Chapitre 16 - Niall
Elle me fait signe de la rejoindre avec son grand sourire et je ne peux pas résister, sans doute aidé par les quelques verres que j'ai bus. Je ne devrais pas, je le sais bien, je joue avec la tentation et mon épée de Damoclès. J'ai essayé de m'éloigner d'elle après le restaurant, seulement, j'ai bien du mal, et l'alcool a tendance à me faire faire n'importe quoi. Si Aïdan nous voit, il pourrait taper un scandale. Si j'arrive à confesser mon problème à Ciara, elle risque de partir sans se retourner. Malgré ça, je ne peux réfréner mon désir d'être avec elle.
Je me cale dans son dos et nous dansons enlacés sur une musique langoureuse. Sa tête repose sur mon épaule, je respire le parfum de ses cheveux et mes mains lui enserrent la taille pour ne plus la lâcher. Elle place les siennes par-dessus et ce contact irradie sur ma peau, parcourant mon épiderme d'un doux frisson. Je suis foutu, elle m'a envoûté, me passer d'elle devient insupportable. J'ai besoin de cette femme qui me retourne les sens, toutefois, j'ai peur. Peur de lui dire. Peur de sa réaction. Peur de lui ouvrir mon cœur et de la voir s'enfuir. Néanmoins, il va bien falloir, avant que mes sentiments me tuent si jamais elle me délaisse à cause de ça.
La mélodie nous transporte et elle se tourne vers moi. Nos yeux se rencontrent et je tressaille lorsque je plonge dans le brun de ses iris qui absorbent mon âme. Elle s'accroche à mon cou et mes mains glissent dans son dos, naturellement, comme si elles y avaient toujours eu leur place. Elle se blottit contre moi et la chanson nous berce.
— Tu n'as pas trop mal ? demandé-je.
— Où ça ?
— Tes côtes, l'accident dont tu ne m'as pas parlé.
— Oh... Ça se répare doucement. L'antalgique aide pas mal.
Je ferme les paupières un instant pour profiter de ce qu'elle provoque en moi. Malheureusement, en les rouvrant, je croise le regard désapprobateur d'Aïdan, qui me ramène à la réalité. Je lâche ma belle à contrecœur, non sans poser ma paume sur sa joue.
— Je dois aller prendre l'air quelques minutes. Je reviens.
Je ne lui laisse pas le temps de réagir et l'abandonne sur la piste. Après avoir pris mon paquet de cigarettes dans ma veste, abandonnée sur le fauteuil de notre coin salon, je me dirige vers l'espace fumeurs à l'extérieur. Aïdan me rejoint avant que je ne l'atteigne, l'air furieux, et me plaque dos au mur, son poing sur mon torse.
— Laisse-la tranquille ! Je ne veux pas que tu mettes tes sales pattes sur elle et encore moins que tu...
— Merde, Aïdan ! Tu crois que je contrôle ce que je ressens pour elle ? Tu penses que je n'en ai rien à foutre et, qu'une fois que je l'aurai eue, je vais la jeter ? Que je suis inconscient au point de ne pas la protéger ?
Il fulmine, mais je sais que l'alcool bu ce soir agit sur son comportement. Je respire lentement, pour maîtriser mon poing qui se serre, et le repousse.
— C'est exactement ça ! N'entraîne pas ma sœur dans ta merde !
Mon sang bouillonne. Ce connard ne peut s'empêcher de me rabâcher mon erreur. J'ai joué avec le feu, je me suis brûlé à vie.
— Écoute, Aïdan. Ciara est majeure, elle fait ce qu'elle veut. Je ne lui cacherai rien et, si elle prend la fuite, je saurai la laisser partir.
— Je n'ai pas confiance en toi. Si tu cherches à t'amuser, tu as le choix de pourrir n'importe quelle femme. Mais pas elle.
— Dégage ou ça va mal finir. Je comprends que tu t'inquiètes pour elle, seulement, je ne lui ferai rien, je ne suis pas stupide.
J'évite de justesse le crochet qu'il tente maladroitement de m'envoyer et qui s'écrase sur le mur. La rage monte en moi, je n'arrive à la contenir qu'en imaginant la tête de ma meilleure amie si je défigurais son futur mari.
— Tu tiens sérieusement à te battre avec moi, Aïdan ? Va retrouver tes potes et profite de ta soirée. Je ne ferai rien qui pourrait blesser Ciara, et je reste vigilant.
