attack_on_titan&0.7 - Partie 7
Quelque part dans le Nevada, 15 avril 2003
attack_on_titan&0.3. Celle-là avait mis plus de temps que prévu, puisque les composants étaient arrivés en retard. Déjà que les créer était compliqué...
C'étaient ses collègues ingénieurs qui s'en chargeaient. Elle leur donnait le principe général, ils s'y pliaient. Seul inconvénient : elle avait au moins dix interlocuteurs différents. De cette manière, les informations étaient éparpillées un peu partout – moins risqué que de les concentrer sur un ou deux hommes dont l'allégeance n'était peut-être pas assez profonde... Mais tout de même, on faisait mieux, niveau praticité.
Ils pouvaient transférer des messages grâce au premier modèle ; des objets avec le second. Ce pauvre numéro trois n'était rien de moins qu'une synthétisation de leur mère. Désormais, les américains pouvaient communiquer avec leurs homologues à l'aide d'un simple boîtier qui aurait pu s'apparenter à une calculatrice grand format... D'où le nom de « Calculette de l'Espace-temps ».
Un écran, un clavier, une batterie, un bloc pour la particule. Mais la lumière, elle, ne disparaissait pas autour. L'Aspirateur à Photons devait certainement se former dans la Calculette même... Là où la particule devait faire son boulot. Sa théorie était crédible, mais il lui manquait des preuves rigoureuses.
Suivait attack_on_titan&0.4. Avec ça, elle pouvait transférer... Des vers de terre. Une amorce pour les organismes complexes. Suffisait d'utiliser le bloc, ça fonctionnait assez bien. Mais les souris, elles, s'étaient retrouvées éclatées au retour. Au moins avait-elle trouvé le moyen d'intriquer une particule arbitrairement, tant qu'elle se trouvait au quarante-et-unième siècle...
Elle avait ensuite eu recours à un électro-encéphalogramme signé Rebecca et compagnie pour attack_on_titan&0.5. Le truc aux nombreux points blancs qui servait usuellement à récolter des données sur le cerveau avait évolué en « je-te-scanne-pour-éviter-que-tu-te-retrouves-en-poussière-dans-deux-mille-ans » dès 2000. La chercheuse se demandait d'ailleurs s'il n'avait pas d'autres fonctions, mais elle n'était pas chargée de cette partie-là.
Toujours était-il qu'elle était parvenue à transférer un humain, qui était revenu vivant. Elle avait bien cru qu'il allait y passer, avec les cris qu'il avait poussés... Le moment avait été affreux, mais nécessaire. Elle avait bien tenté d'améliorer la chose avec la version suivante : cela s'était révélé vain.
Pour ne rien arranger, elle n'était toujours pas autorisée à approcher de nouveau la machine de fortune de la zone 51 par laquelle elle était arrivée. Elle supposait sans mal que Rhys tenait à ce que tout le cheminement de ses recherches se fasse sans perturbations extérieures. L'entièreté de son travail devait venir d'elle. Une perte de temps, diraient certains ; mais lorsqu'on parlait de transferts spatio-temporels, ce problème n'existait plus.
Tout comme la seconde génération, ils avaient déplacé la machine numéro cinq dans une salle fortifiée, et s'attelaient désormais à en faire quelques copies. Ainsi avaient été envoyés Hannah et Robert Steel, fruits des tests d'autres scientifiques sur l'ADN.
Elle trempa ses lèvres dans le thé vert que lui avait fait la jeune mère. Elle ne voulait forcer personne à servir de cobaye pour cette expérience-là ; seulement, il fallait bien tenter d'envoyer des groupes dans le futur. Elle avait donc cherché des volontaires, et l'un d'eux allait arriver... Dans cinq minutes.
Elle soupira longuement. La salle était toujours autant en bordel, avec ses différentes machines – sans compter tous les éléments massifs qui les précédaient. Ils avaient désormais plusieurs PC, dont les branchements prenaient une place folle. Elles avaient dû se résigner à enlever des tables, jusqu'à n'en garder qu'une pour tous leurs papiers de recherches.
Enfin... Elle passa une main légèrement tremblante sur son visage. Elle avait beau vérifier encore et encore les câbles, le programme et le système, elle craignait pour les personnes qui allaient devoir se mettre dans la cellule transparente de deux mètres cubes.
