Chapitre 20 - Niall

La série tourne en fond sonore. Impossible de me concentrer sur l'épisode, Ciara ne quitte pas mes pensées. Ces quelques jours sans elle sont une torture, j'aurais aimé qu'elle ne reparte jamais. J'aurais aimé rester avec elle dans mes bras. À ses côtés, mon cœur bat comme jamais. Je ne pensais plus pouvoir avoir quelqu'un dans ma vie. Malgré mes craintes et la peur que mon état peut inspirer, elle est restée. Je n'ai jamais été aussi content que ma voiture tombe en panne ce fameux jour de février. Il semblerait que le destin ait décidé de la mettre sur ma route pour me sortir de ma léthargie. Encore quelques jours à patienter avant de la retrouver. Le temps est si long sans elle...

Mon téléphone vibre. Je porte mon attention sur la notification du message.

Ciara
[Tu me manques, je pense à toi.]

Ces mots, adorables, auraient été moins intenses s'ils n'avaient pas été accompagnés d'une photo explicite de ma petite amie – ma petite amie... –, la main dans la culotte et le regard coquin. Mon sang ne fait qu'un tour. Je l'appelle immédiatement en visio.

— Dis donc, toi, tu pourrais prévenir avant d'envoyer des photos pareilles.

— C'est pour l'effet de surprise, rigole-t-elle. Ça ne te plaît pas ? Tu veux me punir d'être une vilaine fille ?

J'avale difficilement ma salive et tire sur le col de mon tee-shirt. D'un coup, j'ai chaud. Très chaud. Je maudis la distance qui nous sépare.

— Eh bien oui, tu mériterais une punition. Imagine si j'étais avec un client, avec un pote, avec... Qu'est-ce que tu fais ?

Ciara ferme les yeux et pince les lèvres en souriant. Elle penche son téléphone. Ma bouche se remplit de trop de salive, mais ma gorge reste bloquée. Ses doigts s'agitent sous son dessous.

— T'es en train de...

— Comme je te l'ai dit, je pense à toi, poursuit-elle en gémissant.

— J'aime que tu penses à moi comme ça. J'aimerais tellement que tu sois là...

— Et que me ferais-tu ?

L'écran revient sur son visage lumineux. Ma main glisse sous mon jogging et caresse mon érection naissante. Je tente une approche que je n'oserais peut-être pas dans le réel, du moins pas tout de suite.

— Pour commencer, je te donnerais une fessée pour ton arrogance.

— OK, j'aime ça. Ensuite ?

Sa voix s'infiltre en moi et s'empare de mes sens. Me masturber en pensant à elle est une chose, le faire par vidéo interposée, sans pouvoir la toucher, est encore plus excitant.

— Je t'attacherais les poignets aux barreaux que je vois sur ton lit.

L'espace d'une seconde, je me demande si un autre a déjà eu l'idée. Leur utilité m'a immédiatement sauté aux yeux. Je secoue la tête pour faire taire mon esprit qui divague et revenir à l'instant présent.

— Tu me veux donc à ta merci ? glousse-t-elle.

— Si c'est le cas, qu'en dis-tu ?

— J'ai hâte de connaître la suite de cette histoire.

Elle ferme les paupières et joue avec sa lèvre. Son bras remue encore. Mon sexe se tend en imaginant ce qu'elle se fait. Ce petit jeu me plaît énormément.

— Je parsème ton dos de baisers et laisse traîner ma langue, jusqu'à arriver à ton joli derrière.

— Encore une fessée ? quémande-t-elle, haletante.

— Autant que tu le voudras.

Je lui détaille chaque geste que je pourrais lui faire. Mon imagination déraille au moment où elle me montre à l'écran ses doigts entrer en elle.

— J'ai envie de te sentir en moi, souffle-t-elle.

Après tout, le virtuel n'a jamais tué personne. Je plonge donc dans notre fantasme sans hésitation.

— À genoux derrière toi, je frotte ma queue entre tes fesses, puis sur ton clitoris.

— J'aime que tu me désires. Montre-moi.

Ma respiration accélère, autant que les battements de mon cœur. J'abaisse mon téléphone au niveau de mon érection que je masturbe pour qu'elle constate l'effet qu'elle produit sur moi.

— Monsieur l'ours a une grosse envie on dirait.

— Tu n'as pas idée.

La caméra me la montre en train de jouer avec son sexe. Cette vision, couplée à ses soupirs de plus en plus prononcés, a raison de mon endurance. J'accélère mon mouvement, puis j'éjacule dans un râle et m'en fous plein les mains. Elle gémit fort à son tour, puis remet l'écran face à elle en criant mon prénom.

— Tu trouves ça drôle ?

— Pas du tout, c'était génial. J'ai adoré faire ça.

Je pose mon téléphone le temps de me nettoyer avec un mouchoir. Elle continue de me parler.

— J'ai hâte de faire ça en vrai.

— Je...

Je récupère l'appareil et plonge mon regard dans le sien. Elle se tait et nos respirations se calent ensemble.

— Oui. J'ai hâte, moi aussi.

— Tu te lâches enfin, monsieur l'ours ?

— Je vais essayer.

— Je t'aiderai à y parvenir.

Grâce à elle, j'envisage de reprendre une vie normale. Mais les gens autour d'elle auront toujours peur que je la contamine. On a beau leur expliquer que dans pareille situation ce n'est pas possible, il suffit d'écouter Aïdan qui ne veut rien savoir. Les idées reçues restent difficiles à changer.

— J'espère que...

— Chut, me coupe-t-elle. Tout ira bien. Vivement que tu arrives.

