SUSURRE COMME LES SERPENTS (part 2)


𝕾𝖚𝖘𝖚𝖗𝖗𝖊 𝖈𝖔𝖒𝖒𝖊 𝖑𝖊𝖘 𝖘𝖊𝖗𝖕𝖊𝖓𝖙𝖘
𝔖𝔬𝔫𝔤 𝔬𝔣 𝔟𝔦𝔯𝔡𝔰 𝔞𝔫𝔡 𝔰𝔫𝔞𝔨𝔢𝔰 )

L'ombre de Namjoon avait cessé de le suivre le jour où il avait quitté Poudlard — remplacé par un autre fantôme, plus dangereux, né dans la jalousie et les lugubres secrets.

namkook
harry potter ! au 
apprenti ! jeongguk
auror / département des mystères ! namjoon
slight angst mais chill
mention of poison, aphrodisiacs, darkness & other things
can you tell the 6th book is my favorite
croyez moi ou non mais c'est censé être un os de noël ptdr
mention of smutty scenes

(ndla :  je me suis bien prise la tête pour que cet os soit le plus canon possible (parce que ok je suis sadique dans mes écrits, mais surtout envers moi-même ptdrr), donc si vous saviez le nombre de recherches que j'ai fait pour que tout soit accurate (en plus d'un marathon de films, ça va de soit) donc grosso modo, quasi tout ce que vous lisez sur le monde magique est "vrai" !)

(ndla bis : dédicacé à Lawny__, la fan n°1 de cet os qui le connaît limite mieux que moi ptdr)





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Ça avait commencé par des murmures.

Des murmures qui le suivaient partout, dans les recoins du château, les regards qui s'attardaient sur son profil, les mains qui se pressaient contre des oreilles pour chuchoter quelques secrets scandaleux. Des murmures comme une nuée d'abeilles voraces, malfaisantes. Ou des mouches, plutôt, le genre d'insectes qui se régale des macchabées.

Au début, Jeongguk ne s'en était pas rendu compte. Les cours, les entraînements, l'électricité dans l'air dehors qui ne présageait rien de bon, l'appréhension du lendemain, la lettre qu'il attendait avec impatience — tout, en réalité, l'avait rendu sourd aux messes basses qui le poursuivaient continuellement, trop obnubilé par son quotidien suffisamment anxiogène pour s'inquiéter des ragots qui courraient le long des couloirs.

Mais même un lunatique distrait n'aurait pu durer bien longtemps sans se rendre compte qu'une rumeur secouait Poudlard ; la preuve en était que même l'équipe de Quidditch de Gryffondor, qu'il continuait toujours de coacher malgré son Apprentissage, se trouvait plus préoccupée à marmotter entre eux dans les vestiaires qu'à se concentrer sur le jeu, et le noiraud avait rappelé plusieurs fois Septimus à l'ordre une fois sur le terrain.

Au départ, il avait naïvement cru que quelque chose s'était produit dans le monde magique, au point de faire les gros titres de la Gazette du Sorcier, pour que les étudiants bruissent entre eux comme la corde tendue d'un luth. Ses études avaient pris un tournant serré ces derniers temps, et il n'avait eu guère le temps de s'intéresser au contexte politique de leur communauté ; alors il avait attendu que Windsor lui dépose le journal le matin pour arpenter les premières pages avec une certaine nervosité, en vain. Depuis la défaite de Voldemort par le jeune Harry Potter, il flottait dans l'air un parfum chargé de poudre et de fer, si dense et épais qu'il ne suffisait que d'une allumette pour embraser la révolte. Certains préféraient souffler, se congratuler de leurs survies, disant que la mort de Vous-Savez-Qui par un nourrisson était la fin de tout, que le danger était définitivement envolé, mais Jeongguk n'était pas dupe. Le bruit se répandait que les adeptes du Mage Noir commençaient à se rassembler, et tout cela n'était qu'une question de temps. Un maigre sursis.

Ce fut donc avec un froncement de sourcil qu'il s'installa à la table des rouges et or dans la Grande Salle, les élèves s'empilant le long des bancs pour le dîner dans un joyeux brouhaha. Le plafond enchanté reflétait les saisons dehors, les nuages sombres et bas à peine dissipés par les bougies flottantes trouvant un certain écho avec sa propre humeur. Il allait bientôt neiger, mais même cette perspective n'arrivait pas à lui tirer un sourire.

En face de lui, Jimin, sa cravate de travers et les tâches d'encre sur ses poignets de chemise, les sourcils concentrés alors qu'il prenait des notes de sa lecture — sur les pages jaunies, un chapitre sur les cornes de Bicorne, le titre surmonté d'un symbole fait de runes et de demi-lune. Malgré ses maladresses légendaires en cours de Potions, le jeune homme avait réussi à convaincre Slughorn de le prendre en tant qu'Apprenti ; sa thèse préliminaire sur les ingrédients manquants à la potion d'Amortentia pour faire ressentir le véritable amour avait apparemment eu son petit effet. Maintenant qu'il approchait la fin de son cycle de trois ans, le brun s'interrogeait même à continuer vers une Maîtrise — hautement conseillé, surtout quand on souhaitait s'exercer à la médecine comme lui, hésitant entre Préparateur de Remède et Magicomage.

"Qu'est-ce qu'il se passe ? demanda Jeongguk en posant à côté de lui l'ouvrage qu'il avait réussi à sortir de la Réserve — Les Grandes Noirceurs de la Magie par Godelot.

[Rogue, malgré la rivalité des maisons et son caractère pince-sans-rire, lui avait proposé un Apprentissage en Défense contre les Forces du Mal lorsqu'il avait utilisé en troisième année un miroir face à un Epouvantard, qui, trop effrayé par son propre reflet, s'était immédiatement évaporé. Ça aussi, ça avait eu le mérite d'avoir son petit effet.]

Jeongguk ne put que remarquer, les dents serrées, la façon dont les autres autour de lui lui jetaient des coups d'œil brefs depuis qu'il avait passé les grandes portes. La curiosité des plus jeunes élèves était majoritairement dû au fait qu'il ait explosé tous les scores en Quidditch au cours de ses sept années ; mais à présent, ce n'était certainement pas de l'admiration qui se lisait dans leurs prunelles. Plutôt une forme... d'empathie ?

La dernière fois qu'on l'avait regardé ainsi, comme s'il n'était qu'un vulgaire animal de foire, c'était le lendemain de cette nuit-, quand ils étaient sortis de la Salle du Demande au petit matin et qu'il l'avait embrassé devant tous les autres, et—

Le bel éphèbe serra son poing. Il n'aimait pas les ragots, et il aimait encore moins les ragots sur lui.

"Hmm ?

Jimin était toujours concentré sur son livre, et Jeongguk ne put que sentir son irritation griffer le long de sa poitrine.

"Tout le monde complote ces temps-ci, c'est insupportable. Qu'est-ce qu'il se passe ? Qu'est-ce que j'ai encore fait ?

Si Jeongguk ne connaissait pas le brun aussi bien, sûrement n'aurait-il pas décelé la façon presque imperceptible dont ses doigts se crispèrent autour de sa plume, le bec en iridium s'arrêtant sur le parchemin dans un crissement désagréable. Jimin lui lança un regard bref, avant de reprendre ses notes, et de demander d'un ton qui se voulait désinvolte :

"Qui te dit que c'est sur toi qu'ils parlent ?

"Ignatus et Olympe m'ont arrêté à l'entrée pour me demander si ça allait et si je tenais le coup. C'est la quatrième fois qu'on me pose la question aujourd'hui. Je sais que je suis la petite attraction du moment, et j'aimerais bien savoir pourquoi.

Non pas qu'il n'appréciait pas Ignatus et Olympe, loin de là, mais il n'avait parlé aux deux Préfets de la maison Poufsouffle qu'une poignée de fois dans sa vie — alors leur soudaine préoccupation pour son bien-être était au mieux intéressée et calculée, au pire suspecte et inquiétante.

Face à la moue peu convaincue de son vis-à-vis, le noiraud saisit le journal sur la table pour lui claquer l'arrière de la tête d'un geste sec.

"Mais ? Aïe ! s'exclama l'autre soudainement en se frottant son crâne rougi.

"Jimin !

"Quoi ?

"Qu'est-ce que les gens disent sur moi ?

Il y eut une seconde de flottement, avant que Jimin ne lâche un grognement, fermant les yeux.

"Bon, très bien.

Il repoussa ses papiers d'un mouvement de bras, leur servant deux gobelets — et, se retournant pour s'assurer que McGonagall n'était pas dans les parages, invoqua discrètement un sortilège pour transformer leur eau en Whisky Pur Feu. Ils avaient beau être majeurs, la Directrice des Gryffondor les avait déjà pris entre quatre yeux pour leur ordonner de ne pas boire à côté de premières années de 11 ans, juste ciel.

"Les gens parlent en effet de toi.

"Si c'est à cause de la fois où j'ai taclé Minho pendant le match contre les Serpentards, je me suis déjà expliqué avec lu—

"De toi et de Namjoon.

Jeongguk se figea.

Namjoon.

Par Merlin, forcément que ces langues de vipères parlaient de Namjoon — sans mauvais jeu de mots.

Namjoon qui l'avait obligé à rester dormir avec lui après leur première baise astronomique pour ne pas qu'il s'enfuisse, Namjoon qui lui avait pris la main en rentrant dans la Grande Salle le lendemain matin, Namjoon qui avait accepté une offre d'Apprentissage à Poudlard pour rester avec lui encore un peu, Namjoon chez qui il passait toutes les vacances, Namjoon qui le faisait sortir du château en douce pour leurs virées nocturnes, Namjoon qui l'avait embrassé de tout son soûl quand il avait appris qu'il avait décroché un poste au Département des Mystères. Namjoon qui lui avait promis qui lui enverrait des lettres une fois que Jeongguk ferait sa rentrée en dernière année de cycle. Mais Décembre était déjà bien entamé, et mis à part la missive pour lui souhaiter une bonne reprise...

Son expression ne put que pâlir à cette idée : est-ce que les autres élèves ressentaient de la pitié pour lui ? Car si la réputation de Jeon le précédait, celle de Kim était tout autant gravée dans le marbre. Il avait déjà entendu des Serdaigles demander à Kim Taehyung, qui poursuivait lui aussi des études d'Herbologie, s'il était sorti avec le grand Namjoon — alors qu'il était. juste. à. côté.

Certes, Jeongguk était bloqué dans son Apprentissage sans son petit-ami pour l'attendre de l'autre côté des portes, mais il ne saurait dire le nombre de fois où Namjoon s'était glissé dans son lit quand Rusard avait fini sa ronde, pour repartir aux petites lueurs du jour, décorant son cou de marques si violacées que plusieurs avaient cru qu'il s'était trouvé un deuxième amant.

Mais cela faisait quatre mois que le noiraud était de nouveau à Poudlard après avoir étudié les Dragons en Europe de l'Est pendant tout l'été, et il n'avait toujours aucune nouvelle de son aîné.

Était-ce pour cela que les murmures le suivaient partout ? Le dépeignaient-ils comme étant le petit Gryffondor qui s'était enamouré du redoutable Serpentard, laissé pour compte une fois que l'Animagus ait fini son cursus à l'école ? Savaient-ils qu'il regardait le bal des hiboux tous les matins dans l'espoir de recevoir une lettre de sa part ? Était-ce pour cela que les sixièmes années lui demandaient s'il tenait le coup, préférant se plonger dans ses devoirs et ses incantations plutôt que de faire face à la peine grandissante dans sa poitrine ?

Il n'était pourtant pas le seul : Leta et Cadmus, Quintus et Intak, même Seugmin et Bangchan, tous avaient laissé quelqu'un derrière qu'ils chérissaient de revoir enfin. Hoseok était parti en Asie dans le cadre des liaisons sorcières internationales pour entretenir les relations entre les différentes communautés magiques, et vous ne voyiez tout de même pas leurs camarades de promotion plaindre Jimin de cet éloignement.

Avant que sa mortification initiale ne se transforme en une fureur sourde — pour qui se prenaient-ils, à le déposséder de quelconque once de vie privée et à décortiquer son couple à coup de Plume-à-papote —, le jeune brun en face de lui ajouta :

"Ce n'est pas tant sur ta relation qu'ils parlent. C'est juste que...

Il s'arrêta avec un soupir, baissant la tête, et Jeongguk ne put qu'hausser un sourcil, passablement énervé.

"Et bien quoi ?

"Il y a une rumeur qui circule. Une rumeur selon laquelle le Département des Mystères mènerait une enquête au sein du château.

Ce fut comme si toute la joyeuse cacophonie de la Grande Salle s'était tût d'un coup net. Comme si l'orage qui grondait, les tintements des couverts, les rires des Poufsouffles, les battements d'ailes des chouettes au-dessus d'eux — comme si tout était devenu brusquement néant, le bruit sourd cotonneux quand on plonge la tête sous l'eau. Jimin continuait de lui parler, sa bouche articulant des mots qu'il n'entendait pas, qu'il ne comprenait pas.

Et, petit, timide, perdu, il demanda simplement dans un souffle mince :

"Namjoon est ici ?

Son compagnon lui offrit un regard doux, loin de l'empathie faussée et hypocrite de tous les autres. Lui aussi savait combien cela pouvait être éprouvant de n'avoir de nouvelles, de rester ici pendant que l'autre parcourait le monde. Hoseok avait été accusé d'allégeance quand sa mère était partie à Azkaban, Namjoon travaillait pour un département aussi sibyllin que son nom, et les ténèbres, dehors, étaient grandissants.

Soudain, les portes derrière la grande estrade où mangeaient les Professeurs s'ouvrirent dans un grincement aigu. Dumbledore se matérialisa, parlant avec animosité à une sorcière svelte qu'ils n'avaient jamais vu, un tailleur cintré à la mode des années 40 et un chapeau de feutre orné d'une plume de faisan cachant ses traits. Quelques élèves levèrent la tête en leur direction, brièvement, avant de reprendre leur dîner et leurs conversations.

"Je crois que c'est Hepzibah Edgecomb, chuchota Jimin. Hoseok m'a déjà parlé d'elle.

Mais Jeongguk, lui, n'écoutait pas.

Car derrière le Directeur et la nouvelle venue, se trouvait Namjoon.

C'était comme s'il venait de l'invoquer, comme si la réalisation que Kim était peut-être entre ces murs avait suffi à le faire apparaître soudainement près de lui. Il portait l'un de ses costumes qu'il aimait tant, un riche turban d'un vert sapin profond entourant son torse, son holster de baguette épousant la forme de ses épaules avec envie. Il était beau. Magnifique. Aussi auguste que le jour où il lui avait demandé de gagner contre les Serpentards, aussi éblouissant que le jour où il lui avait demandé d'être sien.

Il ne saurait dire ce qu'il ressentit en premier. La surprise de le voir ici, la joie d'apprécier de nouveau ses traits après des mois séparés ; ou une émotion plus laide, plus vicieuse, celle qui pesait dans son estomac quand la jalousie rancunière lui susurrait d'une voix vile que Namjoon ne l'avait même pas prévenu de son arrivée, que tout le monde ici-bas était au courant, sauf lui.

Namjoon sentait-il le regard lourd de son amant, de là où il était ? Ou faisait-il mine de répondre à son ancien Professeur pour éviter de se confronter aux sentiments confus dans les orbes obsidiennes qu'il connaissait ô que trop bien ?

Et par les cieux, que faisait-il ici ?

Dumbledore hocha la tête à la conversation chuchotée, se caressant une, deux fois la barbe, avant de faire un signe de la main et de conduire ses invités vers la sortie d'un pas dynamique. Ils traversèrent la Grande Salle entre les tables de Gryffondor et de Serdaigle, le reflux des murmures plus fort encore en reconnaissant les nouveaux venus.

Jeongguk ne réalisa que trop tard qu'il s'était levé de son banc. Son regard filant sur la silhouette de Namjoon alors qu'il suivait le Directeur, le menton haut, le visage impassible et le regard droit devant lui. Une nouvelle vague de chuchotements secouèrent l'assemblée, mais il n'en avait cure — Jimin jaugea les élèves d'un œil noir et les remarques désobligeantes soufflées le long de leur table cessèrent.

Il avait envie de crier, de l'appeler, de lui faire un signe, n'importe quoi, mais sa voix mourut dans sa gorge quand la procession passa devant lui, et que Namjoon ne lui accorda aucun sourire, aucun clin d'œil de reconnaissance, rien.

Dumbledore disparut au bout du couloir.
Jimin tira sur sa manche pour qu'il se rassoie.
Les portes de la Grande Salle se refermèrent dans un bruit sourd.
Il ravala difficilement la boule dans sa gorge.