Et l'ambiance qui régnait au laboratoire n'arrangeait rien : depuis l'affaire Rhys, elle s'était automatiquement distancée de Rebecca. Cette dernière se cachait les yeux, c'était à la limite de l'affolant... Mais c'était compréhensible. La situation était très lourde pour elle, et Marion avait dû se contenter de lui expliquer qu'elle ne voulait plus qu'elles couchent ensemble. Elle ne s'était toutefois pas détournée d'elle sur le plan amical, et n'avait pas non plus cessé de l'aider avec Historia.
Celle-ci se ramena d'ailleurs ; elle le sentit, à la petite main qui attrapa le bas de son pull gris. Sa face ronde, éternellement coiffée de ses cheveux dorés et fins, était levée vers elle. Un léger ennui s'y lisait.
« Marion.
— Oui ? »
Elle tendit les bras, ses prunelles bleues plantées dans les siennes.
« Les bras.
— D'accord, sourit-elle. Ça marche. »
Elle la souleva de terre, s'assit sur sa chaise, installa la plus jeune sur ses genoux. Là, celle-ci laissa échapper une exclamation ravie. La jeune femme se contenta de baisser le menton, la gorge nouée.
Le fait que Rebecca soit partie elle-ne-savait-où ne la touchait pas vraiment ; c'était l'absence de Kenny qui laissait un vide. Pour une raison obscure, Jelena lui avait demandé de poireauter dehors en attendant qu'elle ne vienne. Qu'est-ce qu'elle voulait ? Elle n'en avait pas la moindre idée, et ce seul fait lui arracha un énième soupir.
Plus qu'à attendre...
***
Au même instant
Kenny se trouvait dans le couloir gris et gris et encore gris... Ce qui n'était plus dans ses habitudes. Avant que Rhys ne ramène sa poire, il passait déjà bien plus de temps au laboratoire ; après, il avait encore augmenté la fréquence de ses visites au cas où le commandant ne se pointe de nouveau. Désormais, Marion lui avait clairement signifié qu'il était le bienvenu là-bas. Lui et ses Deux Tours s'étaient donc installés sur un siège au fond de la pièce, et observaient parfois ce qu'il s'y passait avec distraction.
Mais ce jour-ci, il devait faire le guet. Jelena allait tester le nouveau jouet de Marion avec Frank Leonhardt, et manifestement à cœur joie. La blonde était déjà un personnage étrange ; là, elle atteignait peut-être bien les limites de la bizarrerie. Elle arriva d'ailleurs, toujours accompagnée de son air stoïque.
« Bien », dit-elle en arrivant à sa hauteur. Elle était toujours habillée de son uniforme kaki, ses cheveux platine étaient toujours coiffés en coupe au bol, ses oreilles se décollaient toujours autant, ses yeux noirs... Est-ce qu'elle essaie de me scruter, là ? Il eut beau chercher, il n'en eut aucune idée. Elle était incompréhensible.
« Prête ? demanda-t-il donc.
— Oui. Enfin... »
Elle se gratta machinalement le cou. « Ils jouent à un, deux, trois, soleil », annonça-t-elle tranquillement. « Dans, je ne sais pas... Un trimestre ? » Elle haussa les épaules. « On saura le vainqueur. En espérant que tu participeras aussi », conclut-elle.
Le silence qui suivit lui explosa à la tronche. Le jeune homme ouvrit la bouche, stupéfait au possible... Et continua de béer un très long moment. Est-ce qu'elle venait de lui sortir un code de la Résistance 2.0 ? « Un, deux, trois, soleil » : il doutait que les soldats américains ne s'y amusent en pleine journée. « Ils vont arriver », que ça voulait dire...
Et là, il était dans la merde. S'ils attaquaient, il allait encore devoir choisir son camp... Il n'en aurait rien eu à foutre sans Marion, mais désormais, à qui devait-il obéir ? Suivre le choix de son amie, peut-être. Il avait bien fait ça, la dernière fois. Voilà sur quoi il allait se rabattre.
Il lui avait dit, après tout, qu'elle avait son flingue. Oui... Je lui raconterai ça. On verra bien ce qu'elle en pensera. Et selon... « Tu as l'air hésitant », intervint alors sa collègue. « Tu as déjà oublié ce qu'il a fait ? » Il se raidit.
