Les meilleurs cosplays du monde - Partie 3

Marion et la brune qui lui servait de garde traversèrent une cour carrée, dont le lierre élégant était vraiment très élégant. Arrivèrent les couloirs de vieilles pierres, et ses fenêtres rectangulaires qui donnaient justement sur cet espace ouvert. Suivit un très bel escalier en colimaçon, coincé dans la tour sud-ouest du château. Très beau, ses marches mises à part – elles étaient assez inégales, si ce n'était abruptes... L'adolescente en arriva même à se tenir désespérément à la corde épaisse qui longeait le mur naturellement gris.

Puis, enfin, après cette attente interminable, après ces nombreuses secondes battues par le claquement de leurs semelles contre les dalles, le corridor, criblé de portes de pin assez mal poncées. Marion observa un instant le soleil se refléter joyeusement sur le plancher... Et manqua de se cogner dans sa garde.

Angela Haussman, s'appelait-elle. Elle l'avait réveillée il y avait une demi-heure de cela, l'avait aimablement accompagnée dans les salles d'eaux collectives pour qu'elle se décrasse, et l'escortait désormais jusqu'au bureau du major. La française avait un instant observé son long visage triangulaire aux nombreuses tâches de rousseur. Il lui avait semblé familier, et ses cheveux bruns n'avaient pas arrangé ce constat ; mais son air adulte avait vite balayé tout doute.

Elles venaient de s'arrêter face à l'un des battants – le premier qui avait daigné se présenter à leur droite. La femme frappa, et attendit patiemment. Une concentration profonde modelait ses traits. Si les yeux verts de Marion dérivèrent un instant sur son corps assez masculin pour une femme cisgenre, ils se reportèrent vite en face d'elle.

« Nom et motif, s'éleva la voix d'Erwin.

— Angela Haussman, j'amène Marion.

— Entrez. »

Elles s'introduisirent donc dans la pièce ; la première salua le major. Ce dernier était assis sur un fauteuil, devant un large bureau en chêne massif sur lequel s'alignaient des dossiers. Deux chaises de bois étaient placées en face, remarqua la lycéenne, avant de surprendre le regard qu'échangèrent le blond et sa subalterne. Appuyé, très appuyé, un peu longuet, finalement brisé.

Livaï était adossé au mur, derrière le gradé, à la droite d'une vaste fenêtre qui répandait la lumière du soleil levant. De grandes bibliothèques remplies de livres et de paperasse longeaient les deux murs restants.

Erwin remercia enfin Angela, et lui fit signe de prendre congé. La porte se referma : Marion examina un instant les deux hommes. Quel que soit l'angle sous lequel je les regarde, ils ressemblent comme deux gouttes d'eau aux Livaï et Erwin de l'Attaque des Titans, songea-t-elle. Le bras mis à part, certes...

Elle s'était résignée à abandonner toute idée de trouver une faille dans la réalité qui se présentait à elle. La peur des soldats dans le hall la nuit d'avant était authentique. Les deux personnes qui se trouvaient en face d'elle ressemblaient trop bien à leurs homologues fictifs pour que ce soit une mise en scène.

Quelle chance, pensa-t-elle amèrement. On se croirait dans une superbe fanfiction. Admettre qu'elle se trouvait au beau milieu d'un anime lui était extrêmement douloureux, mais elle ne trouvait aucune autre explication. Tout ce qu'il lui restait à faire était de leur prouver qu'elle était inoffensive et de trouver un moyen de rentrer chez elle.

On l'invita à s'asseoir. Elle obtempéra. Le major la regarda dans les yeux. « Tout d'abord, est-ce que tu as des questions ? » Marion se mordilla nerveusement la lèvre. Tant d'interrogations tournoyaient dans son cerveau qu'elle aurait été incapable d'en citer une. Elle finit par secouer la tête ; il s'arma donc d'une feuille et d'un crayon.