Namjoon ne l'avait pas regardé. 



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Jeongguk se massa les tempes dans un grognement, ses jambes le menant par pure mémoire musculaire en direction de la salle commune des Apprentis, dans l'aile Nord du château. Il n'y avait presque plus personne dans les couloirs, la grande horloge indiquant bien longtemps après le couvre-feu, signe que sa leçon particulière d'Occlumancie avec Rogue avait fini plus tardivement que prévu. Il fallait absolument qu'il maîtrise cet art aussi capital que difficile pour obtenir ses examens, et être le protégé du Professeur de Défense contre les Forces du Mal donnait quelques avantages — mais à quel prix ?

Quoiqu'en dise les premières années terrifiés par son sarcasme rebutant, Rogue était un excellent pédagogue, mué d'un grand intellect et d'une passion singulière, et le jeune homme avait pris de plus en plus de plaisir d'apprendre de ses préceptes. Mais sa sévérité, que craignaient tous les élèves avec un minimum d'auto-préservation, se faisait ressentir lors de leurs entraînements — usant de ses dons de Legilimancie pour pénétrer l'esprit du jeune Jeon et de mettre à nu ses secrets les plus inavouables, l'ordonnant de parer ses attaques cruelles, féroces et insatiables, ne lui laissant que peu de répit entre chaque assaut haletant pour qu'il rassemble ses forces.

Rogue avait découvert suffisamment de ses souvenirs les plus embarrassants pour que Jeongguk ne réussisse à le regarder dans les yeux le cours suivant, mais après quelques semaines, il se surprenait lui-même à contrer avec une aisance nouvelle.

Mais par mille gorgones, ce que leurs sessions le laissaient épuisé et las, presque vide.

Il tourna à gauche devant le portrait de Boris le Hagard et d'une représentation du Bestiaire de Rochester, emprunta le long couloir qui menait au grand escalier, av—

Une main se plaqua soudainement contre sa bouche.

Son esprit endormi se réveilla d'un seul bond, ses muscles se tendant et prêts à se battre face à l'intrus, mais alors qu'il allait s'emparer de sa baguette, il fut tiré vers un recoin sombre que les bougies ensorcelées n'arrivaient à percer. Il tenta de se débattre, de donner des coups de pieds, formulant déjà des sortilèges de protection et d'attaque, avant de se figer en sentant un souffle chaud près de son oreille :

"Je t'ai enfin trouvé, mon petit lionceau.

La sensation de se plonger sous une épaisse couverture, dans un bain chaud, la sensation du Whisky Pur Feu qui coule le long de sa gorge : son cœur palpitant se calma et la tension le long de ses épaules disparut au son de cette voix qu'il ne connaissait ô que trop bien, apprivoisant la partie reptilienne de son cerveau qui ne voulait que se battre et se défendre. Il ferma les yeux un instant — le parfum de chandelier, de musc, du cuir riche et de la fraîcheur d'un lac gelé ; le contact de ses lourdes bagues de famille contre son menton.

Le jeune homme se retourna doucement, et les faibles lueurs des cierges ne rendaient pas justice à la beauté du visage devant lui. Des traits coupés au couteau, des sourcils épais, des yeux ourlés qui semblaient lire dans son âme, une bouche tournée dans un rictus à la limite du carnassier qui lui avait tant, tant manqué.

Il n'en fallut pas plus pour que Jeongguk saisisse les revers de son costume gris anthracite pour le rapprocher fermement de lui, fondant vers sa bouche avec la hargne d'un alcoolique qui buvait son dernier verre. Namjoon étouffa une seconde de surprise contre ses lèvres — avant de plonger bien vite ses mains dans la tignasse ébène de son amant, un mélange de dents et de beaucoup trop de langue, un de ces "bons retours à la maison" qui les laissèrent tous les deux pantelants. Il lui avait tellement manqué.

Mais alors que son aîné tirait un peu plus sur son scalp pour approfondir le baiser, Jeongguk le repoussa du plat de la main, enfonçant de nouveau son profil dans le noir du recoin en pierres.

"Attends, attends, le stoppa-t-il, un brin essoufflé.

Namjoon leva lentement ses mains en l'air, geste universel qu'il ne ferait rien de plus, un sourcil haussé dans un sourire amusé. Par la barbe de Merlin, il était si magistral que le sorcier aurait pu tomber à genoux et le prendre en bouche, ici et maintenant, peu importe si Peeves les surprenait, peu importe si les Préfets avaient changé leur ronde dans ce secteur.

À la place, il lui asséna une tape sur le torse. Il avait beau lui faire du charme, de tous ses tricks qui le rendait pantelant, mais Jeongguk était trop énervé et confus pour le laisser s'en tirer à bon compte, cette fois-ci.

"Qu'est-ce que tu fais ici ? Tu vas bien ? Pourquoi tu ne réponds pas à mes lettres ? Ça fait 4 mois que je n'ai pas eu de tes nouvelles ! Et le Département des Mystères, pourquoi s'intéresse-t-il à Poudlard ? Qu'est-ce qu'il se passe ? Pourquoi tu ne m'as pas regardé dans la Grande Sa— hmmph !

Un baiser, rapide, chaste, pour faire taire ses pensées intrusives qui dévalaient de ses lèvres en un flot continu.

"Doucement, angel. Respire.

Mais avant que le noiraud ne puisse répliquer son mécontentement, Namjoon jeta un sortilège de Désillusion autour d'eux, pour prendre sa main et le conduire dans les entrailles du château. Jeongguk ne put que froncer des sourcils : l'attirer dans un recoin sombre, et maintenant l'incantation pour les rendre invisibles à l'œil extérieur ? Qu'est-ce qui était si important au point que son aîné craigne se faire surprendre ? Le blond avait déjà été surpris par Hagrid et par le Professeur Chourave lorsqu'il s'échappait en douce de la salle commune le matin quand il venait lui rendre visite, pourtant...

Jeongguk le suivit silencieusement jusqu'au troisième étage, pour s'arrêter devant la statue de la Sorcière Borgne — de son vrai nom Gunhilda de Gorsemoor, célèbre pour avoir trouvé le remède à la dragoncelle au 16e siècle.

"Dissendium, murmura Kim d'un coup de baguette.

La statue vibra, avant de s'écarter dans un bruit de pierres polies par le temps, découvrant derrière elle un couloir sombre à peine éclairé par une lanterne. Il connaissait ce passage secret pour l'avoir emprunté en douce quand McGonagall lui interdisait de se rendre à Pré-au-Lard, passage qui s'avérait bien utile lorsqu'il était impossible de transplaner dans l'enceinte de l'école.

"Namjoon ?

"Pas ici, lui répondit-il bassement en l'intimant d'entrer.

Il ne put que murmurer un Lumos et suivre son aîné le long de la galerie, les questions tournant de plus en plus vite dans son esprit.

La nuit était d'un noir de jais lorsqu'ils sortirent enfin du souterrain, mais le jeune homme ne laissa pas le temps au Gryffondor d'admirer les toits enneigés sous les rayons de Lune, tirant de nouveau sur sa main pour le conduire jusqu'au Trois Balais d'un pas pressant. L'auberge était silencieuse, l'hiver et l'heure tardive ayant raison de toute activité nocturne — si ce n'était pour Madame Rosmerta qui somnolait sur son comptoir—, et ils gravirent les marches grinçantes deux par deux.

Le bel éphèbe le poussa dans une chambre, ferma la lourde porte en bois derrière eux, lança quelques sorts de protection sur le verrou... et se retourna pour embrasser Jeongguk avec une intensité toute nouvelle. Le noiraud gémit contre ses lèvres sous la surprise, les grandes mains de son petit-ami venant cajoler son visage comme s'il était une pierre précieuse qu'il craignait de briser, la chaleur de son corps brûlant sous ses doigts après des semaines sans nouvelles de lui.

"Namjoon, l'appela-t-il entre deux baisers, confus et perdu de toutes ces précautions.

Son sigisbée se détacha de lui pour presser leurs fronts ensemble, le souffle tremblant, son pouce caressant des arabesques rassurantes contre sa mâchoire, et le cadet ne put que retenir un frisson de contentement.

"Par Salazar, ce que tu m'as manqué, murmura le blond enfin en rouvrant les yeux.

Jeongguk lui offrit un petit sourire, toujours aussi déconcerté, et sûrement que l'autre dû lire les questions qui nageaient dans ses orbes charbon. Il avait appris à ne jamais se complaire dans les certitudes avec lui, attendant le prochain cadeau, la prochaine stupeur, le prochain coup du sort, la prochaine surprise. Les premières semaines après leur escapade dans la Salle-sur-Demande s'étaient transformés en mois, puis en années, et le jeune homme comparait toujours leur amour à un saut dans le vide. Une vie à mille à l'heure, nager avec le Grand Calamar dans le lac de Poudlard, slalomer à toute vitesse avec son balais entre les bus de Londres, plonger dans les nuages à dos de dragon. L'adrénaline, la pointe savoureuse sur sa langue d'une vie palpitante et bien remplie.

Mais rien de tout cela n'arrivait à chasser les tourments dans ses pupilles.

"Viens t'asseoir près de moi, dit Namjoon à la place, se dirigeant vers le lit et tapotant l'édredon à côté de lui.

Jeongguk s'installa lentement aux côtés de son amant. Il aurait voulu lui demander ce qu'il se passait, pourquoi il était là, mais il savait que cela pourrait braquer l'ancien Serpentard. À la place, il se contenta d'une introduction sobre, une qui pourrait lancer la conversation sans soubresauts. ; son cœur tambourinant dans sa poitrine quand il demanda d'un air désintéressé :

"À qui est cette chambre ?

"Je l'ai loué le temps de la mission.

"Mission ? répéta-t-il, le front soucieux.

Namjoon soupira en se pinçant le sourcil entre son index et son pouce d'un geste mécanique.

"Je voulais t'écrire, commença-t-il lentement — et Jeongguk craignit qu'une fois de plus, il ne faisait qu'éluder sa question. Crois-moi, je voulais tellement t'écrire, j'ai reçu toutes tes lettres, et j'avais tellement envie de te répondre, tellement envie de te faire savoir que j'allais bien. Je n'ose pas imaginer ce que tu as dû penser en ne voyant pas mes missives arriver.

Le noiraud déglutit difficilement ; il était une chose de se lamenter sur son propre sort à coup d'alcool fort, mais il en était une autre que de voir sa peine étalée devant lui, sous ses yeux, les mots de son aimé résonnant dans ses oreilles dans un sifflement strident — preuve que ses inquiétudes étaient légitimes, que tout cela n'était pas juste les sombres voix dans sa tête qui lui murmuraient des paroles destructrices.

"Je suis désolé, angel, sincèrement, continua Namjoon face au silence de son petit-ami. Mais maintenant que je suis une Langue-de-Plomb pour le Ministère, je dois garder le secret de tout ce que je fais, même les choses plus insignifiantes. Ce que j'ai mangé au dîner peut être considéré comme confidentiel, alors...

Il prit ses mains entre les siennes, jouant distraitement avec ses doigts.

"Les deux premiers mois, j'étais en planque, donc c'était hors de question de trahir ma couverture, ou pire, te mettre en danger inutilement. Par les dieux, c'est vraiment la dernière chose que je souhaite. Et les deux mois suivants, de retour au Département, toutes mes correspondantes étaient filtrées, surveillées. J'étais tellement submergé que je n'avais même pas le temps de venir te voir, de venir te rendre visite, et...

Ses oreilles résonnaient toujours.

"Pourquoi tu m'as ignoré, tout à l'heure ? murmura simplement Jeongguk.

C'était idiot, il le savait — Namjoon avait ses propres batailles à mener, et la dernière chose dont il avait besoin était de quelqu'un rongé par les émotions laides et vicieuses, qui ne pouvait s'empêcher de vouloir se l'accaparer pour lui tout seul.

Pourtant, de tout cela, de tout ce qui le grignotait intérieurement, c'était ce qui le rendait le moins à l'aise. Ne pas écrire pour ne pas faire capoter sa couverture, ne pas l'informer de son arrivée pour ne pas trahir le secret, tout cela, il pouvait le comprendre — il mettrait du temps à l'accepter, à n'en pas douter, mais il pouvait le comprendre. Mais l'ignorer dans la Grande Salle comme il l'avait fait ? Ne lui offrir aucun signe de reconnaissance, aucun sourire secret, quelque chose, n'importe quoi ? Le Namjoon pour lequel il était tombé amoureux aurait trouvé un moyen de lui faire signe... et c'était sûrement cela qui lui faisait le plus mal.

L'idée que l'homme devant lui avait tellement changé au point qu'il ne le reconnaissait presque plus.

Par Godric, que lui était-il arrivé dans ces 4 mois loin de lui ?

"Personne ne doit savoir que nous sommes ensemble. Ni le Département des Mystères, ni Hepzibah avec qui je suis venu, ni...

Le blond se mordit la lèvre, comme pour s'empêcher physiquement de prononcer les derniers mots.

Jeon fit rouler sa langue contre l'intérieur de sa joue, hochant sèchement la tête et tentant tant bien que mal de ravaler la bile de jalousie sourde et mauvaise qui grimpait le long de sa gorge. Il devait avoir ses raisons, n'est-ce pas ? Il n'avait jamais été avare ou timide en effusions affectueuses, allant des marques rougies sur son cou aux bijoux à son poignet. Alors il devait avoir ses raisons, n'est-ce pas ? Pour l'avoir fait passer pour un imbécile devant tous les autres élèves de la Grande Salle ?

Namjoon glissa une main dans ses mèches corbeau, dans quelque chose qui se voulait réconfortant, jouant avec la douceur à l'arrière de la nuque, mais le contact lui paraissait si lointain.

"Je t'en conjure, angel. Crois-moi quand je te dis que tout cela en va de ta sécurité.

Quelque chose dans son regard le fit tiquer. La façon dont il s'était mordu la lèvre.

Il en va de ta sécurité.

"Namjoon, appela-t-il doucement, lentement, énonçant chacune des lettres avec une prudence toute nouvelle. Pourquoi tu ne pouvais pas m'en parler au sein de l'école ?

Son amant ferma les paupières en prenant une grande inspiration. Par les cieux.

Quelque chose au fond de lui lui murmurait qu'il n'allait pas le lui dire. Namjoon était une Langue-De-Plomb, par Salazar. Il travaillait au Département des Mystères, au nom aussi occulte que leurs véritables missions, et toute son existence depuis qu'il avait quitté Poudlard n'était que ça : une fumée de secrets, de mensonges et d'énigmes. Il avait affaire à des choses que le monde extérieur n'avait aucunement le droit de connaître, emportant ces fantômes avec lui dans ses cauchemars et promettant le dévouement le plus absolu. La seule chose qui lui avait dit, lorsqu'il avait commencé au sein de son nouveau poste, c'est qu'il s'occupait des disparitions et des morts suspectes — et... c'était tout. Namjoon ne pouvait en parler à personne, ni à lui, ni à ses parents, ni à son putain de psy, et peut-être lui avait-on interdit d'en parler aussi à Nefertiti, au cas où on chercherait à pénétrer l'esprit du mamba noir.

Le bel éphèbe ouvrit la bouche, hésitant, quand il comprit que Namjoon ne lui dirait rien. Y avait-il une peine de trahison qui planait au-dessus de sa tête le cas échéant ? Il avait envie de lui dire que ce n'était pas grave, qu'il pouvait garder cet autre arcane que pour lui, que l'important maintenant était qu'il était près de lui. Avant qu'il n'ait pu lâcher le moindre mot, l'Animagus leva un doigt pour le stopper, jetant un coup d'œil nerveux à la porte et aux nombreux enchantements qui la gardait.

"Il y a...

Un silence, hésité, hésitant. Jeongguk avait l'impression que son coeur allait encore plus se briser à l'idée que le blond s'interdisait de pouvoir lui parler librement.

"Sweetheart, tu n'es pas obli—

"Un assassinat se prépare à Poudlard. 



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Jimin évita de justesse les branches de gui ensorcelées qui tendaient leurs branches vers quiconque passait près de lui. Il savait que les plus jeunes prenaient du plaisir à apprendre de nouveaux charmes, mais ils devaient arrêter d'enchanter absolument toutes les décorations de Noël que les elfes avaient accrochées dans les parties communes du château. Il jurerait que l'un des sapins majestueux dans le Grand Hall avait tenté de l'enlacer pas plus tard que ce matin.