Avant que la situation ne s'envenime et que je lui colle une droite en pleine figure, je l'écarte de mon chemin et sors. Cette fois, c'est Skye qui me rejoint.
— Toi aussi, tu viens me sermonner ?
Elle secoue la tête en souriant avec affection.
— Merci de ne pas avoir amoché celui qui va partager le reste de ma vie.
— Oh, tu as vu.
Une moue déforme mon visage. J'aspire la nicotine pour me détendre.
— Je sais que tu meurs d'envie de le remettre à sa place, mais je ne désespère pas qu'un jour vous vous entendiez.
Je ricane et me prends un petit coup dans l'épaule.
— Aïe.
— Pff... Elle te plaît, alors fonce.
— Non.
Je ne devrais même pas l'envisager. Je ne songe pas à elle nuit et jour. Je n'ai pas cherché à l'embrasser toute la journée. Je n'imagine pas son corps blotti contre le mien.
— Niall, je sais quand tu tiens à une femme. Ça fait si longtemps que tu n'as pas ressenti ça.
— Qu'est-ce que ça change ?
— Arrête de t'empêcher de vivre pleinement, tu ne peux pas continuer comme ça.
— C'est ta belle-sœur.
— Et ?
— Aïdan n'approuve pas.
— Si tu as de vrais sentiments pour elle, il n'a rien à dire. On ne va pas ravoir cette discussion.
Ce n'est pas tant cet emmerdeur qui me bloque et ma rousse n'a pas besoin que je lui mente. Je me freine sans cesse, effrayé par ce qui pourrait arriver si je me laisse aller.
— Je ne peux pas lui infliger ça. Imagine que...
Ma phrase en suspens, je bute sur mes pensées. Je ne souhaite pas lui faire vivre le même calvaire que moi.
— C'est une grande fille, je suis persuadée qu'elle gèrera très bien ça. Et tu sais pertinemment que tu peux avoir une relation avec une femme. Tu sauras être prudent.
Ça. Ma situation. Mon problème. Ce truc qui me pourrit la vie depuis près de trois ans. Ce couperet qui m'a menotté. J'expire la dernière taffe et la regarde de côté. Les poings sur les hanches, l'air revêche, elle me toise sans ciller.
— Je ne saisis toujours pas ce que tu fous avec cet...
— Arrête, Niall. Ne change pas de sujet. Va la rejoindre. Ça saute aux yeux de tout le monde que vous avez un coup de cœur tous les deux. Même si ça énerve mon gentil fiancé, qui joue au grand frère protecteur. Tu crois que personne n'a capté votre manège, aujourd'hui ? Vous vous cherchez du regard continuellement, vous vous retrouvez côte à côte sans arrêt, tels des aimants. Quand l'un n'est pas dans notre champ de vision, l'autre a aussi disparu. Personne n'est dupe, et chacun approuve. Mon mari, il s'y fera, il n'aura pas le choix.
— Tu sais quoi ?
— Oui, tu m'aimes. File.
J'embrasse mon amie sur le front et retourne à l'intérieur. Je cherche Ciara et la découvre près du bar, en plein échange avec un homme. Quand il s'approche, elle recule. Je me rends à ses côtés et place ma main dans son dos.
— Un souci ? lancé-je en fixant le type.
— Ben alors, Babydoll, t'as jeté ton dévolu sur un nouveau mec ? demande-t-il. Tu vas lui faire la même chose qu'à moi ?
Ciara blêmit et reste muette. Je la lâche et attrape ce salaud par le col, en me postant entre eux.
— Pour qui tu te prends, connard ?
— Niall, laisse tomber, quémande Ciara, la voix tremblante. Fedro, va te faire foutre !
Il se soustrait de ma poigne et me repousse, l'air mauvais.
— Je te la laisse, elle est toute à toi. J'aime bien partager, même si je préfère être de la partie, hein, Babydoll ?
— Dégage avant que je t'éclate, asséné-je en serrant les dents.
— C'est bon, abdique-t-il en levant les mains devant lui. J'ai déjà profité de son p'tit cul, tu vas voir, on est bien dedans. C'est une sacrée petite salope !
Il nous tourne le dos pour s'en aller. J'arme mes poings et le suis pour lui en coller une. Cependant, j'aperçois Ciara s'échapper en courant vers la sortie. Je me précipite pour la rattraper et la retiens par le bras pour la ramener près de moi.
— Hey, ça va ?
