Chapitre 5
Les paupières du blanc s'ouvrirent avec peine, une lumière éclatante l'éblouissait et transperçait son corps de toutes parts. Il posa par réflexe un bras sur ses yeux afin de pouvoir se réveiller moins brutalement. Il resta dans cette position au moins cinq minutes avant de sentir une sensation de vent frai contre sa peau et de se redresser d'un coup sec, bien réveillé cette fois-ci. Il se liquéfia sur place en voyant son torse dénudé, son sang ne fit qu'un tour une nouvelle fois, appréhendant ce qui allait suivre, et d'une main tremblotante il vint relever la couverture de son bassin. Quel soulagement ce fut pour lui de le voir porter un sous-vêtement !
Il se souvenait vaguement s'être endormi à côté d'Akutagawa la veille, mais après, plus rien. Son regard se concentra alors sur tous les petits détails que lui offraient la chambre, mais pas une trace de l'homme. Il s'était comme vaporisé. Tout avait été laissé comme il l'avait vu hier, mis à part le tableau, qui lui comportait bien plus d'éléments. Il se leva doucement et jeta un œil dans la seule autre pièce de l'appartement : la salle de bain. Mais rien. Pas même une trace de buée sur les vires qui signifieraient l'éventuel passage d'Akutagawa. Il retourna sur ses pas et trouva bien vite ses vêtements pliés sur la table de nuit. Il les prit, vérifiant rapidement qu'ils étaient tous bien là avant de sourire, attendri par l'action aimable du brun. Il s'habilla rapidement en contemplant le paysage de par la petite fenêtre. Elle était ouverte et les branches de l'arbre juste à côté rentraient un peu dans la pièce, laissant quelques feuilles par terre. L'atmosphère était paisible, agréable.
Il senti une bosse dans la poche de son pull gris, et, intrigué, il sorti la chose.
Il y trouva son téléphone, éteint. Il avait complétement oublié le fait d'avoir pris son appareil avec lui et encore plus de l'avoir mis en veille.
Il ouvrit le cellulaire et se fit de suite agresser par des milliers de messages. Tous de la même personne : Kunikida. "Tu es où bon sang ?", "Je m'inquiète", "Ça fais 7 fois que je t'appelle, pourquoi tu réponds pas ?" ou encore "Imbécile, qu'est-ce-que tu fous". Et comme dit, une tonne d'appels manqués jonchaient l'écran d'accueil. Atsushi soupira, pourquoi fallait-il qu'il vienne le voir ce jour là ? Néanmoins, il se sentait coupable de l'inquiétude de l'adulte et décida de le rappeler. La sonnerie n'eut même pas le temps de retentir que le blond décrochait déjà.
__ Ah ! Enfin tu réponds ! Cria l'homme au bout du fil d'une voix éraillée et surtout fatiguée.
__ ... Je suis désolé Kunikida, j'avais oublié que mon téléphone était éteint.
L'adulte soupira, sûrement exaspérer par l'étourderie du garçon. Néanmoins, un brin de soulagement se faisait ressentir.
__ Bon. Tu es où ? Je ne t'ai pas trouvé quand je suis rentré chez toi.
__ Comment t'es rentré ? J'ai laissé la porte ouverte ? S'inquiéta le plus jeune.
__ Ne change pas de sujet ! Et puis, t'es devenu débile ou quoi ? J'ai le double des clefs.
__ Je suis chez un ami.
A peine Atsushi eut-il fini sa phrase qu'un bruit de porte qui s'ouvre lui parvint.
__ Je dois te laisser, à tout à l'heure.
Il raccrocha.
Le blanc tourna la tête vers la porte d'entrée et y vit Akutagawa, un sachet marron en main, en train de retirer ses chaussures. Il leva lui aussi les yeux et croisa le regard du garçon qui l'esquiva aussitôt. Le brun se redressa et s'avança vers son vis à vis, qui se sentait extrêmement mal à l'aise car il ne voulait pas prendre ses marques et être impoli. L'homme posa le paquet sur son bureau et s'assit sur la chaise, les jambes croisées et les bras retombant sur ses cuisses. Il scrutait Atsushi de ses yeux infiniment noirs, qui lui tentait de ne pas retomber dans la drogue qu'était l'admiration du visage divin d'Akutagawa. Ce dernier recommanda finalement au blanc de s'installer sur son lit, ce qu'il fit sans se priver.
La scène était étrange : deux hommes visiblement désireux l'un de l'autre qui ne se disaient rien, qui se fuyaient, puis qui se trouvaient. Même si le brun avait tendance à moins montrer l'intérêt qu'il avait pour l'autre garçon, il semblait quelque peu entraîné dans ce tourbillon de sentiments que lui proposait Atsushi. Et quant à celui-ci, bien même son refus d'annoncer directement son affection envers l'autre, il le faisait comprendre de par ses actions -parfois enfantines-.
