SOUS LA GRÂCE DU ROI

𝕾𝖔𝖚𝖘 𝖑𝖆 𝖌𝖗𝖆̂𝖈𝖊 𝖉𝖚 𝖗𝖔𝖎
( 𝔏𝔢𝔱 𝔪𝔢 𝔟𝔢 𝔶𝔬𝔲𝔯 𝔯𝔲𝔩𝔢𝔯 - 𝔶𝔬𝔲'𝔯𝔢 𝔱𝔥𝔢 𝔯𝔲𝔩𝔢𝔯 𝔬𝔣 𝔪𝔶 𝔥𝔢𝔞𝔯𝔱 )

"Sire, vous savez que je vous protégerais de ma propre vie."
"Je le sais, Général ; et c'est bien ce qui m'inquiète."

sope/yoonseok
king!au
generalofarmy!au
betrayal!au
war!au
pas vraiment de temps ni de lieu place à votre imagination les babes
kinda implicit lemon
switch
(ndla: attention, graphic scenes)

REPOST DU PROJET "CALENDRIER DE L'AVENT" DE YMASWELL 

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Le bruit des chaînes contre le sol de marbre et les supplications du prisonnier lui tapaient déjà sur les nerfs.

Hoseok faisait les cent pas sur le côté du trône, sa main crispée autour du manche de son sabre, un froncement de sourcil sur son visage lisse, tandis que le traître, encore dans ses habits de Chambellan, ne faisait que renifler et supplier à genoux. L'incarnation même d'un être pathétique comme il les détestait, trop peureux pour affirmer leurs actions et affronter les conséquences la tête haute. Les deux soldats, derrière lui, étaient impassibles, tenaient fermement ses liens et le tirant vers l'arrière lorsque celui-ci bougeait de trop ; et quel plaisir était-ce de voir là un homme d'une si grande importance, qui pavanait dans les couloirs, fort de son rang, se retrouver lamentant et se soumettant au jugement de son roi.

« Pitié, Sire... Je ne savais pas, je vous le jure !

Un traître et un menteur. Il aggravait son cas au fur et à mesure qu'il ouvrait la bouche, et aggravait la colère du Général encore plus – et tous ceux présents dans la salle du trône savait parfaitement qu'il valait mieux éviter avec prudence ses foudres colériques.

« Silence, misérable, grogna Hoseok en faisant un pas menaçant en sa direction, ce qui eut le mérite de le faire taire, apeuré, la tête rentrée dans ses épaules.

La mâchoire serrée, il se passa une main dans ses cheveux, continuant à faire les cent pas devant le prisonnier. Le Général n'était pas en tenue de combat : les habits calfeutrés et l'armure d'acier étaient trop lourds pour une telle situation, préférant alors un plastron noir légèrement rembourré, où figuraient ses médailles de mérite ; et, caché de façon peu subtile sous ses robes, se trouvait le sabre de son père, détaillé avec minutie, un long dragon incrusté dans le métal, qui lui avait valu le surnom de Lame Sanglante, sur le champ de bataille. La même qu'il avait sorti de quelques centimètres de son fourreau en escortant le traître ici, afin de le menacer que s'il ne se taisait pas, il lui trancherait lui-même la langue.

Alors que le Chambellan allait de nouveau ouvrir la bouche pour implorer la grâce de son roi, le monarque parla enfin.

« Je ne sais pas ce qui me déçoit le plus.

Hoseok se tourna vers Yoongi, et, comme à chaque fois qui le faisait, eut le souffle légèrement court à la vue de l'empereur assis aussi augustement sur le trône. Ses robes, ornées de fils d'or et d'argent, reflétaient les lumières des lustres sur son visage ; et sa couronne, bien que celle de fonction et non celle d'apparat, sortie que lors des grandes occasions, lui donnait tout de même cet air impérial qui lui allait si bien, le doré contrastant sur ses cheveux ébènes.

« Je ne sais pas ce qui me déçoit le plus, Chambellan. Que ce soit vous qui m'ayez trahi, ou que vous ayez voulu me tuer de façon aussi grotesque.

« Votre Majesté, renifla l'homme, je vous jure que je n'ai rien à voir avec tout cela !

Irrité par ses jérémiades si déplaisantes, Hoseok écrasa la main du traître, toutes deux à plats sur le sol, d'un coup de botte, sourd au glapissement de douleur de ce-dernier.

« Je t'ai dit de te taire, renégat. Mon roi, dit-il en se retournant vers le trône, permission de m'occuper personnellement de ce vaurien.

« Patience, Général, répondit doucement Yoongi en levant une main apaisante, bien qu'il fût aisé de sentir dans sa voix une pointe d'amusement.

Puis, déviant son attention vers l'homme qui lui avait voulu la mort, son regard se transforma de nouveau en lac glacé, une expression blasée et lointaine sur son visage, alors qu'il reprit la parole :

« Je vous ai chargé de vous occuper de ma chambre et vous ai donné les clés de ma suite parce que je vous faisais confiance, Chambellan. Mais voilà que la rébellion fait rage dehors ; et pour quelques pièces sonnantes et trébuchantes, vous vous retournez contre votre roi.

« Sire, hoqueta le fautif, avant d'être coupé par les deux soldats le tirant de nouveau en arrière.

« Vraiment, mon ami, continua Yoongi, impassible ; je vous estimais avec un peu plus d'imagination. Du poison dans ma coupe et un serpent dans ma couche ? Rien que pour la perte d'un de mes plus fidèles goûteurs, vous mériteriez qu'on vous tranche la tête immédiatement. Pensiez-vous votre roi assez... assez stupide, cracha-t-il presque, pour se faire avoir d'une si grotesque manière ?

L'homme avait les joues baignées de larmes, la bouche s'ouvrant et se fermant, comme s'il n'arrivait à mettre un mot sur ses explications.

« Qu'as-tu à dire pour ta défense ? demanda bassement Hoseok, bien qu'à contrecœur.

Parce que si cela n'en tenait qu'à lui, cela ferait longtemps que le traître danserait au bout d'une corde; mais il avait appris avec le temps que Yoongi aimait bien voir l'horreur dans les yeux de ses bourreaux, dans les yeux de ceux qui voulaient sa perte, dans une forme de sadisme qu'il pouvait bien se permettre après ce qu'ils lui avaient fait subir. Quand ils comprenaient que leur roi était au courant de toutes leurs manigances et qu'il lui suffisait de claquer des doigts pour qu'ils se retrouvent sous les huées de la foule sur la place public, à genoux et le cou découvert pour la lame de l'exécuteur.

Parce que ce n'était pas la première fois que l'on s'en prenait à la couronne ; et le Roi Yoongi II, bien que jeune encore, avait essuyé sûrement plus de tentatives d'assassinats que son père avant lui. Nombreux avaient été les conseillers qui avaient retourné leur fidélité contre lui, dans le seul but d'assouvir leurs vils et bas désirs, lui reprochant les réformes et le souffle de modernité que le monarque avait apporté sur son royaume. Hoseok avait toujours trouvé cela absurde, soit dit en passant : le peuple mangeait à sa faim et aimait leur roi, si on en croyait les fleurs qu'ils jetaient sur son passage lorsqu'il arrivait à cheval dans les cités. Ce n'était de la part des détraqueurs qu'une faible excuse dans la guerre la plus sanglante de toute – la guerre de la conquête du pouvoir.

Alors, triomphant, il se délectait une dernière fois de leurs promesses, de leurs supplications de miséricorde et de leurs corps rampants à ses pieds. Sadique, oui, peut-être, mais le souverain avait pour certains le défaut d'avoir un grand cœur, et il tenait à rappeler à ceux qui voulaient s'emparer du trône qu'il n'était pas empreint de la naïveté qu'on attribuait à son nombre de printemps. Ce n'était qu'un homme comme les autres, après tout ; et le fait de savoir que l'on avait le pouvoir de vie ou de mort sur un sujet était empreint d'une certaine jouissance.

