernier hocha simplement la tête lui confirmant qu'il était temps de dire ce qu'ils avaient découvert.

Hyun, confessa enfin Jungkook, la déception perceptible dans sa voix.

Attends, quand tu dis Hyun, tu parles de Cho Hyun ? questionna Lian, circonspect.

Oui.

Jimin n'en croyait pas ses oreilles. Hyun, le premier policier en qui il avait placé sa confiance lorsqu'il était à l'asile, les avait trahis. Pourquoi ? Comment ? Alors l'amitié qu'il pensait avoir noué avec lui n'était qu'un moyen de le manipuler ?

Est-ce que tu sais pourquoi ? demanda-t-il d'une voix tremblante.

Jungkook porta son attention sur son amant et y vit le même désappointement qu'il ressentait.

Je suis allé le voir hier soir avant de rentrer à la maison. Moi aussi je voulais des réponses sur ses actes, et après lui avoir très certainement cassé une molaire, il m'a dit que Murphy l'avait fait chanter en utilisant sa fille. Ils lui ont dit que s'il ne faisait pas tout ce qu'ils voulaient, sa fille serait vendue comme esclave sexuelle. La petite n'a que cinq ans, souffla le commandant, le cœur lourd.

— Les fils de pute ! argua Lian en se levant de sa chaise, surprenant Namjoon qui sursauta légèrement.

Ce dernier porta son attention sur sa personne et prit sa main pour le forcer à se rassoir et laisser ainsi le commandant terminer ses explications.

Face à eux, près de son petit ami, Jimin fixait la table, le regard vide, mais l'esprit totalement concentré sur la conversation. Pour lui, ce motif était argument valable pour expliquer son geste. Il refusait de croire qu'un homme aussi doux et bienveillant que Cho Hyun l'ait trahi par plaisir ou sadisme.

Apparemment, ils l'ont contacté un peu avant que Ramez ne t'agresse ici à la maison. Depuis, il était missionné pour leur rapporter nos moindres faits et gestes, mais je ne pense pas qu'il l'ait vraiment fait. Il ne leur a pas dit pour mon voyage à Séoul, et pourtant il était au courant. Il m'a aussi juré qu'il n'était pas au courant pour ton enlèvement.

Tu le crois ? intervint Taehyung.

Je t'avoue qu'au début non, mais j'ai vu son regard, Tae. Il était terrifié.

Moi, je le crois, déclara Jimin en grattant nerveusement l'ongle de son pouce. Il l'a fait pour sa fille. On aurait tous fait pareil.

C'est vrai, mais ça ne pardonne pas tout, reprit le tatoué. Il aurait dû venir nous en parler.

Jungkook a raison, fit Lian. Nous sommes ses coéquipiers et ses amis. Même s'il n'a pas entièrement fait ce qu'on lui demandait, ça reste de la trahison.

Vous êtes sérieux ? s'agaça le plus jeune. Tae, tu vas devenir père. Qu'est-ce que tu ferais si c'étaient tes enfants ? demanda-t-il avant de se tourner vers son compagnon. Et toi ? Si c'était notre enfant à la place de cette petite fille, qu'aurais-tu fait ?

Je les aurais tués. Tous jusqu'au dernier.

C'est faux, le contredit Jimin d'une voix calme. Si sa vie était en jeu et que ces hommes te le demandaient, je sais que tu mettrais la ville à feu et à sang si ça pouvait le sauver. Hyun a agi comme un père. Je suis déçu par ses actes, mais je peux le comprendre.

Donc tu ne lui en veux pas ? en conclut Taehyung.

Si, mais je ne serai pas en colère contre lui toute ma vie. Je ne vais pas abandonner mon ami parce qu'il a choisi sa chair. J'aurais fait la même chose, peut-être pire.

Un silence lourd de sens s'installa dans la pièce. Aucun des trois policiers ne savait quoi répondre, mais surtout, ils devaient avouer que leur ami avait raison. Namjoon assistait à la scène en simple spectateur. N'ayant aucun lien avec le concerné par la conversation, il se sentait en trop, cependant, il ne dit rien, se contentant d'observer.

Très bien, et où est Hyun maintenant ? questionna Lian.

Normalement, il va quitter la ville.

Tu ne penses pas que ça va éveiller les soupçons ? demanda le lieutenant.

C'est les vacances de fin d'année, et puis je lui ai dit de tout payer en liquide. J'ai un contact au Japon qui doit aller le chercher à l'aéroport de Kyoto.

Parfait, il y sera en sécurité et la petite aussi, souffla Jimin, soulagé.

Maintenant qu'il avait tout avoué, Jungkook se sentait bien plus léger. Mentir à son amant était la pire des tortures pour lui, cela lui rappelait que trop bien toutes ces fois où leur relation avait été mise à mal à cause de non-dits. Désormais, ils s'étaient promis l'honnêteté, et ils s'y tiendraient, même si la vérité faisait parfois plus mal que l'ignorance.

C'est quoi la suite de ton plan ? reprit Taehyung, ramenant son frère à la réalité.

Jimin et moi allons à Séoul et nous allons les confronter.

C'est du suicide, lança Lian, visiblement contre cette idée.

Le concerné par ce voyage tourna la tête vers son amant, confus. Jungkook n'avait pas encore énoncé le plan qui avait mijoté dans sa tête depuis son retour à Busan. Il n'en avait parlé à personne, même pas à lui, et à présent, il était curieux de savoir ce qu'il leur réservait.

C'est du suicide si on fonce tête baissée, mais est-ce que je suis le genre à faire ça ?

Oui ! répondirent les quatre personnes avec lui.

En entendant cela, Jungkook écarquilla les yeux, déclenchant ainsi un rire général. Tout aussi amusé, Jimin glissa sa main sur sa nuque, lui offrant ainsi un contact réconfortant. Jouant la carte du mélodrame, le tatoué afficha une moue boudeuse avant de rouler des yeux et de reprendre.

Donc, je disais, avant que vous portiez un jugement totalement erroné sur ma personne, on ne va pas foncer tête baissée. Il nous faut une carte solide, quelque chose qui nous mettra tous en sécurité, mais qui fera peur à nos adversaires.

À quoi tu penses ? questionna le médium.

Est-ce que tu serais capable de répéter mot pour mot ce que ton père et Dae-kun se sont dit ce soir-là ?

Jimin observa son petit ami quelques secondes, les sourcils froncés, puis quand il comprit où il voulait en venir, un sourire en coin prit vie sur ses lèvres.

Eh les amoureux, vous semblez sur la même longueur d'onde, mais nous, on ne comprend rien, lança Taehyung.

Dae-kun a parlé d'un enregistrement compromettant que Jae-sok aurait en sa possession, pas vrai ? reprit Jungkook en portant son attention sur Namjoon.

Oui, c'est ce qu'il a dit.

Eh bien, on va le recréer, déclara enfin le commandant. On se souvient tous comment Woong nous avait berné avec cette vidéo en nous faisant croire, enfin surtout à moi, que c'était Lian et Jimin.

Comment l'oublier, tu as failli me péter la mâchoire, ricana Lian.

Le souvenir de ce moment d'angoisse et d'agonie pour le groupe d'amis n'était plus aussi douloureux qu'autrefois. Aujourd'hui, Jungkook pouvait en parler sans ressentir la culpabilité qui le rongeait. Il avait fauté et en avait assumé les conséquences. Ce manque de confiance lui avait coûté l'amour de sa vie qui était parti loin de lui durant plusieurs mois, mais au bout du compte, ils en étaient ressortis plus forts.

Oui, enfin, tu t'es bien vengé, répliqua le commandant.

On peut éviter de ressasser ça, s'il vous plaît ? intervint Jimin pour qui ce moment n'était qu'un souvenir effrayant.

