Day 3- Le voyage infernal
Hey, ici Lily (LilyCathy0 pour ceux qui ne me connaissent pas ;)) en ce troisième jour dédié aux UA School Life ~
Oui oui je poste tôt, car sachez que je ne suis pas en vacances jeunes gens! (quoi j'ai que 16 ans? Chuut j'aime cette expression). Comme j'ai cours je poste ce matin et je répondrai aux commentaires cette après-midi ;)
Petite note, juste comme ça. Avez-vous trouvez le texte de notre chère Tsuu hier long? Car si oui et bien... Désolée mais le mien est un peu pire (mais juste un peu~) Ensuite, j'estime que mon texte se suffit à lui-même, seulement et ayant d'ailleurs déjà reçu une demande, il y aura tout de même une suite un jour, promis ;) (demandez pas quand, ça je sais pas, mais il sera probablement sur ce reccueil également^^)
Maintenant concernant le thème (et un peu racontage de vie): C'est vraiment un sujet sur lequel j'ai beaucoup apprécié écrire et où je me suis réellement investie car, comme certains le savent déjà, ça fait maintenant dix semaines et demie que je suis à l'étranger (déjà? :') T^T ) donc certes c'est un peu plus long que la période que je décris, mais je pense pouvoir dire que c'est un thème que je maîtrise ;) (et puis j'ai déjà fait une semaine comme celle-là avant X)) Ainsi, beaucoup de situations ou sentiments sont des choses que j'ai vécues ou ressenties (bien qu'assez souvent amplifiées hein ^^)
Dernière petite note avant de vous lâcher (de toutes façons un peu plus un peu moins ça changera pas grand chose au volume de lecture que je vous laisse donc bon :')) Comme vous allez le voir Chuuya a une jolie petite fratrie (cinq frères très exactement, et il en est l'aîné le pauvre :')). Absolument tous les personnages OC apparaissant ici sont repris des biographies des vrais auteurs, ainsi que leurs noms, qui sont les vrais ;) (seule l'apparence change mais bon, BSD n'est pas fidèle dans l'apparence non plus donc^^)(et les origines de la mère de Chuuya pour que ça colle aussi-) Si ça vous intéresse je laisserai peut-être quelques notes en commentaires, parce qu'il n'y a vraiment rien sur ce cher Chuu sur internet ;)
Et le mot de la fin (ou du début, en fonction du point de vue): Bonne lecture!
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Dazai et Atsushi marchaient tous les deux vers leur établissement scolaire alors qu'il faisait nuit, le premier avec une mine indéchiffrable, comme à son habitude, et le deuxième tout excité malgré l'heure tardive et arborant un sourire éclatant. Cela faisait maintenant deux ans qu'ils étaient amis et voisins, depuis que le brun était orphelin et avait été recueilli par son oncle, professeur dans cette école.
Ils avaient tous deux avec eux une valise de taille moyenne, suffisante pour la semaine complète. Car qui rimait avec vie scolaire pouvait, parfois, rimer avec échange linguistique.
En effet, leur établissement organisait ce genre d'évènement tous les trois ans avec une école basée à San Diego, ville jumelée à la ville portuaire de Yokohama. Peu d'élèves y participaient, aussi était-ce pour cette raison que trois niveaux de classes étaient nécessaires.
Atsushi souhaitait y participer pour découvrir un peu le monde et faire des rencontres, sa famille étant trop pauvre pour pouvoir se permettre de voyager. Quant à Dazai, disons qu'il avait ses raisons. Majoritairement, c'était pour fuir la peste de fille de son oncle, ce dernier ainsi que son copain qui venait un peu trop souvent au goût du brun chez eux, en plus de chercher à le prendre en pitié et à l'encourager. Ce qu'il ne supportait pas.
Ils arrivèrent dans les derniers et mirent directement leurs bagages dans la soute du bus. Ils y allaient en avion mais l'aéroport se situait relativement loin d'ici. De plus ils partaient à cette heure-ci, c'est-à-dire une heure du matin, pour arriver dimanche vers vingt heures à destination. C'était plutôt perturbant, car ils étaient en avance de seize heures sur la ville jumelée tandis que le trajet ne durait même pas dix heures et demie.
Ils étaient moins d'une quinzaine à partir, et allaient tous résider chez un élève de leur âge durant la semaine. Ils connaissaient d'ailleurs déjà tous les identités de leurs correspondants et savaient à peu près à quoi ils ressemblaient, ayant reçu une petite fiche de présentation avec une photo.
Les deux amis avaient été surpris et s'étaient dans un premier temps demandé s'il n'y avait pas une erreur, car leurs correspondants à tous deux portaient des noms typiquement japonais, mais on leur avait assuré que tout était en ordre.
Cela encourageait un peu Atsushi, qui, malgré tous les efforts qu'il faisait, était très mauvais en langue. Il se disait donc qu'avec un peu de chance celui chez qui il logerait arriverait à mieux comprendre le japonais que lui l'anglais. Néanmoins il n'était pas rassuré. Il savait en effet qu'il ne serait pas seul.
Car le fameux Ryunosuke Akutagawa avait une sœur, qui participait également à l'échange, et il y avait seulement deux personnes à qui il n'avait pas posé la question pour savoir s'ils seraient ensemble. Kyoka Izumi, qui était d'un an sa cadette et très renfermée sur elle-même. Bien qu'elle n'ait pas l'air méchante, il n'avait jamais osé aller lui parler. Et Naomi Tanizaki, qui elle était une vraie peste et qu'il ne supportait pas.
Il n'était donc pas franchement rassuré à l'idée de savoir qu'il allait passer une semaine complète avec l'une de ces deux charmantes demoiselles.
Quant à Dazai, le plus logique était que l'établissement avait fait en sorte qu'il se retrouve avec un japonais car, contrairement à Atsushi, lui ne faisait absolument aucun effort pour apprendre la langue et savait à peine dire bonjour. Personne ne savait trop pourquoi il avait tant tenu à participer, surtout qu'au départ on avait tenté de l'en dissuader puisqu'il manquait un volontaire de l'autre côté.
Les accompagnateurs pour le voyage devaient à l'origine être le professeur Fitzerald, américain qui leur enseignait l'anglais, bien qu'il eut une tendance assez désagréable à tenter de parler français en permanence - même si tout le monde était persuadé qu'il n'était jamais allé en France- et la professeure Christie, également enseignante d'anglais, mais plutôt effrayante et imposante. Seulement cette dernière était soudainement tombée malade le vendredi et avait dû être remplacée dans l'urgence par le professeur Doppo, enseignant les mathématiques et ne parlant quasiment pas la langue de Shakespeare, pour son plus grand désespoir.
Ce dernier était d'ailleurs en train de faire l'appel tout en se retenant d'étrangler son collègue plus qu'exubérant, qui lui ne faisait rien à part étaler toute sa science sur la culture étrangère avec des sourires suffisants et éclatants.
Après s'être annoncés auprès de leur professeur, Atsushi et Dazai montèrent et s'installèrent, le brun à côté de son meilleur ami, Oda, du même âge que lui, et le gris dans la colonne d'en face. D'ailleurs le jeune homme semblait guetter avec inquiétude l'arrière du bus, comme si quelque chose l'effrayait, lui qui était pourtant si calme d'ordinaire.
Après s'être attachés, les deux nouveaux arrivants regardèrent dans la même direction que lui et comprirent immédiatement. Occupant le dernier rang, Akiko Yosano et Kaiji Motojiro étaient en pleine discussion métaphysique, usant de vocabulaire que peu d'élèves parvenaient à comprendre.
Ils avaient tous deux un ordinateur portable sur les genoux et avaient bien trop d'étoiles dans les yeux pour qu'ils ne mijotent pas quelque chose de louche.
Ils avaient le même âge qu'Atsushi et étaient meilleurs amis, pour le plus grand malheur de tous les professeurs de science, depuis maintenant cinq ans. Si, au départ, leur relation avait été explosive et n'avait été que compétition sur compétition, tous les deux tentant de rivaliser avec l'autre dans leurs domaines respectifs, ils avaient finalement fini par se rendre compte que ce serait bien plus intéressant de collaborer que de se mettre des bâtons dans les roues.
Le pire étant que c'était la faute des professeurs eux-mêmes. En ayant assez de les voir se chamailler et de faire exploser au moins une fois par mois quelque chose durant leurs petites luttes, ils les avaient collés ensemble durant deux semaines complètes, sûrement dans le but qu'ils trouvent enfin un terrain d'entente... Ce qui fonctionna un peu trop bien. C'était là qu'ils avaient pris conscience du plein potentiel qu'ils pourraient avoir à deux.
De plus Dazai s'était retrouvé collé en même temps qu'eux et leur avait évidemment proposé son aide, en bon trouble-fête qu'il était.
Aussi, il n'était pas rare que le laboratoire explose, mais plus une ou deux fois la semaine que le mois, les deux scientifiques arrivant toujours à s'y introduire par on ne sait quel procédé, malgré toutes les fois où la serrure avait été changée, la sécurité renforcée voire le lieu complètement modifié -le brun jurait d'ailleurs être innocent dans cette affaire, bien que peu fussent dupes. Après tout même les caméras qui avaient fini par être installées n'arrivaient pas à les prendre sur le fait, et, sans preuve, aucun ne pouvait être puni.
Lorsqu'ils avaient une idée, rien ni personne ne pouvait les arrêter. Enfin, ils verraient bien comment cela allait tourner de toutes façons.
Ils se retournèrent, pour voir un autre spectacle tout aussi déroutant alors que le bus s'ébranlait pour enfin partir.
Naomi et Jun'Ichiro Tanizaki, assis trois rangs devant les trois amis, recommençaient encore ce que, dans l'établissement, on appelait leurs « scènes ». La sœur était penchée d'une manière plus qu'étrange vers son frère tout en semblant lui caresser le ventre avec une mine boudeuse, tandis que ce dernier était rouge et tentait de l'en empêcher, pour qu'ils ne s'affichent pas trop tout de même. Ce qui, en soit, était raté.
-Tu n'as pas intérêt à me faire des infidélités ! dit la brune d'une voix suspicieuse.
-Non... Non, évidemment, bégaya l'autre en tentant de se reculer, bien qu'il fut déjà contre la fenêtre.
-Tu sais, je serai malheureuse sans toi durant tout ce temps !
-Allons Naomi, ce n'est qu'une semaine, ça passera vite, tenta de la convaincre son frère, de plus en plus gêné.