Ses pensées furent tirées par les sanglots hideux de l'enchaîné, les mains jointes dans une dernière prière que tous savaient vaine :

« Pitié, Sire, mon roi, votre Majesté, bégaya-t-il, pardonnez-moi ; j'ai été conquis par des fausses promesses, je vous promets que mon dévouement envers vous n'en sera que plus ardent si vous me donnez, dans votre infime bonté, une seconde chance, je–

Et, avec plus de force qu'estimaient les gardes, il se jeta aux pieds du roi, dans un signe de soumission et de dernière chance, hoquetant quelques implorations sur les souliers royaux, mais Hoseok n'en avait cure. Cette comédie avait assez duré. Yoongi avait beau avoir un sourire en coin face à cet acte désespéré, un sourcil haussé attendant de voir la prochaine action, appréciant le spectacle d'un homme qui se savait déjà condamné, mais il y avait quelque chose d'excédant dans la façon dont il ne semblait partager la même haine que son Général. Alors, dans un mouvement souple et instinctif, après des années à s'entraîner, le guerrier sortit son long sabre de son fourreau et, dans un éclair argenté, coupa la main sale et traître du Chambellan, accrochée aux robes du souverain.

« Ne le touche pas avec tes mains pécheresses, cracha Hoseok, couvrant le cri de douleur de l'homme, ses yeux écarquillés d'horreur à la vue du sang.

Yoongi soupira, alors que les deux soldats se précipitaient vers le nouvellement infirme pour le tirer en arrière. Un peu déçu, presque, que cette distraction touche déjà à sa fin.

« Il mourra demain sur la grande place. Qu'on lui pose la Question* [torture sous l'Ancien Régime] pour qu'il nous dévoile ses complices. Et envoyez un crieur public ; je veux que tout le monde voie ce misérable mourir. Sûrement que cela en dissuadera quelques-uns de tenter un tel dessein.

Et, d'un autre mouvement de main, il ordonna aux autres serviteurs présents dans la salle du trône de déguerpir, exceptions faite des gardes qui surveillaient la porte ; tous, donc, sauf Hoseok. En train de nettoyer sa lame ensanglantée, il n'avait pas eu besoin de lever la tête pour savoir que le roi le voulait encore un peu à ses côtés – faisant taire son cœur qui ne pouvait que rater un battement à cette pensée. Après toutes ces années passées à ses côtés, quand il n'était encore un prince à qui on promettait le sceptre et le globe, il avait appris à décrypter ses silences et comprendre les mots jamais prononcés.

« Tu ne pouvais vraiment pas t'en empêcher, n'est-ce pas ? commença le noiraud d'un ton moqueur, le tutoiement plus facile, alors qu'il se levait de son siège pour se diriger vers une petite table, où étaient disposés sur un plateau d'argent coupe de fruit et vin de vigne. Il aurait très bien pu demander à l'un de ses domestiques de lui en servir un peu, mais il aimait pouvoir parler à son commandant des armées seul à seul, parfois.

« Non, Sire, répondit Hoseok avec un rictus en coin en rangeant son sabre, qui s'agrandit quand Yoongi se tourna, le bas de ses robes sanguinolentes, pour lui offrir une coupe de vin à son tour.

D'une certaine façon, heureusement qu'ils étaient seuls, dans cette grande salle au sol de marbre et aux lustres imposants – il y avait bien les gardes, mais c'étaient des hommes entraînés à rien et tout voir à la fois ; ils tiendraient leur langue –; car jamais un roi ne s'était permis de donner à boire à ses hommes, aussi fidèle et loyal était-il. Mais cela avait toujours été ainsi, entre eux.

« Et maintenant, j'ai une main à mes pieds, et– Dieu, Hoseok, c'était la soie la plus fine du royaume.

Le brun eut au moins la décence de paraître gêné, au moins un cours instant, face au grommellement de son empereur ; mais son rictus moqueur trahit vite l'amusement qu'il ressentait :

« Vous ne pouviez décemment attendre de moi à ce que je reste impassible face à cette situation. Cet homme vous avait trahi, mon roi ; il était de mon devoir de le lui faire payer.

« Je sais, Général, soupira Yoongi alors que, s'approchant de la fenêtre, il laissa son regard traîner le long des jardins, où les hommes s'activaient pour tailler une haie dans une forme fantaisiste. La rébellion se fait de plus en plus intense dans le sud du royaume ; je crains que les insurgés arrivent au Palais plus tôt que prévus. Ils sont peut-être déjà dans les couloirs du château, et je compte sur toi, Général, pour avoir l'œil alerte.

Hoseok pencha légèrement la tête et apporta sa main libre à son cœur :

« Toujours, votre Honneur ; et il releva les yeux juste à temps pour voir Yoongi, flanqué de ses gardes, passer devant lui pour sortir devant la grande porte, ne laissant traîner derrière lui qu'un parfum de musc et de bougies.

Un parfum entêtant qui empêchait Hoseok de dormir la nuit, parfois, et qui peuplait toujours ses rêves. 

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Plus tard, la légende dirait qu'il y avait une prophétie autour de la vie du roi Yoongi II. Planant au-dessus de son règne comme un vautour affamé, l'ombre de ses ailes noires et poisseuses essayant tant bien que mal d'entacher sa couronne. Les historiens n'y verraient qu'un conte pour enfant, chuchoter à la lumière d'une bougie à l'heure du coucher, quand ces chères têtes blondes demanderaient à leur mère comment était leur souverain. Peut-être que cette histoire traverserait les époques et les océans, suscitant l'imagination des plus hardis des hommes, berçant les âmes poétiques, même au milieu du désert aride d'Arabie, même en haut des montagnes gelées de l'Altaï.

Le roi lui-même était au courant des murmures qui couraient sur lui ; que cela agrémente le mystère autour de lui ou que cela fasse trembler de peur ses ennemis, il n'en avait que faire. Lui préférait en sourire, de ce mauvais sort qu'une sorcière avait dû jeter au-dessus de son berceau quand il n'était encore qu'un nourrisson, traçant pour lui la destinée qui serait la sienne. Quelle serait la face du monde si cela avait été un esprit clément, il n'avait pas envie de l'imaginer.

Car la prophétie disait que la vie du noiraud était intimement liée au mariage du sang et de l'eau. A l'hémoglobine qui se dissipait dans le courant clair, provoquant des émotions mélangées et parfois même contradictoires – la peur, la fascination, la crainte, le désarroi, l'incompréhension. Laissant les bonnes femmes prier les dieux de leur clémence pour le peuple d'ici-bas, et laissant les hommes jurer et empoigner leurs armes, à la quête des quelques démons qui pourraient roder sur leurs terres.

Le sang et l'eau, le bien et le mal, l'obscur et le clair, un paradoxe, un paroxysme, un oxymore qui était venu rythmer la vie de Yoongi comme le froid marque la fin de l'été.

Le sang et l'eau, quand sa mère lui avait donné la vie, plongée jusqu'à la taille dans un ruisseau au beau milieu de la forêt lors d'une promenade à cheval, aidée par ses servantes pour mettre le jeune prince au monde, ses premiers cris effrayant les montures et faisant s'envoler les oiseaux de peur.
Le sang et l'eau, quand son père avait péri dans la Grande Bataille contre les Barbares de l'Ouest, la pluie ardente et aveuglante diluant le vermeil qui ornait son visage figé à jamais.
Le sang et l'eau quand Yoongi avait rencontré Hoseok pour la première fois ; ce-dernier s'approchant trop prêt du noiraud pour tuer l'assassin dans le dos du prince lors d'un banquet mondain, et le jeune seigneur lui jetant sa coupe à la figure sous le coup de la surprise – mais cette histoire était pour une autre fois.

