Putain ils sont bavards aujourd'hui - Partie 3

Shiganshina, 18 juillet 852, quelques instants plus tard

« Marion ? » s'exclamait la voix étouffée de Hansi. Mikasa ne haussa pas même un sourcil. Elle se contenta de frapper au battant mal poncé de sa supérieure, et d'attendre, pas dérangée pour un sou par la combinaison qu'elle n'avait pas eu le temps d'enlever. Cet équipement fonctionnait bien, elle s'était vite habituée aux fourreaux dans le dos, il n'y avait manifestement pas de problème. Alors, pourquoi s'en débarrasser ?

« ... Nom, motif, dit enfin la major.

— Mikasa. Je viens, comme vous me l'avez ordonnée.

— Entre. »

Alors, elle entra.

Les bibliothèques encombrées de fioles, microscopes, livres, et dossiers de cette pièce, n'arrangeaient en rien son étroitesse. Ce fait était encore accentué par les Antoine, Marion, Livaï, et Hansi assis autour de ce pauvre bureau tout aussi peu épargné. Le caporal-chef, jusque-là tourné vers la chercheuse, lui jeta un œil. Au fond de sa pupille, elle perçut un joli « bon sang, c'est vraiment dégueulasse, ici. »

Un tabouret restait libre, à côté de son demi-frère version jeune. Celui-ci même qui nouait tout juste ses longs cheveux en un chignon toujours aussi bordélique. Il posa ses iris clairs sur elle, et la salua d'un petit hochement de tête. Du reste, son visage reflétait un gramme d'inquiétude, un soupçon de gravité, et une curiosité débordante. C'est aujourd'hui qu'ils vont lui déballer les histoires sur les Chaillot..., comprit-elle. Alors, elle souleva le siège restant, le posa où elle le put – c'était-à-dire, entre deux tas de paperasse à propos les bleus –, et attendit simplement.

Un petit silence s'installa. Là remarqua-t-elle que cette Marion borgne arborait une expression perdue au possible. Elle plissa légèrement ses yeux bridés. La haute gradée prit alors la parole ; et là, l'asiatique se concentra dessus, uniquement dessus.

« ... Je te l'ai dit, il y a quelques choses que tu ne sais pas. Tu sais que Livaï est ton alter-ego, et Kenny Ackerman, ton oncle.

— Jusque-là, ça va.

— Est-ce que tu as déjà fait le rapprochement entre toi, leur nom de famille, celui de Mikasa, et votre force à tous les trois ? »

Antoine fronça les sourcils... puis pointa vivement Mikasa du doigt, ébahi. « C'est elle, ma demi-sœur ?! » s'exclama-t-il. « Ouah ! Mais... » Il se tut un court instant. Hansi également. Les autres restèrent muets. L'intéressée, elle, resta stupéfaite par sa réaction légère, trop légère.

Toutefois, le nouvel arrivé se massa vite la tempe, des cheveux devant le visage. Elle ne vit pas son regard ; mais son aura, elle... « Attends, Hansi », laissa-t-il enfin tomber. « On va mettre la force à part pendant quelques minutes. Mikasa. Ma demi-sœur. De quel côté ? » Courte pause.

« De ton père. »

Il serra le poing, et se retint manifestement de frapper le meuble en face de lui. Là, il jura en français ; et elle eut beau ne rien comprendre, son ton seul était loin d'être rassurant. « Mon père, soit », cracha-t-il. Cracha-t-il. Sa voix empestait tant le dégoût que l'exploratrice contracta les mâchoires sous la colère qui pointait chez elle. Il n'avait pas besoin d'en dire plus. « Tu ne l'as pas vu mourir », articula-t-elle sourdement. Les prunelles qu'il darda sur elle l'irritèrent d'autant plus.