Je lui caresse la joue et mes doigts finissent dans ses cheveux. Ses yeux, qui s'embuent de larmes et m'évitent, répondent à ma question.
— Désolée, je...
J'essuie du pouce la goutte qui perle au coin de son œil. Je me penche vers son oreille pour qu'elle m'entende dans le brouhaha ambiant :
— Je ne te juge pas, Ciara. J'aurais bien éclaté ce mec pour son manque de respect.
Je dépose un baiser sur sa tempe. L'envie soudaine de la prendre dans mes bras, comme lorsque nous dansions, s'insinue en moi.
— Ce que tu viens d'entendre ne te dégoûte pas ?
— Quoi ? Que tu aimes prendre du bon temps avec les mecs ? T'as raison de profiter.
Je la regarde en souriant tendrement.
— Je ne veux pas passer pour...
— Tu ne passes pour rien de ce que tu penses à mes yeux. On a tous un passé, plus ou moins glorieux, je ne vais pas te blâmer. Moi aussi, j'ai pris du bon temps, et je n'insulte pas les femmes avec qui j'étais.
Elle me regarde et, cette fois, je fais abstraction de la population qui nous entoure. Mes lèvres viennent chercher les siennes et je l'embrasse enfin. Nos corps se collent et je l'enlace, puis approfondis notre baiser en y mettant plus de vigueur. J'avance et elle recule jusqu'à rencontrer le mur. Une main dans sa nuque et l'autre sur sa taille, je n'arrive plus à la lâcher. Ma langue défie la sienne et nous jouons un moment.
— Ah, quand même ! J'étais à deux doigts de penser que tu avais vraiment fait vœu de chasteté !
Je me retourne vers Lucas, hilare, qui poursuit sa route vers l'extérieur. Ciara pouffe et je ris avec elle.
— Bon, et si on rejoignait la bande ?
Nous restons un peu à distance, sans cesser de chercher l'autre des yeux. Quand les lumières s'allument, nous sortons héler un taxi pour rentrer chez Skye et Aïdan. Ciara y a laissé sa voiture et nous accompagne. Sa contribution n'est pas de trop pour m'aider à ramener le couple, bien trop alcoolisé pour marcher droit. Lorsque nous arrivons dans leur appartement et qu'ils se dirigent directement vers la chambre, Ciara me fait signe qu'elle s'en va. Je m'empresse de l'en empêcher.
— Il est tard, ou tôt... Je ne te laisse pas repartir seule, en plus tu as bu. Prends la chambre d'ami, je dormirai sur le canapé.
— Je ne vais pas te prendre ton lit, je suis assez grande pour rentrer chez moi.
— Ce n'est pas mon lit, et je n'ai pas encore dormi dedans. Promis, ça ne sent pas l'ours.
Elle éclate de rire. Je dormirais bien avec elle dans ce lit, cela dit.
Niall, t'es dingue ?
Réitérer l'expérience peut s'avérer compliqué si je veux garder mes distances, surtout tant que je ne lui ai rien dit. J'ai résisté la dernière fois en la laissant partir, malgré tout, je souhaite vraiment qu'elle reste, cette fois.
— On peut y dormir tous les deux, propose-t-elle. Ce ne sera pas une nouveauté.
— Bien sûr, et quand Aïdan nous verra, il prendra son fusil et bye bye, l'ours. Une bière ?
Je cherche à prolonger ce moment et à retarder ma confession. Je me rends au réfrigérateur pour sortir deux bouteilles. Je lui en tends une et m'affale sur le fauteuil en face du canapé où elle se pose.
Préserver une bonne distance entre nous, c'est bien. Seulement, je n'arrive pas à parler, trop concentré à calmer mon envie de lui sauter dessus, qui n'a cessé de grandir ce soir. Mes barrières sont en train de s'effondrer face à son regard brûlant de désir, qui ne me lâche pas et attise le brasier qu'elle déclenche en moi. Elle porte avec sensualité le goulot à sa bouche et prend lentement une gorgée, ses yeux toujours fixés sur moi. Je déglutis avec difficultés et agrippe ma bière plus fort. Elle joue avec moi, puisque nous sommes enfin seuls. Elle sourit, pose sa boisson sur la table basse, se lève et s'approche de moi.
— Qu'est-ce que tu fais ?
Elle m'enlève la bouteille de la main pour l'installer à côté de la sienne. Ses iris plonge dans les miens.
— Une chose dont j'ai très envie.