Comme tout bon souverain qui voulait s'attirer la grâce des divinités puissantes, régnant dans les cieux qui couvraient leurs têtes, Yoongi avait bien entendu l'habitude d'écouter les prédictions des prêtes et chamans. Mais c'était, comme la plupart des vils personnages qui peuplaient le Palais, des êtres empreints d'ambition et de désirs fourbes : laissant leur langue, appâtée par l'avidité, prononcer des clairvoyances erronées et corrompues. Le roi n'était pas dupe ; il savait que ces hommes-là avaient profité de cette rumeur de prophétie pour voir des signes nulle part et partout à la fois, voulant lui forcer la main pour engager son armée, pour lever l'impôt, pour prendre une quelconque décision politique.

Mais Yoongi, son père le lui avait longtemps reproché, avait l'esprit d'un cheval sauvage. Chaque décision était pensée par lui, et non forcée par la peur de représailles divines et mystiques, comme le promettaient les charlatans qui venaient lui prédire son avenir. Petit, sa mère s'était enamourée de sa tête dure et de sa détermination ; quand elle lui avait dit adieu pour la dernière fois, il lui avait promis, sur son lit de mort et les larmes plein les yeux, qu'il allait tout faire pour rester ce petit garçon qu'elle avait tant aimé.

Aujourd'hui, pourtant, le noiraud était un homme, et avait à ses pieds tout un royaume, s'étendant des contrées gelées du nord aux vagues lascives du sud. Il n'avait plus l'innocence d'une jeunesse préservée et naïve dans les yeux, mais avait su garder sa promesse. Il était roi, il y avait cette prophétie, et il était seul.

Un souverain seul entouré de gens qui ne voulaient que servir leurs propres desseins, et non celui de la Couronne, leurs langues de vipères diluant leurs venins de la plus ignoble des façons. Mais parmi cette foule de visages sombres, il y en avait bien un qui ressortait, brillant de bonté et d'affection. Un visage qu'il pourrait suivre même dans les plus profonds ténèbres.

Ce visage-là, c'était celui d'un certain Général.

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La rébellion faisait rage. Un bastion du sud était déjà tombé entre les mains d'assoiffés du pouvoir, ceux qui reprochait que la gouvernance d'une main de fer du roi était peut-être trop ferme ; les mêmes qui souhaitaient le voir destitué, persuadé qu'ils feraient un meilleur souverain s'ils montaient sur le trône. Le Chambellan n'avait avoué, qu'à demi-mot, que le chef de toute cette agitation ne serait nul autre que l'un des frères de Yoongi, un fils illégitime qui avait grandi dans l'ombre de son père, galvanisé par les promesses de sa concubine de mère qu'un jour, le diadème royal se poserait sur sa tête – et le noiraud avait fait arrêter tous ses frères et les avaient enfermés dans leurs quartiers en guise de représailles, le temps qu'il comprenne réellement l'ampleur de cette révolte.

Mais les partisans et les hommes de mains de ces galvaniseurs de changement n'avaient été que peu émus de voir leurs leaders politiques mis à mal. En réponse, ils avaient pris d'assaut la Citadelle du Sud, contrôlant tout le conté, un des plus importants économiquement, stratégiquement, et politiquement; et si personne ne les arrêtait avant qu'il ne soit trop tard, la gangrène arriverait jusqu'aux portes du Palais en rien de temps, aussi rapide et fatale qu'une traînée de poudre.

Hoseok, en tant que Premier Général et Commandant des Armées, se devait de répondre par la force. Il avait toute une garnison d'hommes prêts à combattre dans le comté voisin, mais face à l'ampleur de cette insurrection, ils se seraient sûrement pas assez ; il se devait alors de conduire l'armée royale pour mater les rebelles, ou les conséquences seraient bien pire que prévu.

« Non, répéta Yoongi, les mains dans le dos et un froncement de sourcil déplaisant sur son si beau visage, faisant les cent pas devant son trône, ne pouvant rester en place.

Quelle ironie, vraiment, quand il y a une ou deux semaines à peine, Hoseok était à sa place, suppliant son monarque de tuer le traître pleurnichant à ses pieds. Que les choses avaient changé, à présent.

« Sire, je dois y aller.

« Tu dois rester, contrecarra le souverain, l'exaspération déjà présente dans sa voix. Il n'y a aucune raison de s'affoler pour une révolte de paysans.

« Les traîtres ont investi le Palais. Vous savez tout aussi bien que moi que si nous ne les arrêtons pas tout de suite, ils se propageront comme une épidémie ; et bientôt, le peuple se joindra à leur cause également. C'est pour cela que je me dois de partir.

Yoongi soupira d'indignation, avant de se tourner de nouveau vers son serviteur et de se remettre à marcher de long en large. Le brun n'aimait pas quand la colère du souverain était dirigée contre lui ; personne, en réalité, mais Hoseok était particulièrement affecté par cela, bien qu'il essayât de le camoufler le plus que possible. Il avait toujours l'espoir que la relation qu'il entretenait avec la tête couronnée était un peu plus spéciale, un peu plus particulière que celle que le roi avait avec ses autres conseillers ; et le fait d'être l'objet de son courroux et de sa contrariété montrait qu'il avait failli dans son devoir – celui de ne jamais décevoir son maître. Serrant la mâchoire face à sa propre déception, il écouta le noiraud reprendre :

« Et le palais, justement, parlons-en ? Qu'en est-il de ma protection ?

« Je laisse mes meilleurs hommes ici en fraction, Sire.

Le Prince n'avait pas l'air tout à fait convaincu, et avec une lueur qu'Hoseok ne voulait pas comprendre, il lui dit, plus bas mais avec la même intensité :

« D'autres hommes sont aussi qualifiés que toi.

« Peut-être, mais je ne veux pas confier à l'un de mes hommes une telle responsabilité. Je crains ne jamais me le pardonner s'il arrivait quelque chose à l'un d'entre eux. Il est important pour le moral des troupes que leur chef parte sur le front avec eux.

Peut-être n'aurait-il dû dire cela, puisque, le ton changea :

« Des hommes assez qualifiés pour protéger ton roi, mais pas pour s'occuper des rebelles ? s'indigna Yoongi en tourbillonnant de nouveau, la rage faisant palpiter le sang dans ses tempes, et faisant grincer les serviteurs présents des dents.

« Votre Grâce –

« Obéissez aux ordres, Général.

La consigne claqua dans l'air comme un fouet sur le dos d'un esclave, et c'était tout juste si Hoseok ne ressentait pas la même douleur physique – pas sur sa peau, non, mais plus profondément, dans son cœur. Mais de la même façon qu'il aimait son souverain, il ne pouvait faire marche arrière. Y aller était la seule solution, pour maintenir l'équilibre et la paix dans le royaume ; s'il ne s'y rendait pas, même pour faire plaisir à Yoongi, alors le destin de la couronne serait encore plus instable. S'il ne partait pas, la gangrène de la révolte dévorerait les pierres précieuses de la Couronne – il ne pouvait se le permettre.

"Je suis navré, Sire, mais en tant que Commandant des Armées, il est de mon devoir de rester ferme sur ce sujet.

"Je suis ton roi ! cria Yoongi en lui faisant face, les visages seulement à quelques centimètres l'un de l'autre.

Il pouvait sentir le souffle erratique du monarque contre ses lèvres, et pouvait lire l'étincelle qui pétillait au fond de ses prunelles. Une de celles qui n'étaient pas plaisantes ; une de fureur, de détermination, et d'indignation, peut-être, aussi. Yoongi était d'habitude d'une aura si calme, si glaciale – alors le voir dans un tel état par sa faute lui faisait plus mal que de raison. Déglutissant le plus discrètement possible, le brun posa un genou à terre et baissa la tête, en signe de soumission ; avant de dire, le plus calmement possible :

« Vous l'êtes ; et c'est pour cela que je dois de partir. Relevant les yeux vers le noiraud, il ajouta : Vous savez que je vous protégerai de ma propre vie.

