Début de carrière - Partie 2
Quartier général du Bataillon d'Exploration, le lendemain
« Pour résumer... », dit Livaï. Ses yeux clairs passèrent de la grille que venait de lui redonner Marion à Marion elle-même. Ils se trouvaient dans son petit bureau brièvement éclairé par la fenêtre encastrée derrière lui. Le peu de meubles qui se trouvait ici était dépoussiéré au possible ; il s'adonnait à cette tâche chaque matin, dès le réveil.
« Je vais passer l'éponge sur ton écriture affreuse... Tu viens de réussir ce teste de connaissances, sans sourciller. » L'adolescente posa ses prunelles vertes, à demi dissimulées par ses lunettes au rouge vif, sur ses petites mains fines. Sa face ronde et criblée de tâches de rousseur aurait presque pu être dissimulée par son carré châtain. Elle ne paraissait sérieusement pas à l'aise, peut-être car il l'avait balancée dans un puits la veille même.
« Oui », finit-elle par balbutier. D'accord.
« Et où est-ce que t'as appris tout ça ? Aucune faute, d'après la correction de Hansi. Que ce soit en mathématiques, physique, chimie, ou biologie... J'ai besoin d'explications.
— Eh bien... Puisque j'ai passé... »
Elle fronça les sourcils. « Environ douze ans à l'école, j'ai eu le temps de voir ça de long en large. » Silence. C'est quel genre de luxe, ça ? Il ferma les paupières un instant, puis braqua de nouveau ses pupilles sur elle.
« Zackley a accepté que tu restes chez nous. Tu vas devoir te coller à étudier les mauvaises herbes et les merdes de piaf du coin. Ton objectif : déterminer où on se trouve, et éventuellement comment tu es arrivée là. Tu as bien dit que tu en étais capable. On attend des résultats précis. »
Elle bloqua un instant ; ses lèvres roses s'entrouvrirent, hésitèrent, se refermèrent finalement.
« Et... Administrativement ? hésita-t-elle.
— On t'a choisie une jolie petite identité de noble, lâcha-t-il. Marion Rovoff. »
Elle écarquilla brutalement les yeux.
« Rovoff ? répéta-t-elle avec ahurissement.
— Quoi, le nom te plaît pas ? Tu n'as pas vraiment le choix.
— Non... »
Elle tripota machinalement le bout de la manche de sa veste du Bataillon. Étrange vision que de voir quelqu'un avec l'uniforme, mais sans équipement. « Rien », souffla-t-elle alors. Rien. « On t'a attribuée de faux parents. Ils ont paumé leur fille y a quelques temps, les Brigades ne l'ont pas retrouvée... » ... et Erwin a éventuellement fait joujou avec la justice pour libérer l'enfoiré qui m'a embauché avant que le rejoigne le Bataillon, mais c'est un détail, paraît-il.
« Quelle histoire est-ce que je dois raconter ? murmura-t-elle, le visage fermé.
— Tu viens de Sina. Tu as passé tes études, et t'es faite enlever par tu-ne-sais-plus-qui. Quelle chance, tu te retrouves au Bataillon. Après discussion avec moi et Erwin, tu as décidé de nous remercier en étudiant pour nous, car tu ne savais pas sur quel sujet te pencher. Il y a plus crédible, mais il va falloir se contenter de ça. Dernière chose : dès que t'arrives à une quelconque conclusion, tu viens me voir. N'en parle à personne d'autre. Compris ? »
Elle l'observa un instant, baissa le menton, acquiesça faiblement. Son air sombre ne lui dit rien qui vaille, mais il ne releva. C'est normal, je suppose. Va te faire balancer du monde extérieur à ici, avec des titans prêts à te bouffer. « Des questions ? » Elle secoua la tête ; il se leva donc de sa chaise.
« A partir d'aujourd'hui, tu rejoindras une chambre double. Conny Springer t'accompagnera dehors, puisqu'il ne risque pas de trouver tes démarches étranges, au vu de son quotient intellectuel. Tu iras après manger. Si possible, conclue quelque chose avant qu'on rameute le titan. Je vais te montrer le chemin jusqu'au dortoir, et ta camarade de chambre viendra te chercher. »
Nouvelle approbation muette. Il plissa les paupières, sortit sa clé, et se dirigea vers sa porte de pin mal poncée. Elle le suivit après une brève hésitation ; ils sortirent dans le corridor étroit. Son office, à lui, se trouvait au rez-de-chaussée. Le raffut des soldats prenant soin de leur équipement raisonnait déjà contre les murs de vieille pierre.
