Chapitre 17
La chambre d'hôtel était entièrement vide : Ranpo étant partit chasser les rumeurs de la ville avec Poe, et ce bien même s'il était statistiquement impossible de trouver une quelconque personne connaissant un roux du nom de Chuuya. Peut être s'ennuyait-il au point d'entreprendre des choses aussi vaines ?
En attendant, les deux amants étaient seuls de leur côté. Comme toujours, ils sortaient dehors pour se promener, admirant le ciel s'assombrir et les étoiles se montrer. A croire que la petite habitude innocente du blanc avait influencé le mode de vie du brun.
Cependant, l'Amérique était un pays bien différent du Japon et Atsushi avait du mal à accepter au bruit ambiant permanent lorsqu'il se baladait.
Tout allait pour le mieux, jusqu'à ce qu'ils virent deux hommes s'embrasser en public. Ce fut un choc imminent pour les deux garçons, d'autant plus que personne ne les regardaient bizarrement, en fait personne ne les regardaient. Akutagawa tourna la tête lentement vers la figure ébahit de son petit-ami, qui n'en revenait pas. Est-ce-que dans ce pays les gens comme eux, ce qui aimaient les personnes du même sexe, étaient tranquilles ? A peine le blanc eut-il put ouvrir la bouche pour prononcer ces mots que les lèvres sucrées du noiraud se posèrent langoureusement sur les siennes.
Leurs langues ne se rejoignirent pas, mais ce fut tout comme. Une libération sans égal les avait envahis et ils se sentaient enfin unis. Les douces mains d'Atsushi caressèrent les joues pâles de son amant, qui se laissa faire, en bougeant quelque peu dans le creux de sa paume.
Les deux autres hommes les regardaient, attendris. Ils n'avaient fait que ce qu'ils aimaient, rien de bien méchant, et personne n'y prêtait une quelconque attention à part eux quatre. Quel bonheur pour Atsushi et Akutagawa que d'être enfin seuls dans leur univers !
La naissance de leur amour avait aspergé leurs cœurs et en un instant cette petite éclaboussure s'était transformé en forêt verdoyante. La petite fleur qui s'était battue pour trouver une place complaisante à l'intérieur de leurs poitrines était à présent devenue une jungle indomptable.
Tout était réglé pour eux à présent, leurs sentiments au clair, ils pouvaient se focaliser sur autre chose.
Poe suivait à la trace les pas pressant de son compagnon qui semblait aujourd'hui bien plus stressé qu'à son habitude. Pas qu'il soit tout le temps dans cet état, mais parfois il voyait Ranpo maronner tout seul dans un coin en emballant les commandes. Dans ces moments là, il aimait se rapprocher de lui doucement et lui dire de passer chez lui une fois le travail terminé. Après tout, leur job était épuisant et éprouvant : passer voir les clients, prendre des notes sur leurs goûts, les garder en place et leur offrir mieux que ce qu'ils espéraient... la restauration n'était définitivement pas un milieu facile. Le seul moment de détente qu'ils pouvaient avoir était lorsqu'ils jouaient au jeux-vidéos ensembles ou résolvaient des enquêtes sur des applications mobiles qu'ils téléchargeaient à la hâte.
Ranpo marchait rapidement, traversant les routes et les trottoirs sans regarder, et finalement, il retournait toujours au point de départ : autrement dit devant l'hôtel où ils séjournaient. Cela faisait un petit bout de temps que Poe avait remarqué qu'ils tournaient en rond mais il n'osait pas intervenir, ayant peur de le couper dans ses pensées.
Seulement, les doigts sur son menton et les yeux rivés sur le sol, le châtain ne remarqua pas la voiture qui fonçait droit devant lui alors qu'il s'apprêtait à traverser.
Heureusement, le cri de Poe le fit revenir à la réalité. Les mains froides de l'américain s'étaient enserrées dans la chemise immaculée du japonais, qui n'en revenait pas lui non plus. Comment avait-il put baisser sa garde ainsi ?
Il soupira en remerciant son ami de l'avoir secouru et fit encore quelque pas avant de s'effondrer de fatigue. Et de nouveau, Poe le rattrapa juste à temps.
