Chapitre 28 : Le Manoir Lestrange
Honte à moi pour ce retard, j’espère que vous vous souvenez de l’histoire. J’ai été accaparée ces temps ci avec la Black Series et mon roman, mais je n’ai pas l’intention d’abandonner In Æternum vive. J’aime trop Lucretia pour ça ;)
Bonne lecture ❤
L'Épouvantard de Narcissa avait suscité beaucoup de curiosité, mais heureusement, personne n’osa lui poser des questions. Evan avait eu besoin de plusieurs jours pour se remettre de l’Épouvantard de sa sœur, mais Lucretia mettait aussi la révélation de Rogue sur le coup. Avadys, cachait bien sa tristesse. Elle passait plus de temps avec la Préfète en Chef des Serdaigle, une certaine Luisa, ce qui lui permettait de retrouver le sourire pendant plusieurs heures.
Les vacances de Pâques arrivèrent à grands pas. Victoire répétait qu’elle allait pouvoir se goinfrer de chocolats, Lucretia plongeait peu à peu dans les pensées sombres, s’étant rendue compte qu’aucun de ses parents n’allaient l’attendre à la gare. Ce genre de vide l’emplissait et la mettait de mauvaise humeur. Elle se disait qu’ils étaient partis en voyage. Un long voyage.
La veille du départ, Evan voulut rester seul avec elle. Lucius et Rabastan avait déserté la chambre pour leur laisser un peu d’intimité. Aussi, elle entra sans même frapper. L’aîné Rosier l’attendait assis sur son lit, un demi sourire coincé entre ses lèvres.
— Bonsoir Princesse.
Cependant, Lucretia n’était pas d’humeur. Elle avait passé la journée à lutter contre les larmes et chercher comment remplir ce vide qui la hantait. Le Manoir allait être si vide. Chaque jour qu’elle avait passé là bas lui rappellerait les répliques légendaires de son père, ou les mots tendres de sa mère. Non, elle ne voulait pas retourner chez elle.
— Je... je suis fatiguée, dit-elle en restant devant la porte.
— Je sais que tu ne l’es pas. Tu penses à tes parents.
Était-ce aussi facile de lire dans ses pensées ? Elle haussa faiblement ses épaules.
— Un peu.
C’était un euphémisme, et il s’en rendit compte. Dans un soupir, il se décala et tapota la place vide du lit avec sa main. Lucretia ferma la porte et obéit.
— Si tu as besoin de quoi que ce soit, vient au Manoir, ok ? Tu es ma fiancée après tout, mon père sera heureux de t’accueillir.
Tout à coup, ses yeux se remplirent de larmes. Evan ne comprit pas la faute qu’il avait commise.
— Le mien ne me croyait pas quand je lui avais dit que je sortais avec toi, éclata-t-elle en sanglot. Il aurait été heureux de te connaître, tellement heureux.
— Eh, Princesse, te mets pas dans ces états.
Mais ses mots étaient vains. Lucretia était inconsolable. Elle qui avait l’habitude de se tenir droite et fière, luttant contre la douleur, la mort de ses parents l’avait détruite. Elle avait perdue l’envie de se battre. Lutter contre la douleur ou retenir ses larmes, tout simplement. Son avenir lui paraissait vide, tout comme son Manoir. Sa vie entière n’était qu’un immense appel du vide.
Evan s’accroupit face à elle et lui prit les mains, cherchant à attirer son attention. La voir ainsi l’emplissait d’effroi. Tout ce qu’il voulait était la protéger, et jusque là, il en avait été incapable.
— Regarde-moi.
Le contact visuel se créa, malgré les larmes qui leur faisait obstacle.
— La vie change. On perd des être chers, on perds l’amour, l’espoir, nous-même. On a l’impression de s’éparpiller en mille morceaux de chaque côté de l’univers. Mais ces morceaux ne disparaissent jamais vraiment. Ils reviennent. Et je te promets de les faire revenir le plus rapidement possible, de les rassembler un par un et de te les offrir. Parce que tu pourras tout perdre, mais pas moi. Pas moi.