Une fois dans le hall carré, il lui indiqua la direction à prendre, et la laissa là.
***
L'adolescente passa les heures suivant son entretien avec Livaï dans un ennui mortel. Ses pensées se désordonnaient, s'effaçaient dans le brouillard d'angoisse et de solitude qui envahissait chaque parcelle de son cerveau. Ni l'armoire de pin calée à côté de la porte, ni les deux lits raides collés de part et d'autre de cette pièce étroite, ni le bureau auquel elle était assise ne retenait son attention.
Tu trouves pas que tu es dans une bonne grosse merde, là ? la titillait elle-ne-savait-quoi – son démon intérieur, peut-être autre chose, elle n'y connaissait rien à rien. Et quand bien même, ses capacités d'analyses étaient bien trop réduites. Elle était spectatrice, si ce n'était victime. Non. Non, c'était elle qui pensait. Un joli monologue, qu'elle écoutait autant que construisait.
Je veux dire, tu es bien loin de ta famille, et de ta maison, et éventuellement de ton pays. Y a des grands méchants pas beaux qui t'attendent dehors pour te bouffer, tu n'as manifestement aucune porte de sortie, et si un ennemi apparaît de nulle-part, t'es encore plus foutue que tes pseudo-camarades. Et on en parle, d'eux ? Reclus dans le mur Rose, avec une inconnue inutile sur les bras. Une bouche à nourrir en plus...
« Mais ce n'est pas tant que ça... », marmonna Marion. Oui, c'est vrai. Ce n'est pas tant que ça. J'ai raison. Mais attends, j'ai mieux. Tes parents. Ses paupières s'écarquillèrent brutalement. Ils étaient vachement louches... Juste avant ton enlèvement. Tu le vois, le parallèle ? C'est peut-être eux qui t'ont balancée ici. Allez, ils ont au moins participé à la boucherie que tu vas vivre. Je parie que tu pesais bien fort sur eux. Et la porte de sortie, elle est où ? Nulle-part.
Nulle-part.
C'est vrai. Nulle-part... Si. Elle remonta ses prunelles vertes sur ses mains, puis sur les carreaux en losange donnant sur la cour intérieure. Le soleil brillait, dans le ciel bleu. Une haute tour, ou un poignard... Ou une corde ? Non, il n'y a rien, ici. Enfin, il y a moyen. Ils ont un puits. Non, il n'y a rien, ici. Il y a toujours un moyen ! Réfléchis. Avec ton cerveau qui ne te servira jamais, car tu n'iras pas plus loin que le baccalauréat, car papa et maman n'ont pas les moyens, et que tu pesais certainement sur eux, et que c'est peut-être pour ça qu'ils t'ont virée. Assez extrême, certes. Alors, où est la solution ?
Où était la solution ? Elle n'eut pas le temps d'y penser. La porte du dortoir s'ouvrit doucement. La lycéenne se retourna dans un sursaut ; dès qu'elle reconnut le visage délicat et les prunelles bleues d'Emilie, son cœur rata un battement. La soldate lui servit un sourire brillant. « C'est donc avec toi que je vais partager cette chambre ! »
Silence. La plus petite se contenta de la dévisager, bouche bée. Son cerveau, jusque-là en ébullition, ralentit d'un coup... Mais se réveilla dès que l'autre lui servit un air surpris, et s'approcha d'elle. « Il y a un problème ? » hésita-t-elle avec inquiétude.
L'intéressée se réveilla brutalement ; elle maudit ses joues qui commençaient à s'échauffer. « Ah, non ! Non, aucun », rit-elle nerveusement. Marion, bordel. Calme-toi deux secondes. C'est quoi, ça ? Et elle y parvint. Cependant, le soulagement de son interlocutrice manqua de la plonger de nouveau dans cet état embarrassant.
« C'est l'heure du déjeuner. Je t'accompagne au réfectoire », expliqua-t-elle. L'adolescente hocha la tête, et quitta sa chaise. A quoi avait-elle pensé, déjà, avant son arrivée ? A se foutre en l'air ? N'importe-quoi. On me met des études sous le nez. Je vais quand même pas les ignorer. Les sciences, c'est trop bien. Et puis, même si je suis dans une merde pas possible, les choses vont s'arranger. Pas de problème, n'est-ce pas ?
