𝓒𝓱𝓪𝓹𝓲𝓽𝓻𝓮 16
Une brise de vent nous accompagne jusqu'à la maison où la porte, grande ouverte, semble nous dire que nous sommes les bienvenues. Aeglos nous entend arriver et passe sa tête hors de l'encadrement pour sortir.
« Et revoilà les touristes. »
Je souris. Je dirai bien qu'Oromë aussi, mais comme elle n'a pas lâché ce sourire depuis...et bien, que je suis arrivée, ce serait difficile. Par contre, elle lance, sur un ton un peu trop enthousiaste par rapport à sa phrase :
« Elle ne se souvient pas de son prénom ! »
Aeglos hausse un sourcil, essuyant un verre dans un cristal extrêmement fin avec un torchon en soie, ce qui, à mes yeux, est exceptionnel mais qui est une tâche basique et peut-être même monotone pour lui.
« Et donc tu es contente ?
-Non, par parce qu'elle a oublié son prénom, mais parce que je lui en ai trouvé un nouveau. »
Elle pose ses mains sur mes épaules et me pousse à avancer un peu, comme pour me présenter une seconde fois.
« Alors, temporairement, je te présente Astal.
-Astal ? C'est mignon. Ça te va plutôt bien. »
Je souris, ravie de voir que c'était un avis commun. Remarque, ils ont tous l'air trop poli pour mentir. Je regarde un peu au loin, distraite, et remarque des nuages très sombres à l'horizon.
« C'est une tempête ? »
Le couple se retourne dans une synchronisation au moins parfaite. Aeglos hausse les épaules.
« Elle ? Oui, c'est Lacerta. »
Je ne relève pas de suite, puis fronce les sourcils.
« Pardon, on parle bien du gros nuage noir là-bas ? »
Oromë ricana un peu.
« Oui, celui-là même. Elle traîne dans le ciel depuis à peu près une semaine. Elle n'est pas venue au-dessus de nous hier soir, mais à priori elle revient à la charge.
-Vous avez donné un nom pour une tempête ?
-Nous ? Non. C'est Atea qui l'a fait.
-Atea ? C'est une présentatrice météo ?
-Une..."
Aeglos explose de rire, et retourna faire la vaisselle. Oromë sourit, bienveillante :
"Non, Area est une déesse. Elle vit dans le monde du Dessus.
-ça existe ?
-Bien sûr. Il y a le monde du Dessous aussi. Mais il n'y a que les Dieux qui y vivent, un humain ne pourrait pas survivre au climat.
-Ah, d'accord. Et Atea c'est la Déesse de quoi ?
-Du temps, en général. Enfin, météorologique."
Je hoche la tête, comme si c'était évident. Elle me sourit, tendrement, et passe sa main dans mes cheveux.
"C'est un peu compliqué, mais ne t'inquiète pas ce n'est pas grave si tu ne comprends pas tout. Viens, on va faire rentrer les Varselles, sinon elles vont être toutes boueuses. Je vais te montrer où sont leurs enclos. Et comment on les attire. C'est très simple, admire."
Elle disparut quelques secondes dans la cuisine et réapparut avec un cupcake d'Aeglos dans les mains, puis siffla. Une armée de petites peluches se mirent à courir le plus vite possible malgré leurs petites pattes, et elle rit tout en se dirigeant derrière la maison.
"Un jeu d'enfant."
Je la suivis, impressionnée, et découvrit alors un immense enclos en bois derrière leur maison. Les barrières étaient étrangement hautes par rapport aux Varselles en elles-mêmes.
"Mais c'est immense !
-C'est parce qu'elles sautent. Elles sont agiles."
Pour prouver le contraire, l'une trébucha sur son ombre, tomba et roula sur plusieurs mètres, faute à la petite pente. Je couru après, horrifiée à l'idée qu'elle se fasse mal, et finit par la rattraper. Elle remua ses six pattes dans le vide, avant de tirer la langue pour la poser sur ma joue. Elles ont l'air stupides. Je les aime. Je reconnu celle dans mes bras : la même que ce matin. Elle a les mêmes yeux, et une petite zone brune sur le dos. Oromë le remarqua avec un léger rire.
"Tu lui a trouvé un prénom ?"
Je secoue la tête.
"Non, il faut que je m'y penche sérieusement. Sinon mon manque d'inspiration va me faire partir sur "Bulbe"."
Je regarde la Varselle.
"Bon, ce sera son nom temporaire. C'est toujours mieux que Petit Nuage."
Elle rit.
"Certes. Bon, t'as le temps pour trouver de toute façon."
Elle ouvrit l'enclos et jeta le cupcake dedans. J'aurais trouvé ça horrible, mais comme l'herbe est presque plus propre qu'une salle d'opération, je me dis que ce n'est pas si terrible. Bulbe me regarde, sans comprendre grand-chose à la situation, -en tout cas, je crois, mais vu son air de merlan frit ce ne serait pas délirant-, et finit par tendre les pattes. Je le pose au sol, et il court le plus vite possible dans l'enclos. Aucun n'essaye de manger le gâteau : Ils s'allongent les uns sur les autres autour et arrêtent de bouger.
