Снежинка
« _ Bordel ! Ca fait mal ! »
Une tête blonde émergea d'un amas de neige, de branche de sapin et de débris végétaux divers et variés. Il s'extirpa tant bien que mal de sa prison et se redressa. Il n'avait que quelques heures pour agir avant de devoir regagner la forêt et le Royaume des saisons éternelles. Aussi se mit-il à parcourir rapidement les allées du parc Gorky pour en trouver la sortie. Ce ne fut pas chose aisée son sens de l'orientation en hiver était mauvais et toute cette neige ne l'aidait pas. Il ne pouvait compter sur la végétation pour lui indiquer son chemin.
« _ Mais qu'est-ce qu'il m'a pris de venir ici maintenant ! J'aurai dû attendre le printemps !
_ Vous êtes perdu ? »
Il sursauta et fit volte-face pour découvrir un vieil homme qui le regardait une lueur interrogatrice dans les yeux. Il était évident que sa tenue devait l'intriguer, lui qui était habillé chaudement mais pour affronter les frimas du printemps, pas ceux de l'hiver.
« _ La sortie la plus proche ?
_ Par là. Il y a une sortie dans environ cinq cent mètres.
_ Merci. »
Il suivit la direction désignée par le vieil homme et pressa le pas sentant dans son dos le regard suspicieux de l'homme qui l'avait renseigné. Il se retint de souffler sur ses mains pour les réchauffer. Il avait froid mais n'avait pas le temps de s'appesantir sur le sujet. Cette nuit, à minuit, il devrait reprendre la route des minuits. Quand il parvint à la sortie, il fit la moue. Il était hors du parc mais était toujours aussi perdu. Il convoqua les souvenirs qu'il avait de la ville au printemps. Ce fut difficile mais après une intense réflexion il se souvint. Un sourire victorieux aux lèvres, il longea la grande rue et marcha pendant près d'une heure. Il contempla la ville autour de lui la découvrant sous un jour qu'il ne connaissait pas. Emmitouflée dans un manteau blanc et parée de lumières décoratives en prévision des fêtes de fin d'année, elle lui semblait merveilleuse. Et que dire des gens qu'il croisait ? Tous étaient joviaux et heureux à l'idée des célébrations du Nouvel An. Ce devait être une belle fête pensa t'il. Lui n'avait jamais participé à cette fête. Elle appartenait au domaine de son frère Zima* pas au sien. Lui, Vesha était le printemps, le renouveau, le réveil, l douceur, l'enfance. Le dernier adjectif lui arracha un bref éclat de rire. C'est ce que tous lui disait. Il n'était qu'un enfant et se comportait comme tel depuis longtemps. Il faisait selon ses frères et sœur des caprices, était tantôt calme, tantôt entrait dans des colères indescriptibles. Pourtant, lui se jugeait suffisamment adulte maintenant pour prendre ses propres décisions et ne plus vivre sous le joug des décisions que d'autres prenaient pour lui. C'était ce qui l'avait poussé à braver l'ordre naturel des saisons pour venir ici alors qu'il n'avait pas sa place. Pas encore tout du moins. Mais, cette année il n'avait pas pu attendre. Ca faisait déjà cinq printemps qu'il laissait passer depuis sa dernière escapade. Il n'en pouvait plus d'attendre pour revoir le beau patineur qu'il avait sauvé des glaces du lac qui se refermaient sur lui.
« _ Hey toi ! »
Une voix dans son dos le fit se figer et instinctivement se méfier. Il reconnaissait le ton agressif de celui qui l'avait interpellé et aussitôt sa méfiance naturelle le mit en garde. Il devait fuir sous peine d'être découvert et d'avoir braver bien des interdits pour rien. Sans se retourner et ignorant les appels il continua sa route. Sa destination était proche, s'il pressait le pas il pourrait l'atteindre sans devoir affronter l'homme qui criait dans son dos. Mais il à peine avait-il accéléré qu'une main le saisit et le poussa contre une vitrine. Le gel recouvrant la vitre le mordit durement et il dû faire un effort sur lui-même pour ne pas grimacer de douleur.
« _ Je t'ai appelé ! Tu pourrais répondre !
_ Qu'est-ce que tu veux ?