En entendant sa voix branlante, Jungkook le sonda un instant et prit sa main dans la sienne. Avec délicatesse, il embrassa celle-ci en signe d'apaisement, puis déposa un baiser sur sa tempe.

Comment tu comptes créer un enregistrement ? interrogea Lian pour changer de sujet.

Je crois que c'est là que j'interviens, parla Namjoon qui était resté très distrait.

Exactement. Est-ce que tu peux recréer leur voix ?

Oui, il me suffit de trouver des interviews ou encore des vidéos où ils parlent et ça ne devrait pas être très compliqué, assura le hacker.

Parfait, voilà la première partie du plan. Ensuite, Jimin attirera leur attention afin que j'aie le champ libre pour agir. Durant notre petite escapade, j'ai pu observer les lieux, et j'ai trouvé un moyen d'entrer dans l'immeuble sans me faire griller par les clowns de la sécurité. Ce sera du sport, mais avec le matériel adéquat et une bonne dose de courage ça devrait le faire.

Hm, je n'aime pas du tout cette phrase, qu'est-ce que tu mijotes ? demanda Jimin, sceptique.

Désolé microbe, si je te le dis tout de suite, tu vas m'attacher aux barreaux du lit.

En représailles, le médium pinça l'intérieur de sa cuisse, récoltant un sifflement de douleur suivi d'un rire grave et d'une moue enfantine.

Et ensuite ? les pressa Taehyung.

Dae-kun est un paranoïaque, s'il se retrouve seul avec Jimin sur un terrain connu, il aura l'impression d'avoir la mainmise sur lui. Il se sentira en confiance, et vous savez bien comment ça se passe avec ce genre de personne.

— Il avouera, en conclut Lian, un air sérieux sur le visage.

C'est ça. Il avouera tout ce qu'il a fait et c'est comme ça qu'on l'aura.

Donc, je résume, commença le lieutenant en se levant.

La nervosité qu'il ressentait était perceptible à travers son langage corporel. Ce dernier mordait nerveusement le bout de son pouce et avait commencé à faire les cents pas, le regard rivé sur le sol.

Namjoon crée un enregistrement à partir des souvenirs que Jimin a gardés de la projection. Il se sert de ça pour attirer Dae-kun dans un lieu public pour que toi, tu puisses t'introduire dans le bâtiment, et ensuite quoi ? Jimin lui donne rendez-vous dans son bureau en priant pour qu'il se mette à table ? C'est un paranoïaque, tu penses vraiment qu'il va tomber dans le panneau ? Tu es prêt à risquer vos vies sur une supposition ?

Tu as une meilleure idée ? demanda Jungkook, ses iris ancrés dans celle de son aîné. Je suis pas plus enchanté que toi de le jeter dans la gueule du loup, mais Dae-kun le déteste et il a peur de lui. Si Jimin le défit, son orgueil sera touché et il va agir par impulsivité. Il va vouloir lui montrer qui est le plus fort, comme il l'a toujours fait. On ne peut plus vivre dans la peur, que ce soit pour nous ou pour notre entourage. C'est pas une vie, Tae. Tout ça doit prendre fin.

Je suis d'accord pour le faire, intervint Jimin.

Bien-sûr que tu es d'accord. Tu es aussi suicidaire que lui ! Vous faites la paire.

Peut-être que Tae et moi, on devrait venir avec vous ? proposa Lian. Vous auriez du renfort.

Non, la ville a besoin de la police. Je peux pas priver la crim de ses meilleurs éléments. Avec Rose qui est absente, j'ai besoin de vous sur place. On doit pas oublier que notre devoir, c'est aussi d'aider les citoyens de cette ville.

Donc tu nous demandes de rester sagement ici, pendant que vous allez risquer votre vie ? reprit Taehyung les mains sur les hanches.

Ce que je te demande Tae, c'est de me faire confiance. Non, de nous faire confiance. Jimin a passé des heures avec vous sur le ring, en plus de tous les entraînements que je lui ai donnés. Il est capable de se défendre et je serai là pour couvrir ses arrières. On fera le nécessaire et vos femmes pourront enfin rentrer à la maison.

Les deux frères se fixèrent de longues secondes, débattant silencieusement. Le côté protecteur de Taehyung lui interdisait de les laisser affronter cette épreuve seuls, mais que pouvait-il faire face à deux têtes de mules comme ces deux-là ? Il ne lui restait plus qu'à prier tous les dieux qu'il connaissait pour qu'ils reviennent en vie.

S'il y a le moindre souci, vous serez seul là-bas, souffla le lieutenant dans une dernière tentative.

J'ai des contacts, Tae, tu as oublié ? lui sourit le commandant. Militaire un jour, militaire toujours. Si c'est vraiment la merde, je saurai qui appeler.

On doit mettre fin à tout ça, intervint Jimin d'une voix douce.

Face à ce regard de chien battu et les arguments de son frère, Taehyung n'était plus de taille. Quand un long soupir le quitta, le couple comprit qu'ils avaient gagné.

Je vous jure que si vous y restez, je vais vous chercher en enfer et je vous tuerai à nouveau !

Les concernés se mirent à rire. Jimin se leva et parcourut la distance qui le séparait de son aîné. Il le prit ainsi dans ses bras, tentant par ce geste d'apaiser ses craintes, pourtant, ces mêmes peurs le rongeaient lentement. Il savait que tout cela était nécessaire, mais désormais, la machine était lancée et leur avenir allait bientôt se jouer.

Quand est-ce que vous partez ? demanda Namjoon, brisant le silence qui les entourait.

Dès que tu auras fait l'enregistrement, répondit Jungkook.

J'ai simplement besoin du texte et le logiciel fera le reste. On a de la chance, nos cibles sont des personnalités publiques. Ce sera très facile de copier leur voix. Si j'ai le texte ce soir, l'enregistrement sera prêt demain.

Ok, je t'envoie ça par texto, annonça Jimin.

Le hacker hocha la tête en souriant puis termina sa bière. Il était tard, et vu ce que Jungkook avait prévu, les deux amants allaient avoir besoin de repos. Ce fut alors sans même avoir à se consulter que les trois invités firent leurs adieux. Taehyung fut celui qui eut le plus de mal à se séparer d'eux, craignant que cela ne soit leur dernier contact. Cependant, Jungkook lui promit de l'appeler avant leur départ le lendemain et de le tenir au courant de l'avancée de leur mission. Très peu rassuré, le lieutenant céda tout de même et s'en alla avec ses deux amis.

Lorsque le couple se retrouva seul, un silence posséda l'appartement. Chacun perdu dans ses pensées, ils remirent leur salle à manger et la cuisine en l'état, puis allèrent se coucher. Comme convenu, Jimin mit par écrit sur son téléphone, l'échange entre son père et le premier ministre. En pianotant ces mots sur son clavier, il eut l'impression de revivre la projection et malgré lui, le manque de Yoongi se fit encore plus grand.

Même s'il tentait de cacher sa peine en tournant le dos à son petit ami, Jungkook entendit sans mal ses sanglots qu'il tentait d'étouffer. Comprenant son mal-être, il le prit simplement dans ses bras, sans rien dire. À cet instant précis, Jimin n'avait pas besoin de discours rassurant. Il désirait uniquement la présence de sa moitié et ce dernier accomplit sa mission à la perfection, le serrant contre lui jusqu'à ce qu'il sombre dans un sommeil profond.

⊱⋅ ──────────── ⋅⊰

Comme promis, Namjoon avait créé l'enregistrement en quelques heures seulement. Avant de partir à Séoul, le couple lui rendit visite, récupérant ainsi le fichier que le hacker avait installé sur un téléphone qu'il donna à Jimin. Ce dernier comptait se servir de cet objet comme moyen de pression, mais aussi comme bouclier.