"Qu'est-ce qu'ils font ?
-Ils vont dormir. Les uns sur les autres, pour ne pas avoir froid. Mais comme à chaque fois, ils finiront par avoir trop chaud.
-Et le cupcake ?
-Laisse, ils veulent juste le vénérer. Je n'ai jamais compris non plus."
Elle haussa les épaules et referma la porte.
"Et voilà. Tu vois ? C'était simple !
-C'est clair ! Mais je ne m'attendais pas à autant, en fait."
Quelques grosses gouttes d'eau s'écrasèrent sur mon épaule. Bien vite, elle tomba partout autour, trempant les environs ainsi que nous-mêmes. Elle prend ma main et court vers la maison en riant, affolée mais heureuse quand même. Je la suis, et on s'enferme dans la maison. Le temps n'est malgré tout pas froid, si bien que leur porte reste ouverte. Aeglos nous voit arriver, trempées, et nous attrape bien vite deux serviettes.
"Oromë, mon cœur, tu vas lui montrer la salle de bain ?"
Elle hoche la tête.
"Excellente idée. Viens Astal."
Elle commence à monter les marches, empruntant le couloir qui mène à ma chambre. Elle passe deux ou trois pièces, avant d'ouvrir une porte, similaire à du chêne. La pièce était très belle, en bois aussi, mais également en pierre, apparente. Une large fenêtre laissait une jolie vue sur de la pierre, celle de la montagne où la maison est collée. De nombreuses plantes logeaient contre les murs. En face de nous, une baignoire en triangle était collée contre la vitre, entourée de verdure et de bougie, et une étagère avec des livres se tenait juste derrière, collée au mur. Une douche était à notre gauche.
Je me tourne vers elle, émerveillée. Elle ouvre un placard, à notre droite, et sort une serviette.
« Et tu as des vêtements dans ta chambre. On ira t'en acheter demain si tu veux. »
Je hoche la tête vivement, et elle sourit, tourne les talons et ferme la porte derrière. J'observe la salle de bain, ne comprenant pas vraiment dans quel genre de Paradis j'ai atterri. J'allume l'eau, la mettant brûlante, et me glisse dessous, après avoir retiré mes vêtements que je laisse dans un petit coin de la pièce.
Je redescends quinze bonnes minutes plus tard, ma serviette sur les cheveux, mes pas rythmés au bruit de la pluie qui s'abat dehors, étrangement violemment. Aeglos est...toujours dans la cuisine. Je m'approche de lui, hésitante.
« T'as besoin d'aide ? j'ai l'impression que tu es coincé dans cette cuisine depuis ce matin... »
Il rit.
« C'est le cas ! Mais ne t'inquiète pas, c'est juste que j'aime bien cuisiner. Ne te sens pas obligée de m'aider, tu viens juste d'arriver, profite plutôt. »
Oromë s'approche, un verre dans la main, radieuse. Au même moment, un bruit de coup de feu résonne dehors : Du tonnerre. Elle pousse un cri, lâche son verre qui s'explose en dizaines de morceaux au sol, griffant ses fines chevilles. Ses mains se plaquent sur ses oreilles, et elle se penche sur elle-même, comme pour se protéger. Aeglos lâche tout ce qui était dans ses mains pour se jeter vers elle, la prenant dans ses bras, sous mes yeux dépassés par la situation.
« Tout va bien, Oromë, tout va bien. C'est juste Lacerta qui gronde. Tout va bien mon ange... »
Il l'emmène vers un canapé à l'entrée, et elle s'assoit, reprenant difficilement son calme. Ses doigts tiennent ses cheveux un peu en arrière, et ce n'est que maintenant que je remarque à quel point ses oreilles sont pointues comparées à celles d'Aeglos -alors comparées aux miennes, je n'ose même pas suggérer le contraste.
« Astal, ma grande, tu veux bien fermer la porte s'il te plait ? »
Je hoche la tête et m'y précipite, essayant d'être le plus utile possible.
« Tu euh...as un balai ? »
Il sourit, et hoche la tête, désignant l'évier.
« Contre le meuble là. Merci. »
Je m'y dirige, et balaie un peu le sol, ramenant les cristaux qui se sont envolés un peu partout. Accidentellement, je marche sur un.
« Aïe ! »
Je relève mon pied, et le retire. Une perle de sang roule le long de ma peau, et s'écrase au sol. J'ai beau être dans un rêve, cette douleur était très réelle... Je secoue la tête. C'est complètement débile, ça peut arriver de ressentir de la douleur dans un rêve, on peut même pleurer dedans. Je secoue la tête, et fais un petit tas à côté de l'évier, là où personne ne marche, en attendant de savoir où est la poubelle.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top