Il y eut un silence. Un long silence, pesant, qui rendait inconfortable les membres du conseil présents, tant le regard échangé entre les deux hommes était d'une intensité rare. Dieu seul sait ce qu'ils se racontaient à travers leurs orbes, et eux-mêmes ne saurait dire si l'autre avait réellement compris le message de son interlocuteur.

Ne pars pas.
Je dois y aller.
Reste auprès de moi.
Je reviendrai.
Promets-moi que tu seras prudent.
Toujours, Votre Grâce.

« Je le sais, Général ; et c'est justement ce qui m'inquiète.

Et leur contact visuel se coupa brutalement alors que, d'un mouvement de cape, Yoongi sortit de la grande salle sans un mot, laissant Hoseok, toujours courbé, soupirant et se demandant quel sera leur futur. 

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Sûrement que la bataille serait contée dans les livres d'histoires. Sûrement que les survivants raconteront à leur petits-enfants la façon dont la Garde Royale du Roi Yoongi II avait repoussé les rebelles avec zèle ; sûrement vanteront-ils la bravoure et le courage parfois inconscient de leur Général. Peut-être, lorsque le brun serait de retour au Palais, que le roi demanderait aux peintres les plus talentueux de graver dans la toile et dans les mémoires cet victoire glorieuse.

Les forces rebelles n'était pas faibles, en aucune façon ; mais elles n'avaient pas la structure et la discipline qu'Hoseok faisait régner au sein de son armée, et il avait bien l'intention d'exploiter cette faiblesse avant de faire exploser leur insurrection de l'intérieur, comme une supernova, comme une météorite. Ce n'était en rien de l'orgueil de sa part ; il avait passé des mois, parfois des années, à former ses hommes à une rigoureuse gouverne. Aujourd'hui, cela portait ses fruits.

La bataille dura un jour et une nuit ; et au petit matin du jour suivant, Hoseok, le visage maculé par le sang brun de ses ennemis, combattait encore contre quelques survivants trop fous ou trop désespérés qui cherchaient encore à le vaincre. Par chance, il n'avait été blessé, ou du moins pas gravement, si on faisait exception de la large plaie à son flanc ; une coupure à la pommette, quelques coups superficiels portés sur ses membres. Il y était habitué ; quel militaire ferait-il s'il avait peur de se blesser, voire même de mourir, pour ses hommes, pour son royaume, pour son roi ? Les dents serrées, il s'était répété cette pensée encore et encore, alors que les ennemis arrivaient plus nombreux encore.

Quand le soleil montra quelques timides rayons au bout de l'horizon, tout ce qu'il éclaira n'était qu'un champ de bataille. Les corps encore tièdes gisaient sans vie sur le sol, noyés dans leur propre sang, les flèches plantées impitoyablement dans leur dos. La fumée des poudres à canon avait du mal à se dissiper, plongeant les ruines de la bataille et le fondement de leur victoire dans un brouillard trouble et mystérieux. Claquant dans le vent, quelques drapeaux à moitié déchirés.

Hoseok, au milieu de tout cela, les cheveux lui collant aux fronts par une sueur assombrie par la suie et la boue, le visage décorée de perles de sang, ne put que fermer les yeux et apprécier la douce caresse de repos et du petit matin se glisser sur ses traits repus. Laissa l'astre royal effleurer ses joues creusées et ses cernes, ses membres tremblant par la retombée d'adrénaline, sa cuirasse cabossée par les coups de sabots et d'épée.

Il était vivant.

Même lorsqu'on est le Général de l'Armée la plus puissante de ces basses-terres, et même si l'on se moquait de la Mort et de son arrivée imprévisible, le jeune homme avait toujours mit un point d'honneur à remercier les cieux de l'avoir épargné. Certains diraient que sa survie n'était que dû à ses capacités sur le champ de bataille, mais gracier les divinités pour leur clémence était toujours bon à prendre. Il l'avait bien vu de ses propres yeux, au Palais, que l'arrogance des hommes n'était pas toujours un gage de sûreté. La richesse, l'influence, les draperies tissées d'or et les mets les plus fins n'empêchait pas la Déesse de la Nuit emporter les pauvres âmes vaines dans son royaume, au-delà des terres, n'en déplaise à la noblesse opulente et arrogante du royaume – qui n'avait, d'ailleurs, de noble que son nom.

Lorsqu'il se rendit au campement, fourbu et las, les muscles manquant de céder d'un moment à l'autre, ce fut avec surprise et satisfaction qu'il prit la pomme qu'une fillette du village voisin lui tendait, un peu rougissante. Le peuple, au-delà de soutenir avec ferveur l'un des camps, était surtout soulagé de voir que les combats avaient cessé ; au loin, au milieu des ruines, certains s'activaient déjà à emporter les cadavres et à préparer les rites funéraires. Ce n'était pas parce qu'on était un rebelle et un traître que l'on n'avait pas le droit aux coutumes qui l'accompagnerait de l'Autre-Côté.

A l'entrée de sa tente, gardée par deux soldats à l'œil vif, se tenait le Colonel Kim Taehyung, fier dans son plastron royal, une égratignure fâcheuse au-dessus de son arcade sourcilière et le sourire victorieux qu'il abordait toujours quand le clairon sonnait la fin des combats. Son sabre était sagement rangé à ses côtés, et seul les dieux pouvaient savoir combien de gorges cette lame avait tranché – à eux deux, sûrement qu'ils auraient pu mettre à mal une bonne partie de leurs adversaires. C'était un cavalier redoutable, que les femmes admiraient avec passion lors des joutes et des tournois que le Palais tenait régulièrement pour montrer à tous le talent de son Armée ; un vertueux stratège, un éminent fauconnier, et un excellent archer de surcroit, et Hoseok se félicitait tous les jours de l'avoir nommé à la tête de leur cavalerie.

« Félicitations pour cette victoire, Général, dit-il avec un sourire en coin, son casque sous le bras, suivant son aîné lorsque celui-ci laissa claquer les pans de la tente derrière lui.

Avec un soupir, il tendit son casque, dont la plume rouge et élégante avait été coupée en deux, ainsi que le sabre à un jeune serviteur, de seulement une quinzaine d'années, et, avec un grincement de dents ou deux, ôta tant bien que mal l'armure qu'il portait sur ses épaules. La blessure qu'il avait eu au flanc devait être sûrement plus grave que ce à quoi il pensait ; quand son cheval avait été tué par les flèches ennemies, bien que désorganisées et ne touchant que rarement leur cible, un fantassin du camp d'en face en avait profité pour planter son poignard entre les écartements de son plastron, alors que ses jambes étaient encore retenues prisonnières sous le corps lourd et encore chaud de son destrier. Un coup de lame, fendant l'air, avait suffit pour que l'insolent tombe à terre, les yeux vides de vie.

« Combien de pertes ? demanda-t-il en saisissant un tissu propre, le froncement de sourcil fâcheux sur son front.

« Seulement une cinquantaine, Général. Beaucoup plus dans l'autre camp.

50 hommes tombés au combat était un ratio raisonnable pour une bataille de cette envergure. Il détestait que tous les soldats combattant ne puisse revenir, vainqueurs, à ses côtés, pour embrasser leurs femmes et leurs enfants. Il avait une sorte de responsabilité envers eux, et assistait, dès que possible, à leurs rites funéraires – il se le devait bien, et s'il était autant respecté par ses hommes que par les conseillers du roi, c'était justement pour son sens de l'honneur. Il s'assurait qu'à son retour ils soient érigés en héros, morts pour sauver le royaume et la couronne de leur souverain. Mais, n'en déplaise à ses émotions qu'il devait garder sous contrôle, sa raison lui murmurait que les pertes n'avaient pas été trop lourdes ; c'était également une sorte de petite victoire en soi.