La journée avait été particulièrement harassante, à assister Slughorn dans la création d'un nouveau genre de potions, et à récolter les ingrédients au sein des Serres d'Herbologie. Il se sentait visqueux, sale, fatigué — un Serpentard lui avait vomi des grenouilles sur sa robe quand il avait traversé le jardin d'hiver —, alors tout ce dont il rêvait à l'instant, c'était d'un bon bain. Il avait mal partout, sa douleur sourde qui prenait possession de son corps, et les récents évènements ne le rendait que plus las encore. Seule l'idée de se prélasser dans la Salle de Bains des Préfets et de parler à Hoseok par Boule de Crystal, ne serait-ce qu'un court instant, réussissait à lui tirer un maigre sourire.

Il avait désespérément envie de son lit, aussi ; mais son esprit n'arrivait pas à trouver la paix, faisant la liste mentale de toutes les choses qu'il devait gérer le lendemain. Comment pourrait-il, avec tout ce qu'il se passait ?

Un des tableaux lui fit un signe de la main lorsqu'il passa à côté.

Cela... cela commença petit d'abord. Un murmure inconfortable qui gratta au fond de sa gorge, une toux courte et sèche qui se transforma en un monstre gras, s'amplifiant au point de secouer toute sa poitrine.

Jimin lâcha son sac en toile sur le sol, n'ayant cure des plumes et des fioles vides qui roulaient sur la pierre, préférant s'adosser du mieux qu'il pouvait contre le mur en briques fraîches, la respiration hachée, cherchant désespérément un souffle, aussi insignifiant paraissait-il. D'un signe de tête, le bel éphèbe incita les septièmes années qui avaient ralenti à sa vue de continuer leur chemin, portant sa main à sa bouche pour étouffer ses expectorations. Les sons rauques lui arrachaient sa gorge, résonnant inconfortablement dans le corridor, les yeux brumeux de larmes, les épaules tremblantes, les poumons en feu.

Cela lui semblait être une éternité quand il se calma enfin, une quinte de toux finale dans un spasme tressaillant. Le brun raffermit sa prise sur le pilier architectural pour se redresser, respirant à plein nez pour chasser la funeste impression de suffocation. Il resta encore un instant figé, les paupières serrées pour se recentrer, pour se calmer, pour reprendre ses esprits.

Lorsque Jimin retira enfin sa main de ses lèvres... ses genoux manquèrent de flancher en voyant les traces de carmin sur sa paume — un mélange de glaire... et de sang.

Un sang rouge comme le rubicond de son blason, jurant contre le raffiné de sa peau, le tourmentant de son carmin indélébile.

Non, songea-t-il, pétrifié. Non, non, non, non.

Son visage pâlit comme la Mort.

Il était beaucoup trop tôt.


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La nouvelle avait fait l'effet d'un coup de poignard dans le cœur de Jeongguk.

Le laissant frigorifié, dans cette auberge glaciale de Pré-au-Lard — car il était une chose d'étudier la mort dans son Apprentissage, mais il en était une tout autre que de se confronter au trépas qui rampe sous la porte, peu importe le nombre d'enchantements qui la gardent.

Quelqu'un allait mourir à Poudlard. Pire, être assassiné. Poudlard, qui avait été son repère depuis tant d'années, qui avait été l'endroit où il pouvait toujours se réfugier quand il n'avait pas envie de rejoindre le Manoir familial et les réprimandes pour les fêtes. Poudlard, qui avait toujours été un sanctuaire sacré, peu importe les ogres et les centaures sanguinaires et les loups-garous qui grouillaient dans la forêt.

Il avait tellement de questions sur le bout de sa langue — qui, quand, comment, pourquoi ? De quelle façon le Département des Mystères avait-il eu vent de cette funeste entreprise ? Comment pouvaient-ils en être aussi sûrs ? Croyaient-ils vraiment que la présence de quelques Aurors permettrait de dissuader le meurtrier qui se cachait dans l'ombre ? Et ce criminel — se confondait-il parmi les élèves, menaçant de prendre la vie des premières années inoffensifs ? Se pavanait-il aux côtés des Professeurs ?

Namjoon, bien entendu, n'avait rien voulu lui dire. Avouer, bien qu'à demi-mot, la funeste menace qui pesait au-dessus de leurs têtes comme une épée de Damoclès risquait de lui coûter suffisamment gros. Alors il avait préféré l'attirer contre lui pour s'endormir tout contre son corps, mais Jeongguk n'avait réussi à fermer l'oeil, l'entendant quitter silencieusement leur chambre aux petites heures de l'aube quand le noiraud feignait de dormir. Le lit sentait encore le parfum de caramel, de feu d'artifice, de polaroïds mélangé à l'arôme plus calme des cierges froids, d'eau salée et des doigts craqués.

C'était sûrement cela qui était pire que tout : savoir, mais pas suffisamment pour se préparer au pire. Savoir, mais tout juste de quoi faire naître un incendie de paranoïa dans sa poitrine, à regarder derrière son épaule constamment et à suspecter jusqu'à son propre reflet dans le miroir.

Et c'était justement pour cela que Jeongguk était en train de prendre son amant en filature.

Il s'était recouvert d'un charme de Désillusion, prenant garde à ne pas trop s'approcher du jeune homme au risque de se faire repérer — la Potion d'Invisibilité avait de bien meilleurs effets, mais Jimin n'en avait pas en stock et il n'avait pas le temps de s'en concocter une lui-même quand il avait suivi silencieusement son sigisbée.

À sa plus grande surprise, sa surveillance l'avait conduit tout droit à l'Allée des Embrumes.

En particulier, au 13b de la ruelle sombre, dans la charmante boutique de Barjow et Beurk.

La vitrine poussiéreuse était reconnaissable entre tous, se dressant froidement dans le sombre des briques sales, et le noiraud eut à peine le temps de déglutir qu'il devait déjà se glisser derrière Namjoon avant que la porte ne se ferme derrière lui. C'était la première fois qu'il s'y rendait, et quelle curieuse façon de commencer son initiation à l'Art Noir.

Partout où il regardait, ce n'était qu'un amoncellement d'objets obscurs et rares, l'air vibrant d'une magie mauvaise qui pesait lourd sur sa langue. Ici, des rouleaux de corde de pendu ; là, des ossements d'Erkling, à côté d'une fiole de parfum au venin de Runespoor ; derrière le comptoir, des dizaines de têtes réduites clouées au mur observant les nouveaux venus de leurs yeux renfoncés. Il ignorait bon nombre des reliques qui se trouvait ici, et quelque chose lui disait qu'il n'avait pas envie de les connaître non plus.

La vieille caisse à touches rouillée était surélevée de livres aux couvertures abîmés qu'il n'avait vu que dans la Réserve de la Bibliothèque de Poudlard, et Jeongguk ne put que frémir en s'imaginant les occultes mystères que les pages jaunies regorgeaient. Le genre de mystères que même Rogue s'interdisait de lui apprendre à l'école.

"Je peux faire quelque chose pour vous ? demanda Monsieur Barjow, tirant derrière lui l'épais rideau de velours de l'arrière-boutique.

C'était un homme aux épaules voûtées, de longs cheveux gras lui tombant sur le front, ajustant son pince-nez d'un doigt crochu. Il était partisan des idées de Lord Voldemort, ce n'était un secret pour personne ; se montrant poli et docile avec ses clients adeptes de magie noire, leur offrant des rictus de travers. Les Mangemorts faisaient de bons clients, après tout, si bien que Namjoon faisait tâche au milieu de tout cela — trop propre sur lui, trop noble, sa beauté démesurée et son cœur plus grand que le monde entier.

"J'aimerais faire expertiser cet objet, dit-il posément, de son flegme britannique légendaire, sortant son tribu de sa poche et s'approchant lentement du comptoir.

Jeongguk dut se retenir de ne pas pester : le commerce était dans un tel état d'insalubrité et de désordre qu'il lui était impossible de s'approcher davantage sans risquer de se faire repérer. De là où il était, il ne pouvait pas voir le bibelot, ni ne pouvait entendre ce que les deux hommes se murmuraient entre eux — seulement les sourcils broussailleux de Barjow se froncer en manipulant la chose.

Le jeune homme se pressa contre un sarcophage en ébène et une étagère en verre supportant Narguilé en forme de crâne humain, Amulette du destin, Glace à l'Ennemi, Scrutoscope et autres outils vibrants sombrement. Il crut un instant que Namjoon l'eut repéré, le bel éphèbe tournant imperceptiblement la tête comme pour regarder derrière lui, retenant sa respiration du mieux qu'il pouvait et tâchant de ne pas se choper une crampe.

Leur conversation sembla durer une éternité pour Jeongguk, camouflé sans pouvoir faire le moindre geste ; mais bien vite, Kim en eut fini, rempochant son précieux butin et le fourrant dans la poche de son manteau. Il jeta une salutation par-dessus son épaule, poussa la porte, et le Gryffondor se précipita pour le suivre avant que la petite cloche au-dessus de leurs têtes ne sonne de nouveau. Il inspira à pleins poumons, comme pour chasser la sensation de poussière qui s'accrochait à sa gorge — mais l'atmosphère de l'Allée des Embrumes était tout aussi chargée de charbon et de quelque chose de mauvais, noir, froid, que même la pureté des premiers flocons n'arrivait à dissiper.

Namjoon tendit le visage vers le ciel gris, vers la fraîcheur venant caresser ses traits comme une amante, la buée s'échappant de ses lèvres dans de jolies volutes.

Le noiraud prit soin de couvrir ses marques de pied dans la neige lorsque l'ancien Serpentard sortit enfin de sa torpeur, le suivant silencieusement à gauche, puis à droite, puis de nouveau à droite, l'esprit en rien apaisé par sa récente découverte. Il ne savait toujours pas ce que la tentative d'assassinat recouvrait, ni ne comprenait encore moins pourquoi le blond s'était rendu dans une aussi sinistre boutique que celle-ci. Ne devait-il pas combattre le Mal, et non marchander à son sujet ? Et puis, qu'avait-il montré à Monsieur Barjow qui semblait avoir tant d'importance au moins de quitter leur lit précipitamment ce matin ?

Trop perdu dans ses pensées, il ne put que lâcher un hoquet de stupeur quand son amant se retourna brusquement au détour d'une ruelle, le plaquant avec force contre le mur en pierre.

"Par Salazar, qu'est-ce que tu fous ici ?

Namjoon retira l'enchantement de Désillusion d'un mouvement de baguette, pressant son avant-bras fermement contre ses clavicules pour l'empêcher de s'échapper. Ses yeux étaient noirs et durs et lançaient des éclairs mauvais, la bouche crispée dans un rictus de colère.

"Hyung ! feignit-il de bonne surprise. Quelle coïncidence de te voir là ! J'étais justement en tr—

"Tu me crois assez sot pour ne pas t'avoir repéré en train de me suivre, Gguk ?

Il ne sut réellement ce qui le rendait le plus perplexe — le plus blessé, aussi. Le fait qu'il n'ait jamais été l'objet du courroux de Kim, qu'il n'avait jamais été dans la ligne de mire de ses tirs, que sa voix n'avait jamais été lacée d'autant de poison, même lorsqu'ils tentaient de pimenter leurs activités nocturnes dans la chambre. Ou le fait qu'il était persuadé d'avoir fait un excellent travail pour se dissimuler à la vue de tous, renforcé par ses bonnes notes et ses mois de pratique quand il voulait quitter Poudlard.

"Je t'ai suffisamment baisé, petit lionceau, pour pouvoir reconnaître entre mille le parfum de ta peau, grogna son aîné face à son silence interrogatif. Aucun enchantement ne peut camoufler cela, encore moins la puanteur nauséabonde de chez Barjow et Beurk.

"Namjoon, je—

"Tu veux bien me dire pourquoi tu me suivais ?

Jeongguk soupira et ferma les yeux, toute trace de résistance disparaissant de ses traits, rejetant sa tête dans un bruit sourd contre les briques derrière lui. Devait-il se lancer dans un autre mensonge, au risque d'attiser plus encore l'étrange incendie qu'il pouvait lire dans ses orbes corbeaux ?

"Je veux comprendre. Tu m'as simplement dit qu'il y avait une tentative d'assassi—

"Pas ici, gronda Namjoon en plaquant la main sur sa bouche, jetant un coup d'œil autour de lui pour s'assurer qu'ils n'étaient pas écoutés.

L'instant d'après, sans même que Jeongguk n'eut le temps de s'en rendre compte, ils avaient transplanés jusqu'à la chambre du bel éphèbe au sein de l'auberge.

"Je t'ai dit, marmonna Namjoon en lâchant sa main pour jeter sortilège sur sortilège contre sa porte, sa baguette crachant des étincelles colorées sous le poids de son impatience et de sa colère. Je t'ai dit qu'il ne fallait pas en parler, je t'ai demandé, que dis-je ? Imploré d'être prudent, surtout en ces temps troubles, et la première chose que tu fais, c'est que tu me suis jusqu'à l'Allée des Embrumes ?

Il se retourna vers son cadet, le visage déformé dans un masque de fureur — et de quelque chose d'autre aussi, plus brutal, à vif, vulnérable. Quelque chose qui s'apparentait à de la peur, soigneusement déguisée en une amertume sourde, car Jeongguk savait pertinemment que Namjoon serait incapable de tourner un tel sentiment contre lui. Les quatre mois loin de lui n'auraient pu changer cela... n'est-ce pas ?

"Et si tu avais été découvert, hmm ? Si Barjow t'avait remarqué ? Salazar sait le nombre d'artefacts qu'il entrepose chez lui, il aurait très bien pu te démasquer au moment même où tu as mis un pied chez lui !

"Namjoon, placarda-t-il d'un ton qui se voulait apaisant, il ne m'est rien arrivé, et je—

Ses mains étaient tendues vers l'avant, les paumes ouvertes, dans une vaine tentative de faire redescendre la tension, mais le blond continua de plus belle :

"Et si on t'avait lancé un maléfice dans l'une des ruelles ? Pendant combien de temps serais-tu resté stupéfixé à terre, invisible, avant qu'on ne remarque ton absence ? Qu'est-ce que tu aurais fait, à ce moment-là ? Qu'est-ce que moi, j'aurais fait, si—

Ça en était trop.

"Mais c'est toujours de toi dont il s'agit ! rugit Jeongguk en bondissant sur ses pieds.

Abandonnés, tout projets de revenir au calme ; un Gryffondor comme lui ne pouvait essuyer éternellement les reproches et les insultes. Il était las d'être traité comme l'enfant qu'il n'était plus, et la méfiance de Namjoon — pariant sur son incompétence et son irresponsabilité — était comparable à de l'acide coulant le long de ses paupières.

"C'est bien ça le problème d'ailleurs ! Ça a toujours été toi en premier, et moi qu'en arrière-plan ! Tu ne t'inquiètes que des répercussions que cela pourrait avoir sur toi !

Était-il égoïste ? Collant ? En demandait-il trop ? L'Ancien Serpentard avait ses obligations, par la barbe de Merlin qu'il le savait ; il avait ses propres fardeaux à porter, mais malgré le simulacre d'excuses et d'explications que le blond lui avait offert la veille au soir, les mois de douleur sourde et d'auto-infliction griffaient encore et toujours l'intérieur de sa poitrine, si ce n'était avec une amertume plus intense encore.

"As-tu seulement pensé à ce que je ressentais, moi ? Tu débarques comme une fleur après des semaines à me faire un véritable sang d'encre, tout ça pour me dire que quelqu'un va mourir à Poudlard et puis... et puis plus rien ? Tu me laisses là à imaginer les pires scénarios ! Ce sont mes amis, là-bas — Jimin et Hwasa et même Taehyung, tiens —, et tu espères que je vais rester là bien sagement sans essayer d'en apprendre plus ? Sans essayer de comprendre ?

"Parce qu'il en va de ta sécurité ! rugit Namjoon tout aussi fort.

"Explique-moi pourquoi alors !

Figés au milieu de la chambre miteuse, la respiration haletante et les mots qu'ils avaient criés résonnant encore dans la distance entre eux, Jeongguk crut un instant qu'il allait s'étouffer — et si ce n'était pour cet instant suspendu hors du temps à se jauger et à mordre les mots cinglants, sûrement n'aurait-il pas remarqué la chose qui bougeait sous le costume anthracite du jeune homme. Quelque chose de long, de lent, et le rouge et or n'eut besoin d'attendre plus longtemps avant de voir apparaître la tête du mamba noir, sortant de la manche de son maître.