Après avoir fait leurs adieux, les deux hommes quittèrent le domicile de Namjoon et prirent la direction de la capitale. Durant le trajet, ils assistèrent au couché de soleil, bercé par le silence qui régnait en maître dans la voiture. Jimin observait le paysage qui défilait, ses doigts caressant tendrement la main de son amant qui était posée sur sa cuisse. Ils redoutaient tous les deux la suite des évènements, mais savaient que c'était nécessaire. Ils devaient rester unis et affronter cette épreuve ensemble, cependant le plus jeune craignait pour la vie de son bien-aimé, et il savait que ce dernier avait les mêmes craintes que lui.

Une fois arrivés à l'hôtel, Jimin passa en boucle l'enregistrement et fut surpris de la qualité de celui-ci. Il eut l'impression d'être ramené dans la chambre où il avait entendu cette conversation la première fois. Assis en tailleur au centre du lit, il fixait le téléphone, le regard vide.

Eh, microbe, appela Jungkook, le ramenant à la réalité.

Hm ?

Éteins ça, ordonna le brun d'une voix douce. C'est la vingtième fois que tu l'écoutes.

Jimin obéit et posa le téléphone sur la table de chevet. Il porta ensuite son attention sur son compagnon qui sortait tout juste de la douche. Tout en fouillant dans leur sac, ce dernier laissa tomber la serviette qui couvrait son intimité, lui offrant une vue des plus exquises sur son fessier musclé. Lorsqu'il trouva enfin ce qu'il cherchait, Jungkook enfila son sous-vêtement puis pivota vers son amant.

Celui-ci l'observait, le visage fermé, rendant ainsi presque impossible de deviner à quoi il pensait. Un sourire compatissant et doux sur les lèvres, le tatoué grimpa sur le lit et l'enlaça, le forçant à s'allonger sur le flanc. Jimin se lova immédiatement contre lui, son visage enfoui dans son cou, respirant son odeur réconfortante.

Ça va aller, ok ?

J'aimerais être aussi serein que toi, murmura le plus jeune.

Tu veux qu'on annule tout ?

Non. J'ai simplement peur pour toi.

Jungkook se mit à rire, attendri par l'inquiétude de son petit ami. Sans perdre son sourire, il se recula afin de voir son visage et lorsqu'il croisa enfin son regard, il vint déposer un baiser rassurant sur ses lèvres pulpeuses.

Il ne m'arrivera rien, je te le promets. Dans quelques jours, tout ça ne sera qu'un lointain souvenir.

Jimin ne répondit rien. Il se contenta de hocher la tête en venant de nouveau se fondre contre son torse nu et brûlant. Son corps et son parfum étaient les choses les plus rassurantes pour lui à cet instant, et comme à chaque fois qu'il se retrouvait dans ses bras, il parvint à trouver un sommeil reposant.

⊱⋅ ──────────── ⋅⊰

Jungkook s'était réveillé bien avant son compagnon. Ne voulant pas interrompre son repos, il était sorti en douce de la chambre, laissant derrière lui une note où il lui demandait de ne pas quitter la chambre avant son retour.

Ayant des contacts peu recommandables en ville, le brun décida d'aller à leur rencontre, seul. Afin d'être préparé pour ce qui l'attendait, il avait besoin de matériel et ce n'était pas au poste de police qu'il pourrait trouver ce qu'il cherchait. Après de longues négociations et une somme d'argent astronomique dépensée, Jungkook quitta le vieil entrepôt où avait eu lieu le rendez-vous. Avant de retrouver son compagnon, il alla faire une dernière course, puis acheta le petit déjeuner.

À l'hôtel, Jimin dormait encore profondément. Allongé sur le ventre au milieu du lit, son visage enfoui dans le coussin de son compagnon, il lui offrait un spectacle du plus attendrissant.

Jungkook posa délicatement leurs cafés et les viennoiseries sur la table puis retira sa veste. D'un pas lent, il s'approcha du lit et vint surplomber son amant de son corps sculpté. Ce dernier grommela dans sa barbe, mais garda les yeux fermés, savourant simplement le contact des mains brûlantes qui caressaient sa peau.

Allez microbe, réveille-toi, susurra le commandant avant de déposer un baiser derrière son oreille.

Hm.

J'ai apporté le petit déj'.

Jimin soupira de bien-être en sentant ses lèvres contre son épiderme et cligna plusieurs fois des paupières. Encore somnolant, il frotta ses yeux, avant de se tourner enfin sur le dos pour découvrir le visage de son petit ami qui le couvait d'un regard débordant d'affection.

Bonjour beauté, murmura Jungkook en l'embrassant chastement. Tu as bien dormi ?

Peinant à émerger, le médium hocha la tête, une moue boudeuse sur les lèvres. Cette attitude bien plus enfantine que d'ordinaire fit rire le tatoué qui caressait l'os de sa mâchoire. Désireux d'un contact plus chaleureux, Jimin repoussa le drap qui recouvrait la partie inférieure de son corps et écarta les jambes, accueillant ainsi son amant entre elles tandis que ses bras vinrent entourer son cou. Leur bassin pressé l'un contre l'autre, le tatoué se fit violence pour ne pas le taquiner.

Allez, lève-toi, le café va refroidir, fit-il en l'embrassant à nouveau.

Câlin, quémanda le plus jeune.

Incapable de lui résister, Jungkook obéit, enfouissant son visage dans son cou. Ils restèrent ainsi de longues minutes, savourant la chaleur de l'autre et profitant du silence qui les entourait. Jimin semblait être retombé dans sa somnolence, cependant, le commandant pouvait sentir ses doigts caresser délicatement son cuir chevelu, lui offrant un massage.

Je ne suis pas trop lourd ? demanda-t-il, inquiet du confort de son bien-aimé.

Non. Reste comme ça s'il te plaît.

Le café va refroidir, annonça Jungkook en se redressant sur les coudes. Je t'ai acheté des croissants dans une boulangerie française.

T'es le meilleur, souffla Jimin en venant à la rencontre de ses lèvres.

Un jour on prendra notre petit déjeuner au pied de la tour Eiffel.

Le médium ancra ses iris à ceux de sa moitié et l'observa un instant. Le bonheur qu'ils méritaient était à portée de bras, mais avant d'espérer ne serait-ce que l'effleurer, ils devaient affronter le pire des démons, et ce détail qui le terrifiait.

Promis ?

Promis, assura le plus vieux.

Le couple échangea un dernier baiser, puis se leva enfin. Pendant qu'ils dégustaient leur premier repas, Jungkook fit une piqûre de rappel de leur plan. En théorie, tout était simple et sans accroche, toutefois, ils étaient tous les deux conscients que la réalité comportait bien des risques.

Une fois le ventre plein, Jimin se réfugia dans la salle de bain où il se prépara avant d'en sortir frais et habillé. Le commandant, pendant ce temps, s'était installé devant son ordinateur, vérifiant que tout allait bien pour ses collègues au commissariat. Il fut sorti de sa rêverie lorsque les mains chaudes de son compagnon se posèrent sur ses épaules.

Tu es prêt ? demanda-t-il.

Oui. Qu'est-ce que tu fais ? questionna le blond en humant les cheveux de son aîné.

Je répondais à quelques mails.

Ok. On y va ?

Oui, mais avant, j'ai un truc pour toi.

Méfiant, Jimin plissa légèrement les yeux et se décala afin d'être face à son petit ami. Il l'observa rejoindre le porte-manteau où se trouvaient leurs affaires et le vit fouiller dans la poche de sa veste. Il en sortit une petite boîte noire qui lui provoqua un froncement de sourcils.