Lucretia ferma les yeux et inspira lentement, laissant couler les dernières larmes. Evan cherchait un moindre signe de rétablissement, beaucoup plus inquiet qu’il n’y voulait paraître. Finalement, elle esquissa un sourire. C’était un sourire triste, mais un sourire quand même.
— Oui. Je sais.
Elle finit par s’endormir sur son lit, épuisée. Evan la regarda respirer doucement, songeant à tout ce qu’il était capable de faire pour l’aider. Mais il n’existait pas de potion magique pour ce genre de choses. Un cœur brisé n’était pas quelque chose qu’on pouvait réparer avec un simple sortilège. Pourtant, il aurait aimé que ce soit le cas.
Quelqu’un frappa à la porte. Rabastan entra, soulagé de voir dormir Lucretia et de ne pas les déranger dans une quelconque activité.
— Tu lui as dit ?
— Non, soupira l’aîné Rosier. Je me dis que, moins elle y pensera, mieux ce sera.
— Mais la prendre par surprise demain ne va pas non plus être une bonne solution.
— On le lui diras dans le train.
Rabastan voulut s’opposer, mais il n’avait pas droit au dernier mot. Déjà qu’Evan le regardait mal maintenant qu’il savait que sa fiancée allait passer les vacances chez lui, il ne voulait pas envenimer la situation. Il ressortit de la chambre et ferma la porte afin de leur laisser de l’intimité. Une fois retourné dans la Salle Commune, il se laissa tomber sur un fauteuil, épuisé. Il espérait pouvoir gagner son lit dans peu de temps.
— Alors ? s’enquit Lucius.
Rabastan secoua la tête. À côté, Narcissa poussa un soupir profond. Elle venait de mettre en image son humeur.
— Surprise pour demain.
— J’ai hâte de voir ma sœur faire la mère préoccupée.
— Le plus drôle reste mon frère, répliqua Lestrange. Bellatrix sait jouer la comédie, mais Rodolphus voit tout ça comme une mauvaise blague.
— Enfin, l’important est que le Ministère laisse ma sœur en paix. Une fois dans votre Manoir, elle y restera quelques jours et reviendra chez nous.
— Encore faut-il qu’elle survive à ces quelques jours.
Personne ne répliqua. C’était indéniable.
***
— Alors, comment t’expliquer.
Lucretia regarda par la fenêtre du compartiment la foule s’agiter, cherchant un quelconque indice du pourquoi on la retenait dans le train. Evan chercha à attirer son attention et claqua des doigts. Plusieurs fois.
— Evan, je ne suis pas ton chien !
— Alors arrête de regarder par cette fenêtre et écoute moi !
— Pourquoi Bellatrix est-elle déguisée en endeuillée ?
— Oh non, s’exaspéra Narcissa en se pinçant l’arrête du nez.
Curieuse, Avadys regarda elle aussi par la fenêtre et éclata de rire.
— Ta sœur est géniale !
— Je pense que c’était la seule chose convenable qu’elle avait.
— Convenable pour quoi ? demanda Lucretia, qui était la plus perdue d’eux tous.
— Tu vas passer le début des vacances chez les Lestrange. Chez tes nouveaux "parents adoptifs", lâcha de but en blanc Evan.
La Serpentard ouvrit la bouche pour parler, puis la referma. Il n’y avait rien à dire. Juste à espérer. Ésperer se réveiller le plus vite possible.
— Tes nouveaux parents qui sont Rodolphus et Bellatrix Lestrange, crut bon de préciser Lucius.
Sous le regard noir de Narcissa, il comprit que non, cela était inutile. Lucretia était à deux doigts de s’évanouir. Elle regardait la fenêtre et son fiancé à tour de rôle, comme si elle lui demandait de lui annoncer le fameux "c’est une blague". Elle l’attendit. Mais rien. Le sérieux surplombait le visage d’Evan.