« Bien. Afin que tu puisses rester sous notre responsabilité le temps des vérifications, il nous faut certaines informations. » Elle se replaça sur sa chaise, mal à l'aise. Elle pouvait presque sentir de regard de Livaï peser sur elle, et se concentra tant bien que mal sur le major.

« Il est vachement plus agréable derrière un écran » était le constat qui l'avait frappée à la seconde où il était sorti de son état de pseudo-choc la veille au soir. Au beau milieu de sa panique, il lui avait semblé assez familier, mais Marion avait vite déchanté.

Quel genre de mirage avait-elle vu ?

« Cela risque d'être répétitif..., dit alors son interlocuteur principal. Quel est ton nom complet ?

— Marion Griffonds. Avec un s à la fin, précisa-t-elle faiblement.

— Ta date de naissance ?

— Trois juin deux mille. »

Il fronça les sourcils.

« Comment ?

— Trois juin deux mille. »

Il la regarda avec incrédulité. Elle ouvrit la bouche une troisième fois, puis comprit le problème. « Je... » Elle déglutit. « Comme dit hier, j'ai dix-sept ans. » Il y eut un silence, au bout duquel Erwin prit l'information en note. Il posa son stylo, et la fixa de nouveau. Au fond de ses pupilles, un intérêt naissant qu'il avait probablement du mal à dissimuler.

« D'où est-ce que tu viens ? » Elle tapota nerveusement sa cuisse du bout des doigts. « De France », balbutia-t-elle finalement. Il ferma les yeux un moment. Le caporal-chef s'avança et posa une main sur la table. Elle se tourna donc vers lui.

« Où se trouve ce truc ?

— A l'extrême ouest de l'Europe »

Elle ne fut pas étonnée de le voir plisser les yeux. Je m'enfonce sévère. « Je ne sais pas comment expliquer... » Sa voix déclina. La sauvant d'un embarras certain, Erwin lui tendit un papier et un stylo. « Peux-tu me dessiner ce que tu viens de dire ? »

Elle réfléchit un instant, pour esquisser du mieux qu'elle le put le continent en question. Elle se rendit compte que son Espagne était fausse et se corrigea. Elle s'arrêta un moment, mine levée, puis inscrivit le nom des mers Méditerranée et de la Manche, ainsi que celui de l'océan Atlantique.

Elle dessina ensuite des chapeaux à la place des massifs montagneux de France et délimita grossièrement les pays dont elle se souvenait, avant d'écrire leur nom. Elle finit par ajouter une échelle et leur rendit le tout. Joli schéma, son écriture mise à part.

Le blond l'étudia un long moment. Ses épais sourcils se haussèrent au bout d'à peine quelques secondes. Une once de stupeur traversa le regard de l'autre, qui posa ses yeux perçants sur Marion.

« Comment est-ce que tu connais tout ça ?

— Je l'ai appris à l'école. »

Les deux hommes échangèrent un long regard. Le major reprit finalement la parole. « Où est-ce que tu vis, sur cette carte ? » Elle pointa du doigt l'ouest de la France. « Est-ce que tu as déjà voyagé ? » Elle acquiesça de nouveau et leur montra un pays d'Europe centrale, puis l'emplacement de Berlin. « J'ai été à ces deux endroits. »

Leur stupeur se fit plus grande. « Pour résumer, tu as voyagé à deux milles kilomètres de chez toi ? » insista Livaï en plissant les yeux. Elle leur confirma une troisième fois.

Erwin posa ses coudes sur le bureau. « Tu viens donc d'au-delà des Murs ? » Les yeux de l'adolescente clignèrent quelques secondes. « Des... Murs ? » Elle plaqua une main sur sa bouche, horrifiée. Les Murs... Bon sang, comment est-ce que j'ai pu oublier ?

Gagnée par l'affolement, elle se leva et se précipita vers la fenêtre. Une ombre immense se dessinait à l'horizon, lui procurant l'effet d'un coup de masse sur son crâne. Elle tomba à genoux, noyée dans un océan de détresse.