_ Ce que je veux ? Mais voyons que pourrais-je vouloir à ton avis ? »
Le cerveau de Vesha se mit à tourner dans le vide. Il ne savait quoi répondre à cette question. Que pouvait bien lui vouloir cet homme ? Il était un esprit des temps anciens et de légendes, il n'avait rien qu'un humain put bouloir.
« _ Je ne sais pas.
_ Oh ! Tu ne sais pas ! Amusant ! »
Autour de lui d'autres hommes qui assistaient à la scène rire ouvertement de son ignorance. La situation devait être de leur point de vue amusante mais pas du sien. Il commençait à paniquer sachant que sa magie bien qu'ancienne et puissante ne le sauverait pas. Pas en hiver. L'homme qui l'avait interpellé se rapprocha dangereusement de lui et renifla quand il fut suffisamment près. Il partit aussitôt dans un grand éclat de rire tout en lui saisissant le bras.
« _ Hey les mecs ! Il sent les fleurs ! Il porte un parfum de nana ! Ben alors mon mignon, on aime les trucs de filles ? Remarque t'as pas l'air bien viril !
_ Fichez-moi la paix !
_ Mais c'est que tu te rebelles. Mais attends, on peut te faire cirer si tu veux. »
La prise sur son bras se resserra et il paniqua franchement cette fois. Du fond de son corps il sentit une vague de froid l'envahir puis une bourrasque de flocons s'abattit sur eux. Celle-ci le surprit mais pas autant que ses agresseurs. Il se libéra vivement de la poigne qui le retenait et se mit à courir. Il entendit des pas de course derrière lui mais ne se retourna pas. Il courut à toutes jambes mais moins rapides que les trois hommes il fut rapidement rattrapé. De nouveau son bras fut agrippé et cette fois il laissa échapper un petit cri de douleur.
« _ On t'a pas dit de partir la fiotte ! On n'en a pas fini avec toi !
_ Laissez-moi ! Je ne vous ai rien fait ! »
Une seconde main saisit son bras libre alors qu'il se débattait comme un beau diable. Son esprit embrumé par la peur lui souffla de provoquer une nouvelle bourrasque de flocons mais il était trop apeuré pour y parvenir. C'est alors qu'il sentit la prise lâcher et il tomba à terre, perdu et étourdi.
« _ Je crois qu'il vous a dit de le lâcher.
_ Te mêles pas de ça Otabek ! C'est pas tes oignons !
_ Je m'en mêle parce que vous violentez une personne.
_ Mais non ! On voulait juste discuter avec lui. On lui aurait pas fait de mal, tu nous connais.
_ C'est justement parce que je vous connais que je ne vous crois pas. Partez maintenant et laissez les gens tranquilles à l'avenir. »
Pendant tout l'échange verbal, Vesha n'avait osé relever les yeux. Cette voix, il la connaissait, il en était sûr. Il pourrait la reconnaître parmi toutes. Elle était l'une des raisons pour lesquelles il était ici.
« _ Tout va bien ? Ils ne t'ont pas fait de mal ces brutes ? »
A ce moment, une main entra dans le champ de vision de Vesha qui releva les yeux pour enfin croiser le regard de son sauveur. Il était là. Il était là, le jeune homme qu'il avait déjà rencontré par trois fois et pour lequel il avait senti son cœur s'enflammer. Celui-ci sembla lui aussi le reconnaître et il suspendit son geste.
« _ On se connaît, non ?
_ Je... Peut-être.
_ Je t'ai vu en Russie ? Non, attends. C'était Barcelone.
_ Les deux, je crois bien.
_ Oui C'est bien ça !
_ Tu es Yuri ! Je te reconnais parfaitement maintenant. »
Vesha saisit la main tendue et se redressa. Il voulut retirer sa main de celle d'Otabek mais le jeune homme la retint.
« _ Ta main est gelée. Tu sembles frigorifié à vrai dire.
_ Oui, j'ai pas chaud.
_ Pas étonnant vu comme tu es habillé. Viens, je t'invite à boire quelque chose avant que tu gèles. »
Vesha ne répondit rien et le suivit dans le petit café qui se trouvait à l'angle de la rue. Il sourit en constatant qu'il ne s'était pas trompé et qu'il se dirigeait vers l'endroit que fréquentait souvent son sauveur. Ils entrèrent et s'attablèrent. Otabek lui tendit une carte que Vesha saisit et parcourut rapidement avant de la reposer.