Les trois amis, tout aussi gênés, détournèrent le regard. Atsushi aperçut Kyoka, à l'avant du bus, seule comme à son habitude, deux rangs derrière les deux professeurs. Fitzgerald continuait de blablater sur on ne savait trop quel sujet, tandis que son collègue faisait son possible pour le faire taire, exaspéré, sans pour autant y parvenir. Le pire étant peut-être que les « Splendides ! » ou « Absolument ! » en français leur parvenaient alors que plus de douze rangées les séparaient. Ce professeur était vraiment désespérant.
Juste derrière Oda et Dazai se trouvait Ranpo, encore une fois du même âge qu'eux, en train de manger une grosse poignée de bonbon, bien que cela soit interdit dans le bus, se souciant peu du règlement. Il semblait lire en même temps un roman policier assez énorme que le gris ne parvint pas à identifier.
Encore un peu plus loin se situait Higuchi, une jeune fille blonde de l'âge d'Atsushi, assez discrète mais qui s'avérait avoir un tempérament assez fort lorsqu'on la connaissait un peu mieux.
Le car était donc plutôt animé malgré l'heure plus que tardive, l'excitation de tous étant palpable.
Le stress commença à envahir l'argenté lorsqu'ils arrivèrent finalement à l'aéroport, n'ayant jamais pris l'avion de sa vie et s'inquiétant toujours de comment serait son correspondant et s'il parviendrait à se faire comprendre malgré son piètre niveau en langue.
D'ailleurs les exclamations joyeuses et excitées qui lui parvenaient du duo Yosano/Kaiji ne l'aidaient absolument pas à se rassurer, d'autant qu'ils semblaient justement parler d'avions et de réacteurs.
Il souffla néanmoins pour tenter d'évacuer, et monta à la suite des autres dans l'énorme engin, direction San Diego.
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L'avantage de partir de nuit, c'est que pendant six ou sept heures le calme plat régnait malgré tous les énergumènes étant de la partie. Enfin en théorie.
Car, malheureusement pour les élèves, comme pour tous les passagers d'ailleurs, les deux pseudo-scientifiques avaient eu une idée plus qu'effrayante. Ils avaient produit de A à Z un programme pour pirater le système de navigation de l'avion et en prendre le contrôle, et avaient décidé de le tester presque aussitôt tout le monde endormi, c'est-à-dire à deux heure et demie, après l'avoir peaufiné.
Au début, rien ne s'était passé et ils avaient tous les deux esquissé une moue déçue, bien qu'ils fussent presque les seuls à ne pas encore dormir et qu'une hôtesse de l'air les regardait d'un œil interrogateur.
Puis finalement, cinq minutes plus tard, l'avion avait été ébranlé, rien d'inquiétant, probablement une turbulence, pensèrent les quelques passagers que cela avait réveillés. Seulement des cris de joie et d'excitation avaient retenti, suivi presque immédiatement après de plusieurs pirouettes et piqués ponctués de messages d'alertes en tout genre.
Les gilets de sauvetage avaient été sortis et tout le monde commençait tant bien que mal à se diriger vers la porte dans la panique et la fatigue générale alors qu'il faisait nuit, tandis qu'ils survolaient la mer et que tous avaient été réveillés trop brutalement pour comprendre ce qu'il se passait.
Certains avaient même leur oreiller ou leur couette dans une main alors qu'ils tentaient d'attraper un gilet sous leur siège et de ne pas tomber de l'autre. Lorsqu'enfin l'hôtesse de l'air eut la bonne idée d'aller rapidement regarder ceux qui ne semblaient absolument pas effrayés par tout cela et allaient même jusqu'à rire et s'extasier.
Yosano, voyant le coup venir, avait immédiatement fermé son ordinateur et l'avait rangé tout en regardant innocemment la dame et en donnant un coup de coude dans les côtes à son acolyte, mais trop tard. L'hôtesse avait vu le programme et avait immédiatement saisi l'engin -bien qu'elle ne dusse pas comprendre grand chose à toutes ces lignes de code- qu'elle avait ensuite jeté violemment au sol et écrasé avec son talon aiguille.
Presque dans l'instant, tout redevint normal et se stabilisa, tandis que l'ordinateur rendait l'âme dans de petits crépitements électriques et que le pauvre Kaiji en regardait les débris d'un œil dépité.
Seulement, et grâce aux conseils avisés de leur partenaire suicidaire, tout était encore enregistré sur l'ordinateur de Yosano ainsi que sur trois clés USB, une pour chacun des enfants dans le coup. Les deux scientifiques en herbe se regardèrent donc avec un sourire entendu, signe qu'ils n'hésiteraient pas à recommencer, quoique le brun à lunette était quand même dégoûté pour son ordinateur.
Par la suite Kunikida, sidéré que des enfants de cet âge puissent réaliser ce genre de chose, n'avait pas su comment réagir dans un premier temps. Ils étaient vraiment effrayants lorsqu'ils combinaient leur savoir, ces deux-là. Puis il s'était confondu en mille excuses tandis que son collègue Fitzgerald tentait d'amadouer l'assistance avec ses sourires. Heureusement, n'ayant aucune victime à déplorer ni aucune perte -mis à part l'ordinateur et la baisse phénoménale de la réserve de sac plastique- et étant donné qu'ils étaient mineurs, ils eurent juste droit à un sermon, qui fut continué par leur professeur plus tard.
Le reste du trajet se passa donc plutôt calmement, enfin autant que possible avec Dazai jouant bruyamment sur sa console de jeu, Kunikida faisant son sermon et les Tanizaki tout à leurs affaires gênantes.
~
Ils arrivèrent à destination environ une heure plus tard que ce qui était prévu, à cause des problèmes techniques rencontrés durant le vol -ce que prétextèrent les membres du personnel par bienveillance.
Leurs correspondants les attendaient avec une impatience non dissimulée, car la nuit était désormais tombée chez eux également alors qu'il aurait encore dû faire jour, mais ils ne pouvaient heureusement pas connaître les véritables raisons de leur retard.
Ils étaient tous à l'aéroport, les deux professeurs de langues -l'un du nom de Melville et l'autre de Rimbaud- les accueillirent avec le directeur de l'établissement jumelé, qui était d'ailleurs un homme plus qu'effrayant.
Il était assez maigre et arborait un sourire sadique troublant, alors que d'énormes cernes pendaient de sous ses yeux mauves. Sur ses cheveux, violets également, trônait une chapka prouvant le fait qu'il n'était probablement pas d'origine américaine.
Les élèves semblèrent tous hésiter avant de s'avancer, prenant enfin conscience de ce qu'ils vivaient. Naomi fut la première à se lancer car personne n'osait briser la glace, lâchant son frère à contrecœur mais rajoutant tout de même avant de s'éloigner un baiser qu'elle souffla dans sa direction avec un clin d'œil.
Elle scruta d'abord le comité d'accueil, avant de s'arrêter sur une jeune fille aux cheveux roses et aux bagues exposées de par son immense sourire carnassier. Cette dernière s'avança également, puis l'air devint électrique. Les deux arrêtèrent de sourire et se dévisagèrent durant ce qui parut une éternité à tous les spectateurs. Cela commençait bien, visiblement deux pestes venaient de se rencontrer.
Puis, mystérieusement, elles changèrent toutes deux d'attitude en même temps. Elles arborèrent un sourire encore plus grand qu'à l'arrivée et repartirent bras-dessus bras-dessous, visiblement satisfaites de trouver quelqu'un de similaire à elles. Naomi fit un dernier clin d'œil à son frère avant que les deux ne disparaissent dans une voiture qu'Atsushi n'aurait même pas pu rêver avoir un jour tellement elle devait coûter cher.
Personne ne parla durant encore deux minutes, comme ébranlés par cette rencontre fortuite. Au moins, il ne se retrouverait pas en cohabitation avec la cadette Tanizaki. Ce qui laissait Kyoka.
Après les deux demoiselles, tous commencèrent à avancer. Jun'Ichiro trouva son correspondant presque aussitôt, un certain Mark Twain. Au moins eux ne semblèrent pas vouloir se sauter dessus pour se crêper le chignon, et se saluèrent même cordialement.
Ranpo s'avança alors qu'il enfournait la dernière poignée de bonbon de son sac et le jetait nonchalamment en travers de la route, puis il traîna son énorme valise derrière lui -probablement remplie d'un stock de sucreries suffisamment conséquent pour la semaine- et s'avança vers un garçon en retrait qui semblait extrêmement timide, ses cheveux empêchant de voir ses yeux.
Le jeune homme brun ne prit même pas la peine de le saluer et continua son chemin, ayant déjà identifié la voiture qu'ils allaient emprunter, tandis que son pauvre correspondant mettait un peu de temps à se rendre compte qu'il était parti et le suivait d'un pas hésitant.
Higuchi repéra une jeune fille habillée élégamment d'une robe et d'un chapeau blancs et verts, aux cheveux bruns et aux yeux bleus. La blonde sourit timidement, et l'autre le lui rendit avant de l'entraîner à sa suite.
Yosano, qui jusque-là avait consolé son meilleur ami de la perte de son précieux ordinateur, avisa celle qu'elle avait déjà vu en photo et qui confirma ce qu'elle pensait. La jeune fille était toute tremblotante et avait la peau si pâle qu'elle ne pouvait qu'être malade.
Or la jeune scientifique rêvait de devenir médecin plus tard, elle allait donc pouvoir profiter de toute la semaine pour disséquer, enfin, plutôt tenter de soigner la pauvresse. Elle s'avança vers elle, lui fit un grand sourire sincère quoiqu'un peu sadique, et attendit qu'elle parte pour la suivre avec son énorme valise contenant tout son matériel aussi bien scientifique que médical -et quelques vêtements tout de même évidemment.
Kaiji, ayant enfin l'air de s'être à peu près repris de la perte de son bijoux technologique, se dirigea vers son partenaire, un jeune homme blond aux yeux bleu glace et portant une sorte de béret. Ce dernier le salua en retirant son chapeau, mais l'autre l'ignora presque, relevant à peine la tête. Ce qui fit grincer des dents l'américain, peu satisfait d'être traité de la sorte.
Oda se dirigea vers un garçon très grand aux longs cheveux noirs et aux cernes presque aussi grands que ceux du directeur, et qui semblait irradier la joie de vivre -ironiquement parlant. Il fit un signe de la main à ses deux amis et ils partirent sans même se saluer au préalable. Pourtant l'auburn était quelqu'un de plutôt sociable, l'aura de son correspondant semblait l'avoir totalement démotivé.
Atsushi et Kyoka, qui était restée en retrait depuis l'arrivée, s'avancèrent vers les deux Akutagawa. Car cela ne pouvait qu'être eux, la ressemblance était frappante. Ils avaient le même regard gris qui semblait à la fois vous transpercer et vous ignorer totalement. Le gris se dit qu'il valait probablement mieux être avec la jeune fille qu'avec Naomi, et que peut-être, malgré l'apparence peu ouverte qu'avaient le frère et la sœur, étaient-ils tout de même de bonne compagnie. Peut-être.