Il ne put réprimer son sourire en voyant le familier sortir de sa tanière, logé tout contre le cœur de Namjoon depuis tout ce temps. Elle lui avait sûrement manqué tout autant que son amant, pensa-t-il alors qu'elle se glissait le long de la jambe de Kim, lentement, toujours lentement. Le serpent se mouva sur le sol, ses écailles noires tout aussi brillantes que l'obsidienne des yeux de son propriétaire, réfléchissant la lumière pure de la neige qui tombait par la fenêtre. Et lentement, toujours lentement, Jeongguk s'assit en tailleur à même le parquet usé pour laisser Nefertiti se lover sur ses genoux.

"Hi, baby, murmura-t-il, la voix quelque peu étranglée.

Namjoon se baissa pour s'installer en face de lui. Il y avait le lit à côté, les fauteuils, mais le plancher grinçant était là où ils avaient décidé d'épancher leurs cœurs. Nefertiti s'enroula autour de son poignet lorsqu'il voulut la caresser, dans une salutation silencieuse.

"Elle est contente de te revoir, sourit-il après un silence.

Les sorciers avaient toujours eu un lien particulier avec leur familier — et lorsqu'on était un Animagus parlant Fourchelangue, cette relation avait tendance à être plus fusionnelle encore. La première fois qu'elle l'avait laissé le caresser, le noiraud avait manqué de lâcher une larme ; cette idée que l'animal qui était comme une partie de son âme l'aime autant que son maître, comme une preuve de confiance, comme une preuve de bénédiction.

Jeongguk refusa de relever la tête lorsque Namjoon commença à parler, redécouvrant la douceur du cuir du reptile.

"Il y a quelques semaines, j'ai été envoyé sur un meurtre. Quelqu'un a voulu nous faire croire à un suicide, mais les éléments ne collaient pas, alors ils ont appelé le Département des Mystères.

"Qui était la victime ? répondit-il sans lever les yeux.

"Le plus gros importateur de Fusain du Japon d'Angleterre — et sûrement d'Europe.

Les mots laissèrent derrière eux la sensation d'eau glacée, susurrant le long de sa colonne vertébrale pour lui tirer un frisson.

"Et je suppose que tout son stock a disparu ? demanda-t-il d'une petite voix.

Namjoon hocha la tête.

"Suffisamment pour rayer Poudlard de la carte.

Par les dieux.

Le jeune homme n'était peut-être pas Apprenti en Potions, mais il n'était pas idiot pour autant, et les sinistres implications de cette disparition résonnaient suffisamment dans ses os pour qu'il en comprenne toute l'ampleur.

Fusain du Japon. Euonymus japonicus. C'était une plante que le monde magique connaissait bien : l'écorce des tiges était antirhumatismale et tonique, et Jeongguk admettait bien volontiers en avoir été fervent partisan lors de ses années à Poudlard, quand la chaleur de la cheminée n'arrivait à chasser le froid mordant des pierres épaisses. Une bouillie des feuilles pouvait même être utilisée lors des accouchements difficiles, et les sorciers avaient toujours été imaginatifs pour l'utiliser de diverses façons. Mais à forte dose... c'était une plante hautement toxique et mortelle. Lorsqu'elle était ingérée seule, elle provoquait en 8 à 15 heures des vomissements, des vertiges, des spasmes violents — alors lorsqu'elle était couplée à un quelconque autre ingrédient mortifère, le trépas était presque instantané.

"Est-ce qu'on est sûr que ça va être utilisé pour un empoisonnement ?

"C'est certainement pas le jardinier du terrain d'entraînement des Canons de Chudley qui l'a volé.

Jeongguk esquissa un rictus, malgré le poids de plus en plus lourd dans son estomac, malgré le goût amer dans sa bouche. Namjoon tendit sa main pour caresser le mamba noir toujours sur les genoux de son amant, leurs doigts se frôlant le long des écailles sans jamais se toucher, comme une tentative maladroite de réconciliation.

"Comment tu sais que c'est l'école qui est visée ? Pourquoi pas le Ministère ? Quel est l'intérêt de s'attaquer à des élèves ?

"On a reçu des lettres nous indiquant une attaque imminente sur le château. Très certainement une taupe ou un traître — peut-être va-t-il essuyer une tentative de meurtre, lui aussi. Les lettres étaient signées anonymement, bien sûr, donc on a aucun moyen de corroborer les dires, mais après le vol de 900 livres de fusain, le Département des Mystères n'a guère envie de prendre la menace à la légère.

Il soupira.

"Quant à l'intérêt de s'attaquer à des élèves... je ne sais pas. Le Seigneur des Ténèbres est peut-être mort, mais il a encore une poignée de fidèles à sa solde prêts à tout pour le venger et perpétrer son nom. Sûrement veulent-ils attaquer les grandes familles aristocratiques qui ne sont pas de leurs côtés, ou les Vingt-huit sacrés des lignées de Sang-purs. Les Shafiq, les Macmillan, les Abbott, les Prewett...

"Les Jeon, acheva le noiraud dans un souffle.

Namjoon se pinça les lèvres en hochant la tête, et Jeongguk ne put que se pincer l'arête du nez en tentant de contrôler sa respiration. Il avait l'impression que son cœur tambourinait dans sa tête, fort, si fort, les syntagmes ricochant entre les parois de son esprit avec un claquement douloureux.

"C'est une possibilité, oui. C'est pour ça, angel, que je ne peux que te demander d'être extrêmement prudent à l'avenir. J'ai pour toi tout un stock de Bézoards pour annuler l'effet du poison, que tu peux prendre avant d'aller manger, par précaution. Et puis...

Il saisit délicatement sa main au-dessus de Nefertiti.

"Je serais là pour te protéger.

Le jeune homme lui rendit un petit sourire.

"C'est pour ça que tu ne voulais pas me regarder dans la Grande Salle ? Tu avais peur que le criminel m'attaque en voyant l'attention sur moi ?

Il n'eut pas besoin de sa réponse pour rejeter la tête en arrière, vidant ses poumons, clignant des paupières. Tout faisait sens, à présent. Namjoon avait toujours eu que son intérêt à l'esprit, et s'il fallait lui envoyer des signes contradictoires pour qu'il reste en vie, alors il recommencerait bien volontiers.

"Je suis désolé, souffla Jeongguk en replongeant son regard dans celui de son sigisbée.

Désolé d'avoir été aussi puéril, aussi immature au point de ne pas chercher à comprendre. Lis dans mon esprit, avait-il envie de dire, faisant tomber tous les murs d'Occlumancie autour de son inconscient. Lis dans mon esprit et comprend combien je m'en veux.

À la place, l'Animagus l'attira dans un baiser, murmurant contre ses lèvres que tout était pardonné. 



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Jeongguk se réveilla en sursaut.

Il ne savait réellement ce qui l'avait tiré de son rêve, si c'était le vent qui s'était levé et qui soufflait contre leur vitre, ou si c'étaient les Préfets qui avaient attrapés des élèves après le couvre-feu devant la salle commune des Apprentis, dans l'aile Nord du château. À part la Salle de divination, ils n'avaient aucune raison d'être ici de toute façon — et il était peu probable qu'ils veuillent suivre le cours de Trelawney à deux heures du matin.

Il se leva pour se servir un verre d'eau, sur le guéridon près de la fenêtre. Les guirlandes de lumières enchantées que les autres Apprentis avaient dressées sur le grand sapin en bas projetaient une douce lueur orangée sous la porte en bois. Dehors, le ciel s'était dégagé, et le tapis de neige immaculée irradiait comme une centaine d'étoiles. À son plus grand regret, la Tour Nord ne lui permettait pas de contempler le Lac gelé — qui devait être magnifique, sous cette lune timide —, mais il se contentait gracieusement de la silhouette veineuse du Saule Pleureur et du Terrain de Quidditch, plus loin.

Mais la vue, aussi imprenable et magnifique soit-elle, ne parvenait rien à chasser son tourment.

Jeongguk jeta un coup d'œil à sa couche. Namjoon dormait toujours paisiblement, dénudé, les bras tendus vers là où le noiraud était assoupi encore un peu plus tôt. Il avait insisté pour le raccompagner, après les révélations à Pré-au-Lard, sautant le dîner pour se rendre directement dans sa chambre — et par mille gorgones, le jeune homme n'avait jamais été aussi content de ne plus avoir à partager un dortoir, car la dernière chose dont il avait envie était d'une passe rapide dans la Salle-sur-Demande ou dans un recoin obscur du château.

À la place, Namjoon l'avait pris dans ses bras comme il en avait rêvé depuis si longtemps ; les coups de langue, de dents, de reins lui faisant tout oublier ; les promesses obscènes susurrées contre son oreille le faisant gémir si fort qu'il ne pouvait qu'espérer que le charme silencieux jeté sur sa porte était suffisamment puissant. Peau contre peau, cœur contre cœur, ses prunelles profondément ancrées en lui pour se satisfaire de chaque soupir, chaque expression, chaque griffure qu'il tirait de lui. Il l'avait chevauché, après, scellant ses hanches contre les siennes et faisant supplier son amant, la tête rejetée en arrière, sa nuque à la douce merci de ses marques d'affection. Ils s'étaient serrés longtemps, encore tremblants bien après leur acmé, caressant une mèche de cheveux, embrassant un front, rattrapant ces 4 mois dans un chuchotement rapide, des "qu'est-ce que tu as appris", des "comment va ta sœur", des "je peux t'aider pour tes révisions", des "où as-tu envie de fêter Noël", des "tu te souviens quand". Des "je suis bien contre toi". Des "je t'aime".

C'était comme s'ils créaient une nouvelle couleur quand ils étaient ensemble, un nouveau parfum.

Lui, le rouge et or, les feux d'artifices, les couchers de soleil, courir pieds nus, les cheveux décoiffés, les épées en bois, le goût du caramel et du gingembre, les genoux égratignés, les chemises chiffonnées, les poignées de main secrètes, les tapisseries lourdes, la musique beaucoup trop forte, embrasser dans un juron, les yeux pétillants de malice, les converses Moldues, les traces de rouges à lèvres sur les tasses en porcelaine, le cidre, les allumettes craquées, les pulls en laine qui grattent, les tapis persans usés contre les pierres froides, les polaroïds, avoir toujours chaud. L'amour effervescent.

Lui, le vert et argent, le cuir frais, les grands pianos et les violons, les cheminées en marbre, la myrrhe, les draps en soie, l'encre fraîche des billets de banque, les bijoux de famille, le goût d'eau salée et de poivre noir, les roses encore épineuses, les vieux vinyles, les labyrinthes, Novembre, écrire à la plume dans des carnets en cuir, les poèmes de Baudelaire, les chats noirs, les crânes humains dans les cabinets de curiosités, le parfum d'oud et de musc, les doigts d'honneur, les cols roulés gris, les ballets où les deux meurent à la fin, les argentiques, avoir toujours froid. L'amour incurable.

Lui, le rubis. Lui, l'émeraude.
Lui, le noiraud. Lui, le blond.
Lui, le jour. Lui, la nuit.

Ses pieds le conduisirent jusqu'au lit avant même qu'il n'ait le temps de s'en rendre compte. Namjoon partirait aux aurores demain matin — enfin, dans quelques heures —, et il comptait bien profiter encore un peu de lui avant.

Mais il manqua de trébucher contre la chaise de son petit bureau, et lorsqu'il baissa les yeux, ce fut le lourd manteau en laine de Kim, jeté contre son dossier, qui le nargua dans la pénombre. Les souvenirs du matin même, la façon dont il s'était planqué derrière un sarcophage poussiéreux chez Barjow & Burke et l'aveu d'un projet d'assassinat, lui revinrent aisément en mémoire.

Jeongguk se mordit la lèvre en jetant un autre coup d'oeil à la silhouette endormie de son petit-ami. Maintenant qu'il était dans la confidence de la menace qui pesait lourdement au-dessus d'eux, sûrement qu'il pouvait connaître lui aussi le mystérieux objet que le bel éphèbe avait essayé de faire expertiser ? Avant même de trouver un contre-argument — comme le fait que Namjoon avait sûrement ses raisons pour ne pas lui avoir montré la relique plus tôt —, la curiosité eut raison de lui, et il glissa la main dans la grande poche enchantée. Il tâtonna autour de son canif de poche, son Balais réduit et son Eteignoir, son c— là.

À la clarté du ciel nocturne, il sortit délicatement une broche.

C'était un ouvrage finement travaillé, en bronze, et aurait-il été un peu plus moderne, que sûrement les élèves de Serdaigle l'auraient porté fièrement sur leurs robes bleues. Jeongguk fronça des sourcils, saisissant délicatement sa baguette sur sa table de chevet pour lancer quelques sorts de révélation d'une voix basse. Rien. Le bijou ne portait aucune magie en lui, ni noire, ni blanche : un simple objet inanimé.

Pourquoi diable Namjoon l'avait-il emmené à l'Allée des Embrumes, dans ces cas-là ? Pourquoi demander à Monsieur Barjow, de toutes les personnes, d'étudier un ornement qui aurait très bien pu venir de chez les non-magiques ?

Il se pencha vers la lumière du dehors pour mieux apprécier les détails gravés sur l'artefact.

Des runes qu'il n'arrivait pas à lire, et une demi-lune. 



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"Vous m'avez l'air bien pâle, Monsieur Park, nota Madame Pomfresh.

Elle le jaugea par-dessus ses lunettes en demi-cercle, l'œil professionnel et le froncement de sourcil inquiet. Sûrement devait-il offrir un piètre spectacle, le teint blême et cireux, ses cernes violacés comme témoin des cauchemars de la nuit précédente. Devait-il avouer à la garde-malade qu'il avait vomi du sang noirâtre ce matin-là, hoquetant autour de la bile, ses intestins se tordant de douleur, comme une triste répétition de la quinte de toux qui l'avait secoué dans le couloir du deuxième étage ? Il lui offrit un maigre sourire en guise de réponse, continuant de ranger les fioles sur l'étagère.

Il avait passé trois jours entiers à renflouer les stocks de l'infirmerie en potions et autres remèdes, puisque les étudiants de Poudlard avaient le fâcheux penchant de se mettre dans de drôles de situations sanitaires — lui le premier. Le flacon ocre pour l'Essence de Dictame pour réparer les plaies, le orange pour l'Onguent Anti-Brûlure, le laiteux pour la Gourde Pousse-Os. C'était ça aussi, être l'apprenti de Slughorn, et le fait de concocter des filtres qu'il maîtrisait à la perfection apportait une familiarité appréciable, loin des recherches complexes et laborieuses sur son sujet de mémoire ; de quoi focaliser son esprit l'espace de quelques heures, les gestes précis et mesurés.

Quand le jeune homme se retourna, rangeant sa baguette dans sa manche, Madame Pomfresh le scrutait toujours.

"Quand est-ce que vous avez mangé pour la dernière fois, Monsieur Park ?

Depuis trop longtemps, avait-il envie de dire, parce qu'il régurgitait la moindre chose qu'il avalait dernièrement. Il avait passé de longues minutes ce matin à observer son thé du coin de l'oeil en se demandant s'il pourrait au moins le digérer. Il aurait pu admettre tout ça, admettre que chaque bouffée d'air qu'il respirait était de plus en plus pénible, mais cela ne servait à rien d'alerter la sorcière. Il savait que de toute façon, elle ne pourrait rien faire pour lui.

Alors il offrit un autre sourire poli, et, éludant de nouveau sa question, se tourna vers les lits occupés contre les grandes fenêtres.

Rei Naoi, deuxième année chez Serdaigle ; Soo-bin et Yeonjun Choi, deux frères en quatrième année chez Gryffondor ; Haerin Kang et Marius Figg en première et troisième année chez Serpentard.

Ils devraient être dehors, en ce soleil resplendissant de cette fin d'après-midi, à jouer sur leurs Balais ou se promener dans le Parc, à profiter des derniers rayons sur les bancs en pierre qui donnaient sur la forêt. Mais ils étaient allongés là, tous endormis ou dans de vagues stades comateux, la bouche déformée dans une moue incommodante, les paupières bruissant sous des sommeils maladifs et sans rêves.

"Comment vont-ils ? demanda-t-il avec un coup de menton en leur direction.

L'infirmière soupira en reposant ses lunettes sur ses dossiers.

"Pas d'évolution depuis qu'ils ont été admis il y a deux jours, répondit-elle en contournant le bureau en bois. Inconfort, nausées, faiblesse musculaire, et hallucinations vivides pendant la nuit. J'ai été contrainte d'en attacher un ou deux, tellement ils se débattaient contre leurs propres démons.

"Et on ne sait toujours pas le mal qui les atteint ?

"Hélas, Monsieur Park, si je le savais, j'aurais immédiatement demandé à votre Professeur de m'élaborer un antidote...