« _ Tu as déjà choisi ?
_ Juste du thé noir. Avec du miel ça serait possible ?
_ Oui bien sûr. Veux-tu manger quelque chose ? »
Il était affamé mais ne souhaitait pas abuser de la gentillesse de son hôte. Il était l'invité et ne devait pas abuser de sa générosité. Pourtant, les pâtisseries qu'il lorgnait du coin de l'œil lui faisaient très envie. Il n'avait pas mangé depuis son départ en catimini le matin même et il était presque seize heures.
« _ Je vais aller commander au comptoir. Ca sera plus rapide.
_ D'accord. »
Le jeune homme brun se leva et se dirigea vers le comptoir où il héla la serveuse. Celle-ci le servit avec empressement ce qui eut pour effet de déclencher une petite pointe douloureuse dans la poitrine du jeune homme blond. Il détourna la tête et se concentra sur ce qu'il voyait par la fenêtre. La nuit était tombée et la neige scintillait sous les lumières de différentes couleurs des éclairages. C'était beau et avait un côté merveilleux. Il ne voyait jamais ça de là où il venait.
« _ Tiens, régale-toi ! »
Vesha retourna la tête sur ce qui avait été posé sur la table. Ses yeux s'écarquillèrent de surprise. Il y avait du thé noir et du miel comme il l'avait demandé mais aussi une belle assiette de chak chak**. La surprise du jeune homme blond fit doucement rire son aîné alors qu'il s'asseyait face à lui.
« _ J'ai vu que tu lorgnais dessus.
_ Ah... Merci. » Se contenta t'il de répondre les joues rouges.
« _ Ca fait quoi, cinq ans depuis la dernière fois que nous nous sommes croisés ?
_ Oui. C'était en hiver à Barcelone.
_ Oui, je me souviens. Tu avais encore des ennuis cette fois là.
_ Ouais, je crois que je ne suis pas très doué pour me faire des amis.
_ Je t'ai proposé mon amitié à l'époque et tu l'avais acceptée. Mais ensuite tu as disparu sans laisser de trace. Tout comme le grand type avec toi. Il s'appelait comment déjà ? Viktor ? »
Vesha hocha simplement la tête. Il ne pouvait pas dire la vérité. Enfin pas maintenant. Il ne pouvait avouer que le Viktor en question était en fait Zima l'esprit de l'hiver et que la seule raison pour laquelle il s'était montré à Otabek était qu'il devait ramener Vesha chez eux. La punition avait été sévère à leur retour.
« _ Ca va ?
_ Hein ? Ouais ça va. C'est juste que Viktor m'a ramené chez nous et que j'ai pas eu le droit de reprendre contact avec toi. »
Au moins ça ce n'était pas un mensonge. Il avait eu interdiction de reprendre contact avec cet humain qu'il avait déjà croisé par deux fois avant son escapade barcelonaise. La première était accidentelle, la deuxième il l'avait plus ou moins provoquée, la troisième avait été délibérée. Il était parti sur un coup de tête lorsqu'il avait appris grâce aux prémices du printemps espagnol où se trouverait le jeune homme aux yeux d'onyx qui hantait ses nuits.
« _ C'est dommage que tu aies si vite disparu. Nous avions passé une bonne soirée en boîte.
_ Oui, c'était vraiment une super soirée ! J'aurai adoré recommencer.
_ Je mixe ce soir. Tu veux venir ?
_ Ca dépend, c'est à quelle heure ?
_ Vingt-deux heures. Ensuite je rejoins ma famille pour la messe de minuit et le passage à la nouvelle année. Tu dois avoir des proches à voir aussi.
_ Pas vraiment. »
Le jeune homme brun arqua un sourcil interrogateur l'incitant silencieusement à poursuivre. Vesha soupira ne voulant lui mentir encore une fois. Il n'allait pas lui dire que le jeune homme qu'il appelait Yuri n'existait pas vraiment. Expliquer qu'il était l'esprit du printemps paraissait un peu compliqué et il le penserait échapper d'un asile.
« _ Qu'est-ce que tu fais ici alors ?
_ Une envie de changer d'air. Mais bon je vais devoir bientôt repartir.