Ne restaient que Dazai et un jeune garçon roux, un chapeau marron sur la tête et relativement petit, qui semblait s'impatienter car il commençait à taper du pied.
-Bon, tu te bouges où tu veux que je te traîne avec une chaîne derrière moi ? finit par cracher le garçon au chapeau en anglais.
En réalité le brun avait parfaitement compris, car il simulait et faisait juste semblant de ne rien connaître à la langue pour énerver son monde, aussi sourit-il innocemment en haussant les épaules et en secouant la tête négativement. Il n'avait certainement pas l'intention de faire d'efforts pour se faire comprendre. Même s'il était évident qu'il parlait presque parfaitement cette langue, ses parents lui ayant appris depuis sa plus tendre enfance.
L'autre soupira, déjà exaspéré. Il savait très bien que l'autre savait ce qu'il avait dit, il l'avait vu dans son regard. C'était l'avantage lorsque l'on parlait trois langues couramment.
Son père était un japonais qui était parti avec son meilleur ami et la femme de ce dernier créer leur propre entreprise ici, à San Diego. Il y avait rencontré sa femme, une française qui était venue faire ses études ici.
Bien qu'ils parlent anglais chez eux, le rouquin avait toujours insisté pour qu'on lui parle dans les trois langues, ayant un profond intérêt pour les cultures étrangères. C'était le seul de sa grande fratrie à les maîtriser, d'ailleurs.
Aussi n'avait-il absolument aucun intérêt à faire cet échange, et il l'avait bien entendu fait remarquer à son professeur de japonais, Arthur Rimbaud. Mais il y avait une personne en trop de l'autre côté, qui de plus ne parlait pas un mot d'anglais, alors on l'avait finalement forcé à y prendre part. Pour cet imbécile heureux qui simulait. Ce que cela pouvait l'agacer.
-Je pense que nous pouvons y aller, se força-t-il à répéter en japonais calmement et en comprimant ses émotions.
L'autre en face écarquilla brièvement les yeux, visiblement surpris et heureux que son correspondant parle sa langue d'une manière aussi fluide.
-Ça t'étonne tant que ça ? Ils ont équilibré en mettant les meilleurs avec les moins bons, c'est tout, sourit l'autre sur un ton à la fois moqueur et supérieur, avant de tourner les talons.
En effet, les deux Akutagawa ne devaient donc pas avoir des cas faciles non plus. Ils se connaissaient tous les trois depuis leur plus tendre enfance grâce à la relation de co-entrepeneur qu'avaient leurs pères, qui étaient actuellement en voyage d'affaires d'ailleurs.
Aussi, même s'ils ne le parlaient pas couramment, ils comprenaient très bien le japonais. Et de toutes manières ils n'étaient pas très bavards. C'était probablement pour cela aussi qu'ils s'entendaient bien, car Chuuya étant plutôt impulsif, le calme du frère et de la sœur ne faisait pas forcément de mal pour compenser.
-Non, je pensais juste que tu étais trop petit pour que je puisse t'entendre, rétorqua l'autre, un grand sourire scotché sur le visage. Le rouquin se décomposa immédiatement, arborant désormais une expression de haine farouche.
-Répète un pour voir, espèce de crétin momifié ?!
~
Lorsque Dazai arriva enfin chez le rouquin après plusieurs longues minutes de marche -il détestait marcher, surtout avec une valise- la première chose qui le frappa fut le bruit qui émanait de la maison. Des cris semblaient fuser de partout à la fois alors qu'ils n'étaient encore qu'à l'entrée, comme si un monstre attaquait des enfants innocents. Peut-être était-ce le cas ?
-Vos gueules les mioches ! Tenez-vous un peu, c'est pas parce que maman est absente et papa en voyage que vous pouvez foutre le bordel ! hurla Chuuya en anglais, son cri résonnant dans toute la maison. Immédiatement le calme plat suivi, on aurait presque pu entendre un moucheron voler.
-Impressionnantes cordes vocales ~ commenta le brun, satisfait de voir que l'autre prenait la mouche à chaque fois. Même s'il se retint de lui faire remarquer son vocabulaire peu élégant, feintant toujours la non-compréhension.
-Toi aussi ferme-la, surtout si c'est pour dire des choses aussi peu intéressantes !
Sur ces paroles, il monta l'escalier qui menait plus haut et se retourna en plein milieu, voyant qu'on ne le suivait pas.
-Tu attends de crever sur place ou quoi ?
-Peut-être bien~
Chuuya comprit que ses nerfs seraient mis à rude épreuve durant cette semaine. Il continua de monter, de toutes manières c'était son problème si l'autre comptait rester dans l'entrée, encore qu'ils n'avaient pas véritablement besoin d'un nouveau porte-manteau.
-J'espère pour toi que tu ne fais pas de bruit en dormant, crétin, parce que tu vas être obligé de dormir avec moi, faute de place, ajouta-t-il alors qu'ils étaient arrivés sur le palier.
-Tu vas un peu vite tout de même, fit remarquer le brun avec un grand sourire, ce qui fit se crisper l'autre sur la poignée, l'idée de l'arracher pour l'envoyer dans la figure de l'autre étant soudainement très tentante.
-Dans des lits séparés, abrutie de momie retardée ! s'énerva-t-il, avant d'enfin actionner la poignée et d'entrer d'un pas rageur.
Il fit bien d'ailleurs, car cela lui épargna d'entendre le « dommage » prononcé par l'autre alors qu'il avait le dos tourné.
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Pour le plus grand malheur d'Atsushi, le trajet se fit dans le calme le plus plat, aucun ne lançant de conversation ou autre. L'ambiance était lourde et il se sentait vraiment mal à l'aise. Il avait pourtant cru remarquer que la mère était un peu typée japonaise, peut-être le parlait-elle ?
Toujours est-il qu'ils arrivèrent devant une maison luxueuse, qui renvoyait la petite demeure modeste du gris à une toile de tente tellement elle était immense. Ils pénétrèrent à l'intérieur, toujours sans s'échanger la moindre parole. Etaient-ils tous muets ou bien ?
Le frère et la sœur se séparèrent et emmenèrent chacun leur correspondant dans une aile de la demeure, puis il entendit pour la première fois Ryunosuke prendre la parole lorsqu'ils arrivèrent finalement devant une porte.
-Ta chambre.
Deux mots en japonais, puis il l'abandonna là, repartant dans le couloir et laissant un Atsushi pantois.
Il se décida finalement, après plusieurs secondes à souffler pour se déstresser, à ouvrir la porte. Il aurait tout aussi bien pu se retrouver dans un hôtel cinq étoiles qu'il aurait vu la même chose. Une pièce plus grande que la pièce à vivre chez lui, un lit double à baldaquin avec une grande étagère, une télé à écran plat sur le mur d'en face et une fenêtre imposante donnant sur un jardin avec piscine.
Cela finit de le déprimer. Comment faire pour accueillir le bicolore dans sa si modeste maison alors qu'il vivait dans tant de luxe ?! Il déballa ses affaires et les mit dans l'armoire prévue à cet effet, qu'il ne remplit même pas au huitième.
Puis il descendit manger, arrivant le dernier à table. Kyoka et Gin ne semblaient pas non plus avoir entamé la conversation, leur regard perdu dans le vide. Ryunosuke semblait, quant à lui, le sonder sans vraiment le regarder, et avec toujours un visage impassible. C'était réellement possible de faire plus malaisant ?
Seule la mère, sentant peut-être qu'il n'était pas à son aise, tenta un petit sourire en coin, ce qui lui confirma tout de même qu'il y avait peut-être des gens humains ici. Il s'installa et commença à manger, comme les autres.
-Et donc, que fait-on de....
Il avait parlé d'une petite voix, mais voyant que personne ne tournait la tête de son repas, ses derniers mots moururent dans sa gorge alors qu'il pinçait les lèvres, désarçonné par le froid qui semblait avoir envahi la pièce. Les fenêtres étaient-elles ouvertes ?
Il tenta de se rassurer en se disant que ce n'était qu'une semaine. Une toute petite semaine.
~
La mère de Chuuya étant absente, c'est lui qui s'attela à la cuisine pendant que son correspondant déballait sa valise plus haut. Ce qui n'était pas plus mal, car cela lui évita de voir tout l'attirail digne du suicidaire qu'il était que l'autre avait emmené.
Lorsqu'il eut terminé, il appela tout le monde et s'installa. Ses cinq frères arrivèrent au pas de course, il était déjà tard et ils avaient tous faim. Lui avait quinze ans et était l'aîné, ensuite venait un autre rouquin qui lui ressemblait étrangement, si ce n'était qu'il avait encore le visage un peu rond du haut de ses douze ans et les cheveux un peu plus long, nommé Arô. Il avait la peau pâle et semblait fragile.
D'un an plus jeune venait Kôzô, aux yeux vert turquoise avec quelques tâches de rousseurs parsemant ses joues et son nez. Shirô, neuf ans, avait les yeux bleus comme ses deux aînés, mais ses cheveux étaient un peu plus foncés. Trois ans plus jeune, Gorô avait les yeux bleus presque gris et la peau translucide. Quant au petit dernier, nommé Jûrô, seulement quatre ans, il avait des yeux vert d'eau et une multitude de petites tâches de rousseurs partout, même derrière les oreilles, ce qui le rendait adorable et lui permettait d'obtenir beaucoup de choses de ses grands frères. Ils étaient tous roux.
Dazai arriva le dernier d'un pas traînant et s'arrêta net en voyant toute la famille au grand complet.
-Oh, la fratrie Poil de Carotte~ sourit-il en s'installant à table également, sous les regards perplexes de l'assistance, qui ne connaissait visiblement pas.
Ils mangèrent dans un silence étonnant, enfin finalement pas tant que cela vu que le brun devait commencer à ressentir les effets du décalage horaire, puis allèrent se coucher presque aussitôt après.
Durant la nuit, Chuuya fut réveillé à de nombreuses reprises car il s'avérait que son correspondant faisait beaucoup de bruit en dormant. Mais ce n'était pas des ronflements ou grincements de dents comme tout le monde, non, lui chantait ! Le rouquin, après s'être retourné pour la vingtième fois, se promit d'aller acheter des boules Quies le lendemain.
Ce qu'il ne savait pas, c'est que Dazai était bien loin de dormir et s'amusait juste à fredonner le plus fort possible, tout en faisant en sorte que cela reste crédible quand au fait qu'il était censé ne pas être conscient.
