Chapitre 9

__ Dis, elles ont quoi de si incroyable mes mains ?

__ Elles sont gracieuses. Maintenant laisse moi me concentrer sur mes croquis.

Atsushi soupira, cela faisait déjà vingt bonnes minutes qu'il était là, assis et main tendue vers l'autre, forcé à ne pas bougé. Son ainé était très sérieux, et lorsqu'il l'était il devenait très froid et concis, chose que le blanc ne détestait pas mais qu'il trouvait parfois embêtante. Il commençait à avoir des crampes dans tout le bras et eut une pensée compatissante pour tous les models de facs. Non seulement car, pour certains, ils devaient se tenir nus devant toute une classe (ce qui était inconcevable pour le blanc) mais aussi car leurs positions étaient continuellement grotesques et inattendues. Il prit alors la décision de reposer sa main engourdit sur ses genoux, ce à quoi le brun ne râla pas, semblant comprendre son amant. Le plus jeune se rapprocha un peu de son vis à vis pour voir ses dessins et fut abasourdis par la beauté retranscrite dans les esquisses sous ses yeux. Akutagawa passa au poignet après avoir finit de détailler les doigts, qu'il avait prit l'initiative d'orner de bagues aux couleurs reposées. Alors qu'il commençait son trait pour prolonger les courbes, il remarqua le bracelet, toujours fermement accroché au bras du blanc.

__ Il est beau, ton bracelet.

Atsushi eut un mouvement de surprise avant de baisser les yeux sur l'objet en question. Il avait complétement oublié l'avoir garder sur lui, même pendant la douche. Il ferma les paupières, un grand sourire nostalgique aux lèvres.

__ Merci. C'était mon cadeau d'anniversaire de douze ans. Devine qui me l'a offert.

__ Dazai ? Tenta le noiraud, sûr de lui.

__ Perdu ! Aussi bizarre que ça puisse paraître il vient de Chuuya. Bon, après je n'ai plus eut de cadeau, mais c'était le plus beau de ma vie. Je pense.

Akutagawa fut d'abord surpris, confus d'avoir perdu à une question dont il était persuadé de la réponse, mais lui adressa ensuite un doux rictus, plein de tendresse. Ils n'avaient pas dormis la nuit passée, ils n'avaient fait que discuter, en grande partie de la vie d'Atsushi, en observant le ciel étoilé qui s'offrait à eux dans un brouillard étincelant. Les deux garçons étaient toujours chez le blanc, qui lui ne travaillait pas à l'inverse du brun, qui avait prit un jour de congé pour rester en compagnie de son amant pour le reste de la journée. Par ailleurs, Atsushi était censé aller à l'école depuis bien longtemps, mais avait abandonné sa scolarité à la mort de son père. Ainsi donc, il avait des lacunes. Parfois il lui arrivait de regretter son club d'histoire de l'art, qu'il avait baptisé du jour et capituler au lendemain. Ses amis qui y étaient devaient être furieux de sa disparition et il avait donc encore moins envie d'y aller pour cela. Il s'allongea sur le lit, dans un long soupire plaintif. Il admira le visage d'Akutagawa, concentré sur sa tâche, puis dériva sur le bijoux qu'il portait au poignet. Maintenant qu'il y réfléchissait plus en profondeur, il se demandait pourquoi le rouquin lui avait offert ça. Eux qui n'avaient jamais été proches, à part au niveau des œillades qu'ils se lançaient de temps à autres, il n'arrivait pas à saisir le pourquoi du comment Chuuya lui avait fait ce cadeau. Même Dazai, la personne avec qui l'orangé était le plus proche, n'avait jamais rien reçu de sa part.

Peut-être était-ce un message ?

Non, bien sûr, le blanc se montait la tête. De plus il venait de raconter tous les malheurs de sa vie au noiraud, il était donc normal d'être perturbé après avoir fait la tirade d'un monologue comme celui-ci. Et surtout après avoir lâcher une tristesse inexprimée depuis bien des années. Il rigola nerveusement, quelle histoire !