_ C'est dommage. J'aurai apprécié passer du temps avec toi. »
Encore une fois le silence se fit. Otabek était sincère. Il aurait aimé pouvoir passer plus de temps avec ce jeune homme qui l'intriguait. Sans compter qu'il le trouvait particulièrement beau et envoûtant. Il était tout à fait son type d'homme. Il était son seul type d'homme. Il se souvenait très bien de lui, mieux qu'il ne lui avait avoué. Depuis des années, il espérait un miracle qui lui permettrait de croiser de nouveau sa route et aujourd'hui il avait eu lieu.
« _ Tu comptes revenir par ici une autre fois ? » Demanda t'il espérant paraître détaché.
« _ Oui. Au printemps.
_ Quand ça ? Tu as une date ? »
Otabek s'arrêta sentant l'espoir et l'empressement dans sa voix le trahir. Mais son vis-à-vis se contenta de sourire. Et quel sourire ! Si Otabek l'avait trouvé beau avant, à présent il le trouvait magnifique. Et c'était encore bien en dessous de la réalité. Il y avait quelque chose de féérique en lui.
« _ La date n'a pas d'importance. Je peux être où je veux au printemps.
_ Dit comme ça, c'est très mystérieux !
_ Disons que le printemps est ma saison de liberté !
_ Moi aussi ou presque. Les compétitions seront terminées fin avril.
_ Alors fin avril je reviendrai ici et on pourra passer du temps ensemble.
_ Il faudra que tu me dises où tu loges et que tu me donnes ton numéro de téléphone.
_ Je te propose plutôt de nous retrouver ici le dernier samedi d'avril. Je t'attendrai.
_ Tu aimes le mystère !
_ Alors ?
_ Très bien Yura. Ca me va.
_ Yura ?
_ Ca te dérange que je t'appelle par ton diminutif ?
_ Non.
_ Alors appelle-moi Beka. »
Encore une fois Yuri sourit et le cœur d'Otabek fut réchauffé par un agréable sentiment. Il ne savait d'où cela lui venait mais c'était comme s'il avait toujours été là et qu'il s'épanouissait tel une fleur à chaque fois que son regard croisait les yeux émeraudes. Les deux jeunes hommes discutèrent un long moment en buvant du thé et en mangeant des gâteaux. Yuri fit rire un bon nombre de fois Otabek par son enthousiasme à goûter à toutes les spécialités kazakhes. Etonnement, il ne semblait en connaître aucune. Aussi Otabek se promit-il de lui faire découvrir la gastronomie de son pays au printemps. A en croire Yuri, il resterait plusieurs jours ici, ils auraient donc tout le temps d'apprendre à se connaître. Il y avait toutefois quelque chose d'irréel dans ce garçon. Il semblait évanescent, aussi éphémère que les flocons de neige.
« _ Qu'est-ce qu'il y a ? J'ai un truc sur la figure ? »
La voix claire et cristalline sortit Otabek de sa contemplation. Il ne s'était pas aperçu qu'il le fixait depuis déjà de longues minutes. Il se reprit et lui répondit dans un sourire.
« _ Non tu n'as rien sur la figure.
_ Alors pourquoi tu me dévisageais ?
_ Je me disais que tu étais mystérieux. Je te parle de moi mais je ne sais presque rien de toi. »
Veha hésita. Que devait-il faire ? Donner vie à un personnage de fiction ou en dire le moins possible de sorte à ne pas mentir ?
« _ Je peux te parler un peu de moi. Enfin si tu en as envie.
_ Oui je veux te connaître.
_ Je... J'ai deux frères et une sœur. Tu as vu Viktor à Barcelone. C'est le plus âgé. Ensuite il y a... » Il hésita un moment ne sachant comment appeler Oshen' et Ieto. Puis avec une inspiration il poursuivit. « Georgi et Mila. Ils sont tous plus âgés que moi.
_ Tu es le petit dernier donc. Comme moi.
_ Et on vit à la campagne.
_ Où exactement ?
_ Dans un endroit assez reculé. Tu ne peux pas connaître. Personne ne connait.
_ Mais comment as-tu fait pour l'école ?