Dans toutes les autres familles, les correspondants commençaient à trouver leurs marques et à parler entre eux pour apprendre à se connaître, malgré le barrage de la langue. Des liens commençaient à se tisser, enfin approximativement pour certains, car d'autres n'étaient réellement pas sûrs de pouvoir tenir une semaine complète.
Naomi et Lucy se découvrirent tellement de points communs qu'il serait impossible de les citer.
Heureusement pour la pauvre Louisa, elle n'avait pas assisté au dépaquetage des affaires de Yosano, et n'avait encore à l'heure actuelle rien subi de traumatisant, la scientifique en herbe devant rentrer tous les calculs et les comptes pris durant le piratage de l'avion.
Mark et Jun'Ichiro ne s'entendaient pas vraiment et la tension commençait à devenir électrique, ils n'arrivaient pas à se mettre d'accord sur les choses importantes de la vie -dont les détails de ce débat houleux ne seront pas retranscris ici pour cause d'allusion à l'inceste-
Steinbeck parvenait difficilement à comprendre son invité, et par la logique des choses à s'entendre avec lui, car il venait tout de même de s'enfermer dans sa chambre sans prévenir et sans avoir mangé, manigançant probablement quelque chose de pas très net. Mais ça, le jeune américain l'apprendrait à ses dépens et bien assez tôt.
Ranpo se sentait comme chez lui, quoiqu'en soit tous les lieux pouvaient faire l'affaire, car il ne se gênait absolument pas. De plus les parents de ce pauvre Poe étaient actuellement absents, et ce dernier ayant peu d'autorité, il avait beau tenter, il ne parvenait qu'à bégayer ou alors ne parlait pas suffisamment fort lorsqu'il tentait de demander aimablement à son correspondant d'enlever ses chaussures du canapé, d'arrêter de jeter ses papiers de bonbons partout ou encore de traumatiser le pauvre raton-laveur domestique de la famille. Il allait devoir apprendre à s'imposer, mais en attendant il était trop occupé à ramasser ces papiers, nettoyer les traces de chaussures et chercher vainement l'animal en fuite.
Margaret et Higuchi étaient à peu près sur la même longueur d'ondes et parvenaient à peu près à s'entendre. Peut-être parviendraient-elles à devenir amies, qui sait ?
Oda tentait de lancer la conversation, dans sa grande sociabilité, mais Lovecraft n'était pas du genre bavard, quoiqu'il semblait tout de même l'écouter d'une oreille attentive.
Seul Atsushi peinait véritablement à s'intégrer dans sa famille. En même temps, on ne peut pas vraiment dire qu'on lui facilitait la tâche, et cela ne semblait pas impacter le moins du monde Kyoka.
~
La semaine commençait en beauté avec une visite de la ville et une sorte de mini rallye avec un jeu de piste pour la découvrir et apprendre des choses sur son histoire et autre.
Seulement pour Chuuya, elle commença sur les chapeaux de roue. Il n'avait pas cours grâce à cette sortie et pouvait donc partir deux heures plus tard, le rendez-vous étant fixé à 10 heures pour permettre aux correspondants d'être un peu moins perturbés par le décalage horaire.
Seulement, lui n'avait absolument pas pu fermer l'œil, tandis que Dazai ne s'était endormi qu'aux alentours de six heures, bien que le rouquin ne le sache pas. Aussi était-il déjà neuve heure passée et il n'était toujours pas sorti de son lit.
C'est donc avec d'immenses cernes et d'une humeur massacrante que le plus petit souleva d'un geste plutôt violent la couverture dans laquelle l'autre était emmitouflé, révélant alors qu'il ne portait qu'un caleçon pour tout vêtement.
D'ailleurs, pas du tout affecté alors que l'autre était plutôt gêné par la situation, il récupéra le pan de tissu que le rouquin n'avait pas lâché et se ré-enroula dedans.
Chuuya pesta, passablement énervé, et décida de sortir les vêtements de l'autre pour gagner du temps, et qu'en dernier recours il irait chercher une grande bassine d'eau. C'est ce qu'il avait tendance à faire avec ses frères récalcitrants. Enfin, plus maintenant vu qu'ils craignaient désormais ce réveil brutal et faisaient un effort.
Sauf que lorsqu'il ouvrit d'un geste rageur la valise de la belle au bois dormant qui lui servait de correspondant, il eut la surprise de ne trouver que des bandages, petits couteaux, cordes, lames de rasoir et autres dans le même genre.
Il blêmit d'abord, un peu effrayé. On ne savait jamais sur qui on tombait, mais l'autre n'avait tout de même pas le profil type d'un tueur en série. Désormais méfiant, il farfouilla tout de même rapidement pour trouver des vêtements, en vain.
-Ce n'est pas très poli de fouiller dans les affaires des gens, murmura soudain Dazai, à à peine quelques centimètres du rouquin, d'une voix ensommeillée.
L'autre sursauta immédiatement, avant de se retourner pour lancer un regard meurtrier au brun. Il s'était levé discrètement et souriait narquoisement du haut de ses cinq centimètres de plus, malgré sa fatigue apparente. Visiblement embêter son monde était sa seconde nature, pour réussir à faire cette tête-là au réveil.
-Rassure moi, tu as d'autres affaires que cette valise avec ces... hmm... il hésita sur le mot à employer, il ne doutait pas de pouvoir se défendre mais il craignait de vexer l'autre si jamais il était effectivement fou à lier, et qu'ensuite il s'en prenne à ses frères. D'ailleurs il remarqua à ce moment que le torse de l'autre était complètement recouvert de bandages, qui s'étendaient d'ailleurs jusque sur son cou et ses poignets.
-Oh, ça ! Ce sont juste quelques bibelots pour mes tentatives ~
-Tes ... tentatives ? dit l'autre en haussant un sourcil, ayant peur de comprendre.
-Oui, tu sais, la mort est fascinante, je ne comprends pas pourquoi les gens en ont si peur ! D'ailleurs il y a un auteur que j'apprécie beaucoup, qui...
-D'accord, d'accord, l'arrêta Chuuya, ne voulant pas en savoir plus tandis que les yeux de son correspondant brillaient. Et donc, où sont tes vêtements, crétin ? dit-il, préférant changer de sujets et voyant l'heure tourner.
-Hmm... Ils sont tous là, je crois, dit-il en souriant et en désignant la pile d'habits qu'il avait porté la veille.
-Attends... Tu te fiches de moi, là ?! s'énerva le rouquin en haussant le ton. Heureusement à cette heure-ci même Jûrô était à l'école et ils étaient donc seuls à la maison.
-Non, je n'avais plus la place, répondit l'autre en haussant les épaules avec un sourire suffisant insupportable.
Le rouquin resta un certain temps sans rien dire, décontenancé par une telle franchise et en même temps un comportement si enfantin. Il avait affaire à un suicidaire attardé, il aurait encore mieux valu un tueur en série tiens, au moins il aurait pu s'arranger avec les professeurs pour qu'il ne reste pas une nuit de plus.
-Et comment comptais-tu faire sans habits ? articula-t-il mot par mot en tentant de contenir une certaine colère.
-Je comptais sauter de l'avion mais les hublots étaient verrouillés, soupira-t-il tragiquement en amenant sa main à son front comme un acteur dramatique. J'avais bien réussi à presque entrouvrir une des deux vitres, mais malheureusement j'avais mis trop de temps, l'avion allait atterrir et il y avait une deuxième vitre similaire. Mais le trajet durera plus longtemps au retour, donc peut-être~
-Dis, juste comme ça, tu sais que si tu parviens à tes fins alors que l'avion est en vol, tout le monde mourra ? demanda Chuuya, dépité et commençant à cerner l'autre énergumène.
Puis il abandonna en voyant le regard plein d'étoile du brun. Il se dirigea vers sa penderie personnelle et en sortit une de ses tenues un peu trop grandes pour lui, en se disant que ça devrait passer.
-Tu sais que je ne porte pas d'habits de minimoys ? sourit tranquillement l'autre, se prenant un regard furibond en retour.
-Mais ferme-là enfoiré, c'est soit ça, soit tu y vas nu ! s'énerva-t-il en lui plaquant violemment les vêtements contre le torse, le faisant tomber assis sur son lit par la même occasion.
-Oh, tu sais...
-Mets ça, et dépêche-toi. Je n'ai pas l'intention d'être en retard par ta faute crétin sans cervelle !
Le rouquin sortit et claqua la porte derrière lui pour laisser l'autre se changer, priant pour qu'il aille vite. Seulement, après quinze minutes, l'autre était toujours à l'intérieur et ils allaient définitivement être en retard.
Il retourna donc devant la porte de sa chambre, ayant mangé et emporté quelque chose dans son sac pour son invité, plus pour éviter ses jérémiades que par réelle sympathie, et l'injuria tout en frappant.
-Mais qu'est-ce que tu fiches bon sang ?! C'est l'heure !
Absence de réponse et de bruit à l'intérieur. Le rouquin attendit encore un peu, puis s'apprêta à frapper de nouveau, quand finalement la porte s'entrouvrit, le brun avec une mine faussement défaite apparaissant.
-Je n'arrivais pas à m'habiller, se plaignit-il. C'est beaucoup trop petit !
L'autre baissa la tête et croisa les bras pour se retenir de le frapper, tandis qu'il mimait des mouvements bloqués par les vêtements en question en sortant enfin de la chambre.
-Maman sera rentrée ce soir, on avisera à ce moment pour tes vêtements, mais ne me fais pas croire que les miens ne sont pas à ta taille, je ne suis pas si petit que ça et tu es si maigre que le vent pourrait avoir raison de toi !
Chuuya tourna les talons et sortit de la maison, avisant qu'il faudrait courir pour être à l'heure. Puis il releva le regard vers son correspondant et vit qu'il n'avait toujours pas esquissé le moindre mouvement. Mais bon sang qu'est-ce qu'il attendait ?!
Le rouquin retourna rapidement à l'intérieur, agrippa l'oreille de l'autre et le traîna sans douceur aucune derrière lui, non sans protestations de la part du brun. Être à l'heure serait vraiment compliqué s'il devait se traîner un boulet geignard en plus, mais il allait essayer.
~
La journée s'écoula tout de même plutôt tranquillement pour tous. Evidemment, Dazai et Chuuya étaient en retard, et même de facilement vingt minutes, la curiosité du brun faisant qu'il trouvait le moyen de s'arrêter à tous les coins de rue malgré le fait que son oreille soit dans un état plutôt inconvenant.
Enfin au moins ce ne serait pas le rouquin qui aurait à le supporter toute la journée mais ses amis où les professeurs s'il décidait à nouveau de faire un arrêt prolongé pour « s'assurer que la poutre est suffisamment solide pour s'y pendre » ou autre débilité du genre. Il allait même s'en éloigner le plus possible.