« Assure-toi que les corps seront remis à leur famille comme il se doit. Et les blessés ?

« Ils sont déjà entre les mains des soigneurs.

En traversant le camp, il avait vu quelques tentes blanches érigées un peu plus loin, s'occupant des conséquences que les lames adverses avaient provoquées. Pressant le linge contre sa peau, devenant rapidement carmin sous la vilaine égratignure qu'il avait reçu, il ajouta.

« Bien. Nous levrons le camp demain matin ; même si je veux partir le plus rapidement possible, je ne peux leur dénier un peu de repos.

Même s'il était irritant pour lui de ne pas partir dès maintenant en direction du Palais, et de retrouver un certain sourire, il serait imprudent et irrationnel de sa part de demander à ses hommes de se mettre tout de suite en route. Bien que gagnants, le moral n'était pas toujours bon quand on annonçait qu'il fallait encore marcher trois ou quatre jours jusqu'à la cité impériale. Alors, quand le Colonel Taehyung partit quand le soleil commença à décliner, après de longues heures à parler de stratégie, et après avoir fait envoyer par pigeon voyageur une missive en direction du Palais pour informer le Roi Yoongi II de leur victoire écrasante, Hoseok ne fit pas long feu et partit dormir. Il fallut très peu de temps pour que le sommeil ne vienne le cueillir dans son tendre cocon, les muscles épuisés et l'adrénaline ayant tiré toute énergie qui lui restait.

Et puis, quelque chose le réveilla – un rêve, sûrement, ou du moins, ses fumeux vestiges. Il ne saurait vraiment dire ce que c'était, mais, quand il se réveilla en semi-sursaut, encore un peu groggy des quelques heures à dormir comme une masse, il lui semblait qu'il s'agissait d'une paire d'yeux, bien qu'il ne fût pas certain de savoir à qui elles appartenaient. Mais son plaisant repos ne revint pas, et, enfilant ses bottes au pied de son lit de camp de fortune, décida de prendre un peu l'air frais.

Il retrouva deux des hommes qui étaient censés garder l'entrée de sa tente endormis contre leurs lances, leurs casques tombant devant leurs yeux et des bouteilles vides, venant probablement du village, à leurs pieds. Hoseok retint un grognement, et, après avoir mémorisé leurs visages pour une punition future, les réveilla d'un coup de botte hargneux – quand ils réalisèrent qui les avait tirés de leurs précieux sommeil, leurs visages semblèrent comme drainés de toute couleur.

Hoseok, soupirant une nouvelle fois, s'aventura en direction du petit bois non loin du camp ; sûrement que la fraîcheur des arbres et le gargouillis du ruisseau qui serpentait non loin sauront apaiser un tant soit peu son cœur, et cette étrange sensation qui le suivait depuis qu'il était réveillé. Il se demandait comment réagirait le roi quand il aurait enfin la missive. S'il serait toujours aussi furieux après lui d'être parti en dépit de ses ordres. Si ses frères qu'il avait fait enfermés avaient enfin parlé, enfin avoué les terribles desseins qui complotaient contre lui – Yoongi n'était peut-être pas le meilleur souverain que le royaume avait pu voir, mais au moins n'était-il pas le pire non plus ; et, quand bien même, il ne méritait pas un tel traitement de ceux du même sang de lui.

Et la nuit était trop calme.

Soudain, une présence derrière lui, pesante et agressive, et Hoseok fut rapide à sortir le poignard qu'il gardait toujours sur lui, la lame aussi longue que son avant-bras et aussi tranchante que du verre. Tout se passa très vite, trop, peut-être, pour comprendre ce qu'il se passait réellement : deux hommes, puis trois, se matérialisant devant lui. Le contact d'un sabre contre son long couteau, le crissement des fers l'un contre l'autre, un coup dans le vide, son poignard tournoyant dans ses mains, mais ne rencontrant que du tissu et du plastron, et non de la peau.

Un homme essayant de retenir son bras, un coup de coude dans son visage et du liquide poisseux coulant le long de sa peau quand il tituba loin de lui. Les attaques de ses mystérieux agresseurs beaucoup trop persistantes et insistantes à son goût pour garder une marge confortable entre eux et lui – il connaissait le poids de son fidèle sabre beaucoup mieux que l'arme qu'il avait dans la main, mais, grinçant des dents, s'efforça à les repousser le plus loin de lui possible. L'adrénaline tambourinait avec force dans ses tempes, et bien qu'il y eût un côté passablement et paradoxalement agréable lorsqu'il ressentait de telles émotions sur le champ de bataille, à présent, fatigué de la bataille, il y avait quelque chose de plus dangereux et de plus effréné, à présent, le poussant à rester toujours plus sur ses gardes.

Par hasard, sûrement, l'un des deux restants fut coupé au niveau de sa main, lâchant son long couteau dans un grognement. Quelques échanges houleux entre le survivant, Hoseok sentant déjà la fatigue dans ses muscles reprendre possession de lui, la noirceur des bois jouant en son désavantage ; ces mystérieux hommes devaient être tapis depuis plus longtemps que lui dans la pénombre, et par conséquent, plus habitués aux formes sombres autour d'eux.

Il rencontra un arbre, et grognant, roula jusqu'au bord du lit du ruisseau, le poids de son adversaire presque immédiatement au-dessus de lui, maintenant fermement sa main armée contre le sol d'humus, stabilisant le jeune homme.

« Fais tes prières, Général ; car aujourd'hui est le jour où tu mourras pour la cause du peuple.

« Traître, cracha Hoseok à sa figure.

Et, d'un coup de genou bien placé, déstabilisé par le crachat qui l'aveugla momentanément, le brun réussit à faire basculer son adversaire au-dessus de lui et d'inverser les rapports de force.

Mais, au moment où il trancha de sa lame la gorge de son prétendu assassin fût également l'instant où il sentit la lame de l'homme sous lui s'enfoncer dans son flan blessé ; un grognement de douleur, un dernier coup pour s'assurer que l'inconnu était bel et bien mort, et puis :

« Seuls les dieux ont ce pouvoir sur moi.

Et les tentacules sombres de l'inconscience vinrent le tirer dans leur poisseux royaume, alors que la fatigue, l'adrénaline et la douleur avaient enfin raison de lui.

La prophétie ne parlait-elle pas du mariage du sang dans l'eau ?

--- 

Quand Hoseok n'était que Lieutenant, Yoongi lui avait fait promettre de toujours revenir en vie du champ de bataille. De toujours lui revenir, avait été le message dissimulé sous ses mots. Parce que le jeune homme savait parfaitement que ce n'était pas un ordre, que ce n'était pas simplement le souverain qui s'inquiétait pour son plus proche conseiller. L'amitié qu'ils avaient construits il y a deçà quelques printemps avait pris un tournant complètement différent, alors que, sous les hospices des dieux, le jeune homme lui avait fait la promesse du sang de toujours veiller sur lui, et de toujours lui revenir. Une telle promesse ne saurait être prise à la légère ; certains mythes disaient que dès lors qu'on trahissait le vœu qu'on avait formulé en se tranchant la main d'une lame pure et vierge, le mal s'abattait sur terre, et le malheureux ne pouvait qu'assister, impuissant, à la perte de son âme et de ceux qu'il aimait. D'autres murmuraient que la mort serait certainement plus douce que de trahir un serment de ce genre, et le roi l'avait bien compris.

Je pourrais mourir pour vous.