Le réfectoire qui l'accueillit alors lui explosa presque à la figure. Elle n'avait porté aucune attention au chemin qu'elles avaient emprunté. Plus précisément, elle n'avait fait que regarder la queue-de-cheval châtain de sa colocataire se balancer au rythme de ses pas.
Et voilà qu'une large pièce en sous-sol se dévoilait devant elle comme par magie. Chaque poutre épaisse et brune cachait deux tables ; elle en comptait bien une quarantaine, pour huit soldats chacune. Environ trois cents combattants étaient réunis ici, et discutaient vivement entre deux bouchées de bouille d'elle-ne-savait-quoi.
Elle repéra alors le buffet aux immenses marmites type self militaire. Deux gars faisaient le service, derrière. Jean, et Conny, reconnut-elle à la face allongée du premier et au crâne rasé du second. Ce fut plus perturbée que jamais qu'elle se présenta à eux.
Jusque-là, seules Angela Haussman et Ymir l'avaient gardée. Et ce n'étaient pas des dessins qui se trouvaient devant elles : ils étaient bien là, en trois dimensions, avec des défauts par-ci et des mimiques par-là. « Ton assiette », dit alors le plus grand des deux.
Elle baissa subitement ses yeux verts sur celle-ci. En effet, un joli plateau uniquement composé d'une gamelle, d'un verre, de couverts et d'un bout de pain l'attendaient. Elle s'en saisit donc, murmura un remerciement, et repartit vers Emilie, qui patientait plus loin. Emilie, laquelle l'invita à la suivre encore, et s'installa... A la table d'Eren, de Mikasa, et d'Armin.
Le premier lui jeta un coup d'œil, la seconde ne lui accorda pas une once d'attention, et le troisième la scruta un court moment. Ils ne saluèrent que sa camarade de chambre. Quelques secondes de silence coulèrent entre eux ; Marion goûta, hésitante, la nourriture qui fumait devant elle. Goût amer, plat... Et pourtant, elle le sentait, qu'elle était nourrissante.
« Comment vont tes blessures ? » demanda alors le brun. Elle le gratifia d'une expression surprise, qui se ferma bien vite. « Ça va. » Bon sang. Lui aussi, c'est une copie conforme de son alter-ego. Ce seul fait lui laboura un peu plus la poitrine. Elle se contenta de se concentrer sur son déjeuner, et abrégea la torture du plus vite qu'elle le put.
Elle n'avait qu'une hâte : achever ces recherches, débarquer à Shiganshina, apprendre le secret ô secret sur les géants, et rentrer chez elle, dans sa petite ville. Dans sa petite ville, où l'attendait Antoine. Antoine. Son visage fin et ses longs cheveux noirs et ses rictus ironique lui revinrent en mémoire avec détail.
Comment avait-il réagi à sa disparition ? Ils avaient toujours eu une amitié fusionnelle, depuis l'école primaire. Et il lui avait dit, qu'il lui pèterait la gueule, si elle ne venait pas à son épreuve de français. Il a dû s'en remettre... Non. Elle le savait, le gars avait dû être un poil perturbé. Il s'en remettra, alors, corrigea-t-elle sans grande conviction. Il s'en remettra...
***
Elle se retrouva à l'extérieur du quartier général avant même qu'elle ne le remarque. Si, elle se souvenait du « à tout à l'heure ! » bienveillant d'Emilie. Et voilà qu'autour d'elle s'étalaient des arbres, plein d'arbres. Des chênes, surtout. Des chênes ? Elle fronça les sourcils, et s'approcha de l'un d'eux. Une branche lui était accessible, juste au-dessus d'elle.
Elle ignora l'air stupéfait de Conny – individu auquel elle n'avait pas spécialement fait attention – pour l'arracher de son tronc. Et elle l'observa longuement, très longuement. Ils étaient en juin, ces bougres végétaux étaient très vivaces. Alors, lorsqu'elle reconnut la feuille aux nombreux rebonds et à la couleur foncée qu'elle tenait entre ses doigts, ses yeux s'écarquillèrent lentement.