Elle s'assied à califourchon sur mes cuisses. Je ne l'en empêche pas. Pire, je passe mes mains dans son dos et me redresse pour la sentir contre moi. Son regard envoûtant me transperce et je n'ai pas la force mentale pour la rejeter lorsqu'elle m'embrasse, même si je sais que nous allons peut-être déraper.
Ses lèvres douces et chaudes m'enfièvrent, son parfum m'enivre. L'avoir ainsi sur moi m'excite encore plus. Je m'embrase instantanément et approfondis notre baiser en venant titiller sa bouche de ma langue pour qu'elle m'ouvre le passage. Ses doigts parcourent ma peau, de ma nuque aux pectoraux par-dessus mon t-shirt, le tout provoquant une furieuse agitation de mes sens et une bonne érection. Je la serre plus fort, tandis que mes mains se promènent sous son haut et caressent son dos. Elle frémit. Son corps remue lentement sur moi, attisant mon sexe désireux de s'enfoncer en elle. Je grogne contre ses lèvres, il faut que je me contrôle.
Néanmoins, mes pensées s'obscurcissent et je me noie dans son baiser ardent. Nos langues se taquinent avec avidité, ses dents mordillent parfois mes lèvres. Ses frottements sur mon entrejambe déchaînent mon envie d'elle, je n'arrive plus à la contenir. Ma main empoigne ses cheveux et l'autre commence une balade vers sa poitrine. Elle gémit et je perds la tête.
Arrête ça tout de suite, tu ne contrôles plus rien, là !
Je la prends sous les fesses pour la soulever en me levant et, avant de la jeter sur le canapé pour m'emparer d'elle, je la repose à terre, puis m'écarte.
— Je... Je ne peux pas, Ciara.
— Pourquoi ? s'étonne-t-elle. J'ai cru...
Elle s'avance et je recule, bientôt bloqué par le mur.
Merde.
— Ne me dis pas que c'est Aïdan, le problème. Je me contrefiche de ce qu'il pense. C'est moi ?
Non. Si tu savais tout ce que j'imagine te faire.
Elle pose les mains sur mon torse, provoquant une vague crépitante le long de ma colonne quand elle se presse contre moi. J'ai tellement envie de poursuivre notre baiser et d'aller plus loin, mais il ne faut pas, pas maintenant.
Dis-lui, comme ça, elle va prendre peur, s'enfuir, et ce sera réglé.
— Ce n'est pas toi, loin de là. Tu me rends complètement fou. Mais je ne sais pas encore si nous pouvons être ensemble, et je t'ai déjà dit que je ne veux pas que tu deviennes juste un coup d'un soir.
J'essaie d'être convaincant, seulement cela n'a pas l'air de fonctionner.
— Pourquoi ?
Elle implore ma réponse, la voix presque brisée. Mon cœur se serre et menace de s'échapper de sa cage.
Dis-lui !
— J'ai... je suis...
Le mot a du mal à sortir. Je ne l'ai jamais dit à personne, mis à part à Skye. Aïdan aussi est au courant, par procuration, et c'est encore plus problématique que je me sois entiché de sa sœur. Pour lui, je ne suis qu'un pauvre mec qui a fait de la merde et qui récolte ce qu'il a semé. Je me sens assez mal comme ça pour ne pas lui ajouter une raison supplémentaire de me détester, déjà qu'il ne m'apprécie guère de base parce que je suis proche de sa future femme et qu'il demeure jaloux malgré les années.
Elle reste plantée là, les mains posées sur moi, son regard brillant ancré dans le mien. Je ne peux décemment pas l'entraîner dans le bordel qu'est ma vie aujourd'hui, bien que je crève de la garder à mes côtés. Toutefois, ce serait égoïste, en particulier si je lui cache la vérité.
Crache le morceau, lâche la bombe. Ça ira mieux après. Ou pas...
J'avale ma salive avec peine et deviens fébrile. J'ai très chaud, mais ce n'est plus sous l'effet de Ciara. C'est la première fois que je vais l'avouer, à une femme à qui je tiens. J'appréhende sa réaction. C'est sûr, elle va s'enfuir, elle ne souhaitera rien vivre avec moi, et je la comprendrai. Qui voudrait d'une telle épée de Damoclès au-dessus de la tête ? J'aurais dû le lui dire dès le départ, avant de m'attacher à elle. Je respire un grand coup et me lance.
— Je vis avec le VIH.
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