Aux yeux de tous, leur indisposition n'avait rien de logique, rien de connu, et pire encore, il n'y avait aucun lien qui leur permettait de comprendre pourquoi ils présentaient les mêmes signes de douleur. Ils ne partageaient ni les mêmes classes, ni les mêmes cours, à l'exception de Soo-bin et Yeonjun. Rei était végétarienne, Marius avait récemment décidé de ne manger que du poisson, et Haerin sautait les dîners pour s'évader à la tour d'Astronomie. Yeonjun et Rei avaient été les seuls à avoir caressé le Dorico — Dodo pour les Moldus — qu'avait apporté Hagrid la semaine précédente, et Marius était même le seul rescapé de son équipe d'échecs à ne pas avoir attrapé la grippe le mois dernier.

Ils n'avaient rien en commun. Alors pourquoi étaient-ils tous saisi du même trouble indescriptible et indéfinissable ?

Avant qu'il n'ait le temps de converser davantage sur le sujet, sa montre vibra frénétiquement dans la poche de pantalon, et Jimin fit preuve d'un grand contrôle pour ne pas devenir encore plus livide qu'il ne l'était déjà devant Madame Pomfresh, sans quoi elle l'admettrait de force dans son service pour garder un oeil sur lui. C'était l'heure de sa potion, celle qu'il avait laborieusement préparée quand Slughorn s'était enfin retiré dans ses appartements, celle qui maintenait les toux de sang et les vomissements à distance pendant quelques temps. Ce n'était qu'une réponse temporaire, il le savait, mais nécessaire s'il ne voulait pas faire un malaise dans les escaliers devant tout le monde.

Il s'excusa à la hâte, quittant l'infirmerie avant même que la Magicomage ne puisse le retenir avec une protestation, courant plus que marchant le long des couloirs pour arriver à temps à son dortoir.

Par Godric, pensa-t-il en grinçant les dents pour retenir la nouvelle vague de nausée, faites qu'il trouve une solution rapidement. 



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La pile de livres provoqua un nuage de poussière et un bruit particulièrement sourd dans le silence pesant de la bibliothèque, lorsque Madame Irma Pince la fit léviter jusqu'au bureau de Jeongguk. Le noiraud zieuta l'exemplaire de Démons du XVe siècle tout en haut, tandis que la bibliothécaire penchait sa tête de vautour et son nez busqué au-dessus de lui.

"Ce sont des consultations pour votre mémoire, Monsieur Jeon ? demanda-t-elle d'une voix étrangement nasale.

"Des recherches satellites, disons, grimaça le jeune homme dans un semblant de sourire aimable.

Elle plissa ses yeux en sa direction, cligna une, deux fois, avant de se redresser et de retourner à son bureau dans un hmmph peu satisfait — laissant Jeongguk relâcher la respiration qu'il n'avait pas eu conscience de retenir.

Son mensonge était tout de même à moitié vrai : plus vite il trouverait la correspondance du symbole de la broche que Namjoon gardait dans sa poche, plus vite il trouverait le criminel. Et s'il trouvait l'assassin avant qu'il ne mette son lugubre dessein à exécution, il resterait en vie ; et s'il restait en vie, il pourrait finir son foutu mémoire pour valider sa foutue dernière année et obtenir son foutu diplôme d'Apprentissage.

Il tira le premier ouvrage à lui avec une concentration toute nouvelle. Ces runes et cette demi-lune... Il était persuadé d'avoir déjà vu le symbole quelque part, mais il avait passé toute la nuit à retourner le problème aux côtés d'un Namjoon toujours endormi, et il n'était parvenu à en trouver la réponse.

[Namjoon, qu'il n'avait entr'aperçut aujourd'hui que brièvement au détour de la grande fontaine dans la Cour Intérieure, les sirènes en pierres enchantées lui faisant des signes aguicheurs de la main ; avant de suivre sa supérieure sans accorder un regard autour de lui, disparaissant bien vite au détour d'une arche.]

Jeongguk avait alors passé tout son petit-déjeuner à éplucher un vieux syllabaire, mais la seule chose qu'il connaissait des Runes était qu'elles étaient divisées en familles nommées aett, et... et c'était à peu près tout. Quand Hoseok était passionné par les cours du Professeur Babbling, lui préférait apprendre sur les flèches ensorcelées et les sortilèges de contre-attaque, et le jeune homme avait bien vite abandonné sa lecture des fehu, uruz et ansuz à son deuxième café.

Il profita ainsi d'une pause entre deux cours pour se glisser à la bibliothèque, jetant un sortilège autour de lui pour ne pas être parasité par le bruit des autres étudiants — même si Madame Pince gérait son petit royaume d'une main si rigide que personne n'osait jusqu'à éternuer, de toute façon.

Il manqua de s'endormir à plusieurs reprises, ses yeux survolant des chapitres de Magie Noire qu'il connaissait par cœur depuis le temps. Il était difficile, en soit, de déterminer avec précision quand était née la Magie Noire — car, aussi longtemps y avait-il eu la lumière, il y avait eu la noirceur. Il ne peut y avoir l'un sans l'autre, et c'était pour cette raison que la matière était si complexe, que le Mal ne pouvait jamais réellement disparaître : abattez la tête d'une hydre, il en repoussera deux, disait le dicton.

Dans un chapitre qu'il avait trouvé particulièrement passionnant, certains théoriciens avaient avancé que l'on devait la création des Sortilèges Impardonnables aux frères Peverell, les mêmes Trois frères qui avaient demandé les Reliques de la Mort à la Faucheuse elle-même. Le premier frère, qui avait demandé la Baguette de Sureau, aurait crée le sortilège d'Avada Kedavra pour qu'il ne puisse plus jamais perdre, un sortilège qui ne connaissait aucun contre-sort de défense à l'époque, afin de rendre son propriétaire le plus puissant sorcier de tous les temps. Le second frère, qui avait demandé la Pierre de Résurrection, aurait créé le sortilège d'Endoloris, car le fait de voir les morts sans pouvoir les toucher, voir des fantômes tristes errer sur la surface de la Terre, était une des douleurs psychologiques les plus insupportables qu'il soit. Le troisième frère, qui avait demandé la Cape d'Invisibilité, aurait crée le sortilège d'Impérium, car il ne voulait pas battre ou humilier la Mort, mais protéger ceux qu'il aimait, allant jusqu'à créer un enchantement pour empêcher quiconque de dévoiler son secret. Si les deux premiers maléfices ont été inventés avec l'intention de faire subir les pires souffrances, les pires horreurs, le sang et les larmes, celui d'Ignotus Peverell relevait davantage d'une forme de félicité guidée, de méditation forcée — avant, inévitablement, de tomber entre de mauvaises mains, et d'être classé comme Impardonnable en 1717 avec ses consœurs par le Ministère de la Magie.

Car peu importait si on utilisait ces sorts dans l'intention de protéger, de défense, de secours ; la Magie Noire qui avait été infusée était si puissante qu'elle ne pouvait que corrompre l'âme de l'intérieur. Grignotait l'esprit, petit à petit, rendant le sorcier incapable de résister à la tentation du pouvoir si infini et illusoire à portée de baguette.

Le Seigneur des Ténèbres n'était certainement pas le premier des mages noirs, même si ses récents méfaits avaient replongé la communauté des sorciers dans une période sombre et désespérée comme elle n'en avait pas connue depuis bien longtemps. Il y avait eu Raczidian, qui avait lancé son armée de Détraqueurs sur un village pour avoir refusé de donner la main d'une de leurs filles, périssant en essayant de reproduire un Patronus — car, n'étant pas digne d'une forme de magie aussi pure, des asticots jaillirent par centaines de sa baguette pour le dévorer. Il y avait eu Herpo l'Infâme, un sorcier grec qui avait été le premier à avoir créé un Horcruxe, et à qui on attribuait également la paternité du Basilic. Il y avait eu Gellert Grindelwald, un mage tristement puissant à la tête d'une secte puriste, dont l'ambition était de réduire les Moldus en esclavage, et qui méritait un chapitre à lui tout seul.

C'était là des choses que Jeongguk connaissait bien, que parents et Professeurs avertissaient sans cesse, car un Homme qui connaît l'Histoire est un Homme qui ne la répète pas. Sans compter que Rogue lui ferait sûrement récurer tous les pavés des cachots si le jeune homme ne connaissait pas la chronologie de leur passé sur le bout des doigts.

Le noiraud fut tenté de rendre les livres à Madame Pince, car il n'y avait rien dans les ouvrages poussiéreux qu'il ne connaissait déjà, et manqua de lâcher un soupir abattu.

Jusqu'à ce qu'il tombe sur un nom, dans un vieux grimoire au titre élimé par le temps. Un nom qui le fit tiquer, qui réveilla un vieux souvenir qu'il n'arrivait pas encore réellement à nommer.

Archibald Ravenhurst. Un Maître de potions et Alchimiste estimé du XIIe siècle, connu pour son approche peu orthodoxe de la pratique et son penchant guère déguisé pour les Arts Interdits. C'était un siècle d'exploration magique et d'expérimentation, alors que les baguettes devenaient davantage des instruments puissants que de vulgaires outils rudimentaires. Il s'était entouré d'une poignée de fidèles, tous aspirant à plus de grandeur — l'immortalité, la nécromancie, tous ces rêves jusqu'alors inatteignables — pour créer la Société Secrète des Alchi

Il sursauta en sentant une main se poser sur son épaule.

Le bel éphèbe s'arracha brusquement à sa bulle de concentration, la tête en proie au tournis alors qu'il quittait les pages jaunies pour découvrir que la nuit commençait à tomber — et qu'il avait aussi certainement loupé son cours de Mythologie Ancienne en perdant le fil du temps qui passe. Oups.

"Ça va ? lui demanda Jimin derrière lui, les sourcils froncés face à son expression perdue.

"Oui, je...

Jeongguk jeta un coup d'œil autour de lui — sa paillasse était recouverte de livres anciens, si bien qu'il avait sûrement dû chasser les autres élèves autour de lui, ses notes illisibles et tâchées d'encre sous ses doigts. Il se frotta les yeux un instant, les questions sans réponse et les recherches inconclusives flottant derrière ses paupières, avant de reprendre sa respiration.

"Oui, ça va. Désolé. Il est quelle heure ?

"Presque 17 heures, lui répondit le brun en l'aidant à ramasser ses affaires. Les Serpentards font un before dans leur salle commune avant le match de ce soir, et Taehyung a dit qu'il ramènerait les premiers plans de cannabis qu'il a réussi à faire pousser. Tu veux y aller ?

Il y avait toujours cette épée de Damoclès qui ne cessait de se balancer au-dessus de leurs têtes dans une danse funeste — l'ombre planante du meurtrier, le vol du fusain du Japon, les malades qui s'empilaient à l'infirmerie, les ténèbres qui grondaient non loin du château. Ce soir-là était peut-être le dernier jour où il aurait encore le luxe de souffler, de respirer à pleins poumons, avant que l'assassin n'exécute son sinistre plan et qu'il ne se retrouve parmi les victimes collatérales.

Mais Namjoon lui avait expressément demandé de continuer sa routine avec l'insouciance béate d'un ignorant, sans quoi il risquait de mettre sa tête à prix. Le tueur savait que le Département des Mystères était sur sa piste, à scruter chaque mouvement, chaque attitude suspecte, fouillant les élèves lorsqu'ils rentraient dans l'école ; mais il ignorait que Jeongguk était au diapason, qu'il avait eu vent de son épouvantable projet, et cela serait douteux s'il ne se rendait pas à la petite fête chez les verts et argents.

Et puis, qui était Jeon pour refuser un peu de bon temps ?

Il sourit à Jimin de son éternel rictus carnassier.

"Quelle question. 


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"Tu as revu Namjoon, depuis ? demanda Jimin.

"Pas depuis qu'il a dormi avec moi, non, répondit le noiraud en retenant de se gratter le nez pour ne pas étaler le maquillage aux couleurs de sa maison sur le visage.

Jimin, à ses côtés, avait farouchement refusé de le laisser lui barbouiller ses traits, mais il portait quand même fièrement l'écharpe de Quidditch autour de son cou, et avait rangé un klaxon à air comprimé dans sa poche arrière pour supporter comme il se devait son équipe.

Jeongguk avait pris plusieurs shots d'alcool au before chez les Serpentards, il était plaisamment excité pour le match et de voir comment Septimus se débrouillait maintenant qu'il lui avait légué le rôle de capitaine, et l'air vibrait d'une électricité sourde de saison sportive. Ils étaient un peu en retard, parce qu'un élève plus jeune lui avait renversé un cocktail sucré sur le pull et c'était une teigne à nettoyer même d'un coup de baguette, mais les premières minutes de l'affrontement étaient toujours dédiées à un discours de Dumbledore et du Professeur Bibine sur le fairplay et d'autres conneries — tout ce qu'ils voulaient, c'était de voir les équipes se cogner entre elles, personne n'était dupe.

Il savait, nonobstant, que les sourires et les chants paillards et les jetés de Souafle avant d'atteindre le terrain et les rivalités amicales entre promotions cachaient quelque chose de plus sombre. Une faible distraction contre quelque chose qui grondait et qui grossissait et qui apeurait. D'autres élèves avaient été accueillis à l'infirmerie avec les mêmes symptômes que les Cinq premiers, et la nouvelle avait fait le tour des classes comme une traînée de poudre, à l'idée qu'une étrange épidémie commençait à s'enraciner. On murmurait même que certains parents avaient demandé au Directeur de retirer leur enfant de Poudlard le temps que cela se tasse.

"Il t'a dit ce qu'il faisait ici ? questionna encore le brun, alors qu'ils traversaient une des cours intérieures pour rejoindre la file colorée des élèves plus loin.

"Non, prétendit Jeongguk. Tu sais très bien qu'il ne peut pas me parler de son travail, de toute façon.

Jimin se pinça les lèvres et hocha sèchement la tête, et Jeongguk ne pouvait que se sentir comme une sombre merde. Pourquoi lui avait-il menti ? Pourquoi ne pas avoir dit la vérité à son meilleur ami — qui, aux dernières nouvelles, était tout autant en danger que lui ou que n'importe quel autre élève de l'école ? Il pourrait très bien lui demander un Serment Inviolable de sa part, et le mettre dans la confidence... Voulait-il préserver le secret de Namjoon, au cas où cette histoire venait à s'ébruiter l'amenant à perdre son travail car il avait été trop bavard, ou tentait-il de prévenir un mouvement de panique général ?

Ses interrogations furent interrompues en voyant quelque chose du coin de l'oeil qui lui fit lever la tête. Quelque chose, quelqu'un plutôt, qui le figea sur place, le glaçant dans son entièreté, les yeux écarquillés et les membres engourdis.

"Et tu penses que—

Jeongguk fit preuve d'une force immense pour sortir de sa torpeur pour donner un coup de coude au Gryffondor, pour qu'il lève le regard en retour. Si on en croyait la façon dont les mots s'étranglèrent dans sa gorge, la vision avait procuré le même effet sur Jimin que sur lui.

Car là, au 3e étage de la Tour d'Astronomie qui surplombait la Cour de Métamorphose, se tenaient cinq figures sombres. Derrière eux, la grande pendule qui se balançait lentement, le faible tic tac de l'horloge presque assourdissant dans le silence pesant, les tourmentant des secondes s'effilant vers un destin incertain.

Cinq figures sombres, et devant eux... le vide.

Il y avait une vieille légende, sur un ancien Directeur de Poudlard qui avait fait retiré les rambardes en pierre dudit 3e étage pour s'en servir comme piste d'atterrissage quand il arrivait à dos d'Hippogriffe — un vaniteux Directeur qui trouvait qu'arriver en chevauchant un animal aussi noble et sublime donnait une dose de panache à ses fonctions. Depuis, les balustrades n'avaient jamais été reconstruites ; les élèves les utilisaient comme tremplin d'envol de balais — le Professeur Bibine avait déjà lâché des premières années terrifiés du vide pour les forcer à contrôler leurs montures depuis cette même plateforme —, et les 10 mètres de vacuité terrifiante étaient suffisants pour se dispenser d'ériger des sorts de protection. Le corps professoral estimait, à tort ou à raison, que les élèves avaient suffisamment d'instinct d'auto-préservation pour ne pas trop s'approcher du vide.

À présent, les cinq silhouettes noires étaient à quelques pieds du rebord, rigides, statiques ; et le sang de Jeongguk ne fit qu'un tour en les voyant faire un autre pas vers le précipice, comme un seul homme.

Une bourrasque de vent ôta leurs capuches, et Jimin porta sa main à sa bouche pour retenir le hoquet de stupeur en les reconnaissant.

"Gguk, c'est... c'est les premiers malades de l'épidémie.