— Depuis combien de temps vous le saviez ? questionna-t-elle d’une voix tremblante.
— Trois sem...
— Hier, le coupa Rabastan. Vraiment, ça nous a pris par surprise. On a reçu une lettre du Ministère disant que Lucius ne pouvait pas être tuteur légal du à son âge, et d’emblée celle de mon frère, qui avait alors miraculeusement tout pris en charge.
Victoire retint un sourire. Evan fronça les sourcils mais se tut. Mieux valait se taire, oui. Mais Lucretia était perspicace.
— Je suis capable d’endurer une telle nouvelle. Pas la peine de me le cacher autant de temps.
Sur ces mots, elle se leva et sortit du compartiment dans un silence glacial.
— Vous croyez qu’elle est en colère ? voulut s’assurer Victoire.
— À peine, répondit Narcissa.
Colère était un euphémisme. Lucretia ne voulait plus parler à aucun d’entre eux. Ni même à Rabastan qui allait passer ces quelques jours avec elle. Qui sait, peut-être allait elle rester toutes les vacances, quant à y être. Cela lui éviterait de voir la tête d’abruti de son frère et rompre ses fiançailles en paix. Ils imaginairent peut être qu’elle allait bien le prendre en lui annonçant au dernier moment. Mais bien sûr ! Lucretia, bonne surprise, ta nouvelle mère est la soeur de ta meilleure amie qui t’as torturé quatre mois auparavant sous ton propre toit pour une pierre qu’elle ne désirait même pas pour elle même ! Comment devait-elle le prendre ?
Mal. Évidemment. Mais ce genre de résonnement semblait leur échapper.
Tant pis, elle assumerait. Elle était assez grande pour jouer la comédie devant des Aurors "camouflés" et ignorer toute cette famille de fous une fois arrivée. Entre toutes les familles de sang purs existantes sur terre, il avait fallu que ce soit les Lestrange, de surplus. Quelle joie.
— Ah, te voilà enfin ! s’exclama Bellatrix en la voyant arriver face à elle.
Lucretia cacha son désarroi derrière un sourire élégant. La jeune femme portait une tenue entièrement noire qu’elle avait semblé porter lors du dernier enterrement. Un filet recouvrait son visage maquillé. Pour une fois, elle avait réussi à discipliner ses cheveux : ils étaient rassemblés en un chignon bas, laissant échapper quelques mèches bouclés sur le côté.
Pour manifester un semblant de joie, elle se firent la bise. Plus ridicule que cela, ça n’existait pas. Rodolphus, derrière, semblait s’impatienter.
— Où est ta valise ma chérie ?
— En route.
— Toute seule ?
— Voyons, non, avec un traîneau de Rennes devant elle pour la traîner.
Derrière son sourire implacable, Bellatrix lui envoya des signes d’avertissement par le regard. Les Aurors pouvaient donc entendre.
— Ah, je vois le traîneau qui arrive.
Evan déposa la valise aux pieds de sa fiancé, lançant un coup d’œil mauvais à Bellatrix. Il tenta d’embrasser une dernière fois Lucretia, mais détourna la tête au dernier moment.
— Je suis désolé, lui murmura-t-il.
— Va te faire voir.
Elle prit son bagage et s’en alla au devant. Bellatrix lui cria de l’attendre, mais elle n’était pas d’humeur à obéir. Pas après s’être pris dans la face autant d’information et d’événements qu’elle n’avait même pas demandé. Oui, elle avait aussi envie de pleurer, hurler même, et alors ? Qui l’empêcherait de le faire ?
— Eh, attends !
Qu’ils aillent tous se faire voir. Evan, et tous les autres. Elle allait partir toute seule loin, vivre seule pour les vacances et revenir plus sereine. Tout ça n’était qu’une blague qui devait prendre fin.
— Lucretia, écoute moi.
Rabastan se situa face à elle et lui prit la valise des mains. Elle chercha à la reprendre mais il lui bloqua le bras.