Jeon Jungkook, qu'est-ce que tu mijotes ?

Ne me regarde pas comme ça, ricana le concerné en venant vers lui. J'aurais préféré te l'offrir dans d'autres circonstances, mais on va en avoir besoin.

Jimin pouvait entendre, au ton de sa voix, la nervosité que son amant ressentait. Les mains légèrement tremblantes, il ouvrit la boîte, dévoilant ainsi deux pendentifs assortis. L'un était un croissant de lune noir et l'autre, un soleil doré, mais ensemble, ils formaient un tout.

Ce n'est pas grand-chose, mais je-

Tais-toi, ils sont magnifiques, l'interrompit Jimin en prenant délicatement les bijoux dans ses mains.

Prends celui que tu préfères, répondit le commandant sans le quitter du regard, ses deux mains posées sur les hanches de son cadet.

Le médium observa les pendentifs, puis les décrocha délicatement. Il garda la lune au creux de sa main et passa le deuxième bijou autour du cou de son compagnon.

Le soleil est pour toi, souffla-t-il en se hissant sur la pointe des pieds afin de fermer le fermoir.

Pourquoi ? gloussa Jungkook, surpris par son choix.

Parce que tu es le soleil qui illumine ma vie.

Il se passa de longues secondes durant lesquelles ne policier ne répondit rien. Profondément touché par ses paroles, il sentit ses joues se réchauffer et son rythme cardiaque s'accélérer. Il était peut-être la lumière dans la vie de Jimin, mais lui était devenu son oxygène, la raison pour laquelle il se levait tous les matins. L'amour qu'il lui portait était indescriptible, et de savoir que ce dernier ressentait la même chose pour lui était revigorant.

C'est si niais ce que tu viens de dire, ricana Jungkook pour cacher son embarras.

Peut-être, mais tu rougis, donc ça t'a plu.

D'accord, j'avoue, c'était mignon.

En riant, Jimin vint à la rencontre de ses lèvres. Lorsqu'ils se séparèrent, le commandant reprit la parole, sans perdre son amusant.

Tu dis ça aussi parce que je te chauffe le cul, plaisanta ce dernier en venant malaxer son fessier prisonnier dans son jean noir.

Tais-toi, tu casses tout le romantisme, pesta le médium en frappant son épaule.

Désolé microbe, c'était trop tentant.

Le médium continua de rire et donna le deuxième bijou à son bien-aimé qui l'attacha autour de son cou et se recula. Du bout des doigts, il effleura l'objet avec tendresse et planta son regard dans celui de son vis-à-vis.

Merci pour ce cadeau, je l'adore.

Je suis content qu'il te plaise, répondit Jungkook, en caressant sa joue.

Tu as dit qu'on allait en avoir besoin. Pourquoi ?

Je me suis procuré une mini-caméra. On va pouvoir la coller sur la petite pierre. Grâce à ça, on aura des preuves recevables de tout ce qui se passera, expliqua le tatoué.

Ce sera recevable devant le juge ?

Oui. C'est une caméra personnelle.

Jimin acquiesça sans rien répliquer. Il avait une parfaite confiance en son compagnon. Ce dernier savait ce qu'il faisait alors, il était prêt à le suivre les yeux fermés.

Après ce moment de tendresse, le couple décida de prendre un moment pour eux. Avant d'affronter le diable, ils ressentaient le besoin de passer un moment de bonheur ensemble. Ce fut donc main dans la main qu'ils quittèrent leur chambre d'hôtel avec la ferme intention d'être heureux, peut-être une dernière fois.

⊱⋅ ──────────── ⋅⊰

L'après-midi touchait à sa fin. Dans leur chambre d'hôtel, Jungkook et son petit ami mettaient en place les derniers détails de la première partie de leur plan. Afin d'assurer un semblant de sécurité pour son amant, le commandant avait, durant l'après-midi, mis en place des outils télécommandés qui lui seraient indispensables pour la suite des évènements. Après avoir vérifié que tout fonctionnait, il donna à Jimin le feu vert pour lancer la suite de la mission.

Assis en tailleur sur son lit, son téléphone en main, le médium sélectionna le numéro de leur cible et amena l'appareil contre son oreille. Les tonalités se succédèrent jusqu'à ce que la voix d'une jeune femme ne résonne dans l'appareil.

Secrétaire de monsieur Yoon, en quoi puis-je vous aider ?

Bonjour, serait-il possible de parler à monsieur Yoon s'il vous plaît ? demanda poliment Jimin.

Je suis désolé, mais il est en réunion actuellement. Puis-je lui passer un message ?

Non, je veux lui parler en personne. C'est urgent, martela le blond, la mine fermée.

Je comprends, monsieur, mais j'ai des consignes. Vous vous doutez bien que monsieur Yoon est un homme extrêmement occupé, il ne peut pas-

Dites-lui que Park Jimin, le fils du sénateur Park, veut lui parler, l'interrompit le médium, agacé. Croyez-moi, il prendra cet appel.

La jeune femme au bout du fils se tut un moment avant de soupirer et de prendre la parole.

Très bien monsieur Park, je vous fais patienter.

Merci.

Une petite mélodie résonna dans le haut-parleur du téléphone, leur indiquant que la secrétaire les avait mis en attente. Les secondes s'écoulaient et l'anxiété du blond montait en flèche. Comment cet échange allait-il se passer ? Dae-kun tomberait-il dans le panneau ? Pour augmenter leur chance de réussite, Namjoon était parvenu à pirater la ligne téléphonique de Jae-sok durant quelques heures. En effet, le couple était persuadé qu'en apprenant que Jimin avait cet enregistrement en sa possession, le premier ministre chercherait à contacter celui qui était à l'origine de cette preuve. Pour que leur plan fonctionne, aucune communication entre les deux hommes ne devait être possible.

Allô.

Jimin sentit un frisson désagréable le traverser lorsque cette voix grave et qu'il n'avait pas oubliée, arriva à ses tympans. Avant de prendre la parole, il prit une grande inspiration pour calmer son rythme cardiaque et la soudaine colère qui venait de l'envahir.

Bonjour, Monsieur le Premier Ministre, lança le médium avec le plus d'arrogance possible.

Bonjour, en quoi puis-je vous aider ? répondit Dae-kun d'un ton assuré.

Était-il aussi sûr de lui ? Ou, comme son interlocuteur, faisait-il semblant ? Peu importe, le jeune médium avait un rôle à jouer et il venait d'entrer dans la peau de son personnage.

Oh, allons, est-ce qu'on va vraiment faire comme si vous ne connaissiez pas la raison de mon appel ?

Face à lui, Jungkook, qui venait de le rejoindre, caressait tendrement son dos, lui offrant ainsi un réconfort silencieux. Même s'il ne lui disait pas, le commandant pouvait sentir à quel point les muscles de son amant étaient tendus. Son regard sombre transmettait toute l'amertume qu'il ressentait à cet instant et il le comprenait.

Est-ce qu'on se connaît ? Je suis désolé, mais je suis très occupé alors, si vous n'avez rien de plus à dire, je vais raccrocher.

Je sais ce que vous avez fait, alors cessez immédiatement ce petit jeu et faites nous gagner du temps, cingla Jimin à court de patience. J'ai une copie de l'enregistrement de mon père, retrouvez-moi dans une heure au Moonlight Café. Sachez que je vous surveille. Si vous faites un autre arrêt entre votre bureau et le café, je le saurai. Il en va de même pour vos appels ou ceux de vos hommes. Si vous parlez de notre échange à qui que ce soit, le monde entier saura ce que vous avez fait la nuit du treize janvier deux milles quinze.