Rei, Soo-bin, Yeonjun, Haerin, Marius.

Ils se tenaient raides, le regard creux et lointain, distant, fixé sur l'horizon. Par Merlin, que foutaient-ils ici ? N'étaient-ils pas au lit, couverts de fièvre et délirants ? Comment étaient-ils sortis de l'infirmerie ? Où était Madame Pomfresh ?

Jimin tenta de les appeler, leur criant de s'éloigner du bord, agitant ses bras pour attirer leur attention — mais ils restèrent immobiles, inébranlables. Les yeux vides. Presque en transe. Qu'est-ce que... ?

Soudain, leurs bouches se déformèrent dans un rictus hargneux, et, d'une même voix, une voix qui ne leur appartenait pas, récitèrent d'un ton caverneux venu d'outre-tombe :

"Estimés Alchimistes et Acolytes, nous nous tenons au seuil d'une nouvelle ère.

"Qu'est-ce qui leur prend ? demanda le brun, paniqué.

Les Cinq firent un autre pas en avant, tirant quelques clameurs apeurés des étudiants qui avaient commencé à s'attrouper autour d'eux en voyant à leur tour le sombre tableau. Les deux hommes sortirent leurs baguettes, Jeongguk lançant quelques sorts de détection pour déterminer le mal qui les animait, persuadé qu'ils étaient sujets au sortilège de l'Impérium, mais sans succès. Il usa de ses capacités de Legimancie malgré la distance, mais à chaque fois qu'il essayait de lire leurs esprits, il se retrouvait sèchement renvoyé, confronté à une forme de magie puissante et toute nouvelle qu'il n'avait jamais expérimenté. Une forme de magie noire, à n'en pas douter.

"Nos ambitions et notre allégeance à notre créateur nous poussent à transcender les limites fixées par les sorciers et sorcières faibles d'esprits tel que vous, qui méprisent le vrai pouvoir de la magie, continuèrent-ils d'une voix rauque, robotique, monotone.

Un autre pas.

"Jimin, grogna Jeongguk en cherchant de l'aide autour de lui, transfigure ton écharpe en matelas gonflable !

"Les jeunes gens que vous voyez là ont été le cobaye de notre expérience, témoignage de notre maîtrise sur la vie et la mort. Vous en êtes tous infectés — l'heure est à vous de vous prosternez devant notre puissance et d'implorer notre magnanimité.

Il y avait quelque chose, quelqu'un, qui parlait à travers eux, usant leurs corps et leurs cordes vocales comme réceptacle de leur sinistre discours — mais Jeongguk n'écoutait qu'à moitié, ses pensées courant à mille à l'heure pour chercher une solution plutôt que suivre la profession de foi du quelconque malade qui avait fait de ces sorciers encore mineurs des marionnettes suicidaires.

Un autre pas. Plus que deux, et ils sauteraient dans le vide comme des moineaux.

Il n'y avait aucun Professeur dans la Cour, mis-à-part des troisièmes années effrayés de voir la chute prochaine de leurs camarades, certains partis grimper les lourdes marches de la Tour d'Astronomie pour arrêter cette folie. Une petite voix au fond de lui lui murmurait qu'ils n'arriveraient pas à temps — il n'y avait qu'eux, deux Apprentis à peine plus âgés qui se retrouvaient soudainement avec la vie de cinq de leurs cadets sur les mains.

"Que cet acte serve de prélude, une annonce, une affirmation que nous, la Société Secrète des Alchimistes, sommes les architectes et les seigneurs du destin. Laissez la peur se propager, car dans le chaos, nous trouverons notre véritable dessein.

"Tu prends Rei et Soo-bin, je prends les trois autres, d'accord ? grinça le noiraud des dents en plantant fermement ses pieds sur le sol pour plus d'appui.

"Gguk—

Les Cinq firent un autre pas. Ils étaient à l'aune du précipice, et ils rencontreraient leurs sorts plus tôt que prévu s'ils ne se débarrassaient pas de l'étrange hypnose à laquelle ils étaient sujets.

"On n'a pas le choix, hyung.

"Embrassons les ombres, frères et sœurs, car la nuit est à notre commandement, aussi sépulcrale que les secrets que nous gardons. Que Mercure nous guide !

Les silhouettes se murent à l'unisson, tendant la jambe devant eux pour ne rencontrer que le vide, chutant en avant comme des soldats de plomb — tirant, dans leur perte, les hurlements fiévreux et horrifiés de leur malheureux auditoire.

"Maintenant ! crièrent les deux rouge et or ensemble.

Ils conjurèrent tous deux une puissante incantation de lévitation, animant un nuage lumineux autour des corps inanimés pour stopper leur descente macabre et rapide vers le sol pavé. Jeongguk ne put que grogner en puisant dans ses forces, distillant toute la magie dont il était capable : il n'était habitué à léviter qu'un corps à la fois — et pas lorsque la gravité s'ajoutait à leurs propres poids, pas lorsque la situation était aussi critique, pas lorsque des vies étaient en jeu. À ses côtés, Jimin luttait également, plus prompt aux potions qu'aux sorts d'assistance, saisissant sa baguette à deux mains pour se concentrer ; et par Merlin, les Cinq descendaient beaucoup trop vite à son goût, et le matelas gonflable n'était pas suffisant pour amortir le choc—

Une brise de couleur jade vint se joindre aux leurs. Un coup d'œil, et Jeongguk prit une grande respiration. Namjoon était à sa gauche, flanqué d'Hepzibah Edgecomb et d'une poignée d'autres Professeurs. Leurs magies combinées ralentirent la trajectoire vertigineuse des pantins humains, venant déposer délicatement les corps inconscients des jeunes sorciers sur l'écharpe transfigurée de Jimin.

Les deux Gryffondors rompirent l'enchantement, essoufflés, et Jeongguk eut tout le mal du monde à rester vaillant sur ses appuis, l'adrénaline et l'intensité et la peur combinée ne faisant guère bon ménage avec ses nerfs. Namjoon le rattrapa par le coude avec un froncement de sourcils inquiet, et il eut à peine le temps de voir Jimin se précipiter aux côtés de Madame Pomfresh pour examiner les envoûtés pour qu'il lâche un :

"Bordel de merde. 



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"Bordel de merde, répéta Jeongguk en s'asseyant lourdement.

Le fauteuil rembourré eut un grincement de protestation sous son poids, mais le noiraud n'en eut que faire — se demandant pourquoi Jimin avait gardé les meubles ensorcelés dans sa chambre, si ce n'était pour se faire réprimander à chaque fois qu'il les utilisait.

La nuit était tombée depuis bien longtemps, et depuis la fenêtre, le jeune homme pouvait voir les lumières éclairant le terrain de Quidditch s'éteindre une à une. Le match, il fallait s'y attendre, avait été reporté suite aux évènements étranges et incompréhensibles de la Cour de Métamorphose. Certains avaient protesté, certains s'étaient inquiétés, d'autres étaient parti continuer à se saouler la gueule chez les Serpentards — chacun gérait son stress comme il l'entendait, après tout.

Après l'arrivée du Département des Mystères, les Cinq avaient été expédiés précipitamment à l'Infirmerie pour s'assurer que la chute avait été indemne, et surtout, pour comprendre l'origine de leur action, à mi-chemin entre le maléfice, l'envoûtement hypnotique, et l'intention de se donner la mort. Dumbledore avait bien évidemment invoqué un conciliabule dans son bureau avec Hepzibah Edgecombe, les Directeurs de Maison et une autre poignée de membres du personnel, instaurant un couvre-feu sur tout Poudlard jusqu'à nouvel ordre. Les paroles que les petites poupées humaines avaient prononcées avant de se précipiter vers leurs pertes résonnaient encore dans leurs oreilles, et ce n'était pas là des menaces à prendre à la légère.

Et Jeongguk ne pouvait que spéculer. Cela avait forcément un lien avec le projet d'assassinat, n'est-ce pas ?

Alors ils avaient également invoqué une réunion de leur côté dans l'une des chambres de la Tour des Apprentis, le panel d'experts se résumant à Jimin, Namjoon et lui.

Ils avaient bien entendus été interrogés par leurs supérieurs, récoltant quelques points pour leur ancienne Maison pour leur dévouement et leur bravoure et leur courage et d'autres superlatifs que le bel éphèbe n'avait pas écouté jusqu'au bout, avant d'être renvoyés à leurs quartiers avec ordre de se reposer. Leurs Maîtres d'Etudes avaient été même suffisamment gracieux pour leur accorder la matinée de libre le lendemain, mais au lieu de se réjouir de quelques heures de repos en plus, ils étaient rentrés dans un état second, les questions se bousculant derrière leurs paupières vides.

Jimin prit place sur le rebord de son lit en toussant, avant d'hocher la tête et reprenant l'expression de son ami pour demander :

"Bordel de merde. Qu'est-ce qu'il s'est passé ?

Jeongguk haussa des épaules, perdu. Il rejouait en boucle le panégyrique caverneux et singulier dans son esprit, tentant de raccrocher les pièces du puzzle dans l'espoir d'y voir plus clair. Namjoon lui avait expressément demandé de ne pas enquêter, mais maintenant qu'il avait vu de quoi était capable le meurtrier... ou plutôt, la Société Secrète des Alchimistes. Il ne put s'empêcher de frissonner en se rappelant être tombé sur ce nom, plus tôt dans la journée, à la bibliothèque — l'histoire d'Archibald Ravenhurst et de sa joyeuse clique d'assoiffés de pouvoir. Mais quel était le lien entre le vol de fusain du Japon, le délire hallucinogène de Rei, Soo-bin, Yeonjun, Haerin et Marius, et la recherche d'immortalité et de nécromancie ?

Il jeta un coup d'œil à son amant. Repoussant les papiers gribouillés et les livres ouverts dispersés sur le bureau en chêne pour s'adosser contre son rebord, nul doute qu'il se posait lui aussi un bon nombre de questions.

"Comment étaient-ils, la dernière fois que tu les as vus à l'Infirmerie ? demanda le blond en croisant ses bras contre son torse.

"Ils étaient tous endormis, répondit Jimin, mais Madame Pomfresh m'a indiqué qu'ils avaient des rêves psychotiques, au point où elle a dû en attacher certains. Pour le reste...

Il fut coupé par une nouvelle quinte de toux, vibrant à travers sa cage thoracique, ses épaules couvertes de spasmes douloureux. Sans un mot, Jeongguk se leva jusqu'au petit cabinet pour leur servir trois verres d'eau, les faisant flotter vers les autres d'un coup de baguette. Jimin accepta le rafraîchissement avec un rictus peiné et soulagé. Pourquoi n'était-il pas parti voir Madame Pomfresh pour sa bronchite ?

Ils trinquèrent, dans un semblant de célébration pour avoir déjoué un plan maléfique, même si leurs sourires n'étaient pas des plus éclatants.

Jeongguk fut le premier à boire.

Le premier à s'écrouler par terre, aussi.

"Gguk ! crièrent Namjoon et Jimin en se précipitant vers lui.

C'était instantané.

Une ou deux gorgées, et l'impression que ses os étaient en feu. L'impression qu'une créature ignoble écorchant l'intérieur de sa tête, dévorait son cœur et crachait du magma le long de ses veines. C'était une douleur simple, dans le sens où elle était radicale, féroce, intense, implacable, sans prévenir. Une souffrance telle qu'elle l'empêchait de parler — il ne pouvait que gémir à travers ses dents serrées, agonisant silencieusement alors que tout son esprit hurlait sa détresse. Sa langue lourde. Son glas âpre.

Son corps se tordit sous les assauts violents, les yeux révulsés, le râle déchirant d'un animal mourant secouant ses lèvres tremblantes.

C'était instantané. Une ou deux gorgées, et il était à la merci de l'Enfer.

"Gguk !

Namjoon fut à ses côtés en un éclair, s'agenouillant sur le tapis pour tenter de prendre son visage en coupe, malgré les mouvements erratiques de ses bras qui tentaient de se défaire de ce mal atroce. Il avait l'air possédé ainsi, se griffant sa poitrine dans l'espoir de s'ouvrir les poumons et de vider la bile de cendres qui remontait le long de sa gorge. Même à travers le voile capiteux sur ses paupières, Jeongguk pouvait voir l'expression de détresse sur le joli visage du blond, quelque chose de désespéré et de confus, quelque chose qui aurait préféré que ce soit lui la victime de cette géhenne tourmentée plutôt que son amant.

Namjoon saisit son verre d'eau pour renifler le liquide, grimaçant en reconnaissant les notes épicées caractéristiques du poison — s'efforçant de ravaler son trémolo pour pointer son doigt vers Jimin et lui ordonner :

"Ne bois pas ça !

Le verre du Gryffondor glissa entre ses doigts, se brisant sur le parquet dans un étranglement de stupeur. Le parfum de la mort glacée se dispersa dans la pièce dans une promesse sourde et mesquine.

"Va me chercher un Bézoard, vite !

Il y avait quelque chose de terrifiant, de voir un homme pourtant si maître de ses émotions à présent lui-même terrifié. C'était écrit sur tout son visage, alors que Jeongguk gémissait toujours plus fort de douleur, la mâchoire proéminente, gargouillant autour de sa propre salive, bavant le long de son menton, les paupières retournées dans l'espoir de chasser le diable qui faisait un festin de ses intestins. Les larmes coulaient le long de ses tempes pour venir se glisser dans ses cheveux, et Namjoon ne savait que faire entre lui murmurer des paroles rassurantes qu'il savait qu'il n'entendrait pas, et le garder fermement maintenu au sol pour pas qu'il ne se blesse, pour pas qu'il se claque le scalp contre le sol jusqu'à ce que l'hémorragie vienne finir le travail.

Jimin était déjà face à son armoire, tirant sur ses compartiments avec frénésie, fouillant dans ses tiroirs avec une fièvre toute nouvelle à l'idée de voir son meilleur ami au point de sénescence.

"Magne-toi ! urgea l'ancien Serpentard.

"Je... Je...

Par mille gorgones, pourquoi Jimin n'en trouvait-il pas ? Il savait qu'il avait une réserve d'anti-poisons dans sa chambre, habitude d'étudiant en potions, alors pourquoi toutes ses cachettes étaient mystérieusement vides de leurs précieux contenants ?

Il se tourna vers Namjoon, les mains vides, le regard misérable et affligé et horrifié, et son aîné ne put que pester en comprenant.

"Par Salazar.

Il se tourna vers Jeongguk, le souffle court et les spasmes toujours aussi frénétiques, pour resserrer ses mains autour de ses joues.

"Jeongguk ? Jeongguk, angel, je suis désolé, mais ça va faire mal.

Le noiraud ne l'entendait pas. Il n'y avait que le bruit de son sang qui battait contre ses tympans, assourdissant, si fort qu'il n'aurait fallu que ça pour le rendre fou. Il allait mourir, n'est-ce pas ?

Namjoon respira à pleins poumons pour ne pas paniquer, et enfouit son visage dans le cou de son sigisbée. Se concentra pour transformer ses dents en crochet de son serpent totem. Hésita une demi-seconde, avant de se rappeler qu'il n'y avait que ça qui pouvait le sauver.

L'instant d'après, il plongea ses crocs dans la peau palpitante de son pouls.

Jeongguk hurla. Il crut mourir. Et quand le trépas ne vint pas, il désespérait que la Parque l'accueille pour le délivrer de ses souffrances, car ça serait là une plus douce damnation que le martyr qu'il vivait-là. 


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Jeongguk avait déjà subi le sortilège Endoloris. Quand on étudie la Défense contre les Forces du Mal sous le Professeur Rogue, oui, forcément qu'on subit le sortilège Endoloris — car il n'y a pas de meilleur enseignement que d'apprendre de façon concrète, sur le terrain... ou, dans ce cas-là, par la douleur. Il se souvenait encore, comment la véhémence du sort l'avait terrassé d'un coup, suppliant d'arrêter au bout de quelques secondes à peine, suffoquant, haletant.

Il ressentit une étrange forme de lucidité lorsque Namjoon planta ses crocs en lui. Son esprit s'était déjà préparé à mourir, de toute façon, et à travers le brouillard épais de la folie, la quelconque tentative qu'il avait en tête n'était qu'un échec de plus. Pourquoi s'évertuer à sauver ce qui ne pouvait plus l'être ? En dépit de cette étrange sensation de fatalité qui parcourait son échine, il accepta volontiers le contact familier de ses dents contre sa nuque. Il y était habitué, à cette douce morsure, l'appréciant même avec un soupir d'aise, sentant l'aphrodisiaque pulser dans ses veines au rythme de ses coups de reins dans d'autres occasions. Mais à présent...