Ils ont l'air réel... Elle se mit à trembler. Vraiment ? Elle regarda autour d'elle. Je pourrais être en train de rêver, ou mes ravisseurs pourraient être en train de me glisser des images dans le cerveau grâce à un encéphalogramme... Non, c'est beaucoup trop perché ! Au bout d'un moment de panique, une idée lui traversa l'esprit.

Elle se releva, et se tourna vers le mur, le vrai. Elle respira profondément. Une seconde, deux secondes, trois secondes. Finalement, son front rencontra violemment la pierre. Sa vision se troubla légèrement ; elle se frotta le crâne un moment, attendant que la douleur passe. Ce monde est définitivement réel.

Elle se rassit sur sa chaise en face d'un Erwin et d'un Livaï interloqués. Le désespoir avait disparu de la face de la jeune fille, laissant place à une certaine concentration.

« En effet, conclut-elle.

— Comment, dans ce cas ? lâcha le caporal-chef.

— Encore une fois, je n'en ai aucune idée. »

Une lueur apparut dans le regard du major. « Dans tous les cas, il est certain que je viens d'un endroit complètement différent d'ici. Je veux dire... », hésita-t-elle alors que son cœur battait à tout rompre. Comment leur dire un truc pareil ? Ils vont me prendre pour une tarée. Elle inspira longuement, et se résolut à se lancer.

« La situation que vous vivez est connue comme fictive à l'extérieur », débita-t-elle. « Il existe une série de livres racontant l'histoire d'un peuple encerclé par des Titans depuis un siècle et cherchant à les anéantir, et où vous figurez tous les deux, ainsi que d'autres personnes que j'ai croisées ici comme Jean et Reiner. »

Erwin fronça les sourcils. Livaï s'approcha de nouveau et la fixa, circonspect. « Prouve-le. » Marion toussota. « Par exemple... », commença-t-elle, mal à l'aise, en le regardant. Elle repensa à la manière dont il avait perdu ses deux amis durant sa première expédition hors des Murs. Elle ouvrit la bouche, mais se ravisa ; elle ne pouvait possiblement évoquer un évènement pareil.

« Vous vouliez ouvrir une boutique de thé avant de rejoindre l'armée. » L'intéressé se raidit. Elle ne lui laissa pas le temps de commenter et se tourna vers son second interlocuteur. « Vous avez un jour trouvé le carnet d'un soldat relatant sa rencontre avec un Titan qui parlait », enchaîna-t-elle. La stupeur de l'intéressé s'accentua.

« Du reste...

— Je pense que c'est assez, coupa le caporal-chef. »

Le silence se fit dans la pièce. « Tu sais donc des affaires confidentielles », conclut Erwin au bout de quelques temps. L'adolescente déglutit. Je n'ai jamais vu les choses sous cet angle... Elle finit par acquiescer, muette. Il joignit ses mains devant son menton et réfléchit un moment.

Marion se sentait de plus en plus mal à l'aise. Si j'avais réfléchi à ce que j'allais dire... Maintenant qu'ils savent tout ça, ils ne peuvent que se méfier de moi : bravo le veau. Bon sang...

« Je n'en dirai rien, balbutia-t-elle. Je sais que vous n'avez aucune raison de me croire, mais...

— En effet, intervint sombrement le petit homme.

— Livaï, elle est innocente. Je lui fais confiance pour garder secret ce qui doit l'être. C'est donc pour cela que tu avais cet objet sur toi, continua-t-il en sortant le portable de Marion d'un tiroir.

— C'est un téléphone portable, il permet de parler à distance avec des personnes, grâce à un système d'ondes. Il affiche aussi l'heure... Et celle qu'il avait affichée dans la forêt ne correspondait pas au moment de la journée où je suis arrivée... »

Elle marqua une pause.

« Enfin. Je connais la carte du monde. Pour réussir à cacher les murs et les Titans du grand public, il faudrait que l'on se trouve dans un vaste territoire désert, et très éloigné de la France...

— Nos terres font près de mille kilomètres de diamètre, fit remarquer Erwin.