Les informations sur la faune et la flore du Nord du monde défilèrent dans son crâne. Elle les revit, les nombreuses cartes qu'elle avait consultées avec Antoine lorsqu'ils s'ennuyaient de pied ferme chez lui.
Ce genre d'arbres... Ses lèvres s'entrouvrirent sous le choc. ... on n'en trouve pas dans les plaines vides de Russie. Ses prunelles passèrent frénétiquement d'un végétal à l'autre. Il y avait des pins, aussi. Des pins noirs, d'Europe, elle le voyait. Elle courut presque vers l'un d'eux ; des brindilles qui craquaient sous ses semelles au vent frais qui siffla dans ses cheveux en passant par le hoquet surpris de l'explorateur, elle n'eut cure.
Ces spécimens étaient recouverts de larges écailles, nettement fissurées. Elle leva le nez vers le ciel, les bras tremblants ; les frondaisons au travers desquels passaient les rayons du soleil s'élevaient à quelques dizaines de mètres au-dessus d'elle. Caractéristique, encore une fois, des arbres européens et alentours. Une chose est sûre : ici, ce n'est pas la Russie. Ce n'est pas la Russie... Elle serra rageusement les dents.
Mais ce n'est pas avec des chênes et des pins que je peux aboutir à une quelconque conclusion ! Les pierres, les animaux, la terre... La terre. La terre est souvent caractéristique de la région où on se trouve, non ? Ici, la flore correspond à un climat continental. Logique. Ils n'ont jamais vu la mer, ici, après tout. Et elle correspond aussi à un climat continental du nord. Jusque-là, tout va bien. Et à un climat européen...
« Euh... », hésita alors le jeune homme. « Excusez-moi. Qu'est-ce que vous faites ? » Elle se redressa brusquement : il était en train de la dévisager avec incompréhension. Elle ne nota qu'à cet instant-là qu'elle venait de déchirer en mille morceaux la feuille qu'elle avait arrachée. « Excusez-moi. » Ses sourcils se froncèrent rapidement.
Pourquoi est-ce qu'il me vouvoie ? Elle ouvrit la bouche, bloqua, posa simplement ses yeux verts sur le sol. Ah. C'est vrai. La terre. « Rien », souffla-t-elle donc, avant de s'agenouiller. Que faisait-elle ? Elle ne le savait pas. Elle allait bien trop vite. Il fallait qu'elle prenne son temps.
J'ai tout l'après-midi devant moi, non ? Non. Non, son cœur se tordit brutalement dès qu'elle vit la noirceur hideuse du chemin qu'elle avait foulé. Du tchernoziom... ? Tchernoziom, et c'est qu'il y en avait un paquet, autour d'elle. Tchernoziom, le foutu sol qu'on trouvait principalement au sud de la Russie et...
A l'est de l'Europe...
***
Dans une petite ville de l'Ouest de la France, 28 juillet 2017
Antoine s'affala dans son fauteuil de bureau en soupirant. Ses longs cheveux noirs et fins retombèrent sur son visage blanc, cachant partiellement ses yeux clairs brillant dans la pénombre.
Il se trouvait dans une petite chambre meublée d'un lit simple, d'une bibliothèque croulante de livres, d'une penderie et d'un tapis bleu recouvert de journaux papier. Des stores descendus devant une fenêtre filtraient les rayons du soleil.
Devant lui trônait un bureau simple, sur lequel étaient posés un ordinateur portable et un fixe, dont la tour émit quelques claquements secs. Il tapota dessus en fronçant les sourcils. Cela faisait un mois qu'il passait ses journées et ses nuits enfermé dans cette pièce, sortant seulement pour se nourrir et se laver. Sa machine tournait sans relâche ; il pouvait comprendre qu'elle commence à montrer des signes de fatigue.
La semaine ayant suivi la disparition de son amie, seuls les médias régionaux avaient relayé l'information, relatant toujours les mêmes faits : « Une adolescente portée disparu le matin de son épreuve de français au baccalauréat », « Qu'est-il advenu de Marion Griffonds, mystérieusement volatilisée le quinze juin dernier ? », « Avis de recherche : une jeune fille recherchée dans toute la région Nouvelle-Aquitaine ». La gendarmerie avait eu beau chercher, Marion n'avait laissé aucune trace.