Mais ils n'étaient pas les plus en retard, car l'oreille du suicidaire avait déjà retrouvé une couleur normale lorsque les derniers arrivants, Poe et Ranpo, étaient arrivés. Le deuxième lambinait en zieutant à droite à gauche et en enfournant une sucette tandis que l'autre l'exhortait timidement à se presser.
Evidemment, cela n'avait pas plut à Kunikida, qui n'arrêtait pas de hurler sur tout ce qui bougeait, à cran à cause de la quasi-heure de retard qu'ils avaient. Enfin, l'avantage en pays étrangers, c'est que tout le monde, même ses élèves, mimaient ne pas comprendre. Ce qui ne l'énervait encore plus, mais il criait dans le vide.
-Je savais que les américains étaient violents mais pas à ce point ! se plaignit Dazai, désormais entre Atsushi et Oda et se frottant l'oreille alors qu'elle était redevenue couleur chair depuis belle lurette. Un peu plus et il me décollait l'oreille ! geignit-il encore, provoquant la colère de son correspondant, à quelques pas derrière lui.
-Allons Dazai, il avait peut-être une raison de te traiter de la sorte, dit calmement Oda, diplomatique.
-Il est juste incapable de contrôler ses pulsions, ce nain rétré...
Il n'eut pas le temps de finir, le nain en question lui ayant fait un croche-pied pour qu'il s'étale de tout son long. Et désormais il lui marchait dessus comme un paillasson et pris sa place entre Oda Atsushi, qui avaient simplement continué leur chemin en soupirant.
-Comment faîtes-vous pour le supporter ? dit avec humeur Chuuya, légèrement vexé. Vous êtes amis alors que vous n'êtes pas du tout similaire !
Les deux autres écarquillèrent d'abord les yeux face à sa maîtrise parfaite du japonais, puis se regardèrent, gênés. Ils étaient incapables de s'exprimer aussi bien, comment ils pouvaient lui répondre ?
Le rouquin les regarda tour à tour, ne comprenant pas leur malaise apparent. Maîtrisant parfaitement trois langues, cela ne lui venait pas forcément à l'idée que des étrangers censés parler la langue du pays où ils étaient souhaitent rendre la pareille lorsque l'on s'exprimait dans leur langue. Enfin, peut-être l'aurait-il compris si Dazai était un peu plus respectueux de ce genre de principe moral.
-Eh bien quoi ? Il y a un problème ? demanda-t-il en baladant son regard azur de l'un à l'autre, perplexe.
Oda tenta de répondre, parlant mieux anglais que son compagnon, mais n'y parvint qu'à moitié et formula quelque chose de totalement incompréhensible, sorte de yaourt japonais/anglais.
-Parlez en japonais, c'est ma seconde langue, je vous comprendrais probablement mieux que si vous essayiez de dire quelque chose en anglais, finit par dire Chuuya, toujours un peu perplexe, mais cela eut au moins l'effet de faire se détendre un peu les deux compagnons.
-Il est difficilement supportable, mais on finit par s'habituer, sourit finalement Oda.
-Hmm... Je n'ai pas franchement envie de m'habituer, marmonna le rouquin dans sa barbe, avant de reprendre plus fort. Vous savez qu'il tente de mettre fin à ses jours ? Et que j'aurai de gros problèmes s'il y parvient chez moi ?!
Nouveau regard gêné des deux amis. Oui, ils étaient au courant, ce n'était pas nouveau, il avait toujours été comme cela depuis qu'ils se connaissaient.
-Ne vous en faites pas, il ne fait que des tentatives infructueuses depuis plus de deux ans, il n'y a pas de raison, dit Atsushi en tentant d'être assuré.
En effet, si jamais un élève venait à mourir durant l'échange, ce ne serait d'ailleurs pas que les Nakahara qui auraient des problèmes, mais absolument tout l'établissement.
-Et puis, il a pour principe de ne pas souffrir et de ne déranger personne, donc il n'y a vraiment pas à s'inquiéter, ajouta Oda en voyant la mine peu convaincue du rouquin.
-Bien, merci, je vous fais confiance, vous le connaissez mieux que moi.
Sur ces paroles, il ralentit l'allure pour les laisser lui passer devant et retourner au niveau des deux Akutagawa, enfermés dans leur mutisme habituel. Chuuya commença tout de même à parler, d'ailleurs il s'agissait sûrement de la seule personne à le faire étant donné qu'ils étaient amis d'enfance, tandis que Lovecraft les suivait à une distance respectable, et que Kyoka se tenait en retrait sur le côté, visiblement concentrée uniquement sur le jeu de piste. A ses côtés, Margaret et Higuchi tentaient de communiquer, étant encore loin de la prochaine étape.
Le groupe avait été scindé en deux, et ils se livraient une sorte de petit concours. Le parcours était exactement le même mais chacun partait dans un sens différent, en toute logique ils devraient donc bientôt se croiser. Et les premiers remportaient un pot de popcorn, entre autres. Ce qui en motivait plus d'un.
Quant aux professeurs, personne ne savait trop où ils étaient, probablement visitaient-ils eux aussi la ville, mais sans élèves pour leur traîner dans les pattes.
Ils arrivèrent enfin à l'étape suivante, dix minutes plus tard, et Chuuya constata alors que Dazai n'était toujours pas revenu après qu'il l'ait écrasé auparavant, lorsqu'Atsushi et Oda le lui avait fait remarquer. Mais qu'est-ce qu'il fichait encore ?!
Il était retourné sur ses pas en pestant, disant au groupe qu'ils les rejoindraient, mais ne l'avait pas non plus trouvé là où il était censé être resté.
Il aurait dû être plus vigilent. Il s'en voulu un peu, il l'avait pourtant à peu près cerné, mais non... Après encore une dizaine de minutes à chercher dans les environs, il rebroussa chemin, se jurant qu'il allait payer s'il était retourné avec le groupe.
Et évidemment, il croisa le second groupe, dont les deux pestes Noami et Lucy, sachant pertinemment qu'il les comprenait l'une comme l'autre, ne se privèrent pas en remarques désobligeantes tout en lui barrant le passage. Il n'avait pas que ça à faire mais en même temps, il ne pouvait pas régler cela par la force.
Quand, à un moment, Lucy leva les yeux en les écarquillant et s'arrêta subitement. Chuuya suivit son regard après quelques secondes d'hésitation, se demandant si ce n'était pas seulement pour le mener en bateau, mais il constata alors que, sur le toit de la petite maison de trois étages en face, se tenait debout sur la rambarde de la terrasse son correspondant.
Alors, premièrement, comment il était arrivé là alors qu'il s'agissait d'une propriété privée ?! Deuxièmement... Chuuya arrêta de réfléchir lorsqu'il le vit sauter et courut aussi vite qu'il put.
Il avait de bonnes capacités physiques, mais trois étages, c'était haut. Il parvint à intercepter le brun avant qu'il ne touche le sol, heureusement, mais le heurta violemment et ils roulèrent tous les deux sur le sol, se retrouvant alors dans les bras l'un de l'autre.
Dazai se releva rapidement, son visage un peu trop proche de celui du rouquin, et sourit légèrement, trop sonné par le choc pour faire une quelconque remarque désobligeante.
-Espèce de crétin décérébré, qu'est-ce qui t'as pris ?!
L'autre ne répondit pas, et soudain plusieurs « click » caractéristiques de prise de photos retentirent, faisant encore plus pester Chuuya. Comme s'il avait besoin de ça dès le premier jour... Il releva brièvement la tête pour fusiller du regard Naomi, Lucy, Mark et même Ranpo qui tenaient tous leurs téléphones avec un sourire espiègle.
Il soupira, mi-amusé, mi-agacé. La tradition voulait qu'à la fin des deux semaines d'échange un album souvenir soit créé et distribué à tout le monde avec toutes les photos prises, aussi les élèves étaient-ils exhortés à en prendre le plus possible.
Cette photo risquait fortement d'être détournée et de le suivre, surtout qu'il était quelqu'un de plutôt populaire dans son école, bien qu'il ne sache pas trop pourquoi. Probablement le fait qu'il était étranger, ainsi que sa réputation de bagarreur qui le suivait depuis la primaire bien qu'il n'ait pas réitéré depuis.
Il finit par pousser sans douceur son correspondant, qui n'avait toujours pas bougé, se releva et parti en esquivant ceux du deuxième groupe qui se moquaient gentiment, entendant déjà des mots comme « couple » et « mignon » se balader dans les deux langues et à son plus grand désarroi. Ils allaient un peu vite en besogne quand même.
Dazai lui emboita immédiatement le pas, souriant sans même se donner la peine de nier les interventions des autres, visiblement pas gêné par l'idée.
Puis le reste de la journée s'écoula tranquillement, et le rallye se termina, le deuxième groupe les devançant et largement grâce à Ranpo, qui tenait à avoir son pot de popcorn notamment.
Ils pouvaient désormais tous rentrer chez eux, la journée de « cours » s'achevant. La mère de Chuuya vint les chercher en voiture, et ils en profitèrent pour acheter deux tenues au brun, ce qui devrait lui suffire. Après tout ils faisaient beaucoup de machine à laver de par le nombre d'enfants.
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Le lendemain était prévue une visite de l'établissement pendant que les correspondants européens allaient en cours, avec un autre petit jeu de piste pour apprendre à se repérer dans cet environnement nouveau. Il fallait faire des équipes de deux ou trois, et les premiers à en venir à bout gagnaient des chocolats.
Aussi, cela avait immédiatement motivé Ranpo, et les plus rapides à s'associer à lui furent Kaiji et Yosano. Car quand il s'agissait d'énigmes et que le brun était motivé, alors il pouvait même tout trouver seul. Et justement, cela permettrait aux deux amis d'aller un peu plus amplement fouiner dans le laboratoire, qu'ils avaient déjà repéré le matin même grâce à leurs correspondants.
Sans surprise, les Tanizaki se mirent ensemble, tandis que les deux plus calmes, Higuchi et Kyoka, se mettaient également en binôme. Enfin, Oda, Dazai et Atsushi formaient la dernière équipe. Ils partirent donc tous en chasse, sous le regard de leurs professeurs.
Kunikida se disait qu'il allait enfin pouvoir se reposer un peu au calme, maintenant que les gamins gambadaient joyeusement dans les couloirs, mais c'était un peu trop idyllique. Car son insupportable collègue lui prit la manche et le tira avec lui, voulant lui aussi participer à la chasse.
Après tout, les professeurs n'étaient pas interdits, si ?
