A feu et à sang - Partie 2
Ce qui ressemblait à un officier américain sortit d'un bâtiment plus loin, suivi d'une dizaine de subordonnés. Il porta un talkie-walkie à son oreille, et hocha plusieurs fois la tête, tout en laissant ses mains distribuer des ordres à ses soldats. Il leur suffit d'un filer géant pour neutraliser Isaac, qui peinait depuis quelques minutes à garder sa forme titanesque.
Son regard balaya ensuite la forêt, et s'arrêta sur ses camarades morts. Tous remarquèrent sans problème le signal rouge que venait de tirer Erwin. Il ne leur en fallut pas plus pour se mettre à plat ventre, et viser les broussailles de leur fusil.
« A terre ! » cria à son tour le major. La poitrine de Marion rencontra le sol sec, et alliés comme ennemis ouvrirent le feu. Il fut alors évident que ses derniers avaient un avantage technique considérable.
Le débit de leurs armes était terriblement meurtrier. Elle vit avec horreur une dizaine d'explorateurs, de brigadiers et de soldats de la Garnison laisser brutalement leur tête retomber au sol, leur visage éclaté baignant dans une mare poisseuse. A une dizaine de centimètres de son nez, les balles rebondissaient dans les troncs qui les protégeaient, laissant une encoche menaçante derrière elles.
Chaque seconde précipitait sa mort.
La peur la poussa urgemment à fuir, tout son être lui hurla de quitter l'endroit : mais le vacarme assourdissant des tirs qui la frôlaient la clouait au sol. Elle se recroquevilla sur elle-même du mieux qu'elle le put, et ramena ses bras contre ses seins, les mains devant sa bouche. Elle ne pouvait pas mourir maintenant, pas si près du but.
Alors que les larmes commençaient à lui monter aux yeux, une main tapota son épaule. Elle tourna discrètement la tête : c'était Annie, fusil à l'épaule, qui lui fit un bref signe de la main. Son regard se porta immédiatement sur Eren, debout au milieu du front, et Mikasa qui tentait vainement de le retenir. Une balle le frappa en plein abdomen ; il se plia en deux, le visage crispé, et porta son pouce à sa bouche.
Une formidable déflagration retentit. Le titan du soldat s'éleva alors, les yeux furieux et le poing serré. Sans hésiter une seule seconde, il fonça vers les ennemis, faisant trembler le sol sous ses pieds. Avant qu'ils n'aient eu le temps de réagir, ils se retrouvèrent brutalement écrasés sous ses talons.
Les tirs cessèrent un court instant de les harceler. « On y va ! » cria Livaï. Un second éclair passa à deux doigts du visage de Marion. Le mastodonte d'Annie, moitié plus petit qu'usuellement, chargea son poing de fluorine, et éclata le mur en face d'eux. Elle sortit rapidement du corps qu'elle venait de créer, pour se ruer vers le trou béant.
« Marion, bouge ! » Elle se redressa rapidement sur ses pieds, et se retrouva encerclée entre Erwin, la blonde et le petit homme. Tandis que les autres bataillaient sauvagement, ils enjambèrent le tas de débris et le cadavre du monstre, puis pénétrèrent la pièce sombre. Là, ils se plaquèrent contre le mur à leur gauche.
La poussière blanche se dissipa rapidement, découvrant une porte blindée à leur gauche. En face d'eux, une trappe de fer forgé contrastait avec le béton clair du sol.
« C'est ici ? demanda le major.
— Je pense, répondit l'ancienne ennemie.
— Vas-y. »
Après une œillade glaciale, elle se blessa de nouveau. Cette fois-ci, seul un bras fumant s'étala devant elle. Elle tira brusquement sur la pauvre entrée, qui se retrouva expulsée à quelques mètres, découvrant un escalier tout aussi morne.
Moblit et Nicholas les rejoignirent. « Major Smith », interpella le premier. « Il n'y a plus un seul ennemi à l'extérieur. » L'intéressé fronça les sourcils ; tous se turent. Un silence de mort régnait au-dehors.
Lui et son second échangèrent un regard, qui se tourna vite vers l'entrée de la pièce. A cet instant précis, elle s'ouvrit en grand : quatre soldats les identifièrent immédiatement, et pointèrent leur kalachnikov sur eux.
Il n'en fallut pas plus pour que les explorateurs fassent de même avec leurs fusils. Marion se retrouva accolée entre le mur de béton et celui, protecteur, que formaient ses camarades. Une tension lourde s'installa. Ils étaient en surnombre, mais son cœur criait toujours au danger, battant de plus en plus fort contre sa cage thoracique.