Ainsi, les recherches devinrent nationales. On suggéra une fugue, un enlèvement ; aucune de ces pistes n'aboutirent. Le vingt-neuf juin, le Times fut le premier journal étranger à évoquer ce cas. Une cascade d'autres suivirent ; puis, le lendemain, tout s'arrêta brusquement.
Si le florilège d'hypothèses émises avait mis la puce à l'oreille au jeune homme par leur nature sans queue ni tête et par le nombre de sources peu fiables – ce qui voulait simplement dire que la police n'avait effectué aucun avancement –, cette violente interruption acheva de l'alarmer.
Malgré ce que tout le monde semblait penser, il était persuadé que Marion était encore bien vivante. Qu'est-ce qui aurait justifié un tel blocage de l'information, si ce n'était pas le cas ? Ce n'était pas une affaire de réseau de prostitution, ou de meurtre ; ce n'était ni un petit groupe, ni un individu isolé qui avait enlevé l'adolescente : c'était une organisation bien plus puissante – assez pour manipuler les médias de toute la planète de la sorte.
Il s'était mis en tête de résoudre cette énigme seul. Il ne pouvait pas supporter de rester les bras croisés alors que son amie était en difficulté. Et comme il ne pouvait y parvenir légalement, il avait décidé de se débrouiller autrement.
Il avait donc sacrifié son ordinateur portable, vidant le disque dur afin de ne laisser aucune trace de son identité. Il avait installé une version spécifique de Linux ainsi qu'une armée d'anti-virus et de pare-feux, puis avait téléchargé Tor. Après mille précautions, il l'avait finalement lancé, et avait découvert le fameux et ô ténébreux dark web, qui allait lui permettre de récolter des informations seul.
Cela s'était avéré plus complexe que prévu. L'adolescent n'avait d'abord rien trouvé qui concernait, de près ou de loin, la disparition de Marion. Il n'avait toutefois pas abandonné, et avait continué ses recherches, zigzaguant entre les fausses pages Wikipédia, les ventes d'armes et de faux passeports, et les sites pornographiques en tout genre.
Il savait qu'il n'avait accès là qu'à un pourcentage bien faible du « web sombre ». Cela le frustrait au plus haut point ; c'était à peu près aussi facile que de chercher une aiguille dans une botte de foin. Il avait toutefois persévéré pendant trois semaines.
Et après une matinée de travail, ce jour-ci, il venait de trouver un lien vers une sorte de journal clandestin – pour son plus grand bonheur, anglophone. Un article du nom de « the missing teenager's jail=walls ??? », se résumant à une vidéo, attira son attention. Il lança l'animation.
La scène était filmée dans une sorte de ville souterraine, au style bien familier. Deux personnes, dont le caméraman, se trouvaient dans une pièce au plancher grinçant et aux murs de pierre prête à s'effriter.
L'homme se dirigea vers une fenêtre en riant. Au-dehors, quelques personnes à l'habit tout à fait conforme à celui de l'armée dans l'Attaque des Titans dressaient leur fusil, visiblement sous tension. Leur regard convergeait vers un groupe d'individus, dont l'un d'eux, un blond, appuyait la lame d'un couteau sous la gorge d'une jeune fille. Le visage de cette dernière était caché par un sac de toile ; son pantalon et sa chemise blancs étaient impeccables.
Des paroles, certainement en allemand, furent échangées, recouvertes par les gloussements étouffés de la personne qui filmait. L'otage fut égorgé : l'excitation des deux autres grandit. Soudain, un cri s'éleva dans le dos de l'homme ; il se retourna dans un sursaut. La dernière image de la vidéo montrait une silhouette floue qui courait vers son camarade.
Le silence se fit. Antoine resta cloué sur place, la main sur sa souris. Il venait ni plus ni moins de voir une scène réelle adaptée de l'un de ses mangas favoris. Il secoua vigoureusement la tête et visionna le film en boucle, cherchant, en vain, un détail le convainquant que c'était un film amateur.
Rien n'y fit. Il se frotta les yeux en grommelant. Le titre ne faisait sûrement pas référence à Marion ; il était tout bonnement ridicule qu'elle ait été enlevée par une bande de fans de cosplay.
Il s'apprêta à fermer l'onglet puis se ravisa. Cette histoire l'intriguait. Il prit le risque de télécharger la vidéo, après moult préparations, et ferma le tout pour s'étaler dans son lit, vidé de toute énergie.
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