— C'est plutôt petit à l'échelle planétaire. Le tour de la Terre fait quarante mille kilomètres, donc quatre cents murs Maria côte à côte. »

Elle réfléchit quelques secondes.

« Il y a bien un endroit... Au milieu du plus vaste pays du monde, qui s'appelle la Russie. Il doit faire environ dix mille kilomètres de long, et sa population se concentre sur un quart de son territoire total. Mais il serait délicat de cacher tout ça dedans, admit-elle d'une voix faible.

— Tu as un moyen de le démontrer ?

— Oui. L'heure change selon les pays. »

Le petit homme la gratifia d'un air dubitatif. Elle déglutit et expliqua le principe de fuseau horaire. « Là où l'on pourrait se trouver, il devrait y avoir environ huit heures de plus que chez moi... », conclut-elle. Elle montra son téléphone. « Puisqu'il affiche l'heure de là où je vis... Si on la compare avec l'heure d'ici, on pourrait vérifier ma théorie. »

Il se tourna vers Erwin, attendant sa décision ; l'intéressé accepta et Livaï attrapa le portable à l'envers. Il l'observa un moment, yeux plissés. « Il faut appuyer sur le bouton gris », précisa Marion. Il alluma l'écran avec méfiance. La lumière du téléphone éclaira son visage fin : il remit l'objet droit.

« Je n'arrive pas à lire ça. Marion ?

— Dix-sept heures trente sept. »

Il reposa le téléphone devant Erwin. Celui-ci sortit une montre à gousset de son pantalon. Il releva le visage vers Marion. « Neuf heures douze », annonça-t-il. Le cœur de cette dernière rata un battement. Je ne suis pas complètement perdue, pensa-t-elle alors que l'espoir renaissait en elle.

Il reprit sa feuille de notes, et écrivit quelques lignes. « Je garderai ceci avec moi », déclara-t-il en reprenant l'appareil. La lycéenne fit un léger geste en avant. « Il faudrait l'éteindre », dit-elle timidement. « Il a une énergie limitée, et si on le laisse constamment allumé, elle s'épuisera complètement et on ne pourra plus l'utiliser. »

Il lui tendit donc l'objet. Elle le regarda un moment, le cœur serré, puis appuya sur le bouton. Le portable vibra longuement. Elle le redonna au major, qui le mit sous clé.

« Bien », dit-il en se rasseyant. « Nous rediscuterons de tout cela à un autre moment. Les vérifications quant à ton identité de Titan commenceront demain, et seront menées par Livaï et Hansi. En attendant, tu resteras dans ta cellule. »

Les épaules de la jeune fille s'affaissèrent en pensant à l'ennui qui l'attendait. Au même instant, une faible lueur traversa furtivement le regard du plus petit. Ça l'amuse ? Peut-être que ça l'amuse. Chacun ses loisirs, mais ce n'est pas très gentil. On rappela Angela : elles sortirent de nouveau dans le long couloir ensoleillé. Mais alors qu'elles allaient retourner dans l'escalier en colimaçon, elle s'arrêta avec urgence.

Les souvenirs de la veille défilèrent dans son esprit. Émilie, Jean, le hall carré, les menottes, les cris, Livaï... Et Reiner. Reiner ! « Excusez-moi », débita-t-elle d'un ton tremblant. Angela posa ses petits yeux bruns sur elle : sa longue face se peignit d'une expression suspicieuse.

« Quoi ?

— J'ai..., s'étrangla la française. »

« J'ai oublié de préciser qu'il y a deux traîtres chez vous » ? Merveilleuse idée, tiens ! Elle inspira longuement, le cœur battant. « J'ai oublié quelque chose dans le bureau. » L'autre la dévisagea avec méfiance, mais fit tout de même volte-face. De nouveau, on frappa à la porte, on attendit, et Erwin les autorisa à entrer. Mais, cette fois-ci, elle se prit des regards surpris, et ferma le lourd battant au nez de sa garde. Les deux collègues froncèrent les sourcils dès qu'ils virent son air affolé.

« Reiner et Bertolt... Il faut absolument que vous les arrêtiez ! »

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