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Chuuya était assis à côté de Poe, côté fenêtre, et écoutait avec plus ou moins d'attention le cours de japonais de Rimbaud. C'était un professeur qu'il respectait beaucoup, néanmoins il n'avait absolument pas besoin de ces cours.
Il était d'ailleurs plutôt perdu dans ses pensées, ressassant malgré lui la matinée infernale qu'il avait vécue. Evidemment, il avait fallu se lever plus tôt, et Dazai avait refusé. Même un seau d'eau gelée ne l'avait fait qu'à peine entrouvrir les paupières quelques secondes avant de replonger, à croire qu'il y était insensible.
De dépit, Chuuya lui avait alors saisi la jambe et l'avait traîné jusque dans la salle de bain, qui heureusement pour le brun était au même étage que la chambre, et l'avait à moitié noyé sous la douche, sans pitié.
Et, lorsqu'il avait enfin pris totalement conscience, il s'était évidemment mis à faire remarque désobligeante sur remarque désobligeante, le fait étant qu'on avait estimé qu'il pouvait bien continuer de dormir sans pyjama et que le rouquin était également dans la cabine de douche, torse nu car il dormait comme cela en été.
Puis cela avait tourné à la bataille d'eau, également prise en photo car les frères du rouquin ne s'étaient pas privés tandis que leur aîné tentait désespérément de s'échapper de la cabine de douche.
Résultats, ils avaient encore été en retard, mais seul Chuuya en avait payé les frais car « c'était à lui de gérer » et qu'en plus le jeu de piste des japonais ne commençait que trente minutes après le début des cours.
Alors qu'il repensait avec rage à cette matinée agitée et en se jurant qu'il se vengerait, son regard dériva vers la fenêtre. Soudain, il se leva en repoussant violemment la table, faisant faire une rature sur toute la page du pauvre Poe, qui n'avait rien demandé, en plus de renverser sa trousse ouverte sur le sol.
-C'est pas vrai... Bon sang je vais le tuer !
Et il se précipita au-dehors de la salle comme une flèche, sous les regards interloqués de son professeur et de ses camarades, en omettant Poe, qui lui ramassait le contenu de sa trousse s'étant déversé sur le sol lors de la sortie mouvementée de son voisin.
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Après une heure de chasse, Ranpo sifflotait tranquillement dans les couloirs, fier de lui. Il avait déjà tout trouvé depuis plus d'une trentaine de minutes, et savourait le temps d'avance monumental qu'il avait sur tous ses autres camarades.
Il se dirigea vers les toilettes, où il rencontra un Oda et un Atsushi qui semblaient attendre désespérément quelque chose. Ils le virent arriver et l'interpellèrent donc.
-Ohé, Ranpo, dit le gris. Pourquoi est-ce que tu es seul ?
Une lueur inquiète brillait au fond de son regard, car il savait qui étaient censés être les deux partenaires de chasse du brun.
-Ils sont tous les deux dans la salle informatique à côté du laboratoire, répondit nonchalamment l'interpellé en haussant les épaules. Ils préparent le voyage du retour, ajouta-t-il en sortant un paquet de gâteau de son sac tandis que ses deux camarades commençaient à esquisser une grimace.
-Qu'est ce qu'ils vont encore faire, ces deux-là ?! s'inquiéta Atsushi à voix basse.
-Oh, rien de bien méchant. Prévenez juste vos parents que vous rentrerez un peu plus tard que prévu. Mais pas que de quelques heures si vous voulez mon avis, dit-il tout en engouffrant un gâteau entier dans sa bouche, avant de reprendre sans totalement l'avoir fini. Et vous, qu'est-ce que vous attendez ?
-Dazai, il est aux toilettes depuis dix bonnes minutes maintenant, soupira Oda, désespéré de son ami.
-Vous êtes sûrs qu'il est toujours là ? demanda le brun, presque amusé, avant de tourner les talons pour repartir d'où il venait.
Les deux jeunes hommes se regardèrent, soudain un mauvais pressentiment les assaillant. Atsushi déglutit et se baissa pour voir si les pieds de son ami étaient toujours là où ils devraient être. Et en effet, il n'y avait personne.
C'est seulement à ce moment qu'ils se rendirent compte qu'une brise anormalement fraîche parcourait les lieux.
-C'est pas vrai... Il est passé par la fenêtre...
Ils se regardèrent à nouveau, soupirèrent de concert et repartirent, se disant que de toutes manières ils ne le trouveraient pas tant qu'il n'en aurait pas décidé autrement, et qu'ils avaient un jeu de piste à terminer bien que le grand gagnant soit déjà désigné.
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Chuuya arriva sur le toit, essoufflé et ayant l'impression de rejouer la même scène qu'hier, juste que le toit était un peu plus haut et que lui était aussi dessus. Dazai le regarda arriver avec un sourire indéchiffrable, puis sauta.
Le rouquin n'eut pas le temps de reprendre son souffle et s'élança immédiatement, passant la moitié de son corps par-dessus la rambarde pour le rattraper sans pour autant chuter avec, et il crût bien l'espace d'un instant qu'il l'avait raté.
Il l'avait finalement eu de justesse grâce à l'une de ses bandelettes, mais celle-ci commençait déjà à se détendre, il fallait faire vite.
Chuuya agrippa les cheveux de son correspondant, faute de mieux et obtenant maintes protestations, encore une fois, mais il réussit à suffisamment le remonter comme cela pour lui attraper le bras et ensuite le refaire passer du bon côté.
Heureusement pour eux deux que le rouquin avait une force physique supérieure à la moyenne, ils auraient chuté et se seraient écrasés six ou sept mètres plus bas sinon.
Ils étaient désormais tous les deux assis l'un en face de l'autre, Chuuya tentant de retrouver un rythme respiratoire normal et lançant un regard meurtrier à son partenaire, tandis que celui-ci semblait être sur une autre planète.
-Bon sang, mais qu'est-ce qui te prends à chaque fois ?! s'énerva-t-il, avant de se lever, d'attraper fermement le bras de l'autre et de l'entraîner derrière lui, sans protestation cette fois-ci.
Il le traîna dans les couloirs, jusqu'à trouver Oda et Atsushi, qui le récupérèrent promptement sans même demander ce qu'il s'était passé, avec une lueur d'excuse dans le regard.
-Tâchez de mieux le surveiller, marmonna-t-il tout de même avant de tourner les talons.
Il retourna rapidement en cours, qui avait continué durant son absence, remis sa table et sa chaise en place et s'installa comme si de rien n'était. Il s'était faufilé discrètement, pourtant tout le monde le fixait désormais, et, même si Rimbaud souhaitait continuer son cours, le regard qu'il lança à son protégé lui indiqua clairement qu'il devrait rester s'expliquer à la fin.
Il soupira, se demandant si toutes ses journées allaient véritablement être comme ces deux premiers jours.
~
L'après-midi, les japonais allaient en cours normalement comme des européens. Et ils étaient un suffisamment petit nombre pour tous aller avec leurs correspondants, au plus grand malheur de Chuuya, qui dut donc passer l'après-midi à côté du suicidaire, ayant mystérieusement repris sa bonne humeur.
Ils avaient actuellement cours d'histoire, avec le professeur Ivan, un homme presque aussi effrayant que le directeur lui-même, avec son teint blême, son visage ovale, ses yeux à moitié fous et ses cheveux blancs longs et lisses.
Et ce même professeur n'arrêtait pas de les reprendre car Dazai était tout simplement incapable de se tenir en cours, manquant de maturité et faisant donc pleuvoir les reproches sur son correspondant innocent.
Chuuya se dit d'ailleurs qu'il aurait peut-être dû accepter l'offre du professeur de japonais un peu plus tôt, au final.
Lorsqu'il l'avait pris à part et après avoir reçu les explications de ce départ précipité, Rimbaud lui avait proposé d'échanger de correspondant avec Lovecraft, celui-ci n'ayant pas d'avis sur la question, mais il avait -et il ne savait pas trop pourquoi d'ailleurs- décliné. Peut-être parce qu'il avait l'impression qu'il parviendrait vraiment à mourir s'il allait chez le noiraud, et que cela lui posait problème.
Enfin, Il se rassura en se disant que ce n'était qu'une petite semaine, et que cela passerait vite. En théorie. Et il allait s'assurer que l'autre ne recommence pas, de toutes manières ce matin était censé être le seul moment où ils étaient séparés. Il n'allait donc pas lâcher d'une semelle l'autre.
Mais pour le moment, il ne pouvait pas s'arrêter de chantonner deux minutes ? En plus de se faire injustement réprimander, Chuuya n'arrivait pas à se concentrer, et l'autre continuait un air parlant de suicide malgré les coups de coude qu'il recevait. Il était juste épuisant.
Le professeur Ivan, sadique dans l'âme, finit même par coller le rouquin, ce qui ne lui était pas arrivé depuis quatre ans. Il écarquilla les yeux à cette nouvelle, mais se garda de protester, il savait l'adulte capable de le coller toute une semaine s'il disait quoi que ce soit.
Et Dazai qui lui souriait tout fièrement à côté. Finalement l'autre allait certainement mourir, mais ce ne serait pas de l'une de ses tentatives de suicide.
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Ils rentrèrent le soir dans un calme relatif, arrivant à peu près en même temps que tout le reste de la petite famille. Les enfants, fatigués d'une journée de cours, allaient probablement stagner durant une vingtaine de minutes, puis, comme à chaque fois et telles des piles que l'on viendrait de charger, ils repartiraient à fond de train dans toute la maison.
La routine pour Chuuya, néanmoins il n'avait pas envie de supporter cela après sa journée, alors il traîna de force son correspondant, qui allait mordre dans sa brioche, et l'entraîna à sa suite pour aller faire un tour en ville.
Il évita évidemment les magasins d'objets coupants, la côte et les endroits trop élevés, et profita du semblant de calme qu'il y avait quand Dazai commençait à s'émerveiller devant un quelconque bâtiment historique.
Ils rentrèrent ensuite lorsque le brun se fût lassé et commença de nouveau à embêter le rouquin, si bien qu'en arrivant à la maison Chuuya jurait toutes les insultes françaises existantes -les anglaises et japonaises étant déjà épuisées et ne voulant pas en apprendre à ses petits frères, qui ne parlaient pas cette langue.
Le repas fût convivial, puis ils allèrent se coucher les uns après les autres, les plus âgés restant veiller un peu plus longtemps.
Le rouquin mit ses boules Quies et s'enroula dans sa couette en fermant les yeux, mais ne parvint pas pour autant à s'endormir. L'autre, ayant décidé de rester encore éveillé un peu plus longtemps, le harcelait littéralement, n'arrêtant pas de lui tapoter le bras.