Sans doute que Yoongi l'aurait traité de fou, s'il n'avait pas lu la détermination qu'il y avait dans ses yeux, l'étincelle ô que trop brillante qui chatoyait au fond de ses prunelles quand il lui s'était courbé en sa direction, la main sur le cœur. Il n'avait pas besoin de se rappeler cet engagement ; c'était inutile, puisque tout ce à quoi il aspirait, c'était de retourner au Palais auprès de son roi après des jours, parfois des semaines ou plus, et de trouver enfin un peu de repos dans les lignes de son sourire.

Reviens-moi, Général.

Quand il se réveilla, en sursaut, la douleur trop lancinante pour le laisser inconscient encore longtemps, il n'avait plus les jambes trempant dans le ruisseau qui côtoyait le camp. La voix du noiraud faisait encore écho dans son esprit, et sûrement que le rêve fiévreux l'avait réveillé de son inconscience. Il mit un certain temps à se remettre de ses émotions, de chasser la noirceur qui peuplait encore ses paupières, pour réaliser qu'il était en mouvement. Et à dos de cheval, allongé sur une scelle et la tête reposant le long de l'encolure de la bête, fermement attaché pour éviter qu'il glisse. C'était une méthode de transport peu conventionnelle, les blessés voyageant généralement sur des brancards tirés par des chevaux ou par des attelages, mais, si on en croyait les sangles qui le maintenait en place et la chaude couverture au-dessus de lui, ce n'était certainement pas des forces ennemies qui l'avait retrouvé.

« Que— grogna-t-il.

« Du calme, mon Général, tu es dans un sale état.

L'interpellé mit du temps à cligner des yeux et à comprendre ce qu'il se passait, avant de voir, à sa droite, le profil du Colonel Kim, le regardant intensément et avec un petit sourire.

« Tae-Taehyung ?

« Moi-même, mon Général.

Et par les dieux, Hoseok n'avait jamais été aussi soulagé de voir son rictus impertinent.

Ils avaient encore pour deux jours de voyage, moins, s'ils se dépêchaient, et s'arrêtèrent dans un village pour laisser leurs chevaux s'abreuver. Taehyung aida Hoseok à descendre de sa monture, et ils changèrent son pansement, pendant que le Colonel donnait à son supérieur quelques explications.

« Nous avons levé le camp à l'aube, comme tu avais prévu. Mais impossible de te retrouver. Nous avons retrouvé un homme non loin du ruisseau, et il y avait d'autres traces de pas également, alors nous avons supposé que les autres s'étaient enfuis. J'ai laissé le commandement de l'armée au Lieutenant Jeon, pendant que j'ai rebroussé chemin pour venir te chercher. Ils devraient être arrivés, à l'heure qu'il est.

« Je suis resté inconscient 2 jours ? grommela-t-il en se prenant la tête dans les mains.

« Tu as dérivé jusqu'à un village un peu plus au sud ; j'ai mis du temps à te retrouver. Un fermier venait juste de te découvrir quand je suis arrivé. Vu le sang que tu as perdu, ça ne m'étonne pas que tu sois resté dans un tel état aussi longtemps.

« Par les cieux, marmonna le jeune homme en mordant dans un morceau de pain que le blond lui offrit. Merci, Taehyung. Je ne sais comment te remercier.

« Je préférais ne pas retourner au Palais sans savoir ce qu'il était advenu de toi. Dieu sait ce qu'aurait fait le roi si tu n'étais pas rentré sain et sauf, répondit-il avec une certaine malice.

Hoseok releva la tête d'un mouvement brusque pour sonder les pupilles de son compagnon d'arme. Ils s'échangèrent un long regard, et Taehyung avait toujours été quelqu'un de très intelligent et de clairvoyant, de toute façon, anticipant les prochaines actions de leurs ennemis pour avoir au moins 2 coups d'avance. C'était l'une des nombreuses qualités que le brun admirait chez lui, alors il ne devait pas être autant surpris par cette révélation – tôt ou tard, il aurait compris l'animation de son Général pour leur souverain. Pourtant, la remarque qu'il s'attendait recevoir, probablement perspicace, ne vint pas ; à la place, son cadet posa la main sur son épaule, et, d'un sourire compatissant et plein de soutien, la pressa légèrement.

« Allez viens. Rentrons.

--- 

Ils arrivèrent au bout d'un jour, forçant leurs montures à redoubler d'intensité, traversant les grandes plaines. Fort heureusement, ils n'avaient pas à contourner les montagnes, un peu plus à l'ouest, ou sinon leur voyage se serait considérablement allongé.

Quand ils franchirent la porte de la Cité royale, la nuit était déjà tombée, laissant les flambeaux illuminer les ruelles qui menaient jusqu'au Palais comme des esprits les guidant à travers la pénombre. Les gardes de la Porte Sud les reconnurent aussitôt, les yeux écarquillés en voyant le piteux état de leur Général et la façon dont les cernes creusaient le visage du Colonel – la chevauchée avait été éprouvante, et même Taehyung était heureux d'être enfin de retour – et bien vite, ils se retrouvèrent devant le perron du château. Peut-être parce qu'il se savait près du but, mais la traversée de la ville était sûrement la plus longue et la plus pénible qu'il n'ait jamais connu. Hoseok descendit tant bien que mal de sa monture, grimaçant quand ses pieds touchèrent terre et se tenant le flan, et quand il releva la tête, il vit Yoongi, le roi, courir au travers des jardins, ses gardes à ses talons et ses robes agrippées dans ses poings. Quelle vision.

Les serviteurs s'arrêtèrent quelques pas avant, et Hoseok, après quelques pas douloureux en direction de son souverain, ne put que tomber à genoux, un masque d'inconfort peint sur ses traits ; puis deux mains, fraîches, qui relevèrent son visage.

« Sire, souffla-t-il.

« Hoseok, murmura le roi en retour, le soulagement plus que présent dans ses yeux.

Les yeux du Général étaient écarquillés de surprise ; quand était la dernière fois où le souverain l'avait appelé par son prénom ? Quand était la dernière fois qu'il avait senti ses mains sur son visage, sur sa peau, sur lui ? Tant de fois il l'avait rêvé ; était-ce un autre songe, à présent ? Un défi que les dieux lui envoyaient pour tester sa loyauté et sa vigueur ? Que les cieux lui viennent en aide, parce qu'il n'était pas certain d'avoir la force mentale nécessaire pour ne pas être affecté par le toucher léger des mains de son roi sur ses joues. Et si l'on en croyait aux regards étranges que leur lançait l'assemblée, nul doute que d'autres que lui se posaient la même question.

« Tu es vivant, chuchota de nouveau le noiraud, scrutant son visage comme s'il ne l'avait pas vu depuis des années, comme voulant mémoriser le moindre trait.

« Je vous ai toujours promis que je vous reviendrais, mon Roi, dit le plus jeune, fermant un instant les yeux pour apprécier la chaleur des paumes contre ses joues fouettées par le vent et les intempéries.

La suite fut un peu brouillée, son esprit trop embrumé de se retrouver enfin auprès de lui. Il crut entendre des ordres, de la nourriture et un bain, des bandages et des vêtements propres ; avant de franchir une porte sous le regard étonné des serviteurs. Quand ils furent de nouveau seuls, le guerrier se rendit compte qu'il était dans les appartements privés du monarque, un bain à ses côtés, et Yoongi en face de lui. Il ne pouvait que s'imaginer l'incompréhension de la suite royale : pourquoi tiraient-ils le bain du Général dans les quartiers du Roi ?

« Tu es blessé.

Les paroles et la voix apaisante de son souverain, combiné à ses mains douces de nouveau sur son visage, le firent revenir à la réalité. Sûrement qu'il était en train d'examiner les coupures et écorchures qui décoraient sa peau, signes visibles des duretés qu'il avait enduré sur ce qui n'était plus qu'à présent qu'un champ de ruine – et si Yoongi continuait à le regarder de ces yeux-là, son cœur finirait probablement dans le même état. Le brun eut l'audace de prendre sa main dans une poigne lâche, rassurante, avant de sourire et de dire :

« Je vais bien, Majesté. Je suis navré de vous avoir causé autant de souci.