« Oh, ironisa-t-il. Tu ne l'as pas vu quitter ma maison non plus. Et tu n'as pas vu ma mère seule, à s'en sortir parfaitement avec un gosse sur les bras. En fait, sa situation était si impeccable qu'elle s'est laissée volontairement crever de maladie. Elle qui était assez radine pour refuser de se soigner... Mon Dieu, quelle enflure, Alice ! Ton côté rapace t'a perdue !

— Antoine, intervint sèchement Livaï.

— Tu as dû connaître un joli petit papa tout gentil et aimant, continua l'interpellé dans un rictus lugubre.

— Tu ne l'as pas côtoyé, siffla-t-elle.

— Je crois que t'as pas bien saisi. »

Elle descendit sa main vers son canif sans s'en rendre compte, la main tremblante. Le cadavre de son paternel, ses pupilles vides de toute vie, son ventre en sang : tout lui revenait trop bien en mémoire. « Mon, ton, notre père n'était qu'un lâche », jeta-t-il crûment. « Un coureur de chattes, qui a fini par se caler avec une japonaise bien gaulée qu'il a tout autant fourvoyée. »

Il ne lui en fallut pas plus pour se lever d'un bond, et lui choper violemment le col, l'œil exorbité. L'autre se saisit de son poignet avec force, elle tenta de dégainer son couteau, Livaï se mit illico sur ses pieds. Il lui ôta l'arme avant qu'elle ne la plaque contre la carotide d'Antoine ; au beau milieu de sa furie, elle ne sentit ni cette action habile, ni la douleur qui se propageait dans son avant-bras.

« Ferme-la, gronda-t-elle, ou...

— Tu penses qu'il lui a racontée, à ta mère, peut-être ?! s'écria le plus petit. Tu penses qu'il a au moins évoqué mon existence ?! »

Elle ouvrit la bouche pour répliquer. Rien n'en sortit. Les larmes qui pointaient dans les yeux du jeune Chaillot la clouèrent sur place.

« Je me disais bien », siffla-t-il entre ses incisives. « Bonne chose pour toi, il t'a pas laissée derrière. Mais me sers pas tes phrases à la noix. Car je doute qu'il ait une seule fois... » Il la repoussa brutalement, et s'affala sur son siège. « ... regretté la mort de ma mère », murmura-t-il. « Ni la situation dans laquelle il m'a foutu. Se faire renier par son père avant sa naissance... »

Puis, il se tut. Le caporal-chef se rassit, le menton étrangement bas ; Mikasa, elle, resta un instant pantoise. Il n'y eut que Marion pour poser une main sur l'épaule de son ami.

« Antoine... », hésita Hansi. « Il y a une explication derrière. » Il releva mollement la tête. Ça y était, ses traits s'étaient définitivement fermés. « Ah bon », énonça-t-il monotonement. « J'adorerais l'entendre. » Elle prit une courte inspiration, puis planta ses yeux auburn dans les siens.

« Toi, Mikasa, Kenny, Livaï... Toute ta famille côté Chaillot, êtes modifiés génétiquement. Vous avez hérité cela de Shihong Chaillot.

— Par quel procédé ? coupa-t-il dans un intérêt subit. »

Elle écarquilla brièvement les paupières. « Nous... nous ne savons pas. Mais c'est de là que viennent votre force et votre réactivité. » Et Marion de glisser quelque chose dans sa langue natale ; à l'évocation de quelque chose qui ressemblait à Krisp, puis Kass, puis un mot qu'elle ne comprit pas, Antoine hocha la tête, plongé dans une profonde réflexion. « Seulement... », continua donc la major.

Son timbre de voix était si incertain que la chercheuse et Livaï échangèrent un coup d'œil déjà préoccupé. Mikasa, elle, se contenta d'attendre. Son demi-frère version jeune également, ses iris clairs bien fixées sur la brune... Laquelle regarda ses papiers un instant. Elle n'était décidément pas faite pour jouer aux Erwin. L'asiatique le voyait, malgré ses efforts. Chassez le naturel, et il reviendra au galop...