-Mais qu'est-ce que tu veux à la fin ?! s'énerva Chuuya en se relevant vivement dans son lit, pour se retrouver le visage à à peine quelques centimètres de celui tout sourire de l'autre.
Ce dernier dit quelque chose, mais le rouquin ne l'entendit pas et fit la grimace, tout en rougissant malgré lui, association de la proximité de l'autre et des rumeurs qui avaient commencées à circuler. Finalement, il comprit qu'il avait toujours ses bouchons d'oreille et les retira.
-Tu peux me lire une histoire ? dit candidement Dazai, avec néanmoins l'air le plus sérieux du monde.
-Tu te fous de moi ? Mais t'a quel âge ?! répondit l'autre, incrédule.
-Hmm, j'en ai eu 15 cette...
-C'était une question rhétorique crétin, je sais quel âge tu as, souffla l'autre, énervé désormais.
Et il savait pourtant que ce n'était pas un état compatible avec le sommeil, désormais il lui faudrait facilement une demi-heure pour se calmer et sombrer dans les bras de Morphée. Il fusilla l'autre du regard, le mettant en garde si jamais il comptait recommencer, et se blottit de nouveau dans ses draps.
Mais l'autre continua de le harceler, de sorte qu'il finit par se dire que quitte à faire quelque chose le temps que ses nerfs se calment, autant calmer ceux de l'autre abruti qui partageait malheureusement sa chambre.
Il se leva en soupirant et alla chercher un livre de contes pour enfant dans sa bibliothèque -en anglais car tous les livres japonais étaient dans la chambre de ses parents, donc inaccessibles pour le moment- sous la moue désapprobatrice de l'autre.
-Je vais te le traduire, fais pas cette tête, murmura le rouquin en levant les yeux au ciel.
Soudain le visage du suicidaire s'illumina, et il s'assit sans aucune gêne à côté de son correspondant, donc dans son lit. Ce dernier allait le virer lorsqu'il souffla pour se reprendre. S'il s'énervait encore il n'arriverait pas à dormir de la nuit, autant laisser couler.
Il n'aurait peut-être pas dû, car l'autre posa sa tête sur son épaule, pour voir le livre qui ne contenait pourtant aucune illustration. Chuuya se retint difficilement de faire à nouveau une remarque, et au final sourit intérieurement, car il avait déjà passé plusieurs soirées comme cela avec ses frères.
Les nerfs des deux adolescents se détendirent totalement au bout de la moitié de l'histoire, et ils finirent donc par s'endormir tous les deux adossés au lit du rouquin, la tête de ce dernier s'appuyant désormais également sur celle de son partenaire.
~
Le lendemain, mercredi, ils avaient une visite de prévue le matin au musée maritime de la ville, comprenant la plus importante collection de navires historiques de tous les Etats-Unis. L'après-midi ils se rendaient à l'USS Midway, porte-avions conçu durant la seconde guerre mondiale mais lancé plus tard, qui pouvait alors compter un équipage de 4000 marins et désormais reconverti en musée flottant, où l'on trouvait une trentaine d'avions parfaitement restaurés.
Chuuya dut encore traîner son casse-pieds de correspondant, qui avait d'ailleurs eu le culot de rester dormir dans son lit -il s'était bien réveillé au milieu de la nuit mais avait préféré rester embêter le rouquin- jusque sous la douche pour le réveiller.
Le pire étant qu'il mit cinq minutes de plus à émerger, un peu comme les microbes qui finissaient par devenir immunisés aux antibiotiques. Mais là, c'était à vitesse grand V.
Enfin, cette fois-ci Chuuya l'avait laissé seul pour éviter d'être à nouveau trempé et était parti petit-déjeuner avec ses frères, qui l'avaient tous regardé avec la question d'où était Dazai dans les yeux.
Mais aucun n'osa la formuler, voyant que leur aîné était perturbé. En réalité, il était plutôt satisfait que l'autre ne se soit pas réveillé avant lui, car ils avaient littéralement été dans les bras l'un de l'autre. Et il n'arrivait pas à l'accepter.
Encore une fois il prit quelque chose à manger pour le brun, sachant qu'il ne descendrait jamais à temps, et remonta pour voir s'il était prêt. Il l'exhorta encore à se presser durant une bonne vingtaine de minutes, l'autre traînant des pieds, puis finalement ils purent partir, et furent même en avance -car le rouquin avait bien évidemment prévu de l'être, le musée n'ouvrant de toutes manières qu'à neuve heure.
La visite était différenciée : un guide classique accompagnait les européens tandis qu'un autre parlant le japonais accompagnait les correspondants, pour que la visite puisse être instructive pour tous. Et il en était de même pour la visite prévue l'après-midi, mais avec des guides audios, ce qui était à la fois plus simple et moins vivant.
Chuuya ne se passionnait pas particulièrement pour les musées, mais il savait pour en avoir déjà visité deux ou trois qu'un guide aimant vraiment ce qu'il faisait pouvait la rendre intéressante.
Ils attendirent facilement une bonne heure dans le hall, Poe et Ranpo encore en retard bien que cette fois-ci le deuxième semblait presque avoir couru. Peut-être qu'il s'intéressait enfin à quelque chose ?
Finalement, ce n'était absolument pas cela. En désespoir d'arriver un jour, le pauvre Poe avait affirmé qu'il y avait toujours un stock de bonbons conséquent à l'entrée de ce musée. Ce qui expliquait la course.
Chuuya soupira, se disant qu'il n'avait finalement peut-être pas le pire correspondant du lot. Surtout lorsqu'il aperçut enfin Louisa, livide et en retrait du petit groupe.
Elle devait être aux toilettes jusqu'à présent, car tous les européens semblèrent la remarquer en même temps et convergèrent vers elle.
-Ohé, ça va ? Tu n'as pas l'air dans ton assiette, dit Margaret, inquiète, ce qui était plutôt rare.
-Oui oui, ne vous en faîtes pas, répondit d'une voix tremblante et faible la concernée en détournant le regard.
Tous la fixèrent, perplexes. Elle avait toujours l'air pâle et maladif, mais là c'était pire que d'habitude. Enfin, si elle ne voulait pas parler. Chuuya intercepta tout de même le regard qu'elle lança furtivement à sa correspondante, devenant durant ce court instant encore plus livide, avant de détourner le regard et de s'éloigner ostensiblement bien que plusieurs mètres les séparassent déjà.
Mais qu'est-ce qu'il pouvait bien se passer chez eux ? Enfin, les professeurs intervinrent à ce moment, accompagnés des deux guides. Les deux groupes se séparèrent alors pour qu'on leur explique à tous les règles.
Le rouquin se rendit soudain compte qu'il allait donc devoir laisser son correspondant sans surveillance, et qu'il serait tout à fait capable d'aller faire une quelconque tentative, encore.
Il prit rapidement Rimbaud à part avant le départ des groupes et demanda si, à tout hasard, il n'y aurait pas moyen qu'il fasse la visite en japonais. Le professeur sembla réfléchir quelques secondes, se doutant des raisons de son élève, et finit par accepter.
-Tu ne peux plus te passer de moi ma limace, hein, murmura Dazai, taquin, lorsque Chuuya arriva à sa hauteur.
-Ferme-la, et ne m'appelle pas comme ça, crétin de maquereau, dit-il avec un regard meurtrier à l'autre.
Il commença à entendre de nouveau des rumeurs murmurées dans son dos, mais préféra les ignorer bien qu'il se doutait de quoi il s'agissait. Malheureusement, il sentait que ses joues avaient commencé à rosir et ne ferait que confirmer ces débuts de ragots s'il intervenait dans cet état.
La visite commença enfin, et, peu désireux d'entendre son correspondant le rabaisser tout le long, il décida d'aller faire la connaissance des autres japonais, tout en le surveillant d'un œil. Et puis l'état de Louisa l'intriguait.
Il se dirigea donc vers Kaiji et Yosano, en pleine discussion sur... La météo ? Il les écouta quelques minutes, eux l'ayant bien vu mais pensant qu'il ne comprenait pas la moitié de ce qu'ils disaient. Chuuya compris également que cette visite ne les intéressait pas, néanmoins celle prévue dans l'après-midi, beaucoup plus. Quelle en était donc la raison ?
Peut-être que, tout comme Mark, un de ses camarades, ils s'intéressaient à l'aviation. Bien que dans le cas de l'européen, c'en était parfois presque maladif, son rêve étant de devenir pilote, il ne faisait plus que de parler de cela depuis qu'il avait appris qu'ils iraient justement au musée.
La conversation commençant à dériver sur tous les paramètres permettant de manipuler un avion et la manière dont fonctionnaient ses compteurs, dans le cadre d'une sorte de projet apparemment, ce à quoi le rouquin comprenait autant de chose que s'il n'avait pas maîtrisé la langue, il décida enfin de les interrompre.
-Dis-moi, hmm... Yosano ?
Il attendit un hochement de tête avant de continuer, mais désormais les deux compagnons le regardaient bizarrement, craignant à sa manière parfaite de s'exprimer qu'il n'ait compris quel plan tordu ils montaient et qu'ils les dénoncent. Et se posant enfin la question de pourquoi il les accompagnait.
-Je suis à moitié japonais, donc oui je vous comprends, si c'est ce que vous vous demandez, dit-il en soupirant. Est-ce que tu sais ce qu'il se passe avec Louisa ?
Les yeux de la jeune fille passèrent de la méfiance à l'intérêt soudain, tandis que son visage se fendait d'un petit sourire qui ressemblait presque à du... sadisme ?
-Je pense qu'elle couve une maladie grave, et comme je veux devenir médecin je cherche un moyen de la soigner, dit-elle sans se départir de son sourire.
On aurait dit Dazai parlant de suicide, pour peu, pensa le rouquin. C'en était inquiétant, il ne voulait pas savoir ce qu'elle tramait, son aura était réellement inquiétante. Il adressa tout de même une petite prière pour le salut de Louisa, puis décida de laisser les deux amis parler entre eux de leur « projet ».
-Je vois, désolé de vous avoir interrompu.
Il recula un peu, tout en jetant un regard au suicidaire, non loin de là, qui n'écoutait que d'une oreille les explications du guide et qui semblait d'ailleurs plus intéressé par les mats des bateaux que par les engins en général.
Chuuya soupira encore, se retenant d'aller lui faire la remarque, il nierait probablement. Ou confirmerait en enchaînant sur une conversation portant sur le suicide, et dans les deux cas, cela n'intéressait pas le rouquin.
Il entendit alors, un peu plus derrière lui, Atsushi et Oda décrire chacun l'ambiance morbide qui régnait chez l'un comme chez l'autre. Il se posta à leur niveau pour écouter distraitement, se rappelant vaguement d'avec qui ils étaient -enfin, ce n'était pas bien compliqué non plus, vu ce qu'ils décrivaient.