Subitement, deux personnes firent leur entrée. Des hoquets de surprise s'élevèrent ; c'était Angela, qui tenait sans ménagement Historia par les cheveux. La lame d'un couteau commençait tout juste à lui égratigner la gorge.
« Haussman » fut le seul nom que Erwin prononça d'un calme olympien. Celle-ci plissa les yeux. La scientifique eut tout juste le temps de voir les cicatrices caractéristiques d'une transformation sur le visage de leur nouvelle adversaire. Angela, un titan ?! pensa-t-elle, bouche bée.
« Erwin Smith. » Quelques secondes passèrent.
« Livrez Marion, et cette jolie jeune fille restera intacte.
— Qu'importe, répondit l'intéressé. Marion a plus de valeur qu'Historia Reiss. »
Les deux soldates échangèrent un regard, et la panique naquit dans les yeux de la blonde. Il ne va pas les laisser la tuer ? pensa-t-elle, horrifiée.
« Vous avez brûlé quelques étapes, Major. Vous ne vous êtes jamais demandé pourquoi on a tranché ses doigts ? C'est étonnant de votre part. Marion, à côté, n'est rien de plus qu'un boulet. Elle ne peut pas accéder à ce que vous voulez. Alors que la petite Christa... » La brune sourit légèrement. « Ce n'est pas une Reiss pour rien. »
Elle n'eut comme toute réponse qu'un regard impassible. « Elle est inutile pour nous », reprit l'autre, manifestement agacée. « Elle est la seule de votre camp à pouvoir accéder aux machines. Marion ne peut rien faire de tout ça. Livrez-la. »
Le blond et Livaï échangèrent brièvement un regard. On tira brusquement la scientifique par le bras ; en une fraction de seconde, elle se vit immobilisée par le caporal-chef, le dos contre son torse et un poignard sur la carotide. Elle écarquilla les yeux, paniquée. « Que... » articula-t-elle en même temps que l'ennemie.
« Rendez Historia, ou on la bute », lâcha-t-il froidement. D'abord désemparé, le groupe ennemi reprit rapidement sa position ferme. C'est une blague ? Elle serra les dents, le souffle court. La voix de l'homme n'aurait pas pu être plus glaciale.
Le désarroi commençait à naître sur le visage marqué d'Angela.
« Vous vous foutez de notre gueule, finit-elle par ricaner, la voix légèrement tremblante. Vous n'allez pas tuer votre meilleur plan, ça serait du suicide.
— Oh ? rétorqua le plus petit. Elle n'est plus une loque, d'un coup ? »
Le regard de l'autre se fit plus irrité. Elle serra un peu plus la blonde, qui laissa sortir un gémissement désespéré. « Rendez nous Marion, ou on la cr... »
Une détonation soudaine retentit à quelques mètres, la coupant court dans ses propos. Ce fut les yeux écarquillés que les deux camps regardèrent le titan d'Ymir débouler rageusement dans la pièce, et sauter sur Angela.
Celle-ci eut tout juste le temps d'esquiver la blessure fatale que l'autre voulait lui asséner : les longs doigts de la brune se refermèrent fermement sur l'otage, qui l'observa, bouche bée. Puis son titan s'immobilisa, et elle sortit de sa nuque, les yeux embrasés et les lames chargées. Là, elle fonça sur son adversaire dans un tourbillon de fureur.
La lame tranchante de Livaï se dégagea immédiatement de la gorge de Marion. Il la poussa en arrière, se plaçant devant elle, manette de commandement et fusil aux mains. Déjà, les américains s'élançaient à leur tour.
L'un d'eux tira vers l'homme. Celui-ci se propulsa immédiatement dans un autre coin de la pièce, prenant la chercheuse au passage. Là, il projeta son second axe de manœuvre tridimensionnel dans l'abdomen de l'individu, qui se retrouva aussitôt au sol, le ventre déchiré.
« Marion, charge tes sabres », ordonna son supérieur une fois de nouveau à terre. Elle eut à peine le temps de les sortir de ses fourreaux qu'il tua une femme d'un coup de fusil au beau milieu du front. Toujours plus de pourpre coula sur le sol froid.
Ce fut alors Annie qui se posta devant elle, prenant solidement position pour se battre. La bataille qui se livrait dans la petite pièce était si chaotique que la jeune adulte ne savait plus où donner de la tête. Livaï virevoltait à une vitesse folle, enchaînant les meurtres ; Erwin égorgeait à tours de bras ; Ymir et Angela se battaient à mains nues devant une Historia qui venait tout juste de sortir de l'emprise de son amie.