« Je crains, Hoseok, que je ne pourrais jamais cesser m'inquiéter pour toi, surtout quand tu disparais pendant aussi longtemps.

Il y eut un petit silence, un moment de battement où le Général laissa les mots s'imprégner dans son esprit. Son chuchotement avait fendu l'air calme de la salle de bain, et s'était frayé un chemin jusqu'à lui, jusqu'à son cœur, et Hoseok ne savait comment réagir. C'était peut-être bien la première fois qu'on se faisait autant de souci pour lui ; les autres partaient toujours du principe qu'en tant que Général, il était capable d'affronter toutes les peurs, tous les dangers. Et il en était capable ; mais le fait d'entendre son roi prendre de ses nouvelles et s'assurer que tout allait bien était une chose qui n'était comparable à rien d'autre.

« Un bain, murmura-t-il, et après tu prendras un peu de repos. Je ne peux imaginer à quel point ton retour a été éprouvant.

Il y avait une expression douce sur ses traits, quelque chose qu'il n'avait vu que de rares fois. Il était peu commun, en effet, qu'il aborde une telle expression dans la salle du trône, confronté à la trahison des siens, de ceux de son propre sang, et aux critiques amères et âpres de ceux qui se prétendaient être de son camp. La vie de la tête portant la couronne n'était pas de tout repos, et n'accordait que de tels moments de douceur ; et pourtant, alors qu'Hoseok venait de traverser le royaume tout entier, blessé, pour revoir l'auréole brune qui encadrait son visage, il était persuadé que c'était enfin le cas. Que le roi pût enfin s'accorder un sourire, même s'il n'était que pour lui – il lui volerait tous ses rictus, effacerait tous ses soupirs et ses peines, si cela signifiait qu'il fût toujours aussi radieux à ses côtés.

Sans vraiment remettre en question sa proposition d'un bain, qui pouvait presque s'apparenter à un ordre bienveillant, Hoseok se leva et tenta tant bien que mal de se défaire de ses bas ; mais ses doigts étaient encore engourdis pour avoir tant agrippé les rennes de son cheval.

« Laisse-moi faire, sourit le prince.

Et, comme dans un rêve, les mains de Yoongi, son roi, s'occupèrent de dénouer les lacets de son pantalon. Et, comme dans un rêve, sentit la pulpe de ses doigts caresser, comme une plume, son torse alors qu'il retirait sa chemise bouffante.

« Je vais guérir vite, Sire, dit-il alors que le bel éphèbe s'arrêta à la vue du bandage ensanglanté qu'il avait autour du torse.

« Je devrais faire appeler un médecin, répondit-il, sceptique.

« Plus tard, alors.

Et, comme dans un rêve, sentit son regard sur lui alors que, aussi vêtu que le jour de sa naissance, s'enfonça dans l'eau du bain.

Et puis, les mains du souverain sur ses épaules, massant légèrement le savon sur sa peau qu'il n'avait pas eu conscience d'avoir pris.

« Majesté, s-sûrement que quelqu'un d'autre—

« Laisses-moi prendre soin de toi, Général, après tout ce que tu as fait pour moi.

Le brun ne savait s'il devait rougir du compliment et de la marque d'affection de son souverain, ou s'il devait rougir de se retrouver en tenue d'Adam, en présence de son monarque, alors même qu'il proposait de le laver. De mémoire d'homme, jamais une tête couronnée n'avait rincé le dos de son Général, aussi loyal était-il, aussi nombreuses étaient ses victoires.

Pendant un moment, ils restèrent silencieux, le son de l'eau clapotant contre la grande bassine en bois, et le léger fredonnement de Yoongi, pendant que ce-dernier lui lavait les cheveux à l'aide d'une coupe en cuivre, ses doigts légers sur son crâne. Hoseok s'autorisa à fermer les yeux pendant un instant, appréciant le moment présent ; la bataille l'avait fourbu, le voyage retour effréné et blessé encore plus. Et là, le noiraud, son maître, son dieu, lui massait le scalp en humant une mélodie : était-il au Paradis ? Jamais il ne l'avait entendu chanter – il n'était pas sûr que lui-même s'autorisait ce genre d'écart – et pourtant il laissait l'allégresse que son Général lui soit revenu en vie s'imprégner dans son sourire.

« Dis-moi si je te fais mal, murmura-t-il alors que ses mains massèrent plus bas le torse finement dessiné de son chef de guerre.

Le sang séché se diluait à la surface de l'eau, créant des arabesques étranges et incompréhensibles, un peu hypnotisantes parmi les bulles de savon légères, parfumant la pièce de musc blanc, d'ambre, de roses des Indes et de miel d'Himalaya. Tant d'horreur et tant de douceur à la fois ; l'horreur de l'hémoglobine parasitait l'eau claire et pure, l'horreur des souvenirs d'Hoseok et la douceur dans le regard de son monarque quand il lui souriait. Et les manches en soie des robes royales, bien que remontées au-dessus de ses coudes, trempaient quand même dans ce mélange inquiétantes, les yeux fixés sur le visage de son général, alors que ses mains s'aventuraient, ambitieuses et curieuses, plus bas.

« Sire, souffla Hoseok en se tendant, alors que les doigts mutins continuaient leur exploration sous-marine vers le bas de son ventre, caressant du bout de sa pulpe l'intérieure de ses cuisses, comme si le souverain savait parfaitement les tourments qui lui causaient. Bien sûr, qu'il le savait, si on en croyait l'étincelle joueuse dans ses yeux, déterminée, aussi, alors qu'il lui murmura, se penchant vers son oreille :

« Détends-toi, Hoseok. Laisse ton roi s'occuper de toi.

Si le jeune éphèbe avait été maître de son esprit, sans doute lui aurait-il lancé une pique – « C'est un ordre ? » – pour détendre un tant soit peu l'atmosphère ; mais le regard fiévreux de son prince était posé sur ses lèvres, et ses manches, à présent trempées dans l'eau savonnées, remuaient au fur et à mesure de ses caresses légères et si entreprenantes sous l'eau.

« Ah—

Parce que la main royale, graciée par la Couronne et par les dieux, venait de se faufiler le long de sa verge, déjà à moitié éveillée sous ses gestes qui le rendaient tremblant.

« Sire—

« Dis mon nom, Hoseok.

« Je—

Il ferma les yeux et rejeta la tête en arrière, grisé par les sensations qui lui étaient offertes, ne comprenant vraiment à quel moment la situation lui avait échappé, à quel moment les sentiments qu'il avait pour son Prince étaient réciproques. Il savait que Yoongi tenait à lui, bien entendu ; mais, persuadé qu'un homme de son rang et de son envergure ne s'intéresserait pas à un guerrier comme lui, aussi hargneux et sans pitié était-il au combat, qu'il pensait que ses regards, ses sourires, ses messages à moitié cachés dans ses mots n'étaient que des preuves d'affection. Pas le genre d'affection qu'un homme pouvait avoir à l'égard d'un autre, en revanche, mais au moins Hoseok s'en contentait-il, chérissant ses rares rires et les lueurs pétillantes qu'il avait à son égard.

« Yoon—Yoongi...

« Viens pour ton roi, Général.

Et le brun n'eut pas besoin de se faire plus prier, jouissant dans un gémissement étouffé dans l'eau à présent sale du bain, la tête bourdonnant et la peau recouverte d'un millier de feux d'artifices.