Le brun farfouilla dans la poche et en sorti deux pains-melons. Il en tendit un au garçon en face de lui et garda l'autre pour lui.
__ Tu n'as pas mangé. Expliqua-t'il simplement.
Atsushi fut d'abord étonné mais accepta bien vite et remercia chaleureusement son vis à vis. Il engouffra d'un coup la pâtisserie dans sa bouche, sans prendre la peine de le savourer à l'inverse d'Akutagawa qui la croquait par petit bouts. Néanmoins, le blanc était heureux. Même s'il n'avait pas vraiment eut le temps d'apprécier le cadeau du brun, il en fut réellement content. Son cœur se réchauffait lorsqu'il était à côté de l'homme, et, rien que le fait qu'il puisse à présent le revoir lui faisait de petits picotements dans la poitrine. Un large sourire étirait ses lèvres rosées.
"Je suis heureux" se murmura-t'il mentalement. "J'espère que tu l'es aussi". Il ferma les yeux, laissant son esprit divaguer entre les nuages de son âme.
Akutagawa se racla la gorge, un poing serré devant la bouche. Il était temps. Atsushi devait partir, il n'allait tout de même pas rester indéfiniment chez son hôte ! Il se leva donc, sans oublier de remercier mille fois le noiraud pour tout ce qu'il avait fait pour lui, et enfila sa veste. Il était bien couvert, paré pour affronter l'adversité et la foule qui l'angoissait tant.
Quoi que, tout compte fait Atsushi se sentait mieux. Bien mieux. Peut-être étais-ce parce qu'il se sentait accompagné. Accompagné par ce garçon aux yeux sombres qui lui plaisait tant. Il se sentait maintenant prêt à tout affronter; et à gagner. Il lui en fut reconnaissant, reconnaissance qu'il n'exprima d'ailleurs jamais, la prenant déjà comme acquis pour l'autre. Le blanc pensa à prendre le numéro de téléphone du brun avant de le saluer et de partir.
L'ascenseur n'eut jamais été aussi solitaire qu'à ce moment. Il repensait à la veille, à là où tout avait commencé, à cette conversation qui fut leur première (réelle). Et il repensa aussi au moment où ils étaient sorti de la cabine, à celui où ils étaient arrivés, tout gênés, devant la porte et à quand ils avaient discutés plus intimement. Atsushi plongeait dans un bonheur jusqu'alors inexploré. Il n'avait jamais été amoureux, à ce qu'il sache, et c'était donc la première fois qu'il écartait les entrailles de ce sentiment si complexe. Il n'était absolument pas comme le bonheur que lui avait apporté Dazai ou encore Kunikida, c'était différent, bien trop.
Mais ce n'était pas pour autant un sentiment miteux, il était... scintillant ? Que dire, éblouissant ! Évanescent ou éphémère ? Tant d'adjectifs pour le décrire, mais aucun à sa hauteur. Puis, le blanc eut l'illumination. Il était comme une fleur, une fleur... laquelle ? Il réfléchit. Un camélia ! C'était ça, l'amour qu'il ressentait était comme un magnifique camélia, s'efforçant d'être parfait pour la journée, et étant lui même la nuit, lorsque tout est calme et doux. S'il avait aussi été un camélia, Atsushi aurait pu sentir le vent caresser ses hanches et ses pétales, et les doigts blanchâtres de cet homme parcourir n'importe laquelle de ses parcelles de peau, de ses épines. Il en rêvait. Il en soupirait.
Lorsqu'il fut rentré chez lui, il posa lourdement son corps contre le matelas et s'étala de tout son long. Il se devait d'appeler le blond, à présent. Sinon, il lui en voudrait encore plus qu'il ne lui en veut sûrement maintenant. Le blanc appuya sans grand entrain sur les touches afin de composer le numéro de Kunikida. Comme pour la fois précédente, sa voix résonna bien vite dans la pièce. Les mêmes mots retentir en écho dans la tête du garçon, mais il ne les écoutait pas pour autant, trop perdu pour y prêter garde. Il s'égarait dans ses propres réflexions.
Atsushi était du genre à ne pas faire attention à ce qu'il disait lorsqu'il était confronté à une situation un peu trop émotionnelle ou complexe. Alors normalement il se baladait, seul, pour s'envoler, au moins quelques instants. Seulement, si quelqu'un était avec lui à ce moment là, il entendait tout ce que le blanc avait sur le cœur; lui qui n'était pas vraiment du genre à ce confier normalement.
__ Kunikida, je suis amoureux.
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