C'était une autre forme de torture — plus violente encore. Comme si le rideau lourd du calvaire venait de se lever brusquement, d'un coup, laissant la lumière si aveuglante percer le recoin sombre dans lequel son âme s'était recroquevillée pour se protéger. Les assauts étaient brusques, bestiaux, durs, comme s'il n'était plus qu'une proie finalement, et non un amant. Jeongguk hurla de plus belle, son corps se tordant dans des mouvements douloureux pour échapper au nouveau supplice, mais Namjoon était allongé de tout son poids sur lui, maintenant ses poignets fermement contre le tapis persan pour éviter qu'il ne lui griffe le visage jusqu'au sang. S'il n'était pas encore mort, sûrement que ce n'était plus qu'une question de temps.

"Qu'est-ce qu'il lui arrive ? entendit-il Jimin sangloter à côté de lui, son visage peint de larmes d'incompréhension et de peur.

Oui, vraiment, que lui arrivait-il ? Il ne comprenait rien de ce qu'il se passait, ne comprenait même pas ses propres émotions, son propre corps. Sa bouche n'était que cendres, ses pleurs étaient de la lave en fusion contre ses joues, et il savait que son coeur ne tiendrait pas longtemps à ce rythme-là. Pourquoi Namjoon lui faisait-il plus de mal que de bien ? N'était-il pas censé l'aider ?

Doucement, comme s'il ne voulait pas le blesser — quelle ironie, après ces cris qui le hanteraient jusqu'à la fin de ses jours —, l'Animagus rétracta ses crocs, lapant un instant les perles d'hémoglobine coulant le long de son cou tordu. Il inspira, une, deux fois, tentant de calmer les émotions laides et vicieuses qui ne se tairaient qu'une fois que Jeongguk lui aurait pardonné toute cette souffrance.

"Il a été empoisonné, répondit-il sombrement en se redressant la mâchoire contractée dans un rictus de haine.

"Pourquoi tu l'as mordu ? bégaya le Gryffondor la voix tremblante, tombant à genoux auprès de son meilleur ami, lui caressant les cheveux d'un geste presque maternel, le coeur au bord des lèvres.

Mais son contact était trop lointain pour Jeongguk, perdu, figé, n'osant respirer de crainte que ses poumons ne se remettent à flamber.

"Mon venin est certes un aphrodisiaque, mais aussi un puissant antidote. Espérons simplement que son corps soit assez fort pour supporter deux poisons d'un coup. On ne peut rien faire à part attendre, pour le moment.

Sa voix était froide, factuelle, objective. Il avait été empoisonné — c'était un fait —, mais il n'était toujours pas sorti d'affaires pour autant — ça aussi, c'était un fait.

Le noiraud ne pouvait que fixer le plafond d'un oeil vide, son coeur battant si fort qu'il pouvait le sentir dans sa gorge, et... en effet. L'intrusion d'une autre toxine dans son organisme avait été particulièrement cuisante et térébrante, mais il avait déjà l'impression que cela faisait son petit effet. L'impression de mieux respirer. L'impression que son tourment se taisait, se faisait tout petit dans ses intestins, le bout des doigts qui picotait comme pour se reconnecter avec lui-même. Une sorte d'expérience hors de son propre corps qu'il n'appréciait guère, mais si cela lui permettait d'aller mieux...

"Angel ? Tu m'entends ?

Le rouge et or n'eut qu'un gargouillement en guise de réponse, mais cela sembla contenter Namjoon, lui offrant un maigre sourire au-dessus de son visage et lui invoquant un oreiller pour supporter sa nuque.

Avant de stupéfixer Jimin d'un coup de baguette rapide.

Le corps du brun fit un choc sourd en tombant à la renverse, les yeux écarquillés face à l'attaque surprise. Les prunelles du Serpentard, elles, étaient redevenues aussi nébuleuses que sa colère, et il s'avança vers son cadet à terre avec la démarche d'une panthère. D'un monstre. De quelqu'un qui avait manqué de tout perdre, et qui avait depuis longtemps dépassé le point de non-retour.

"Il a été empoisonné, reprit-il bassement, parce que l'eau a été empoisonnée. La même eau qui se trouvait dans ta chambre !

Figé dans son sortilège, Jimin ne pouvait rien dire, rien faire, à part canaliser dans son regard toute la protestation et la détresse qu'il désespérait de crier. Des "écoute-moi", des "je t'en conjure", des "je ne lui aurais jamais fait ça".

Et dans son smog des dernières traces de véhémences, Jeongguk était tout autant confus que son compagnon. Où voulait-il en venir ?

"Tu avais accès aux potions de Slughorn, accès à l'infirmerie pour t'assurer que tes premières victimes ne se remettraient pas du quelconque poison que tu leur as administré. Quelle coïncidence que tu te trouves au même endroit, au même moment que les Cinq lorsqu'ils ont fait leur petit discours en transe, n'est-ce pas ? Comme ça, tu les sauves, tu es acclamé comme un héros, les Professeurs ne te soupçonnent pas, tu peux continuer de mettre ton plan à exécution. Ce que je ne comprends pas, en revanche, c'est pourquoi tuer Gguk devait faire partie de ton plan, mais je suppose qu'un sociopathe tel que toi n'a pas forcément besoin de raisons...

... Quoi ?

Namjoon se pencha au-dessus de sa silhouette paralysée, penchant la tête sur le côté pour demander, ses lèvres retroussées dans une grimace menaçante :

"Dis-moi, Jimin, depuis combien de temps es-tu adepte de la Société Secrète des Alchimistes ?

Jeongguk ne sut dire si le bruit sourd dans ses oreilles était le travail de ses anti-corps tentant de lutter contre la strychnine... ou si c'était la soudaine réalisation que tout ce qu'il cherchait depuis si longtemps était sous ses yeux depuis le début.

Jimin émit un grognement de révolte, abattu et affligé par la lourde accusation, et le blond, dans sa grande mansuétude, ôta son emprise magique simplement autour de son visage pour qu'il puisse lui répondre.

"Namjoon, tu ne comprends pas, je ne suis pas avec eux, je—

"Ah oui ? rétorqua-t-il d'une de ses expressions qui voulaient en dire long. Dans ces cas-là, pourquoi est-ce que tu as l'emblème de la Société Secrète dans tes effets personnels ?

À cela, le bel éphèbe brandit l'un des parchemins sur la table de travail, un de ceux qu'il avait repoussé pour pouvoir s'y installer un peu plus tôt. En marge d'une équation dont il n'y comprenait pas grand chose, Jimin avait gribouillé le même symbole qu'il avait vu sur la broche que Namjoon avait emmené expertiser chez Barjow & Burke. Cela ne pouvait, de toute évidence, être un pur hasard. Quelque chose dans ses pensées floues cliqua soudainement — le même symbole sur le livre que le brun avait d'ouvert devant lui quand le Département des Mystères avait fait leur sortie fracassante de la Grande Salle... Le même symbole qu'il cherchait désespérément à la bibliothèque quand il avait découvert l'existence de la caste.

"Ce n'est pas—

"Tu veux me faire croire que la rune du temps qui passe et la demi-lune ne sont pas les armoiries de la Société, peut-être ?

"Pas une demi-lune, corrigea-il dans un murmure. C'est Mercure, le symbole des Alchimistes, mais...

Que Mercure nous garde, avaient scandé les hypnotisés avant de se jeter dans le vide.

Mais comment pouvait-il connaître la véritable signification de cet insigne, si ce n'était avouer qu'il faisait lui-même partie du petit club de dégénérés ? Namjoon semblait en être arrivé à la même conclusion, car il lança sans un mot un maléfice qui fit grimacer le jeune homme encore perclus — pour l'inciter à parler ou pour extérioriser sa colère, il ne savait pas trop. L'espace d'une brève seconde, le noiraud se demanda si son amant avait mené des interrogatoires de cette façon depuis son entrée au Ministère — ou pire, s'il avait lui-même torturé, car rien n'indiquait que le Département des Mystères ne soit lui-aussi adepte de méthodes peu conventionnelles...

"Et comment expliques-tu que tu sois soudain à court de Bézoard, alors que tes armoires sont d'habitude bien remplies, si ce n'était pour préparer la mort de Jeongguk ?

"Ce n'est pas ce qu'il s'est passé, grogna Jimin en fermant les yeux sous les impacts cruels et térébrants, ce sont eux qui ont tenté de me piéger !

"Qui, la Société Secrète ? Pourquoi auraient-ils fait ça ?

"Parce que je suis le descendant d'Archibald Ravenhurst !

La révélation fit l'effet d'une petite bombe — enfin, chaque mot prononcé faisait l'effet d'une détonation dans l'esprit encore embrumé de Jeongguk, mais ces dernières paroles eurent le mérite de rendre Namjoon coi, au moins le temps d'un instant flottant étrangement dans la chambre. Jimin ne laissa pas à son aîné l'opportunité de le questionner avec plus de sortilèges pénibles encore, puisqu'il poursuivit, aussi rapidement que les chaînes invisibles et inconfortables lui permettaient :

"Pour eux je suis le prochain leader légitime, mais je ne veux pas de tout ça ; alors quand j'ai découvert leurs véritables projets, j'ai tenté de les empêcher, tout ça pour qu'ils me visent à leur tour, et je n'ai pas dormi depuis des jours à la recherche d'un antidote assez puissant, et — et s'il-te-plaît, relâche-moi, j-je n'arrive plus à respirer...

Alors ça, il ne l'avait pas vu venir, pensa Jeon.

Il eut un autre gargouillement, tirant Namjoon de son observation sévère, ses yeux implorant des mots qu'il était trop faible pour prononcer. Détache-le, chuchota-t-il dans son esprit, espérant que son amant comprenne le message et qu'il fasse usage de sa Legilimancie. Détache-le, et laisse-le parler, mon amour.

L'Animagus resta immobile une, deux secondes, avant de soupirer et de lever le charme d'un mouvement de poignet, peut-être plus abruptement qu'il n'aurait dû. Jimin prit une grande inspiration à l'instant même où la pression autour de ses poumons se relâcha, ses épaules secouées une nouvelle fois par une toux sèche et radicale ; Namjoon offrit sa main, avec un scepticisme non dissimulé, pour l'aider à se relever et à s'asseoir sur le lit.

"Parle, lui ordonna-t-il simplement, et l'Apprenti se garda bien de lui demander une minute le temps de reprendre son souffle.

"Ça a commencé cet été, commença-t-il, la voix encore rauque. Je remettais en ordre les affaires de mon grand-père, quand je suis tombé sur une version de notre arbre généalogique que je n'avais jamais vu. C'était suffisamment compliqué d'allier le côté Moldu de mon père aux anciennes racines sorcières de ma mère ; je n'ai jamais vraiment cherché à connaître mes ancêtres, jusqu'à ce que je tombe sur ce parchemin-là. Une version selon laquelle nous serions les héritiers directs d'un certain Archibald Ravenhurst, un Alchimiste pionnier d'un bon nombre d'avancées magiques. J'ai fait quelques recherches sur lui, mais sans plus — mon grand-père ne voulait pas m'en parler, j'avais des lectures préparatoires à finir pour l'Apprentissage, et Hoseok partait bientôt pour l'Asie pour je-ne-sais combien de temps... Alors j'avoue que j'ai un peu laissé tomber.

Il se tordit les doigts dans un geste nerveux.

"Jusqu'à ce que je retombe sur ce nom quand je faisais des recherches pour mes cours de Potions. C'était comme si le fait que je savais de qui je descendais était suffisamment pour les réveiller.

"Comment ça, réveiller ?

"Une sorcière s'est présentée à moi comme étant une cousine éloignée de ma mère. Elle m'a parlé de la Société Secrète des Alchimistes, celle qu'Archibald Ravenhurst avait créée. Elle m'a dit qu'elle était toujours active mais souterraine, que c'était un groupe élitiste et visionnaire, que de grandes choses se préparaient... Elle me disait que toute ma famille avait fait partie de ce cercle, que mon grand-père avait oeuvré pour la grandeur de leur association. Je ne savais pas encore, à l'époque, que la soif de pouvoir de Ravenhurst l'avait conduit à la folie, que tout ce qu'il voulait était la destruction de l'ordre mondial tel qu'on l'entendait, tu comprends ? Je l'ignorais.

Je comprends, voulut souffler Jeongguk pour le rassurer — mais les vestiges du poison étaient encore bien présents, et sa langue, ses paupières, tout son être était trop lourd.

"Elle m'a proposé de faire mon initiation au sein de la Société, et bien sûr que j'ai accepté. J'étais Apprenti en Potions, et on m'appâtait avec des nouvelles recettes, des expérimentations comme vues nulle part ailleurs, des découvertes majeures...

Il camoufla ses yeux derrière ses mèches couleur chêne pour ajouter, plus doucement :

"Et puis, cela me permettait de me reconnecter à tout un pan de ma famille avec lequel je n'ai jamais eu vraiment d'attaches.

Namjoon laissa quelques secondes passer, le temps que Jimin rassemble ses émotions, mais bien vite, l'enquêteur en lui prit le dessus, puisqu'il interrogea de plus belle :

"Qu'est-ce qu'il s'est passé ?

"Pendant l'initiation ?

Le Gryffondor fit un geste de la main désintéressé en guise de réponse.

"Ce n'est pas le plus important, en réalité.

Il refusa de le dire avec des mots, mais son esprit, lui, était plus bavard ; c'était comme si Jimin poussait volontairement son souvenir sur le devant de sa mémoire, là, juste là, pour que Jeongguk puisse puiser dans ses dernières réserves pour lire dans sa tête. Le venin commençait déjà à se dissiper pour qu'il rassemble ses forces et fasse usage de Legilimancie, regardant la réminiscence comme un film Moldu que lui présentait son meilleur ami.

Une cagoule sur la tête, un passage secret dans Poudlard, une grotte recouverte de runes dessinées à la cire, des cierges flottant entre les parois humides. De lourdes capes en velours d'un bleu roi sombre, des silhouettes dressées en demi-cercle et l'observant d'un oeil de vautour par-dessus leurs capuches, des amulettes en or brillant étrangement sur leur plastron. Une dague sertie de pierres précieuses et surmontée d'une tête de dragon, le fil de la lame coupant sa paume dans une grimace, des paroles en latin à réciter presque religieusement. Nul doute que ce simulacre de cérémonie avait fait forte impression pour un Jimin encore naïf et assoiffé de connaissances, à l'époque.

Mais déjà, ce-dernier reprenait :

"Ce qui est important, c'est qu'une fois l'initiation faite, ils m'ont considéré comme suffisamment digne de confiance pour me faire part de leur plan. Autant te dire que j'ai salement déchanté.

Il laissa un silence passer, prenant une grande inspiration pour lâcher :

"Ils comptaient empoisonner toute l'école.

"Toute ?

Jeongguk ne pouvait voir Namjoon de là où il était, même du coin de l'oeil, mais son incrédibilité était suffisamment audible dans sa voix pour deviner son expression. Il avait imaginé un assassinat visé, ciblant une personne en particulier, ou, tout au plus, les grandes familles de Sang Pur, donnant à Voldemort la paternité de ces atrocités...

"Toute, confirma Jimin d'un air grave. Professeurs, étudiants, et tout le personnel. Imagine le retentissement que cela aurait été, d'éliminer 7 générations de jeunes sorciers de Grande-Bretagne d'un coup, ainsi qu'une dizaine de Mages plus puissants les uns que les autres. Imagine tuer Dumbledore. La communauté magique aurait instantanément été à l'écoute de leurs requêtes, de leur profession de foi. Ce serait comme avoir le pouvoir absolu.

Le blond fronça les sourcils, le choc de ces nouvelles marquant son front soucieux.

"Et cela n'a rien à voir avec le Seigneur des Ténèbres ?

"Pas que je sache, contra Jimin d'un haussement d'épaules perdu. Ils ne servaient que leurs propres buts. L'immortalité. Faire revenir les morts pour en faire une armée de cadavres sous leur servitude. Ce genre de conneries.

Le vert et argent continua de tourner en rond autour de la chambre, jetant un regard protecteur sur le profil fatigué et inanimé de Jeongguk. Il savait qu'au moment où son attention serait concentrée sur son sigisbée, il perdrait toute volonté de se battre, de comprendre, toute volonté pour stopper cette folie sanguinaire. C'était comme l'adrénaline : au moment où il arrêterait de nager, au moment où il s'arrêterait de courir pour souffler, il n'aurait plus aucune force. Les requins le boufferont. La terre l'engloutirait. À la place, il profita de l'esprit ouvert de son cadet pour lui envoyer des messages réconfortants par la pensée, pour lui demander comment il se sentait, pour lui dire qu'il l'aimait et qu'à la seconde où tout cela serait fini, il le prendrait dans ses bras pour ne plus jamais le lâcher. Jeongguk cligna lentement des yeux pour lui dire merci, pour lui dire je t'aime.