Un long silence s'installa entre les deux hommes. À l'autre bout du fil, le médium pouvait entendre la respiration irrégulière de son interlocuteur et imaginer la peur qu'il devait ressentir fut si grisante, qu'il en fut effrayé.

Qui me dit que tu ne bluffes pas ? lança Dae-kun d'un ton grave et menaçant.

Si vous êtes si sûr de vous, ne venez pas et vous en subirez les conséquences.

Sans attendre une quelconque réponse, Jimin mit fin à l'appel. Subitement, il eut la sensation que son téléphone était comme de l'acide contre sa paume, alors il lança l'appareil entre les deux oreillers avant de se mettre debout. La main contre sa poitrine et la respiration rapide, il se mit à faire les cent pas, tentant par ce moyen de retrouver un semblant de contrôle sur son corps.

Remarquant son anxiété et sa colère, Jungkook se leva et s'approcha de lui. Il ne voulait pas le brusquer, alors il resta simplement à ses côtés, le laissant ainsi décider de ce dont il avait besoin. Le choix du médium fut vite fait. Sans attendre une seconde de plus, il combla l'espace qui les séparait et vint se lover contre lui, ses bras fins entourant son buste.

Son visage enfoui dans son cou, il respirait difficilement l'odeur boisée qui émanait de la peau de son compagnon. Cet effluve l'aida peu à peu à retrouver son calme tandis que Jungkook caressait tendrement sa nuque en signe de réconfort.

Est-ce que ça va aller ? demanda le commandant.

J'en sais rien. Je ne suis pas sûr de réussir à contenir mon envie de lui crever les yeux, répondit Jimin d'une voix tremblante.

Je comprends, mais tu ne dois pas laisser la colère prendre le dessus, répondit Jungkook en déposant un baiser sur le haut de son crâne. Tu n'auras pas besoin de le retenir longtemps. Dès que le soleil sera couché, je pourrai monter sur le toit et passer sur l'autre bâtiment. Quand j'y serai, tu pourras mettre fin à la conversation, mais le plus important, c'est que tu ne quittes pas les lieux tant qu'ils ne sont pas partis, ok ?

Hm, grommela le médium. Je ne peux pas juste lui crever un œil ? Juste un ? implora-t-il en se reculant, offrant ainsi à son compagnon une moue des plus adorables.

Tu pourras, mais plus tard, ricana le plus vieux en dégageant une mèche de cheveux de son visage. Avant ça, il faut lui faire cracher le morceau.

Et pourquoi pas la torture ? Ça a fonctionné avec Yeosang.

T'es pire que moi en fait.

Le rire rauque de Jungkook emplit la chambre, détendant l'atmosphère entre eux. Même s'il était contrarié par le coup de fil qu'il venait de passer, Jimin ne put rester sérieux.

Tu es prêt ? questionna le plus vieux en prenant le visage de son compagnon en coupe.

Oui.

Je peux pas te donner d'arme parce qu'ils te fouilleront forcément avant de te laisser entrer, mais n'oublie pas ce que je t'ai appris.

Sois une anguille, analyse, anticipe et frappe de toutes tes forces dès que tu as une ouverture, récita Jimin, se rappelant mot pour mot les conseils de son petit ami.

Exactement. Si tu vois que ça dégénère, tu donnes le signal et j'interviendrai, mais si jamais on vient à être séparés, souviens-toi de la planque dont je t'ai parlé, j'y cacherai une arme.

Ok, souffla le plus jeune en venant l'enlacer. Je t'en supplie, sois prudent.

C'est promis, microbe, murmura Jungkook.

Celui-ci glissa son index sous le menton de son amant et releva sa tête afin de lui offrir un baiser. Quand ils se séparèrent, chacun prit ses affaires puis, ils quittèrent l'hôtel, priant tous les dieux pour que le sort leur soit favorable.

⊱⋅ ──────────── ⋅⊰

Le café que Jimin avait choisi pour le lieu de rendez-vous se trouvait en plein cœur de Gangnam. Ce choix n'était pas anodin. En plus d'être très fréquenté et ainsi lui garantir une certaine sécurité, il n'était qu'à deux rues du bureau de Dae-kun. Cette proximité permettait à Jungkook de contrôler, via le réseau, les deux snipers factices et télécommander qu'il avait installés sur le toit du bâtiment voisin. Grâce à leur laser, le brun pouvait simuler sa présence sur place, alors qu'il profiterait en réalité de ce moment pour s'introduire dans l'immeuble où aurait lieu l'ultime confrontation.

L'attente était très certainement la chose que Jimin détestait le plus au monde. Installé à une table dans le café, il regardait les minutes défiler, espérant que leur cible se présente.

"Microbe, comment tu te sens ?"

La voix de Jungkook retentit dans son oreillette, le surprenant.

J'en ai marre d'attendre, soupira-t-il en grattant nerveusement la table avec son ongle. Peut-être qu'il ne viendra pas.

La cloche suspendue à la porte du café retentit, attirant l'attention du médium. Lorsque son regard rencontra celui de Bradley Murphy, chaque fibre de son être se crispa. Les poings et la mâchoire serrés, il prit une grande inspiration pour calmer son rythme cardiaque et balayer l'envie de meurtre qui venait de se réveiller en lui. Il était la pièce maîtresse de ce jeu d'échecs, s'il échouait, alors toute l'opération tomberait à l'eau et il refusait cela.

Ils viennent d'arriver, annonça-t-il d'une voix basse en dissimulant sa bouche derrière sa paume.

" Ok, souviens-toi de ce qu'on a convenu. Tu le pousses à bout, il n'y a qu'en touchant son orgueil qu'on parviendra à lui faire commettre une erreur. "

Le médium n'eut pas le temps de répondre qu'il vit Dae-kun et son garde de corps arriver près de sa table. Le premier ministre le toisa, mais Jimin ne fut nullement touché par cela, au contraire, il s'en réjouissait.

Bonjour monsieur Yoon, lui sourit le jeune consultant avant de se tourner vers Murphy, un large sourire sur les lèvres. Jo, ou devrais-je plutôt dire, Bradley Murphy ? C'est bien comme ça que vous vous appelez, non ? Je suis ravi de vous revoir. Je vous en prie, asseyez-vous.

La mâchoire du Britannique était si contractée que le blond crut entendre ses dents craquer. La colère qui dansait dans ses prunelles sombres était lisible et cela ne faisait qu'accroître la satisfaction du plus jeune. S'il y avait bien une chose qu'il maîtrisait à la perfection, c'était l'art de l'arrogance et de la provocation. Il avait appris avec le plus grand et comptait bien mettre ce talent à l'œuvre.

Et si nous allions discuter dans un endroit plus calme ? proposa Dae-kun d'une voix bien trop calme.

Anh, vous me prenez vraiment pour un idiot ? gloussa Jimin.

Je pourrais aussi te faire sortir de force, intervint Murphy assez fort pour que seul le concerné par cette menace n'entende ces mots.

Cette fois, un rire profond fit vibrer les cordes vocales du blond, avant qu'il ne prenne un air plus sérieux.

Entendant la conversation à travers le micro, Jungkook qui se trouvait à quelques rues, assis dans sa voiture, saisit la manette qui contrôlait les snipers et les enclencha, allumant ainsi les lasers de ceux-ci.

Dans le café, Jimin vit deux points rouges apparaître sous ses yeux. L'un deux se trouvait sur le pectoral gauche du garde du corps, tandis que le deuxième était sur le front de Dae-kun. Si les fusils longue distance avaient été chargés, ces tirs assuraient une mort certaine pour les cibles, cependant, rien de tout cela n'était vrai. Ce n'était qu'une intimidation et surtout une dissuasion de tenter quoi que ce soit à l'encontre du médium.