__ Pourquoi tu ris ? Demanda le brun, sans lever les yeux de ses dessins, qu'il peaufinait encore.

__ Je viens de penser à une blague marante. Tu veux que je te la raconte ?

__ Je t'en pris.

__ Quel est le comble pour un dentiste ?

__ Je ne sais pas.

__ D'habiter dans un palais !

Atsushi s'esclaffa sous le regard dépité de son amoureux. Le blanc se roula sur le dos puis sur le ventre, se tordant de rire à sa propre blague, de mauvais goût qui plus est. "Quel enfant !" pensa le plus âgé, exaspéré par tout les attraits juvéniles du blanc. Enfin, Akutagawa était mauvaise langue, c'était aussi pour ça qu'il aimait le plus jeune. Il claqua les deux couvertures de son carnet de croquis pour le refermer, s'exclamant :

__ Et bien ! Puisque tu veux rire, on va rire !

Le noiraud se jeta sur l'autre, le plaquant sur le dos et le chatouillant partout où il le pouvait. Ce dernier crut bien mourir de rire à cause des sensations hilarantes qu'il ressentait. Finalement, ils se calmèrent et reprirent leurs respirations, saccadées par la faute de leurs comiques ébats. Bien vite, leurs halètements ne furent plus qu'un léger souffle, s'apparentant à un coup de vent s'étant égaré dans la pièce depuis la fenêtre ouverte. Leurs regards se firent plus intenses, comme si une flamme ardente s'était allumée au plus profond de leurs cœurs. Les prunelles corbeaux du plus vieux ne se détachaient de celles bicolores de celui d'en dessous. Une lueur blanchâtre venait se rajouter au violet perçant et au jaune vif des yeux de ce dernier, absorbé par la beauté du dieu qui le dominait de toute sa splendeur. L'envie folle de saisir les lèvres d'Akutagawa et de les marteler de son désir le plus puissant lui serrait les tripes, mais, se rappelant la veille, il ne fit que se redresser et se dégager de l'emprise de l'homme en question.

Il s'assit contre le sommier du lit et se racla la gorge, en face de celui qui n'avait pratiquement pas changer de sa position initiale. Un long silence se fit, parsemé par les bruits du dehors. Les oiseaux chantant, les feuilles voltigeant et le son de l'eau ruisselant paisiblement : l'atmosphère était prospère. Aucune gêne ne se fit ressentir dans la chambre, par conséquent. Néanmoins le blanc se décida à hausser le ton, par peur que l'ambiance ne change trop rapidement et ne devienne malaisante pour eux deux. Il prit donc le risque de casser l'harmonie merveilleuse qui semblait si tranquille sous leurs oreilles. 

__ Akutagawa, tu veux aller quelque part maintenant ?

__ Je ne sais pas trop, tu veux sortir ?

__ On peut visiter un musée, il y en a un à côté de chez moi. Et puis normalement il n'y a pas trop de monde à cette période de l'année, c'est plutôt calme.

__ Qu'est-ce-qui y est exposé ?

Le blanc parut réfléchir pendant quelques secondes avant de répondre avec assurance, le doigt levé comme si sa parole avait été la bénédiction des dieux tant attendue. Ce qui aurait put être le cas s'il on avait remplacé Akutagawa par Bouddha et Atsushi par un fervent croyant. Cette idée qui venait de germer dans la tête du noiraud le fit adresser un rictus amusé au plus jeune, qui ne le remarqua même pas.

__ C'est sur les tableaux occidentaux du XIXe siècle.

Le brun hocha la tête en guise d'affirmation et tout deux quittèrent l'appartement pour se rendre sur le lieu désiré. Atsushi chantonnait comme un enfant trop gâté mais heureux de sa journée et l'ainé marchait sans un mot comme un adulte à fleur de l'âge. Leurs personnalités qui ne s'accordaient pas et leurs évidentes différences auraient pu porter à confusion les gens qui les voyaient passer à côté d'eux; pourtant ils formaient un incroyable duo. Une équipe gagnante, une équipe qui s'apprenait et qui ne pouvait qu'aller de l'avant. Distincts sourires, distinctes larmes. Ils étaient différents, et c'était l'une des plus belles choses qu'ils avaient à se montrer.

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