Toujours plus de soldats rentraient de tous les côtés pour tenter de finir le massacre. Elle vit Jean se prendre une balle dans l'épaule et s'écraser au sol. Son incapacité à les aider la frappa brusquement. Désobéissant aux ordres, elle rangea ses épées, attrapa son fusil et le chargea le plus vite qu'elle put. Le soldat américain qui eut le malheur de courir vers elle se retrouva la cuisse et le crâne explosés.
« Je ne suis pas une loque, bande d'enfoirés ! » cria-t-elle en chargeant de nouveau son arme. Annie lui jeta un regard intense, qu'elle ignora pour viser un autre américain dans le genou. Dans le feu de l'action, elle ne remarqua pas les corps qui jonchaient le sol, ni le cadavre qui la fit trébucher, tête la première, dans l'escalier menant au sous-sol.
Elle déboula douloureusement quelques marches, et se redressa avec peine, sonnée. Où sont mes lunettes ? Elle les chercha du bout des doigts, et les rencontra enfin... Pour se couper le doigt sur du verre brisé.
« Marion ! » l'appela sa garde du corps. Elle se releva, chancelante. Seuls quelques bruits de lutte lui parvinrent d'en haut. Elle remonta les marches en boitillant, et sortit de la trappe. Le spectacle qu'elle découvrit la cloua sur place.
Une bonne quinzaine de morts baignaient dans une marée de sang, dont l'odeur métallique l'étouffa. Des vies en moins, toujours. Seules six personnes étaient encore debout : ses supérieurs, Historia, l'ex-ennemie et les deux brunes qui se démenaient à n'en plus finir.
Cette vision la frappa de plein fouet. Les mouvements des deux femmes étaient quasiment identiques : aucune n'avait l'avantage sur l'autre. Leur visage déformé par les cicatrices, leur expression endiablée, leurs cheveux en bataille, tout était si semblable qu'on ne pouvait presque plus les différencier.
Après quelques secondes de contemplation, ce fut au petit homme de plaquer ce qu'elle supposa être Angela à terre et de l'immobiliser d'une clef de bras.
« Ymir, murmura la blonde, choquée. Qu'est-ce que...
— Qui es-tu ? la coupa Erwin. »
L'intéressée claqua de la langue, agacée. « Je crois avoir une petite idée », articula Livaï. Elle lui jeta un regard noir.
« C'est trop tard pour moi, laissa-t-elle tomber. Caporal, vous le voyez bien. Angela a vingt-quatre ans, et j'en ai seize. Ça arrivera sans que rien ne puisse me stopper.
— Ymir, de quoi tu parles ? demanda Historia d'une voix légèrement tremblante.
— Tu n'as toujours pas compris ? cracha Angela. Tu as en face de toi la saloperie que j'étais lorsque j'étais ado. J'ai réalisé trop tard que vous n'étiez que des merdes totalitaristes. On a quand même voulu de moi, ce fut une chance... Ymir, tu n'y échapperas pas. C'est mieux, ici, s'exclama-t-elle, avant de grimacer de douleur. Ymir, réveille-toi, bon sang ! Suis-moi ! »
L'intéressée se releva lentement, l'œil noir. « Je me fiche de tes histoires sorties du fion de je ne sais qui. » Elle s'approcha, fusil en main, et posa le canon contre la tempe de son alter ego. « Va bien te faire foutre », cracha-t-elle, avant d'appuyer sur la gâchette.
Son crâne explosa, répandant des bouts de cervelle un peu partout sur le sol déjà macabre. Elle regarda son futur elle avec dédain, avant de ranger son arme sur son épaule. Le caporal s'en écarta, et essuya du sang coulant de son arcade sourcilière.
« Tu n'aurais pas dû la tuer, lâcha-t-il, mais on verra ta sanction plus tard. Qui est encore vivant ?
— Nicholas est mort, Jean n'a pas l'air en état, répondit Annie.
— Historia, envoie un signal de détresse et attends les secours avec Ymir. Gardez l'endroit, ordonna Erwin. Marion, Livaï, Annie, on descend. »
Lorsqu'ils entendirent plus de gardes arriver par le couloir, ils obtempérèrent immédiatement, non sans un regard de la jeune adulte vers son camarade peut-être mort. Et Armin ? Elle secoua la tête, et suivit rapidement les autres, passant devant le cadavre de ses lunettes rouges sans même le remarquer.
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