Afin que ses ennemis prennent conscience de la situation, le jeune consultant pointa du doigt les zones visées, un sourire provocateur sur les lèvres.

Comprenant la menace qui pesait sur eux, Murphy pivota vers l'extérieur, et ce fut à cet instant que Jimin remarqua les deux hommes qui se tenaient près de la berline noire qui les avait très certainement amenés jusqu'ici. L'agent de sécurité posa deux doigts contre son oreillette, avec l'intention de prévenir ses collègues, mais la voix du jeune busanien claqua de nouveau dans l'air.

À votre place, je ne ferais pas ça. Vous savez, mon petit ami a la gâchette facile. Ce serait bête que l'un de vous meurt à cause d'une balle perdue.

Tout ça n'était qu'un mensonge, il n'y avait personne. Jimin était seul face à ces deux individus dangereux, cependant, son jeu d'acteur était tel, que Murphy sembla y croire.

Espèce de-

Posez votre cul sur cette banquette et fermez-la, ordonna le plus jeune sans perdre de sa superbe.

Voyant que le fils du sénateur ne se démontait pas, Dae-kun stoppa son garde du corps d'un signe de la main, et prit place sur la banquette. Face à face, les deux hommes se toisèrent de longues secondes. Lorsqu'il pensait à cette rencontre, Jimin avait imaginé mille et un scénarios et réparties, mais à cet instant son cerveau ne pensait qu'à une chose ; ce qu'il avait vu durant la projection.

Puis-je prendre votre commande ? intervint la serveuse.

Le médium porta son attention sur le jeune femme et lui offrit un sourire poli.

Je vais vous prendre un latte, merci, demanda-t-il. Et vous, Monsieur le Premier Ministre ?

Rien, merci, répondit le concerné.

Allez, c'est moi qui vous invite.

Son vis-à-vis le sonda un instant, cherchant certainement une faille dans cette assurance qui émanait de lui, néanmoins Jimin était bien trop doué à ce jeu.

Un café noir, commanda finalement le politicien.

La jeune femme attendit la demande du troisième homme, mais ce dernier lui fit signe de s'en aller. Quand ils furent à nouveau seuls, Dae-kun posa ses deux mains jointes sur la table et se pencha légèrement en avant, tentant par là d'intimider son interlocuteur. Sur l'autre banquette, le médium ne cessait de sourire, gardant cet air faussement détendu.

Alors, qu'est-ce que vous voulez ? demanda-t-il.

Hm, lutter contre le réchauffement climatique et la paix dans le monde, répliqua Jimin, son regard ancré dans celui de Murphy.

Même si cela remontait à plusieurs mois maintenant, le blond venait de réciter mot pour mot la réponse que celui-ci avait donné à Jungkook lors de son enlèvement. Il sembla s'en souvenir, car un rire nerveux le quitta.

Tu sais que tu viens de signer ton arrêt de mort, fit-il d'une voix basse.

Hm, vous croyez ? demanda le médium, sa tête faiblement penchée sur le côté. Moi, je crois au contraire que vous êtes dans une merde noire, et tout ça, c'est votre faute. Vous n'avez même pas été capable de me tuer. Sérieusement, Monsieur Yoon, vous devriez renouveler votre personnel parce que vous êtes entouré d'incapables.

Le concerné laissa échapper un petit ricanement et passa une main sur la partie inférieure de son visage. En observant son langage corporel, Jimin pouvait deviner la nervosité qu'il ressentait, et ce, même s'il tentait de la dissimuler derrière son air suffisant et sa posture droite.

Mettons fin à cette mascarade. Que voulez-vous ?

Pour commencer, je voudrais savourer mon café et discuter un peu avec vous. Nous avons beaucoup à nous dire.

Je ne pense pas, nia Dae-kun.

Oh vraiment ? s'étonna le plus jeune. Moi, je crois que si. Par exemple, on peut parler des jeunes hommes à peine majeurs que vous avez payés pour coucher avec eux ? Vous savez, ceux qui travaillaient pour Seok-min. Peut-être que le nom de Min Yoongi vous dit quelque chose ? Vous étiez avec lui, la nuit du treize janvier deux mille quinze au Busan Beach Hotel. Ça vous rappelle quelque chose ? Non ? Peut-être qu'une photo vous rafraichirait la mémoire ?

Taisez-vous donc, ce ne sont que des calomnies, s'emporta le premier ministre sans pour autant élever la voix.

Vous en êtes sûr ?

Dae-kun porta son attention sur Murphy qui détourna le regard. La honte quant à son échec était notable et Jimin se réjouissait de cela.

Ne lui en voulez pas. Vous savez, il a été un bon toutou. Il a fait tout ce que vous lui avez ordonné. D'abord, il a envoyé Ramez, puis Woong pour m'enlever et il a même essayé de me tuer de ses propres mains, mais comme dit mon père, je suis un parasite dont on n'arrive pas à se débarrasser, plaisanta le médium en passant une main dans ses cheveux décolorés. Bon, je vous aime bien, du coup, je vais vous donner un conseil, commença-t-il en se penchant vers son vis-à-vis. La prochaine fois que vous voudrez me tuer, visez la tête, vous savez, comme les zombies, ou alors, envoyez des vrais tueurs, parce que sinon je risque de revenir vous faire chier.

C'est bien noté, grommela Dae-kun, la mâchoire serrée.

Leur échange fut interrompu par la serveuse qui vint ramener leur commande. Contrairement à l'ambiance entre les trois hommes, celle du café était légère. Les clients discutaient entre eux, ignorant totalement la guerre psychologique qui se déroulait sur l'une des tables.

Un sourire arrogant gravé sur ses lèvres pulpeuses, Jimin saisit sa tasse et l'amena à ses lèvres, prenant une gorgée de sa boisson chaude. Il devait gagner du temps, et pour cela, il devait sortir toutes les cartes qu'il avait dans sa manche.

"Tu t'en sors bien microbe. Je vais monter sur le toit.", annonça Jungkook depuis l'oreillette.

Le médium voulait lui dire d'être prudent, de veiller à ce que son grappin soit bien accroché avant qu'il ne saute dans le vide, mais il ne pouvait pas. Tout ce qu'il était capable de faire, c'était d'espérer que les dieux étaient de leurs côtés, qu'ils protègeraient l'homme qu'il aimait.

Vous savez, je sais exactement ce qui s'est passé ce soir-là, reprit le consultant de police en s'enfonçant dans la banquette, prenant ainsi une posture plus décontractée.

Je ne vois pas de quoi vous parlez, continua de nier Dae-kun avec mépris.

Et si je vous parle de l'ancien premier ministre ? Le défunt Heo Joon-ho, vous ne voyez toujours pas ?

Le politicien se crispa en entendant le nom de son prédécesseur, tout comme son garde du corps, et face à lui, le jeune consultant ne loupa rien de cette réaction. Un air malicieux sur le visage, il se languissait de voir cet homme qu'il haïssait, prisonnier des mots. Il le tenait par les bijoux de famille et aussi éphémère soit ce moment, pour une fois, il avait un coup d'avance et il aimait cela.

Je n'ai pas de temps à perdre avec ces enfantillages, répliqua Dae-kun en tentant de garder la face. Je ne sais pas ce que vous voulez, monsieur Park, ni à quoi vous jouez, mais c'est très dangereux. Vous devriez faire attention à qui vous vous en prenez.

Est-ce une menace ? demanda le concerné, les sourcils haussés.

Non, juste un avertissement.

Ah, je vois. Eh bien, à mon tour de vous "avertir", reprit Jimin en appuyant volontairement sur le dernier mot. Je sais tout de vos petites manigances. Je sais que vous avez commandité l'assassinat de votre prédécesseur car il devenait gênant pour vos affaires. Comme vous êtes un lâche qui n'a pas les couilles de faire le travail lui-même, vous avez demandé à mon père de le tuer et cet abruti l'a fait.