— Je sais que tu es en colère et que tu ne veux pas me parler, ni à moi ni à personne. Mais s’il te plaît. Devenir une famille d’accueil est compliqué, surtout pour des familles sang pur aux fréquentations douteuses, et si tu ne t'es pas retrouvée chez des sang de bourbes, c’est uniquement grâce à mon frère. Et à Bellatrix. Alors fais l’effort, je t’en supplie. Je serai avec toi une fois dans le Manoir. Tu n’auras aucune mauvaise surprise.
— Rabastan, je veux juste... je veux juste rentrer chez moi.
— Je sais. Mais ce n’est pas possible.
Elle haïssait le monde. L’avait-elle déjà dit ? Si oui, alors elle le répétait, cela ne faisait aucun mal, ce n’était que la constatation d’un fait. Elle souffla, comme pour exprimer une dernière fois son mécontentement et accepta d'attendre ses "parents". Bellatrix s'approcha avec éclairs dans les yeux mais ne fit aucun commentaire par la suite. Ils transplanèrent tous jusqu'au Manoir.
Un halo sombre envellopait la demeure. Un corbeau croassa quand le portail de fer grinça. Le Manoir s'imposait sur les jardins fânés, grand et haut, très haut. Une mer de nuages gris cachait les tours les plus hautes. Lucretia passa les grandes portes en jetant des coups d'oeil inquiets partout autour d'elle. Ce lieu austère ne lui inspirait en rien confiance. Elle n'avait pas vraiment l'habitude de sortir de sa zone de confort, surtout sans un membre de sa famille. Sa colère envers Lucius s'évanouit comme le vol d'un papillon. Elle voulait l'avoir à ses côtés, maintenant. Proche. Ici.
-Le dîner est à 19 heures, annonça Rodolphus d'une voix dure. Rabastan va te montrer ta chambre, ne sois pas en retard.
Il partit sans un mot de plus. Bellatrix serra la mâchoire, un regard noir posé sur la place qu'occupait quelques secondes auparavant son mari. Elle donna sa cape à l'elfe de maison et se tourna vers Lucretia.
-Si tu as besoin de quelque chose, je suis là.
-Je n'ai pas besoin de toi, répliqua la blonde sèchement.
Qu'elle le veuille ou non, elle avait encore de travers son Doloris. Elle ne comprenait pas comment Lucius avait pu la vendre à cette folle aussi facilement. Bellatrix comprit le sous-entendu mais ne s'en amusa pas.
-Tu comptes pour Narcissa, et Narcissa compte pour moi. Je lui ai promis de bien te traiter. Alors ne me cherche pas.
Sur ces mots, elle partit de la même manière que Rodolphus. Quel accueil. Rabastan leva les yeux au ciel et s'empara de sa valise pour la monter à l'étage. Lucretia prit la sienne, en rien bouleversé par cette discussion. Elle était plutôt occupée à analyser le lieu et le juger sous toutes les formes. Si un vampire serait apparu face à elle, elle ne s'en serait même pas étonné. L'ambiance était telle qu'il pouvait surgir n'importe quoi sans être hors contexte.
La chambre assignée était simple. Une armoire, un lit à baldaquin et un fauteuil, avec des bougies neuves à côté. Elle se souvint du bordel régnant dans sa vraie chambre et eut un pincement au coeur. Elle aurait aimé retourner là-bas. Regoûter au vieux temps. Ici, elle se sentait prisionnière. Ces murs étaient trop épais et les couleurs trop fades, il lui manquait de l'air, de la lumière. Elle ne pouvait pas s'enfuir d'ici, ou Rodolphus la ramènerait par le lobe de l'oreille et Merlin savait ce qu'il lui ferait. Il n'hésitait pas déjà à se défouler sur son frère, alors qu'est-ce que ça serait sur elle.
-Tu veux que je t'aide à déballer tes affaires ? demanda Rabastan.
-Non. Ça va.
Elle aurait pu lui dire merci, mais il était déjà parti avant qu'elle en ait l'occasion.