_ Je n'y suis pas allé. Mes parents ont fait mon éducation. Ils préféraient que je reste avec eux plutôt que de partir. »
Vesha sentait qu'il s'avançait sur un terrain glissant. Il n'avait aucune idée de comment il allait bien pouvoir se sortir de ce bourbier. Potya, sa seule amie, lui avait bien dit que c'était une mauvaise idée de partir seul voir le monde même pour quelques heures.
« _ Tu as dû avoir une enfance solitaire. Ca doit te faire drôle d'être ici.
_ Non pas tant que ça. Il y avait... Enfin bref ! Et oui c'est un peu bizarre de se retrouver ici ! Mais c'est agréable aussi. Il y a des bonnes surprises. »
Il conclut sa phrase par un sourire si renversant qu'Otabek sentit son souffle se couper. Il était en admiration devant ce jeune homme. Mais plus que sa beauté, c'était sa personnalité qu'il devinait à la fois forte et fragile qui l'attirait irrémédiablement. Une envie, un besoin presque vital de le protéger enfla en lui au point de presque le submerger. Il allait de nouveau s'abîmer dans ses pensées quand une main fraîche et légère comme une brise se posa sur la sienne le ramenant au moment présent. Sans réfléchir, il entrelaça ses doigts aux doigts blancs et fragiles.
« _ Ca va ?
_ Oui... Ta main est fraîche. Tu as froid ?
_ Non. Il fait bon ici.
_ Oui mais tu sembles avoir froid. Tes joues sont pâles. J'espère que tu n'es pas malade.
_ Je ne le suis pas. »
Lui répondit-il avec un petit rire qui sonna comme le tintement d'une clochette. Pourtant, il sembla à Otabek qu'une soudaine tristesse avait traversé les émeraudes. Mais Yuri ne lui laissa pas le temps de le questionner.
« _ Tu disais que tu devais aller mixer ce soir ?
_ Ah oui ! Attends... Viens, il faut qu'on y aille. On va être en retard. Il faut que je passe chez moi. » Il hésita un instant. « Tu m'accompagnes ? »
Vesha hésita puis se disant que c'était pour le voir qu'il était là et il lui proposait de l'accompagner, pourquoi refuser. Il se leva tout en souriant et Otabek l'imita.
« _ Je prends ça pour un oui.
_ Je te lâche pas.
_ Tout du moins pour ce soir, c'est bien ça ?
_ Je reste avec toi le plus longtemps possible. Mais... Je devrai rentrer à un moment.
_ Hey, ne sois pas triste. On va se revoir. N'oublie pas notre rendez-vous. »
Encore une fois ce sourire merveilleux éclairait son visage et même ses yeux émeraude pétillants de joie. Otabek tenta de se reprendre mais il n'y parvint pas totalement. Il n'y pouvait rien, il ne parvenait pas à lutter contre ce doux sentiment qu'il éprouvait. Ce jeune homme l'attirait, l'envoûtait, le fascinait. Il était beau comme un esprit des contes pour enfants. Il tenta bien de bavarder tout au long du chemin qui les menait à son appartement mais son esprit était un peu ailleurs. Parfois, il faisait des pauses et admirait le joli profil de son compagnon.
Arrivés à l'appartement d'Otabek, celui-ci fit entrer Yuri et lui proposa un verre le temps pour lui d'aller se préparer rapidement. Il partit dans sa chambre laissant le jeune homme seul au salon. Celui-ci en profita pour fureter dans la pièce. Il passa ses doigts sur les tranches des livres, lissait les titres d'ouvrages qu'il n'avait jamais lus avant de s'immobiliser devant l'impressionnante collection de vinyles. Il posa son verre sur la petite table basse et une fois les mains libres il tira un premier disque et en regarda le titre qui le fit sourire tristement. Ce fut le moment précis que choisi Otabek pour revenir.
« _ Tu n'aimes pas Vivaldi ? »
Yuri sursauta et reposa rapidement le disque se sentant coupable d'avoir fouillé dans les affaires du jeune homme. Honteux de s'être fait prendre, il détourna les yeux tout en bafouillant.
« _ Si... Si... Mais en fait... Désolé d'avoir fouillé.
_ Tu n'as pas fouillé. Il était à portée de main. J'aime bien les quatre saisons. Je trouve que c'est très beau et ça fait ressentir beaucoup d'émotions d'différentes.
_ C'est quoi ta saison préférée ?