Ce dernier posa un regard attristé sur le visage endormi de son ami. Désormais, ils n'étaient plus que trois... Ranpo était hors-service pour de bon. A attendre de pouvoir voler comme ça, aucune bonne fin ne pouvait lui arriver.
Poe leva les yeux au ciel encore jaunie et implora les dieux de laisser une chance au châtain de prendre son envol. Enfin, pour cela il fallait déjà que les dieux existent.
Le téléphone d'Atsushi vibra dans sa poche, il retira ses doigts de ceux d'Akutagawa et attrapa l'appareil. C'était Ranpo.
A peine décroché, une voix qui n'était clairement pas celle de son frère se fit entendre :
__ Est-ce Atsushi à l'appareil ?
__ Heu... oui ? Souffla t'il, hésitant et surtout dubitatif de l'identité de la personne au bout du fil.
__ C'est moi, Edgar Poe, Ranpo vient de perdre connaissance mais rien de grave. Je suis à l'hôtel là.
Tout à coup, la réticence du blanc s'évanouit pour laisser place à l'inquiétude. Il allait crier à une explication mais son interlocuteur le coupa brusquement.
__ Cependant, ce qu'il y a de plus grave, c'est qu'on ait trouvé Chuuya.
Akutagawa, qui avait tout entendu, fut aussi choqué que son amant. Les deux, complétement figés sur place, sentirent leur sang ne faire qu'un tour et pour en rajouter une couche la tension ne descendait pas. Poe continua d'une voix sérieuse.
__ Je viens d'avoir mon oncle au téléphone, et il me dit avoir une piste.
Atsushi était surprit par la rapidité avec laquelle Fitzgerald avait déniché certaines informations, probablement confidentielles. Après tout, l'enquête n'était que personnelle et l'État ne savait rien de ce kidnapping familial. Pour retrouver des archives datant de plusieurs années auparavant, il fallait être sacrément puissant : ce que le blond semblait être plus qu'autre chose. Les yeux du blanc firent des aller-retours entre ses pieds et le noiraud, qui ne pouvait que se demander à quel point les humains pouvaient être corrompus par l'argent et la dominance.
L'homme au bout du fil toussota légèrement et reprit.
__En fait, il a eut accès aux archives vidéos de l'époque et a remarqué un roux aux cheveux mis longs accompagné d'un grand brun sur plusieurs enregistrements. Il pense que c'est le garçon que vous cherchez mais il a besoin de votre confirmation. Après ça, vous pourrez partir le chercher comme bon vous semble, mais nous ne sommes plus impliqués.
Sûrement que Fitzgerald ne voulait pas trop être mêlé à cette histoire sans queue ni tête, c'était même plutôt logique. Il avait fait le strict minimum pour les aider, mais il les avait tout de même aidés. Alors, au lieu d'être contrarié par leur refus d'aller plus loin, ils devraient être reconnaissant de ce qu'il avaient reçus.
Les deux garçons se précipitèrent vers l'hôtel en en un rien de temps ils gravirent les escaliers de ce dernier. Une fois à leur chambre, Atsushi se baissa pour toucher le front de son frère. Il avait juste un peu de fièvre, mais il nécessitait du repos plus qu'autre chose. Le petit frère, presque rassuré que ce ne soit pas très grave, souffla un bon coup.
Il demanda ensuite l'emplacement de l'entreprise une nouvelle fois pour s'y rendre, ce qu'il fit. Akutagawa et lui toquèrent pour la deuxième fois à la porte de Fitzgerald, et lorsqu'ils eurent son approbation pour rentrer, ils pénétrèrent la pièce.
Assis en face du blond, des regards s'échangèrent et tous étaient sérieux.
Finalement, l'homme alluma un énorme écran derrière lui et leur montra une compilation des mouvements qui avaient étaient enregistrés du rouquin. Il était principalement dans les gares routières et comme pour se faire discrets, ils ne prenaient aucuns vols luxueux ou ne se promenaient que dans les rues marchandes les plus battes-gammes.
Tout cela était très suspicieux, mais une chose était sûre : ce garçon remontant de presque cinq ans en arrière était bel et bien Chuuya.
Fitzgerald leur donna l'adresse exacte de l'ultime endroit par lequel ils étaient passés, et comme par magie, les deux s'étaient déjà éclipsés, probablement déjà en route.
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