« Cela a été fait en Chine.

— Je connais son passif avec cette belle démocratie, en effet, railla-t-il.

— Bien..., soupira-t-elle. Mais leur... manipulation a apporté avec elle quelques inconvénients. Ta grand-mère vieillissait bien plus vite que la moyenne, par exemple. Bon, de cela, vous n'en avez pas hérité. Ou... Je ne crois pas que Kenny ait mentionné autre chose de ce type auprès de Livaï, marmonna-t-elle rapidement. Je veux dire, sur le plan physique. Musculaire. Intellectuel, tout cela.

— Hansi, articula d'ailleurs le caporal-chef.

— Quoi, c'est vrai !

— Ça n'explique toujours pas pourquoi mon père s'est taillé avec une asiat', martela Antoine. »

Bref silence. Son interlocutrice se frotta la nuque. « Dans le tas, elle a aussi chopé quelque chose que Kenny a appelé le lien Shihong. En bref... » Ses pupilles papillonnèrent sur ses livres. « Chaque Chaillot ayant hérité de ses modifications génétiques se liera profondément à une personne. Profondément, et viscéralement. Avec... un besoin urgent de protéger ladite personne lorsqu'elle est en danger... et un sentiment fort à la création du lien... Comme pour Mikasa et Eren, ou Kenny et... » Elle fronça les sourcils, confuse.

« Et je ne sais qui.

— Pour faire court, Philippe s'est lié à la sœur de Hajime Isayama, et c'est pourquoi il n'a pas fui à l'annonce de l'existence de Mikasa ? »

Sa question était brute, très brute. Au bout de quelques secondes, Hansi hocha la tête : Antoine, lui, se tripota le menton. Puis, un rictus spécial lui-même s'étala sur sa face. « Et donc... Je serais lié à Marion, c'est ça ? »

On entendit le tic-tac de l'horloge, le chant des oiseaux, les pas précipités des recrues et autres. Ce fut long. Et alors que l'officier ouvrait enfin de nouveau la bouche, lui éclata de rire, sous le regard sidéré de tous. « T'as entendu ça, Marion ! » hoqueta-t-il en la prenant par les épaules. Il fit rouler son biceps d'un air outrecuidant. « Je suis un surhomme prêt à te sauver de n'importe-quelle situation. Si c'est pas une raison suffisante pour sortir avec moi... »

Seul un lourd silence ponctua ses paroles.

... Il n'est pas sérieux ? pensa lentement la japonaise. Elle se souvenait trop bien du sentiment vicieux qui l'avait hantée après cette discussion avec Livaï et Erwin. Et voici que l'énergumène qui lui servait de famille en causait avec un détachement presque affolant. La scientifique semblait partager cette impression, car elle bloqua un bon gros moment.

« ... T'es pas sérieux ? jeta finalement Livaï. C'est un sujet fondamental, là. On cause de notre nature, en tant que Ackermans. T'es pas là pour faire du gringue à Marion.

— Oh..., susurra l'intéressé. T'as dû perdre ta chance, alors. T'as pas meilleurs argum... »

Il laissa échapper un cri soudain. Son alter-ego saisit sèchement son poignet, le regard noir au possible. « Continue de faire le pire, et je te pète un membre », articula-t-il. Toutefois, l'autre se dégagea avec habileté. « C'est vous trois qui vous vous bernez », répondit-il. « On est comme ça. C'est tout. Tu veux quoi de plus ? Un discours dramatique ? Je te pensais plus pragmatique que ça, Livaï. Mikasa aussi », lança-t-il en passant.

Celle-ci s'apprêta à répliquer. Il leva une main avant qu'elle ne sorte un mot.

« Ne vous attendez pas à ce que je me mette des œillères comme vous l'avez peut-être fait. On est en guerre, non ? Les américains ont des géants ; les Murs, des guerriers sur-mesure. Ce n'est pas pour rien qu'on peut tous les trois abattre un titan intelligent tout seul. Nous sommes des atouts stratégiques intéressants. Et ça, si c'est pas de la balle...