_ Laisse-moi réfléchir. » Otabek réfléchit un instant. Il laissa son regard errer dans la pièce avant de le plonger à nouveau dans les émeraudes. « Le printemps. »
Un magnifique sourire lui répondit lui coupant encore une fois le souffle. Il était magnifique et semblait rayonner à sa réponse. Sans réfléchir, il saisit la fine taille et attira le mince corps à lui. Il rapprocha ses lèvres et caressa de son souffle les lèvres rosées. Elles étaient terriblement tentantes. Elles avaient l'air si douces. Aussi, sans réfléchir, il pencha la tête et les effleura de ses lèvres. Il sentit Yuri frissonner entre ses bras. Il se demanda s'il devait se reculer mais Yuri prit la décision pour lui en scellant leur baiser. Il fut doux et frais, lent et un peu timide. Otabek le rendit plus sensuel au bout de quelques secondes se sentant enivré mais son téléphone sonna brisant la magie. A regret, il s'éloigna du jeune homme blond et décrocha. Encore sous prit par la magie du moment, Yuri cligna des yeux et posa ses doigts délicats sur ses lèvres et rougit. Il avait espéré sans trop y croire quand il était venu ici pouvoir séduire le jeune homme brun. Un doux sentiment enfla dans son cœur et il sut que reprendre sa vie loin de lui lui serait difficile Son monde fait de solitude allait l'écraser d'autant plus maintenant qu'un doux sentiment enflait en son cœur.
« _ Yura ? »
Otabek se rapprocha doucement du jeune homme et le prit dans ses bras un instant gardant le silence. Il caressa son dos et il sentit Yuri se blottir étroitement contre lui. Il n'avait plus envie de le lâcher. Savoir qu'il ne le reverrait pas avant des mois lui semblait une épreuve insupportable.
« _ C'était qui au téléphone ?
_ Un ami. Il voulait savoir où j'étais car je mixe dans une petite heure. Il faut qu'on se dépêche.
_ D'accord. Bah allons-y.
_ Yura... Es-tu sûr de ne pas pouvoir rester plus longtemps ? »
Tristement, la fée secoua négativement la tête. C'était déjà un miracle qu'il n'ait pas dû repartir dans sa forêt traîné par la peau du cou par Zima, Ieto ou Osen'. Si ce n'avait été les trois...
« _ Je peux pas mais au printemps...
_ La plus jolie des saisons... Mais ce soir ?
_ J'aimerai rester mais... Ce n'est pas si simple. J'aimerai mais...
_ Pourquoi ? Et pourquoi ne revenir qu'au printemps ? »
Le ton insistant d'Otabek fit ciller Yuri. Il s'approcha de lui et posa sa main contre la joue hâlée. Il la fit glisser suivant l'arc de la mâchoire puis le long de son cou. Il saisit le cordon de cuit du collier du Kazakh. Il hésita un instant puis saisit le pendentif en argent qui pendait à son bout.
« _ Ferme les yeux.
_ Pourquoi ?
_ Ferme les yeux. Ai confiance en moi. »
Otabek ferma les yeux intrigué. Yuri se mordilla la lèvre inférieure avant de prendre doucement son souffle. Il souffla sur le pendentif entre ses doigts. Celui-ci brilla un instant avant de transformer en un délicat flocon de neige. Avant qu'Otabek ne rouvre les yeux, il posa un délicat baiser sur ses lèvres.
« _ On y va maintenant ? Tu vas être en retard.
_ Qu'est-ce que tu as fait ?
_ Je t'ai laissé un petit quelque chose. »
Sans lui laisser le temps de répliquer, il lui saisit la main et l'entraîna vers la porte de l'appartement. Il n'avait plus beaucoup de temps à passer en sa compagnie. Il voulait en profiter.
Ils arrivèrent au club seulement quelques minutes avant qu'Otabek ne doive s'installer aux platines. Le jeune homme entraîna son compagnon un peu à l'écart pour lui voler quelques baisers à l'écart des regards indiscrets. Il n'arrivait pas à lâcher sa fée et sentant qu'il allait lui échapper l'emprisonnait de ses bras en une vaine tentative pour le retenir près de lui.
« _ Reste s'il te plaît.
_ Si je pouvais je resterai. Je n'ai pas envie de te quitter.
_ Alors ne pars pas.