Il y eut un moment de silence agréable, durant lequel Hoseok sortit du bain, et laissa le monarque le sécher de linge, avant de recouvrir avec soin sa blessure. Il enfila un de ses kimonos en soie d'Orient, décoré par les artisans les plus respectés de la ville et brodés d'or, et ne put que se sentir honoré de porter les robes de son Empereur.

« Viens, lui souffla-t-il contre ses lèvres en lui prenant la main, les yeux pétillants sous la lumière des bougies.

Bientôt, Hoseok s'allongea sur la couche royale, appréciant un moment la douceur des draps les plus raffinés qu'il pouvait exister. Il n'eut pas le temps de se sentir gêné de se retrouver dans une telle position, là, sur le lit du Roi, position que même les favorites n'osaient rêver – d'autres chambres étaient réservées à cet effet. Mais, de ce qu'il avait entendu, cela faisait bien longtemps que la tête couronnée ne se préoccupait plus de ses maîtresses ; et toutes ces questions, tous ces doutes, disparurent alors que, du coin de l'œil, le spectacle de Yoongi dénouant ses propres robes était comparable au plus exquis des songes érotiques.

« Yoongi, souffla-t-il alors que le noiraud grimpa au-dessus de lui sur la couche, incapable de prononcer autre chose que son nom maintenant qu'il en avait l'autorisation, maintenant qu'il avait ce goût sur sa langue.

Il aurait pu se sentir gêné, encore une fois, quand il réalisa enfin que son kimono était entrouvert sur son torse, laissant le regard gourmant du prince couler le long de sa peau, jusqu'à son entrejambe et son érection de nouveau naissante. Mais tout cela n'avait d'importance, vraiment ; surtout pas quand Yoongi se pressa, allongé au-dessus de lui, tout contre son cœur, son sexe entrant en contact, dans un soupir, avec le sien.

« Hoseok...

Et les baisers furent ardents, tout de suite, ne prenant pas le temps de découvrir, avec une certaine timidité, les lippes si tentantes de celui qui avait un pouvoir de vie et de mort sur lui. Il avait attendu trop longtemps pour cela, avaient rêvé trop de fois de cela, pour ressentir encore cette retenue qu'il s'imposait quand il s'agenouillait devant le trône. Sa langue était chaude sous la sienne, ses baisers, pleins de promesse ; sa peau, alors qu'il remontait les mains le long des cuisses, écartées de part et d'autre de chaque côté de son bassin, était aussi soyeuse que les pétales des roses qui poussaient dans la serre royale ; ses gémissements, encore trop silencieux à son goût, comparable aux chants des moineaux qui se posaient à sa fenêtre quand le jeune roi s'adonnait à un peu de lecture, dans l'un de ses salons privés. Combien de fois, jetant un regard comme un voleur à travers l'ouverture de la porte, avait-il admiré le corps de son monarque, allongé sur le petit canapé de velours carmin, les cils caressant ses joues et le livre reposant contre son ventre, alors qu'il s'était assoupi ? Combien de fois s'était-il imaginé l'avoir dans cette même position, sous lui, les yeux cette fois ourlé d'un désir alors qu'imaginaire et impossible ?

Et à présent, Hoseok avait tout le mal du monde de se convaincre que ce n'était pas un rêve, la façon dont son roi enroulait sa main autour de leurs deux membres, pressés l'un contre l'autre, pour appliquer des vas-et-viens qui les envoyaient tout droit vers une autre dimension.

Par les dieux, il aurait pu jouir tout de suite, quand il sentit la main de son aîné se faufiler jusqu'à sa propre antre pour se préparer, pressant son visage dans le cou de son amant pour y gémir et pour y embrasser la peau caramélisée par le soleil ; Hoseok ne pouvait qu'agripper la peau de ses fesses pour lui faciliter la tâche, pantelant presque autant que le noiraud et pressant des baisers fiévreux contre ses lèvres entrouvertes.

« Laisse-moi faire, tu es blessé... souffla Yoongi en se redressa, une main pressée contre le torse musclé du guerrier – de son guerrier – et l'autre agrippant sa verge, la peau tendue palpitant contre ses doigts divins, avant de s'empaler dessus dans un geste brusque.

Les gémissements étaient divins. Ses baisers étaient divins. Ses yeux noirs de plaisir et d'envie étaient divins. Les claquements de ses fesses contre ses hanches étaient divins. Son nom roulant sur sa langue était divin. Ses cheveux en bataille étaient divins. Ses ongles s'enfonçant dans la peau de ses épaules étaient divins. Ses muscles se serrant autour de lui étaient divins.

Il n'aurait pu s'imaginer ne serait-ce qu'autre chose à propos de lui, Yoongi, son roi, son amant. Ce moment semblait ne durer qu'une seconde et une éternité à la fois, le cerveau embrumé par la vision de pure concupiscence au-dessus de lui et des sensations délectables qu'il ressentait. Et quand, dans un râle rauque, le souverain vint décorer son bas-ventre de sa semence, il était tout aussi auguste, la même expression quand il était assis sur le trône, le globe et le sceptre dans la main ; pour enfin, avec un sourire rassasié et heureux, s'allonger de nouveau tout du long pour venir s'endormir contre son cœur, le visage enfoui dans son cou, les bras d'Hoseok l'entourant et le baignant dans un sentiment de sécurité.

Parce que tous ces rêves ne pouvaient rivaliser avec la sensation d'avoir, enfin, le corps de Yoongi contre le sien. 

---

« Ils ne vont pas apprécier, chuchota Yoongi entre deux baisers sur ses clavicules, baignant dans le soleil matinal qui jouait sur ses formes délicieuses.

« Qui ? demanda le brun, passant une main attendrie dans la chevelure corbeau et désordonnée de son roi.

Ce-dernier haussa des épaules, s'arrêtant un moment dans sa promesse de se remémorer les vallons de ses pectoraux de ses lèvres, pour plonger son regard en direction de son amant. Qu'il était encore difficile et irréel pour lui de pouvoir l'appeler ainsi. Amant.

« Tous. Mes frères, les conseillers, le peuple, la noblesse, qu'en sais-je. Mais cela n'a pas d'importance, ajouta-t-il, alors qu'Hoseok inversait leurs positions, déposant délicatement le corps de son souverain sur les couvertures pour venir à son tour le choyer de ses baisers.

« Je tuerai de mes propres mains tous ceux qui te souhaitent du mal, murmura le soldat en retour, les yeux clos et la langue dessinant des arabesques intrigantes contre sa peau.

« Je ne t'en demandes pas autant, ricana-t-il sous les chatouilles au niveau de ses côtes.

« Mais tu sais que je pourrais mourir pour toi, n'est-ce pas ? dit Hoseok plus sérieusement, approchant son visage du sien et plongeant son regard dans ses orbes charbons.

« Oui, souffla-t-il en écartant un peu les cuisses, laissant l'opportunité pour le guerrier de se loger entre elles.

« Et tu sais que je te reviendrais toujours ?

« Oui.

« Alors c'est tout ce qui importe, répondit Hoseok avec un sourire, avant de plonger en direction de ses lèvres. 

.

chose promise, chose due ! je sais que cela fait longtemps que je vous avais parlé de ce concept, et le calendrier de l'avent de YMASWELL m'a permis de le finir !! hésitez pas à aller jeter un coup d'oeil, il y a tout plein d'os de tout plein d'auteurs ultra talentueuses !! 

(et même si vous lisez ceci en plein été, who cares, allez checker ma liste de lecture "proud of that shit : collabs" pour le lien du recueil !!! )

qu'en avez vous pensé sinon ? j'ai plein d'idées de concepts qui vont arriver bientôt, donc stay tuned !!! ;)




ah, et je voulais finir sur ce fanart de @ hopamine_ sur twitter, qui représente vachement bien l'idée que je m'en faisais ;) 
(merci marion pour être ma fan n°1 et de m'envoyer des fanarts qui ressemblent à mes fics, jtm)

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