Quand bien même tout cela est vrai, vous n'avez aucune preuve de ce que vous avancez. Si c'était le cas, je serais déjà dans une cellule, je me trompe ? riposta le premier ministre, un rictus arrogant sur les lèvres.

Murphy, qui se trouvait assis près de lui, ne cessait de regarder par la fenêtre, cherchant sûrement d'où venaient les deux points rouges qui ne les avaient pas quittés, mais Jimin était serein. De leur position, il était impossible de localiser les snipers, c'était pour cette raison que le couple avait spécifiquement choisi ce café. Le médium s'amusait de voir la frustration qui peignait les traits de cet homme qui l'avait terrorisé, mais qui, à présent, ne l'intimidait plus.

Vous avez raison, je n'ai aucune preuve qui soit valable devant un tribunal, mais vous et moi, nous savons que la réputation est plus importante que tout dans ce milieu. Que penseraient les citoyens s'ils apprenaient que leur premier ministre était un gros porc qui couchait avec des jeunes hommes à peine majeurs ? Ou qu'il avait orchestré le meurtre de l'un deux pour couvrir un autre de ses crimes ?

Personne ne vous croira, cingla Dae-kun, la mâchoire serrée de rage.

Peut-être, concorda Jimin en haussant innocemment les épaules.

Un sourire espiègle sur les lèvres, il prit sa tasse et avala une nouvelle gorgée de sa boisson. Autour d'eux, le brouhaha n'avait pas cessé. Malgré la popularité de ce politicien, personne ne semblait leur porter attention et cela leur convenait. Ce n'était pas le moment que quelqu'un vienne les déranger, cela pourrait mettre toute l'opération en danger, cependant, toutes ces personnes étaient des boucliers invisibles dont il n'hésiterait pas à se servir pour sa sécurité.

"Microbe, je vais bien. Je suis sur l'immeuble de Dae-kun.", annonça Jungkook dans son oreillette.

En entendant la voix de son petit ami, le jeune consultant sentit une chaleur agréable se propager en lui. Il allait bien, la traversée en tyrolienne s'était bien passée. Le soulagement qu'il ressentait était si grand qu'il fut incapable de retenir un sourire qui intrigua ces vis-à-vis.

Qu'est-ce qui vous fait sourire ? demanda le politicien avec dédain et méfiance.

Vous, répondit Jimin sans hésitation. Vous êtes là, vêtu d'un costume trois pièces hors de prix. Vous arborez une mine confiante, une posture bien droite, votre élocution vous donne des airs de personne bien élevée, mais vous et moi savons que ce n'est qu'un masque.

Vos accusations sans fondement commencent sérieusement à m'agacer, monsieur Park.

Patience voyons, gloussa le médium. Dès que j'en aurai envie, je vous montrerai ce petit enregistrement qui vous fera frémir, et pas comme vous aimez, le nargua-t-il, un rictus espiègle au coin des lèvres. Vous savez, quand j'étais enfant, avant chaque apparition en public avec mon père, il me disait toujours que j'avais intérêt à bien me tenir. Il me répétait sans cesse que chacun de mes actes pouvait avoir des répercussions sur son image. À l'époque, je ne comprenais pas ce qu'il voulait dire, puis quand il m'a enfermé dans cet asile, j'ai compris. Vous, les politiciens, tenez tellement à paraître parfaits aux yeux du monde que vous en oubliez que cela fait de vous des cibles faciles. Peut-être que vous avez raison, personne ne me croira, mais vous savez bien qu'il suffit d'une seule petite rumeur pour que les gens se mettent à creuser.

Qu'ils fassent. Ils ne trouveront rien, lança le premier ministre avec aplomb.

— Vous êtes sûr ? répliqua Jimin les sourcils haussés. Moi, je peux vous dire que j'ai en ma possession une vidéo vraiment très compromettante qui pourrait prouver mes dires.

En entendant cela, le britannique tourna brusquement la tête vers le maître chanteur, ses sourcils froncés par la confusion et la peur. Son expression divertit le médium qui ne put retenir un ricanement qu'il dissimula derrière sa paume.

Vous pensiez vraiment qu'en effaçant la vidéo des disques durs de l'hôtel, elle disparaîtrait pour de bon ? Rolala Brady ! Vous êtes pire que ma mère lorsqu'il s'agit d'internet ! On ne vous a donc rien appris au MI6 ? Je suis déçu, se moqua-t-il, une moue faussement boudeuse sur les lèvres. Vous êtes très fort et vous faites un peu peur, mais, ne le prenez pas mal, vous n'êtes clairement pas le couteau le plus affûté du tiroir.

Je te jure que je vais t'écorcher vif, le menaça ce dernier d'une voix basse et menaçante.

Ce que vous pouvez être susceptible, soupira Jimin en se laissant tomber contre son dossier. Pour votre gouverne messieurs, rien ne disparaît réellement d'internet, alors quand je vous dis que j'ai ce qu'il faut pour vous détruire, je ne bluffe pas. Peut-être qu'aux yeux de la loi rien n'est valable, mais je n'ai pas besoin de ça.

Qu'est-ce que vous voulez ? parla enfin le politicien une fois la stupeur passée.

Trois milliards de won.

De l'argent ? Vraiment ? s'étonna le garde du corps. Après tout le mal pour nous arrêter, tu vas simplement demander une simple sommes d'argent ?

Que voulez-vous, être consultant de police, ça ne rapporte pas autant qu'on le croit, répliqua-t-il en haussant les épaules de façon désinvolte. En plus, je compte quitter le pays avec mon petit ami. On va se marier, alors il faut bien que j'ai assez d'argent pour tout ça.

Dans son oreillette, Jimin entendit le concerné glousser et dût se retenir de ne pas rire à son tour.

En revanche, vous vous trompez, je ne veux pas seulement de l'argent.

Les sourcils de Dae-kun se froncèrent tandis qu'il se redressait sur la banquette. L'entièreté de son corps était tendue et la situation n'aidait en rien. Avec son visage angélique et son corps fin, Jimin était plus intimidant que Murphy ne l'avait été, et ce, sans même user de la violence. Sa puissance était dans ses mots et il le savait. En menaçant sa réputation, il avait touché en plein dans le mille et désormais, il devait battre le fer tant qu'il était chaud.

La politique, c'est toute votre vie, pas vrai ? Vous avez même tué pour protéger votre carrière.

Malgré les spéculations du médium, le politicien ne pipa mot, se contentant de le fusiller du regard, imaginant très certainement les manière les plus douloureuses de le tuer.

— Vous avez une heure pour rassembler les trois milliards de wons. En plus de ça, vous allez rédiger une lettre qui sera envoyée à tous les journaux du pays et dans laquelle vous direz que vous retirez votre candidature au présidentiel. Vous y noterez également que vous avez commis des actes moralement discutables et que pour vous racheter, vous quittez le monde de la politique.

Hors de question ! argua Dae-kun en frappant son poing sur la table.

Ce bruit sourd fit sursauter Jimin qui se recula. Les clients installés sur les tables voisines se turent et se tournèrent vers eux, surpris par ce bruit soudain. En une fraction de secondes, toute l'attention se porta sur eux, et en sentant les sueurs froides le traverser, le médium fut heureux de ne pas être seul en compagnie de ce monstre à l'aspect humain.

Vous voulez vraiment attirer l'attention sur nous ? questionna le médium les sourcils froncés. Faites ce que je vous dis, ou tout ce que j'ai sur vous sera en première page de tous les journaux du pays.