— Mais le lien..., grimaça Hansi.

— Le lien ? Quoi, le lien ? C'est psychologique, ça. Ou psychiatrique, j'en sais rien. Mais ça me va. Si ça peut te rassurer, ce que je ressens pour Marion, ce truc ne le rend pas superficiel... car c'est à elle que je me suis lié, et pas à n'importe-quel péquenaud. C'est de l'authentique, du pur et dur. Plus intact que ça, tu crèves. N'est-ce pas, Mikasa ? »

L'intéressée ne sut pas lui répondre. Elle ne fut pas plus capable d'acquiescer. Les premières paroles d'Eren, suite à cette nouvelle, lui revinrent en plein dans la face. Elle baissa le menton, le cœur tremblant. ... C'est vrai, réalisa-t-elle. Nous ne sommes pas aveugles pour autant. J'ai pu me battre contre Eren ; Antoine sait remettre en question les actions de Marion, et Livaï faisait de même avec Erwin. Tout ce qu'il reste, c'est cet instinct protecteur... Cependant, cela... Même un humain normal peut le ressentir, non ?

« Est-ce que c'est tout ? » posa alors le nouveau venu. Elle releva la tête vers lui. Il paraissait relativement fatigué ; elle le voyait, à ses épaules basses. Il était expressif, contrairement à son alter-ego, qui restait interminablement impassible.

Hansi se contenta de hocher la tête.

« D'accord, souffla-t-il. Merci.

— ... Vous pouvez tous disposer. »

Alors, ils disposèrent. Ils, sauf Marion. Mikasa lui jeta un œil : elle était restée sur sa chaise. Antoine bloqua, Livaï haussa un sourcil et s'avança vers elle. Elle leva une main avant qu'il n'arrive à sa hauteur, sans même le regarder. Peut-être l'avait-elle reconnu à son rythme de marche ?

« Hansi... Est-ce que je peux te parler ? » énonça la scientifique. La face ovale de l'intéressée tourna au surpris.

« Je n'ai pas beaucoup de temps, mais je peux bien nous accorder cinq minutes.

— Merci. Livaï, Antoine...

— Je vais garder la porte, lâcha le premier. Mikasa aussi. Antoine, on dirait bien que tu étais de corvée de quelque chose. »

Ce dernier entrouvrit les lèvres. Rien n'en sortit. Il se contenta de détailler son amie de ses deux prunelles désormais perturbées. « On y va », insista le caporal-chef d'un ton catégorique. Donc, ils firent tous volte-face.

Et l'asiatique de poireauter avec lui à la droite du battant de pin mal poncé du bureau, les jambes réchauffées par le soleil de juillet que déversaient les fenêtres de ce fameux couloir. Cette recrue aux courts cheveux châtains passa par là, écarquilla les paupières lorsqu'elle vit Antoine, et retourna bien vite à sa besogne d'un air faussement impassible. Alma, se souvenait-elle brièvement. Alma Ralle...

***

Attends. Quoi ? Hansi détailla, stupéfaite, ce visage rond, criblé de taches de rousseur, et surtout défiguré par cette entaille qui avait bien rosi depuis la dernière fois qu'elle avait vu l'énergumène. Énergumène qui venait de lui sortir une théorie tirée par les cheveux.

Où était passée sa rigueur ? Elle doit être biaisée par la perte de Leah. Ou sacrément fatiguée, conjectura-t-elle au cerne supportant son œil vert.

« ... Réexplique-moi ça, parvint-elle à énoncer.

— A mon arrivée, une nouvelle exploratrice est passée dans le hall. De taille moyenne, avec des cheveux courts et châtains... Et une frange courte... Et des yeux marron... »

On en a récupéré une cinquantaine. C'est une bleue parmi bien d'autres...