« Rien ne l'en empêcherait de nouveau, ponctua-t-elle.
— Je suis là, aux dernières nouvelles. »
Petit rictus. « Sa centaine de soldats aussi. » Elle se dressa sur la pointe des pieds, atteignit son oreille. « Que se passerait-il, si elle désobéit ? » chuchota-t-elle. « Peut-être que ta mère a pu se débrouiller, dans sa jeunesse... Mais tu n'es pas comme elle. Et puis... Tu as déjà senti l'odeur des thés que lui fait Rebecca ? »
Il écarquilla les yeux. « Les travaux de Marion sont leur meilleure arme. Ils sont prêts à tout pour qu'elle les continue... Et pour qu'elle ne les diffuse pas à l'extérieur. Tu le sais bien, Kenny... » Elle eut un sourire audible.
« Un mort ne parle pas. »
Rien de plus. Elle revint à sa place, retrouva son impassibilité, s'adossa au mur ; mais le jeune homme, lui, fut incapable de bouger.
Marion avait choisi de rester ici après les attentats... Seulement, Rhys ne lui avait pas encore fait la démonstration de sa violence. Désormais, qu'est-ce qu'elle voulait ? Non. Il passa une main sur son front. Qu'est-ce que je dois mettre en priorité ? Sa sécurité, ou sa volonté... ? Si elle est en danger ici... Son cœur se tordit violemment. Sa vie avant tout, trancha-t-il.
« Tu ne vas pas rester planté là », énonça-t-elle de sa voix plate. « Je peux attendre mon cher camarade, tu sais. » Il la dévisagea un moment. Si elle était du côté de la Résistance, elle n'allait probablement pas risquer la vie de Marion. Ils voulaient manifestement la récupérer...
« Un mort ne parle pas. » Il prit les devants, et s'avança dans le corridor gris avec rapidité. Une porte métallique plus tard, il débarqua dans le laboratoire. Il fut presque soulagé de voir que Marion était assise face à l'un des PC installés sur la table la plus encombrée de la pièce. Sur ses genoux, Historia, qui lui jeta un regard curieux.
La jeune femme se retourna à son tour. Lorsqu'elle le vit, elle posa l'enfant, se leva, marcha vers lui, et enfonça sa tête dans son long manteau. « Kenny », bougonna-t-elle. « T'en as mis, du temps. Je m'ennuyais. Puis, c'est nul, quand t'es pas là. » Il pinça les lèvres, mais posa, comme toujours, une main sur le haut de son dos.
« Je suis jamais bien loin.
— Oui, mais quinze mètres, c'est trop !
— Tu as bien survécu pendant des mois.
— Je me disais que tu voulais pas voir ma tronche.
— Sérieusement ? lâcha-t-il.
— Non. C'était une blague. »
Il se pinça l'arête du nez.
« Dis, Kenny, reprit-elle sur le même ton ennuyé.
— Oui.
— J'ai une question.
— Oui.
— Une question capitale.
— Oui.
— Genre, plus important que ça, tu m...
— Tu vas la poser, oui ?
— Tu m'aimes ? »
Il manqua de s'étouffer avec sa salive.
« C'est quoi, cette question ?!
— Oh. Je prends ça pour un non.
— Te fous pas de moi !
— Je peux comprendre, après tout. Je suis communiste.
— Mais... »
Il passa une main sur son visage.
« Ça n'a aucun rapport, bon sang.
— Je veux dire, t'aime pas le communisme... se lamenta-t-elle.
— Je n'aime pas le rouge, corrigea-t-il.
— Tu n'aimes pas mes lunettes ?!
— Si !
— Je vois. »
Elle marqua une pause. Elle a enfin...
« Tu préfères mes lunettes à moi.
— Putain de merde. Bien sûr que non, énonça-t-il entre ses dents serrées.
— Dis. »
En entendant son ton bien plus sérieux, il baissa la tête. « Est-ce que tu m'aiderais, si j'étais en danger ici ? » Silence. « Oui », finit-il par dire. Ses doigts remontèrent sur l'arrière de la nuque de la jeune femme, s'y arrêtèrent, la maintinrent. Il inspira longuement, la gorge nouée.
« Jelena m'a parlé de quelque chose. »
Lien vers l'image : https://twitter.com/_pon_ko_tsu/status/995260180878131200
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top