_ Je ne vais pas avoir le choix. Ils vont venir me chercher.
_ Qui ? »
Yuri lui sourit doucement et lui caressa la joue. Il posa une dernière fois ses lèvres contre celles de celui qui avait enflammé son cœur.
« _ Je ne serai jamais loin de toi. Si tu tiens à moi je serai toujours avec toi, même si je suis loin.
_ Yura...
_ Je suis dans ton cœur Beka. Temps que tu m'aimeras j'y serai toujours. N'oublie pas le printemps.
_ Otabek ! C'est à toi ! » Le cri interrompit la fée.
« _ Qu'as-tu fais tout à l'heure quand tu m'as fait fermer les yeux ? »
Un sourire malicieux étira les lèvres du jeune homme blond lui volant un peu plus son cœur.
« _ De la magie.
_ De la magie ?
_ Oui de la magie. Ca t'aiderait à me trouver quand le moment sera venu. Et n'oublie pas après la neige viennent les fleurs.
_ Otabek ! C'est maintenant ! »
Otabek soupira et embrassa une dernière fois Yuri. Il s'éloigna à regret de lui et se dirigea vers la cabine de mixage laissant derrière lui celui qui l'avait envoûté. Yuri soupira avant de se retourner.
« _ Salut Vesha !
_ Salut. Osen' » Soupira t'il.
« _ Alors c'est pour lui qui tu as encore fugué ? Dame Lilia est hors d'elle. Tu vas avoir de gros ennuis.
_ Je m'en moque... Ca en valait la peine.
_ Si tu le dis. Aller viens il faut qu'on se dépêche. Polounotchnitsa *** nous attend. »
Yuri inspira pour se donner du courage et suivit son frère au de la boîte de nuit non sans jeter une dernier regard par-dessus son épaule. Il vit le jeune homme brun concentré sur ses platines et sourit.
« _ Presse-toi Vesha. Elle va s'impatienter !
_ C'est bon j'arrive ! Bordel on n'est pas aux pièces ! La nuit est encore jeune ! »
Il franchit la porte et se hâte de suivre son frère vers une forme sombre. L'air oscilla autour d'eux et ils suivirent Dame Minuit vers leur pays. Seule la certitude de revenir bientôt aida Vesha à ne pas faire demi tour. Ca et les mains de Polounotchnitsa et d'Osen' sur ses épaules.
Lorsqu'Otabek termina son set, il se précipita au pied de l'escalier mais Yuri s'était volatilisé. Il avait espéré que le jeune ne fut parti mais il devait se rendre à l'évidence. Celui-ci était vraiment parti. Ils ne se reverraient pas avant le printemps. Il passa sa main dans ses cheveux en soupirant de frustration. Puis se souvenant de ce qu'il s'était passé un peu plus tôt il saisit son pendentif. Sentant que sa forme avait changé, il détacha le lien en cuir. Stupéfait, il ne put retenir un murmure surpris.
« _ Un flocon de neige ? »
Il l'examina attentivement le pendentif avant de le serrer dans son poing. Il sentit le métal froid lentement tiédir dans sa paume. Puis, voulant revoir le cadeau de sa fée, il la rouvrit et écarquilla les yeux. Le pendentif s'était transformé en une délicate fleur. Il sourit, ferma les yeux et se laissa aller.
« _ A bientôt Yura. A très bientôt. »
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* Vesha : printemps en russe / Zima - Viktor : hiver / leto - Mila : été / osen' - Georgi : automne
** Chak chak : gâteau frit au miel
*** Polounotchnitsa : Dame de Minuit, démone de la nuit qui apporte des cauchemars et tuent les voyageurs égarés. Elle guide aussi les esprits du folklore slave.
Poloudnitsa : Dame de Midi, démone de la journée. Elle parcourt les champs et la campagne et tue ceux qui la croisent par des insolations et déshydratation. Elle est la sœur de
Polounotchnitsa.
Le tire : Снежинка (Snezhinka) - Flocon de neige / Снежинки (snezhinki) - Flocons de neige
Un très joyeux anniversaire à Yuri en ce 1er mars 🎂🎉🐯
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Je sais que cette histoire change totalement de ce que j'écris habituellement. J'espère que ça vous aura plu.
Si vous avez aimé et que ça vous tente peut-être que je retenterai l'expérience un jour.
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