***
Le plat était froid. Elle se mit à jouer avec ses morceaux de carotte d'un air las, sans penser un seul instant à les mettre dans la bouche. Rodolphus l'inspectait de loin, elle sentait son regard la sonder depuis une demi-heure. Rabastan se faisait petit et silencieux, tandis que Bellatrix parlait de refaire la décoration du salon.
-Le lustre est moche, je veux le changer.
-Ce lustre est ancestral, Bella, répliqua son époux d'un ton agacé. Tu n'y touches pas.
-Mais il gâche tout !
-Tu n'as qu'à pas le regarder. Sinon, Lucretia, tu comptes manger un jour ou tu attends qu'on te donne la permission ?
Ses doigts se crispèrent à sa fourchette. Elle allait lui refaire son beau visage de crétin. Bellatrix, vexée par ce changement brusque de conversation, s'avachit sur sa chaise.
-Je n'ai pas faim, prononça-t-elle clairement, histoire qu'il n'y ait aucune ambigüité.
-Tu vas manger.
Son ton était cassant, sans appel. De quoi se permettait-il ?
-Si elle n'a pas faim, ne la force pas, intervint Rabastan.
-Est-ce que je t'ai demandé ton avis ?
L'ancienne Black but d'un coup sec son verre de vin, visiblement habituée aux répliques cinglantes des deux frères.
-Et toi, est-ce que tu peux avoir de la compassion, juste une fois dans ta vie ?
Lucretia n'aurait pas cru voir Rabastan aussi résistant. Ou alors il le devenait en sa présence. Elle opta pour le seconde option quand elle vit le haussement de sourcils de Bellatrix. Rodolphus, lui, se retint de se lever pour le frapper.
-Tu devrais te taire.
-Lucretia, ma chérie, fit la maîtresse de maison pour mettre fin à ce début de catastrophe, demain soir nous sortirons.
-Pour aller où ?
-Tu verras.
Rabastan se tourna alors vers sa belle-soeur, ses yeux lançant des éclairs.
-Tu ne vas quand même pas l'entraîner dans ça ?
-Ne t’en mêle pas, veux-tu.
-Mais tu...
-Rabastan, tonna son frère avec une lame à la place de la langue.
Le concerné s'arêta de parler et demeura raide comme un morceau de bois, contenant sa rage bien enfouie à l'intérieur de lui. Lucretia le plaignit. Sincèrement. Vivre avec ça tous les jours ne devait pas être facile. Son frère était pire qu'un tyran, tandis que Bellatrix était chiante doublée psycopathe. Elle ne savait lequel était pire.
-Puis-je sortir de table ? demanda-t-elle. J'ai encore des choses à ranger, et je...
-Tu finis ton assiette avant.
Comment ne pas le haïr ? Pour qui se prenait-il, au juste ? Que ne comprenait-il pas dans "je n'ai pas faim" ? Elle voyait bien qu'il faisait cela pas parce qu'il se préoccupait d'elle, mais pour asseoir son autorité. Mais Lucretia étant Lucretia, l'autorité autre que parentale était quelque chose qu'elle ne supportait pas.
Elle se leva, esquissa un magnifique sourire et se dirigea vers la porte. Elle eut le temps de sortir -miraculeusement- et de traverser la moitié du salon en toute liberté. Elle crut avoir gagné, mais c'était sans compter la rapidité de Rodolphus. Il lui prit brutalement son bras et lui asséna une gifle, si fort qu'elle résonna plusieurs fois entre les murs de pierre. La surprise empêcha Lucretia de parler. Si elle ne s'était pas effondrée, c'était uniquement parce qu'il la tenait. Comme si les milliers d'aiguilles plantées sur sa joue ne lui suffisaient pas, il s'empara de son menton et la força à le regarder dans les yeux. Elle haïssait son regard. Aussi mauvais que le Diable lui-même.