***

À la sortie de l'aéroport, ma belle Écossaise m'attend, assise sur le capot de sa voiture. Mon souffle s'emballe quand je la contemple : petit chemisier blanc, jupe courte en jean, jambes nues, Doc. J'avale difficilement ma salive en l'approchant.

— Tu veux ma mort...

J'attrape son menton et dépose un baiser chaste sur ses lèvres. Je respire un grand coup en la regardant droit dans les yeux.

— Tu m'as manqué.

— Toi aussi.

Elle passe les bras dans mon cou et m'embrasse de plus belle. Notre étreinte met mon corps dans tous ses états. Mes palpitations accélèrent, mes paumes deviennent moites. J'ai en tête notre dernière nuit chez moi et, surtout, nos discussions par écrans interposés, assez mouvementées. Ses joues ont pris une jolie teinte rosée.

— Si tu ne veux pas que je te retourne sur ce capot devant tout le monde, rentrons vite chez toi.

— Eh bien, monsieur l'ours, comme vous y allez !

Elle rit aux éclats et dépose un bisou au coin de ma bouche. Nous nous séparons pour monter dans son bolide.

J'appréhende ce qui va se passer chez elle. Presque trois ans sans aucune femme, avec pour seule compagnie ma main droite, et la sienne quand elle se trouvait dans mon lit. « J'ai hâte de faire ça en vrai. » Oserai-je ? Ça se trouve, je suis rouillé. Je ne sais même pas si nous allons pouvoir passer outre mon blocage. Quand il faudra mettre le préservatif, est-ce que...

— Niall, panique pas.

Je croise son regard doux avant qu'elle ne se focalise de nouveau sur la route.

— Non, je... je panique pas, pourquoi tu dis ça ?

— T'as perdu des couleurs et tu martyrises ton jean.

— Oh... C'est que...

— Ne te justifie pas. Je sais. On va commander des pizzas, mettre un film et après, un gros dodo pour être en forme demain pour ton rendez-vous. Ça te va ?

Je bouge les doigts histoire de les détendre et place une main sur sa cuisse, que je caresse.

— Va pour la soirée pépère.

Je tente tant bien que mal de calmer le stress qui me gagne peu à peu. Chez moi, tout s'est bien passé, je me suis maîtrisé et elle s'est montrée très compréhensive. Même si nos petits jeux virtuels laissent présager de futurs rapports intenses, si jamais je lui dis non au dernier moment, elle ne le prendra pas mal. Elle sait que je ne suis pas venu ici que pour elle. Nous avons longuement parlé de mon rendez-vous médical pour contrôler mon taux de V.I.H. et elle a tenu à m'accompagner. Mes analyses sont bonnes, je n'ai pas de raison de me faire du souci.

Lorsque j'entre chez elle, je reste quelques secondes à observer son environnement. Une étagère avec des miniatures de voitures de collection décore le mur où une fenêtre donne vue sur le fleuve. Je n'avais pas remarqué en nous garant dans le parking qu'elle résidait de ce côté-là de Londres.

— C'est drôle, nous habitons tous les deux un appart au bord de l'eau.

— Nous étions faits pour nous rencontrer, me taquine-t-elle. Je n'ai qu'une autre pièce, ma chambre, avec la salle de bains.

— C'est très mignon, et je ne suis pas venu pour visiter ton intérieur.

Je l'enlace. Elle enfouit sa tête dans le creux de mon cou, son parfum m'enveloppe. Son baiser sur ma mâchoire se poursuit sur ma joue, puis il atteint mes lèvres dont elle se saisit avec douceur. La tendresse émane de cet échange, rien d'urgent, rien de brutal.

Je crois bien que je l'aime...

— Tu peux aller poser ton sac dans la chambre, je commande le repas.

— Tu me présentes pas ?

— À qui ? s'étonne-t-elle.

— À la grosse bulle rouge prête à éclater dans son bocal.

— Ah ! Niall, voici Coggy, mon poisson rouge.

— Il est excellent. On dirait un p'tit zi...

— Oui, je sais ! File ! rigole-t-elle.

Elle prend son téléphone et je me dirige vers l'autre pièce. Les murs sont peints dans un doux marron, avec un pan plus foncé que les autres. Le soleil se couche et la faible luminosité qui filtre à travers la fenêtre danse sur quelques tableaux, des paysages d'Écosse. Mon attention se déplace vers son lit aux draps rouges. J'aime cette couleur chaude. Un rictus s'étire sur mon visage à la vue des barreaux en guise de tête de lit.

— Alors, l'endroit te plaît ?

Je ne l'ai pas entendue se faufiler derrière moi et mes pensées s'envolent. Elle passe les bras autour de ma taille et me fait un câlin en se collant dans mon dos. Je me retourne pour empaumer ses joues.

— C'est toi qui me plais.

Je l'embrasse, avide de goûter ses lèvres encore et encore. Ses mains glissent dans mes poches arrière. Elle me rapproche plus près d'elle d'une légère pression. Mon bassin entre en contact avec le bas de son ventre et je ressens quelques pulsations me chatouiller. Les paupières bien fermées, j'essaie de contenir mon érection.

Pas maintenant...

Je me dégage un peu pour reprendre mon souffle et dévier la situation qui pourrait déraper trop vite.

— Alors, quel film as-tu prévu de nous mettre ?

Cinquante nuances de Grey.

Mes yeux s'écarquillent de stupeur. Je hausse en penchant la tête sur le côté.

Elle se fout de moi ?

Ciara éclate de rire.

— Je déconne ! Tu verrais ta tronche... Je pensais plutôt mater un Marvel. Venom, ça te tente ?

Et que tu mates l'acteur principal pendant presque deux heures ? Je suis pas sûr...

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