L'homme détourna les yeux pour se reconcentrer sur le plus jeune assis en face de lui, ravalant l'étrange façon dont sa voix s'était étranglée dans sa gorge.

"Et toi, qu'as-tu fait ?

"J'ai fait mine de les suivre, au début. D'adhérer à leur plan. J'ignorais quelle potion ils comptaient utiliser, simplement qu'elle contenait du fusain du Japon — le champ des possibles est encore assez large. Ils parlaient d'en faire un poison que l'on peut déclencher à distance, par une incantation. Des... des agents dormants, en quelque sorte, jusqu'à ce que la Société décide qu'il était temps de mettre leur sinistre projet à exécution, et qu'ils activent le venin. Je n'avais jamais rien vu de comparable — j'ignorais même que c'était possible, et sûrement se sont-ils dit la même chose, parce qu'ils ont voulu vérifier que cela fonctionnerait bien comme prévu, en faisant des tests aléatoires...

"Rei, Soo-bin, Yeonjun, Haerin, Marius, souffla Namjoon.

Les voix d'outre-tombe résonnaient encore caverneusement dans ses oreilles — les jeunes gens que vous voyez là ont été le cobaye de notre expérience.

Jimin hocha de la tête, les lèvres crispées et le fondement de sourcil anxieux et tourmenté.

"J'ai essayé d'obtenir plus d'informations, crois-moi, j'ai essayé. J'en étais presque pathétique. Mais je ne pense pas être aussi bon acteur que ce que je pensais être, car ils ont vite découvert que je n'étais pas à 100% avec eux sur ce coup-là. Bien vite...

Un soupir, avant de laisser sa tête retomber contre son torse, ses mains se tordant toujours sur ses genoux.

"Bien vite, ils ont pimenté mon verre, à moi aussi.

Les quintes de toux, pensa immédiatement Jeongguk. Sa pâleur incommode de ces derniers temps, les plats qu'il ne touchait presque pas, les respirations haletantes quand il pensait que son meilleur ami ne le regardait pas...

Une vague d'horreur saisit son coeur, bien différente que la torture de la toxine, et pourtant, si comparable. Vague d'horreur pour Jimin, à l'idée de ne serait-ce qu'imaginer ce qu'il avait pu vivre. Vague d'horreur pour lui aussi ; n'avait-il donc pas vu les signes ? Avait-il été à ce point trop occupé par Namjoon qu'il avait complètement ignoré la menace de mort qui pesait sur ses épaules ? Etait-il hors de portée, à présent ? Quelque chose de mauvais et de viscéral gronda dans sa poitrine, un mélange de honte et de remords et d'opprobre confus et indigne, le laissant déglutir difficilement quand le brun tira sur sa manche.

Là, sur son avant-bras coloré de bleus turpides tirant vers le violacé, pointillaient le long de ses veines les traces rougies d'une dizaine de piqures. Jimin ferma les yeux un instant, comme si cela lui coûtait de montrer son échec au grand jour, lui qui déjà avait fait tant de mal en rejoignant la secte.

"J'ai tout testé sur moi, en intraveineuse pour que cela fasse effet plus rapidement, expliqua-t-il dans un chuchotement. Je suis certain qu'ils m'ont administré une version relativement proche du poison qu'ils comptent utiliser — ça fait de moi un bon patient zéro, non ?

Il tenta un petit rire, sans saveur, un qui ne fit pas écho chez son auditoire, avant que son rictus ne se transforme en une autre toux. L'aîné invoqua un verre d'eau — non empoisonné, cette fois-ci —, et le tendit à l'Apprenti sans un mot, comme un signe de paix, de trêve.

"Tu n'as prévenu personne ?

"A ton avis, elle vient de qui la lettre anonyme que tu as reçu au Ministère ?

Namjoon se pinça les lèvres. Qu'avait-il dit à Jeongguk, dans sa chambre à Pré-au-Lard, déjà ? Qu'il y avait sûrement un traitre dans la mystérieuse organisation, un traître dont tout le monde chercherait à se débarrasser ? Il aurait tant aimé que sa prédiction soit fausse — ou du moins, que le Judas renégat ne soit pas Jimin.

"Je savais qu'ils me surveillaient, poursuivit le rouge et or entre deux gorgées. Le venin dans mes veines était un avertissement, pour ne pas aller plus loin. S'ils découvraient que j'avais averti quelqu'un, ils m'auraient tué sur-le-champ, descendant de Ravenhurst ou non. Et puis... personne ne m'aurait cru. On parle d'une secte qui n'a pas été active depuis des siècles, et ils me bandaient les yeux à chaque fois qu'ils m'emmenaient dans leur quartier général. Nos correspondances s'auto-détruisaient automatiquement, et je suis quasi sûr qu'ils utilisaient des faux noms. Alors tu m'excuseras si je suis resté low profile quelques temps.

Ses yeux balayèrent le corps inerte à leurs pieds.

"Pour Jeongguk... Ils ont dû me voir sauver les Cinq tout à l'heure, et ils ont voulu m'éliminer une bonne fois pour toute du tableau, avant que je ne tire l'alarme, vidant mes placards de Bézoards pour maximiser les chances de réussite. Ce poison... Il m'était destiné.

Une larme fautive et coupable coula lentement le long de sa joue dans le silence pesant. L'idée que Jeongguk était peut-être mort par sa faute, pour ses propres failles et débâcles, pour avoir été appâté par des chimères illusoires, pour ne pas avoir vu les signes — si Namjoon ne l'avait pas mordu pour le sauver, il ne se serait jamais pardonné le trépas de son meilleur ami. Plutôt sauter lui-même à la place des Cinq.

L'instant s'étira dans le temps, durant lequel personne ne prononça un mot ; Jeongguk lui-même retenait ses grognements d'inconfort pour assimiler tout ce que Jimin avait vécu ces dernières semaines, tournant un oeil aveugle vers ce qui était pourtant ô si visible.

Lentement, s'approchant de lui comme un animal blessé qu'il ne voulait pas effrayer, l'ancien Serpentard s'assit aux côtés de l'Apprenti en Potions sur le lit.

"Par Salazard, Jimin, pesta-t-il simplement. Je suis désolé, je... Je n'aurais pas dû m'en prendre à toi de cette façon.

L'autre eut un sourire triste, réaliste.

"Mais tout m'accusait, n'est-ce pas ?

Namjoon lui prit la main, délicatement, refusant de jeter un oeil à son avant-bras maculé de toutes ses tentatives — vaines, certes, mais au moins avait-il essayé. C'était un moment presque hors du temps, assis là à se pardonner, alors que le temps, justement, ils n'en avaient pas. Dehors, des centaines d'élèves risquaient de mourir à chaque instant, le conciliabule de Dumbledore et des autres Professeurs n'était sûrement qu'un ramassis de conneries auto-satisfaisantes, et quelque part caché derrière les murs épais du château, une bande de décérébrés complotaient pour leur perte. Ils n'avaient pas de temps à perdre, certes ; mais le temps, Namjoon le prendrait pour réparer ses erreurs et ses jugements trop hâtifs, comme il l'avait toujours fait.

"Laisse-moi t'aider, d'accord ?



--- 



En réalité, Jeongguk ne parvint pas à sauver tout le monde — pour la simple et bonne raison qu'il ne faisait pas partie de la mission de sauvetage, à son plus grand dam. 

Trop occupé à se remettre de ses blessures et des conséquences néfastes du poison, dormant des jours durant. L'étrange lucidité qu'il avait ressentie à la morsure de Namjoon et lors des aveux de Jimin, quand il était pantelant sur le tapis de sa chambre, était du fait de l'adrénaline, lui avait expliqué Madame Pomfresh. Car cette acuité presque clairvoyante s'était transformée en léthargie somnolente au moment où son amant l'avait porté dans ses bras jusqu'à l'infirmerie, la tête dodelinant contre son épaule pour se réveiller seulement le lendemain matin sans personne à ses côtés.

Les jours suivants ne furent qu'une succession de sommeil sans rêve, de médicaments douloureux à avaler, et l'étrange sensation des ombres à son chevet qui venaient et partaient, sans qu'il ne réussisse jamais à mettre un nom sur leurs profils. Namjoon ? Jimin ? Le Directeur ? Ses parents peut-être ? Il avait l'impression de revivre les effets du virus en lui, se réveillant à peine quelques secondes pour replonger aussitôt dans les bras de Morphée. Il était presque dans le même état que les Cinq — qui devaient sûrement être ici avec lui, après leur vol plané —, car il était une chose de lutter contre la toxine, mais il en était une autre lorsque cette-dernière était couplée avec la version létale de l'aphrodisiaque de l'Animagus.

Le jeune homme sortit de sa torpeur trois jours plus tard, qui paraissaient être une éternité. Ouvrant les yeux lentement, précautionneusement, papillonnant pour fixer le plafond un moment, confus, perdu.

Puis tout lui revint d'un coup.

Il se redressa dans un sursaut, avant de grincer sous la protestation sourde de ses muscles encore endoloris, pour sentir une main sur son bras, un chuchotement bas, une pression le poussant à se rallonger.

"Eh, eh, angel, doucement, tout va bien.

Des mots, simples, mais si réconfortants — un timbre de voix qu'il avait entendu dans son inconscient, et lorsqu'il tourna son visage encore indolent et engourdi vers la source de chaleur, il prononça son nom avec une lourdeur molle et difficile :

"Nam' ?

Une silhouette se pencha au-dessus de lui — par la barbe de Merlin, il faisait beaucoup trop jour pour son propre bien —, fronçant des sourcils pour se concentrer sur les détails flous et troubles. Des sourcils droits, forts, un nez fin, une bouche qu'il aimait tant embrasser ; avec du recul, c'était exactement ce qu'il s'était dit lorsque son amant l'avait attiré dans un recoin sombre du couloir lorsqu'il sortait d'une leçon particulière avec Rogue, juste avant de l'emmener dans sa chambre à l'auberge d'à côté.

Un sourire fendit le masque vaporeux, une main chaude caressant ses cheveux.

"Je suis là, angel, je suis là.

"Qu'est-ce que...

Il fit un mouvement de langue contre son palais sec et sa bouche pâteuse, frustré de réussir à trouver les mots justes.

"Est-ce que... Tout le monde...

"Oui trésor, tout le monde va bien. C'est fini. Il n'y a plus personne en danger.

Jeongguk fit un bruit interrogateur, à défaut de réussir à formuler des phrases cohérentes, et remontant la couverture sous le menton de son cadet, le blond expliqua brièvement :

"Je ne pense pas que tu te souviennes du moment où je t'ai déposé à l'infirmerie ; tu te réveillais pour t'évanouir quelques secondes après, complètement délirant par la fièvre. J'ai eu beaucoup de mal à te laisser là seul, mais je savais que tu étais entre de bonnes mains ici, et il n'y avait rien que je pouvais vraiment faire. J'ai immédiatement prévenu Hepzibah et les professeurs. Inutile de te dire que les déclarations de Jimin eurent leur petit effet, j'ai bien cru que le Professeur Binns allait clamser tellement il était pâle.

Le bel éphèbe eut un maigre sourire, la voix de son compagnon le berçant d'une douce mélodie, mais quelque chose dans son esprit le tirait des méandres agréables et incitantes du sommeil pour le forcer à écouter.

"Pour faire une longue histoire courte, on a rapidement réussi à retrouver la trace de la Société. Rogue a plongé Jimin dans un état d'hypnose pour retrouver le chemin parcouru jusqu'au QG, et la secte n'était pas aussi secrète qu'elle prétendait l'être — de vieux registres de l'école montraient qu'ils avaient déjà eu des plans semblables par le passé.

"Et... Comment...

"Jimin avait presque trouvé l'antidote, répondit-il à sa question silencieuse. Il était à ça, si proche du but. Slughorn lui a donné un petit coup de pouce, mais tous les mérites lui reviennent. Les Cinq se remettent lentement de leur transe, étant donné qu'ils ont été le plus touchés, et les derniers élèves sont en train de recevoir le remède à l'heure où je te parle. Je crois que Dumbledore souhaite faire une petite cérémonie en l'honneur de Jimin, histoire de lui donner son diplôme en avance, de façon symbolique.

Ses muscles se tendirent imperceptiblement à l'entente du nom de Park, les mots se pressant contre ses lèvres pour lui demander :

"O-Où est-il ? Comment va-t-il ?

Ravalant un rictus attendri, l'ancien Serpentard donna simplement un coup de menton en direction du lit derrière lui. Jeongguk se retourna, si vite que sa vision tourna au point de lui donner la nausée, mais il était là. Assoupi, ses traits paraissaient plus jeunes, ses mèches mordorées comme une auréole autour de son doux visage, lisse de toutes les menaces, remords, périls et perdition. Son bras torturé d'horribles marques jurait contre le blanc éclatant des bras, des nuages d'ecchymoses améthystes tirant sur le jaunet ocreux — Jimin le voyait comme la preuve de ses échecs, lui le voyait comme la preuve de ses tentatives, de sa détermination. Il avait été tout seul, lui contre le monde, lui contre des sorciers infiniment plus puissants que lui, sournois et mensongers. Portant cette aigreur, cette peur inconsolable qui lui donnait envie de vomir, portant tous ces sentiments hideux dans son coeur solitaire, esseulé, écarté des autres.

Il leur avait sauvé la vie, à tous. Jeongguk espérait de tout coeur qu'il s'en rende compte.

"Il a refusé de se faire traiter tant que la potion n'était pas au point pour les autres. Mais il fallait se rendre à l'évidence, tout ça était bien plus que son corps ne pouvait supporter, et il s'est écroulé au moment où il n'y avait plus de danger. J'ai eu un hibou d'Hoseok, il est en chemin pour prendre soin de lui.

Namjoon vint caresser sa joue, le surprenant, essuyant une larme qu'il n'avait pas conscience de verser.

C'était fini. Par Salazar, c'était enfin fini.







"Hepzibah m'a accordé quelques jours de repos, et je pense que Dumbledore n'aura aucun mal à en faire de même, surtout pas après que tu aies failli laisser ta peau sur le tapis de Jimin. Que penses-tu de petites vacances ?

Jeongguk ne put que lui sourire de toutes ses dents à cette proposition — ils auraient pu passer du temps ensemble dernièrement, si ce n'était pour la petite tentative d'assassinat général qui leur avait un peu coupé l'appétit.

"Tu as une idée en tête ?

"Je voulais te montrer le dernier super-pouvoir que j'ai débloqué grâce à mon Animagus, lui dit-il d'une voix basse et cachotière. Tu savais que les serpents avaient deux pénis ?

Le noiraud ne put que rougir à l'idée de ces retrouvailles. 







.

4 ANS APRES HERE WE ARE FOR THE PART 2 !!!! 

entendez-moi bien quand je vous dit que TOUT ce que vous avez lu de magique peut se retrouver dans l'œuvre originale (à part la partie sur la société secrète). le nom des bouquins, des ingrédients, des familles de sang-pur, des runes, T O U T. vous voulez pas voir la gueule de mon historique ptdrrrr (j'ai mis des heures de hogwards legacy sur youtube pour me faire un fond aesthetic mdrrr) 

je suis sincèrement navrée de tout ce retard -- pour ceux qui ont suivi, je me suis fait cambriolé mon ordinateur (et tout le reste de mon appartement au demeurant) début janvier, assez traumatisant d'ailleurs, donc j'ai mis du temps à me fournir de nouveau en tout ce que j'avais besoin. + je suis actuellement en asie pour plusieurs mois, donc j'ai aussi un peu la tête ailleurs ! (j'espère d'ailleurs que je me suis pas gourrée dans la programmation du chap avec le décalage horaire)

j'espère en tout cas que vous avez aimé cet os, ça m'a bien fait plaisir de l'écrire ! à la base ça partait juste sur un ptit smut avec namjoon qui a 2 queues, ça retombe sur une tentative d'assassinat ptdrrr, more plot than on the first part lmaooo 

sorry s'il reste encore 2/3 fautes, j'ai vachement rush j'avais envie de le poster en janvier (on est le 31, le timing est parfait mdr) 


n'hésitez pas à laisser un ptit commentaire, me dire ce que vous en avez pensé, à liker, partager et tout le tralala, ça me ferait super plaisir !! 

j'ai plein d'autres idées encore à vous partager j'ai trop hâte


love you lots et merci pour votre soutien, 


champagne 

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