-Maintenant, que les choses soient bien claires. Tu es chez moi et tu obéis à mes règles. Et si ça te plaît pas, c'est la même chose. N'essaie pas de faire ta rebelle avec moi, parce que ça ne marchera pas.
Sa joue lui brûlait comme une marque au fer rouge. La douleur ne fit que renforcer sa haine.
-Va te faire voir, lui cracha-t-elle.
Au moment où il levait la main sur elle, une voix le stoppa net dans son élan.
-Rodolphus. Lâche-la.
Lucretia ne reconnut pas l'intrus. C'était une voix plus grave, regorgeant d'âge et d'expérience. Les traits du jeune homme se décomposèrent et il obéit sans hésiter. Elle se rattrapa avec chance au fauteuil. Vraiment, elle allait laisser sa vie ici. Elle tourna la tête pour remercier son ange gardien quand elle vit un homme de la cinquantaine fixer Rodolphus d'un air sévère. La ressemblance était frappante. Si l'aîné avait hérité de ses pomettes et sa carrure, Rabastan avait ses yeux. Aussi verts qu'une émeraude.
-Miss Malefoy, faites ce que mon fils vous a ordonné. Et obéissez-lui, à partir de maintenant.
S'il croyait que parce que c'était lui qui le lui disait, elle allait obéir, il pouvait se mettre le doigt dans l'oeil. Néanmoins, la douleur à sa joue lui suffit. Elle revint dans la salle à manger dans un silence funeste. Pourquoi Lucius l'avait-il abandonnée ici ?
Rabastan avait déserté les lieux, il ne restait plus que Bellatrix. Elle finissait son verre de vin d'un air tranquille. Lucretia s'assit à sa place et fixa son assiette comme si elle contenait de la bouse de dragon. Elle ne pensait pas une seconde la finir.
-J'ai une crème pour les hématomes, dit Bellatrix.
Bellatrix Lestrange, se préoccuper pour elle. La blague.
-Non, ça va, répliqua-t-elle sèchement.
-Je ne suis pas ton ennemie, Lucretia. C'est lui que tu dois craindre. Pas moi.
Elle se souvint des récits de Rabastan sur la cruauté de son frère. Il disait que c'était Bellatrix qui limitait les dégâts. Elle s'occupait d'elle ensuite, quand son frère se souciait seulement de savoir s'il était à l'heure pour le dîner. Lucretia avait eu du mal à le croire, mais à présent, c'était plus qu'évident. Bellatrix avait du se rendre compte qu'il existait plus malade mental qu'elle.
-Pourquoi tu le laisses faire dans ce cas ?
-Parce qu'il est mon époux, soupira-t-elle. Une femme s'écrase sous les désirs de son époux, c'est l'ordre des choses.
-Et c'est toi qui dit ça ?
Où était la Bellatrix tueuse de sang-froid obéissant seulement à ses pulsions meurtrières ?
-Les choses sont souvent plus compliquées qu'on ne le croit. J'ai la chance d'avoir la protection du Seigneur des Ténèbres. Mais ici, sous ce toit, je ne l'ai pas. J'ai appris à baisser la tête et me taire.
La gorge de Lucretia se noua. Elle avait atteri dans un monde totalement différent du sien. Chez elle, sa mère ne s'était jamais écrasée sous son père. Lucretia l'avait toujours vu comme une femme libre, et leur couple avait toujours été sain et équilibré. Les sang-pur avaient beau être une communauté, chaque famille composait un univers à part entière. Elle préférait largement le sien.
Bellatrix se leva et sortit sa baguette de sous son bustier. Elle s'approcha d'elle. Lucretia eut un instant peur qu'elle ne l'attaque elle aussi, mais elle la pointa vers l'assiette. Celle-ci se vida en un claquemet de doigt, laissant quelques restes pour la forme.
-Monte dans ta chambre.
Lucretia ne comprit pas le pourquoi de son geste mais fit ce qu'elle lui ordonnait. Elle venait de découvrir que la tueuse la plus recherchée du pays avait un coeur.
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