« Je n'ai toujours pas son nom, la prévint donc la major.

— Je le devine bien, tu as pas mal de choses à gérer. Enfin, la forme de ses paupières, et de son visage, et... je ne sais pas, son corps en général, m'ont rappelée Leah. Vraiment, insista-t-elle. Lorsque je l'ai vue, j'ai eu un souvenir... »

Petite pause. « ... éclair », grimaça-t-elle, « où j'ai vu Leah enfant. J'ai dû la croiser, à la Résistance. Et je me souviens encore de son visage d'adulte, tu n'as certainement aucun doute là-dessus. Ce n'est pas une impression que j'ai eue, Hansi. Elles ont des traits trop similaires. Même l'arête du nez ! »

Elle grogna suite à cette exclamation. La commissure droite de ses lèvres était manifestement encore sensible. Il y eut un long silence, brisé par le fracas d'un livre s'écrasant contre le parquet encombré. Il servit presque de signal. « Tu as récupéré des souvenirs... ? » dit la brune du bout des lèvres.

Son interlocutrice observa ses genoux. Ses mèches retombèrent devant sa face ; elle vit à peine son cache-œil médical. « Je crois. Avant de tenter de me suicider, il y a environ un mois... J'ai vu Fabien jeune. Chez les américains aussi. Et... je ne sais pas... », murmura-t-elle. Sa voix tremblotante s'immisça dans leur discussion comme un cheveu sur la soupe.

« Rien sur la machine numéro sept ? abrégea donc Hansi, la gorge nouée.

— Rien. Sinon, je l'aurais signalé depuis longtemps. Hansi, c'est important. S'il y a d'autres Résistants... Il faut discuter avec elle en personne. »

La haute gradée croisa ses mains devant son menton, et prit une longue inspiration. Créer de nouvelles équipes, y affilier les recrues, ne pas oublier de bien ligoter Bertolt, choisir quelqu'un pour le torturer sans risque, demander des nouvelles régulières au sujet d'Anka, se préparer à une éventuelle négociation avec elle, anticiper l'arrivée du Tribunal, préparer leur assaut de la base ouest américaine, garder un œil sur Marion, et en savoir plus, toujours plus, de la part de Rebecca et de Carla. Et elle ne voulait même pas penser au nouvel équipement...

Je dirai à Antoine de s'en charger. Il en a largement les capacités... et peut allier les réunions entre ingénieurs avec les entraînements physiques. Marion... devra reprendre ses recherches... Elle se retint difficilement d'agripper ses cheveux gras et en bazar. Heureusement pour elle, Mike et Moblit l'aidaient de près. Et puis, Livaï était revenu.

Elle ignora son cœur qui se serrait hideusement. Le cadavre pendu d'Erwin, il ne la quittait jamais. Pourquoi diable avait-il fait ça ? Non. Peu importe. N'y pense pas, ce n'est pas le moment, il faut manifestement dénicher des Résistants pour entrer en contact avec eux. Mike, trancha-t-elle abruptement. Mike s'en chargera. Mais je veux voir la tête de cette bleue avant.

Elle se leva de son siège ; elle ne se rendit compte de la violence de son geste que lorsqu'il crissa sur les planches, et s'écrasa sur le dos. Elle comme Marion clignèrent les paupières avec confusion. Surtout Marion. « Hansi... » Dans tout le vert de son iris, une inquiétude sincère. « Tu as l'air vraiment fatiguée. »

Lourd mutisme. L'officier béa de longues secondes. Sa poitrine se compressa dans une lenteur vicieuse ; mais rien ne sortir de la gorge de l'exploratrice. Cette question était directe, trop direct, si directe qu'elle la frappait en plein bide. Alors, elle se contenta de ravaler la bile qui avait remonté sa trachée, et d'attraper son trousseau de clefs.

« On y va », souffla-t-elle simplement.

Fanart par ackerbang sur tumblr.com

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