Cette fois, le regard du politicien changea. La colère qui y était gravée fut remplacée par une immense rage, dévastatrice et dangereuse. Jimin venait de réveiller le démon, il en avait parfaitement conscience, or tout se déroulait selon son plan.

Vous savez ce qui arrive à ceux qui m'attaquent ouvertement, monsieur Park ? questionna le premier ministre d'une voix bien trop calme pour être normale.

Le timbre profond de ses cordes vocales provoqua un frissonnement désagréable sur l'épiderme du plus jeune, cependant il conserva son assurance et indifférence.

Hm, j'ai une petite idée oui, mais vous me croyez assez stupide pour ne pas avoir couvert mes arrières ? ricana le blond. S'il m'arrive quoi que ce soit, ces fichiers fuiteront sans que vous puissiez les arrêter. S'il vous venait également à l'idée de vous en prendre à Jungkook, à nos amis ou à nos familles, je n'hésiterai pas à utiliser ce que j'ai contre vous. Il ne vous reste pas beaucoup d'options monsieur Yoon. Soit vous allez à la police vous rendre, soit vous faites ce que je vous demande. La balle est dans votre camp désormais.

Les conditions de Jimin plantèrent un silence de mort entre eux. Ses deux aînés le toisaient, cependant le blond gardait son calme et sa mine sérieuse.

"C'est bon, microbe, tu les as bien énervés, pas la peine de continuer."

La voix de Jungkook dans son oreille le surprit, mais il resta de marbre, continuant d'observer les deux hommes face à lui. La mine sérieuse, Dae-kun se gratta la gorge tout en lissant sa veste de smoking de ses paumes. Il resserra ensuite sa cravate puis, tentant de garder la face, il prit la parole.

Je crois que nous n'avons plus rien à nous dire.

C'est vrai, vous savez quoi faire.

Le politicien jeta un coup d'œil à son garde du corps, communiquant silencieusement avec celui-ci. Un ange passa avant que monsieur Yoon ne s'exprime à nouveau.

J'aime que mes affaires restent privées. Je vous attends chez moi.

Désolé Monsieur le Premier Ministre, mais ma mère m'a toujours dit de ne pas aller chez des inconnus. Je viendrai à votre bureau dans une heure.

Dae-kun serra les dents, agacé par l'entêtement de son maître chanteur, mais se résigna.

Très bien. Ne soyez pas en retard, j'ai autre chose à faire.

Comme quoi ? Menacer des pauvres gens pour obtenir ce que vous voulez ? Ou peut-être que vous allez encore coucher avec un garçon qui pourrait être votre fils ? le provoqua Jimin.

Le mépris et le dégoût qu'il ressentait à l'encontre de cet homme était bien trop grand pour qu'il puisse le contrôler. Durant cet entretien, le médium s'était rendu compte que Jungkook avait raison. Cet homme était dirigé par sa cupidité et son orgueil. Pour le moment, il ne se sentait pas en sécurité, cependant, il savait qu'une fois seul et sur son terrain, ce dernier serait pris d'un élan de confiance et avouerait. Du moins, il l'espérait.

Ton insolence te perdra, fulmina le politicien d'une voix basse.

Oui, je sais, mais que voulez-vous, on a tous des défauts. Certains sont insolents, d'autres des tueurs, répliqua-t-il en haussant les épaules.

Sans rien ajouter, Dae-kun se leva, suivi de son garde du corps. Il reboutonna sa veste de costard et s'apprêtait à partir, lorsque Jimin retint une dernière fois son attention.

Avant que vous ne partiez, j'aimerais vous montrer un gage de ma bonne foi et vous prouver que je ne plaisante pas.

Un rictus espiègle, le médium sortit le téléphone que Namjoon lui avait donné et lança le début de l'enregistrement. Dès les premières secondes, la voix du politicien s'extirpa des hauts parleurs de l'appareil.

" Il est temps que je prenne le contrôle de cette situation. Les élections approchent à grands pas, et Heo Joon-ho commence à devenir gênant. J'ai entendu dire qu'il avait des informations sensibles à ton sujet. "

C'est bon, ça suffit, paniqua ce dernier, la mâchoire serrée.

Un air suffisant sur le visage, Jimin verrouilla l'appareil et le rangea dans sa poche. Ces paroles, il les avait lui-même écrites de mémoire, peut-être même que ce n'étaient pas les mots exacts qui avaient été dits cette nuit-là, néanmoins Dae-kun ne sembla pas y prêter attention et cela lui convenait.

Dans une heure, à mon bureau, ordonna le premier ministre.

J'ai hâte, sourit le médium en prenant une dernière gorgée de sa boisson.

N'offrant à son maître chanteur qu'un regard dédaigneux, le politicien tourna cette fois les talons et s'en alla. Murphy resta immobile quelques secondes, toisant Jimin qui ne cessait de lui sourire. Le blond n'était pas dans sa tête et pourtant, il pouvait voir à travers ses iris noirs l'envie profonde que celui-ci avait de lui faire du mal.

Je crois que votre maître vient de vous siffler, lança-t-il d'un ton belliqueux.

Un rire gras et presque machiavélique quitta la gorge du Britannique pendant qu'il se penchait vers l'avant, posant ses deux paumes larges à plat contre la table. À cette distance, Jimin pouvait sentir son souffle étonnement frais contre sa peau.

Je te conseille de surveiller tes arrières, un accident est vite arrivé.

Hm hm, et comme ça vous serez l'unique responsable de la chute de votre patron.

Elle était loin l'époque où le médium s'écrasait face à l'aura menaçante que dégageait cet homme. Aujourd'hui, il continuait d'avoir peur, mais plus jamais il laisserait ce sentiment le freiner.

Frustré par l'aplomb de son vis-à-vis, Murphy alla rejoindre son patron qui avait déjà quitté l'enseigne. Dehors, le Britannique observa les alentours en cherchant sûrement le sniper, mais ne trouvant personne, il monta à bord de la berline et s'éloigna à grande vitesse.

Ils sont partis, annonça-t-il dans l'oreillette.

"Et toi, est-ce que ça va ?" questionna Jungkook.

Jimin resta muet et immobile de longues minutes, fixant un point invisible devant lui. La tension venait subitement de redescendre et son cœur avait du mal à supporter ce changement d'ambiance brutal. Il s'étonnait lui-même du self-contrôle et du courage qu'il avait eus pour cacher ses émotions, mais désormais tous ces sentiments enfouis le frappaient de plein fouet.

Malgré lui, ses yeux s'inondèrent de larmes alors qu'il cachait son visage de ses mains, ne voulant pas que les autres clients le voient craquer. Même s'il tentait de rester silencieux, un sanglot lui échappa, attirant l'attention de son amant.

" Microbe, parle-moi. "

C'était si dur de ne pas craquer, confessa ce dernier d'une voix basse.

" Je sais, mais tu as été formidable. Rentre à l'hôtel et prépare-toi pour ce soir. Je reste en ligne d'accord ? "

Où est-ce que tu es ?

" Dans la salle des serveurs. Namjoon a pu pirater les caméras pour que je puisse passer. Je ne serai pas loin de toi. "

D'accord, murmura simplement Jimin en reniflant.

" Ça va aller. Tout va bien se passer. "

Sois prudent.

" Promis. Je t'aime. ".

Moi encore plus.

À distance, le commandant désactiva les deux snipers et resta en ligne avec son amant pendant que ce dernier alla régler la note de la table. Il quitta ensuite le café, et rejoignit sa chambre d'hôtel tout en veillant à ne pas être suivi.

Dans cinquante-cinq minutes, il allait se jeter dans la gueule du loup, et jouer la dernière carte de son destin. Est-ce que la vérité lui coûterait la vie ? Il n'allait pas tarder à le découvrir.

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