-J'ai beau essayé de lancer la conversation, je m'embrouille dans ce que je dis et ils me regardent tous fixement comme si j'avais sorti une énormité, alors je bafouille encore plus et au final j'arrête d'essayer, murmura Atsushi, désemparé.
-Moi, il m'écoute, mais il ne parle que très peu. J'ai l'impression qu'il est timide, mais en même temps c'est oppressant. Enfin, peut-être que tu devrais essayer plus longuement sans abandonner, c'est la clé pour se faire comprendre au départ ! tenta de le rassurer Oda.
-Oui, mais j'ai l'impression de m'adresser à des pierres. Ils n'ont aucune expression faciale, comme des fantômes...
-Si c'est des Akutagawa que tu parles, alors c'est tout à fait normal, dit soudainement Chuuya, faisant sursauter le gris qui ne l'avait pas encore remarqué.
-Oh, depuis quand êtes-vous là, monsieur...
L'autre interrompit sa formule de politesse d'un revers de main, peu désireux d'être traité de la sorte à son âge. Il n'y avait bien que les japonais pour être autant à cheval là-dessus, et c'était une des raisons pour lesquelles il appréciait la vie en Amérique.
-Tu sais, je les connais depuis tout petit. Ne force pas avec eux. Ce n'est pas à toi de faire le premier pas, tant qu'ils ne l'auront pas décidé, ils ne diront rien.
-Mais ils m'adressent à peine des regards, protesta Atsushi.
-Ils sont très vite agacés, plus tu essaieras et plus ils se braqueront. Je t'assure.
-Hmm... J'essaierai, murmura le gris en baissant la tête.
-Oh, et ils ne parlent pas vraiment le japonais, néanmoins ils le comprennent parfaitement, donc si jamais tu as vraiment besoin de quelque chose, n'hésite pas à leur demander, ajouta encore le rouquin, avant de se diriger vers Dazai, qui avait filé en douce par le petit escalier dérobé jusqu'au bateau le plus proche sans se faire remarquer par le guide.
-Merci, monsieur Nakahara ! lança Atsushi dans son dos, ce qui lui valu un regard glacial, mais au moins il était un peu rassuré. Seulement un peu. Mais il allait essayer.
Malheureusement pour Chuuya, il n'était pas aussi discret que son correspondant, et le guide l'interrompit avant qu'il ne soit à l'intérieur du navire. Il pesta intérieurement tout en comptant sur les japonais pour informer l'adulte qu'il était européen et qu'il n'avait, peut-être, pas compris.
Il ramena le brun par le col dix minutes plus tard, sous le regard excédé du guide et sous les flashs du téléphone de Naomi, qui, bien que collée à son frère, ne ratait pas une miette de la scène.
En effet, les deux se fichaient bien du guide, s'engueulant car l'un allait enfin réussir sa noyade, dans le pire des cas l'eau étant suffisamment froide pour qu'il fasse une hydrocution, l'autre parce qu'il avait dû lui courir après.
Les insultes fusaient tandis que la tension était palpable et qu'ils semblaient sur le point de se sauter dessus. Puis, excédé, Chuuya finit par s'éloigner, non sans faire un doigt à son compagnon, qui tira la langue dans son dos.
Le guide, qui avait un peu blêmi, décida d'ignorer l'altercation tant qu'elle ne se reproduisait pas, et continua donc comme si de rien n'était. Tout se passa à peu près calmement, les deux énergumènes chacun vexés et à moitié boudeurs, si bien que les seules choses que l'on entendait étaient les murmures que s'échangeaient les deux scientifiques. Ah, et les deux Tanizaki également, mais chacun préférait les ignorer.
Ils déjeunèrent après ses évènements tranquillement le pique-nique emporté à l'avance ou pris sur place, avec ensuite une heure de libre pour aller acheter des souvenirs ou autre, moment ou Oda promis de raisonner son meilleur ami à Chuuya, lui permettant de profiter lui aussi un peu de cette heure de libre. L'autre allait vraiment le rendre chèvre, à force.
Il mangea en compagnie des deux Akutagawa et de Kyoka, en se demandant d'ailleurs si cette dernière s'entendait vraiment avec ses compagnons ou avec une quelconque personne. Elle avait l'air tout le temps renfermée sur elle-même, un peu comme Lovecraft. Quoi qu'un peu moins effrayante.
Il en profita également pour parler un peu avec Ryunosuke de son correspondant, qui à force d'insistance finit par promettre qu'il « essaierait » de faire un petit effort. Il savait surtout que le rouquin était borné et qu'il ne céderait pas.
Puis tout le groupe alla au musée de l'aviation, comme prévu. Kaiji et Yosano venaient d'ailleurs, apparemment, de se lier avec Mark, car ils ne s'étaient pas lâchés de l'après-midi.
Toujours est-il que cela passa plutôt vite, la visite étant relativement intéressante. Ils rentrèrent tous chez eux tôt, Chuuya et Dazai avant les petits frères du premier, et le rouquin décida alors de s'attaquer à l'exposé colossal que leur avait donné le professeur Ivan pour le vendredi matin, seul autre moment où ils avaient cours, et évidemment histoire aussi, dans sa grande sadicité. Comme si ceux recevant un correspondant allaient avoir le temps... Enfin, il s'agissait d'une note coefficient trois, alors le rouquin allait au moins tenter de décrocher la moyenne.
Il s'y plongea durant deux bonnes heures, entendant ses frères rentrer les uns après les autres, entendant même à un moment un énorme « boum » provenant du couloir, mais préférant l'ignorer. Se concentrer sur les colonies françaises en Algérie était déjà suffisamment compliqué, étant donné qu'il ne s'y intéressait que peu, sans avoir en plus à chaperonner ses petits frères trop bruyants.
D'ailleurs où était passé Dazai ? Il finit par se poser la question, et, estimant qu'il n'arriverait de toutes façons pas à continuer car sa concentration commençait sérieusement à flancher, il décida d'aller voir, au cas où.
Et dans le couloir, il croisa son plus jeune frère, Jûzô, et failli passer à côté sans remarquer. Le petit garçon aux yeux vert clair tenait dans ses petites mains un scalpel, avec un peu de sang dessus.
Chuuya se retourna immédiatement et lui arracha des mains, se prenant une moue boudeuse en retour. Le sang dessus n'était pas sec, aussi le rouquin eut peur que le petit ne se soit blessé avec et l'examina sous toutes les coutures. Soulagé, il soupira brièvement, avant de deviner d'où il tenait cet objet. Il posa tout de même la question, au cas où.
-Dis, où tu as attrapé ça ?
L'autre le regarda boudeusement, peu satisfait qu'on lui ait volé son jouet, tout en croisant les bras d'un air presque de défi. L'aîné le fusilla du regard, faisant passer plusieurs menaces par ses yeux azur sans pour autant les formuler.
-Réponds moi ou tu dors dehors le mioche, finit par dire sur un ton presque doucereux Chuuya, voyant que l'autre ne disait toujours rien.
-Tu... Maman ne te laissera pas faire, commença à hésiter le plus petit, ne sachant pas trop si son grand frère en était capable ou non.
-Et qui te dit qu'elle le saura ? demanda Chuuya en haussant un sourcil, appréciant de voir le plus jeune commencer à frissonner.
-C'est Dazai qui me l'a donné, abandonna bien vite Jûzô en tirant la langue et en tentant de fuir.
-Ça je m'en doute, mais où est-il ? dit l'aîné en le retenant par le poignet.
Le plus petit lui indiqua la salle de bain du doigt avant de partir rapidement. Chuuya soupira, se disant qu'il irait probablement rapporter à leur mère quand elle serait rentrée et qu'il avait du souci à se faire, mais tant pis.
Il se dirigea rapidement vers la pièce indiquée, assez proche de sa chambre, et découvrit alors Arô, blême et visiblement évanoui, en plein milieu du passage. Il lui tapota les côtes avec son pied, sans aucun mouvement de sa part.
Il était d'une santé plutôt fragile bien qu'il prenait des fortifiants, aussi Chuuya ne paniqua pas car il avait l'habitude, il faudrait juste le porter dans sa chambre. Il enjamba donc prestement son corps et découvrit alors son correspondant lui faisant dos, les jambes dans la baignoire.
Il était torse nu et ne portait plus aucun bandage. Il était en train de tranquillement s'ouvrir les veines, si bien que si l'on omettait le sang dégoulinant de ses coudes on aurait bien pu croire qu'il se limait les ongles.
Le rouquin fonça vers lui et lui saisit les deux poignets par derrière, ne sachant pas trop comment l'empêcher de se blesser davantage. Surtout qu'il était sûr d'avoir posé ses mains sur au moins trois ou quatre griffures.
Néanmoins, voyant que l'autre avait simplement tourné sa tête vers lui tout en souriant doucement sans pour autant s'arrêter, il resserra sa prise pour l'empêcher de bouger davantage.
-Lâche ça, crétin, murmura-t-il d'une voix presque livide, comprenant pourquoi son frère s'était évanoui. Il le faisait à la moindre goutte de sang.
-Tiens, Chuuya~ Je ne t'avais pas vu, tu...
-Ferme-la et lâche ! Je ne veux rien savoir, d'accord ?
Le brun tourna un peu plus la tête vers lui, clignant plusieurs fois innocemment des yeux. D'ailleurs la situation aurait pu être gênante dans un tout autre contexte, le rouquin étant complètement collé à son dos et sa tête reposant à moitié sur son épaule pour pouvoir atteindre ses mains.
Au début, il réfléchit plutôt à accepter histoire qu'il le lâche pour continuer ensuite, lorsqu'il se rendit compte que le rouquin tremblait. Il tentait visiblement de s'en empêcher, mais c'était raté. Et ce n'était pas seulement ses bras. Est-ce qu'il avait peur pour lui ?
-Tu trembles, Chuu, murmura-t-il en tentant de sourire un peu, voulant éclaircir ce point.
-Parce que j'ai froid.
-Tes mains sont beaucoup plus chaudes que mes bras alors qu'ils sont recouverts de sang...
-Lâche ce truc, c'est tout ce que je demande !
Dazai accepta enfin, l'ustensile résonnant d'un bruit métallique particulier lorsqu'il atterrit violemment au fond de la baignoire, qui ressemblait d'ailleurs plus à un champ de bataille désormais. Chuuya se releva en cessant de trembler, puis le fixa d'un regard à la fois meurtrier et désapprobateur, auquel le brun répondit par un regard innocent.
-Tu ne bouges pas d'un pouce, compris ?
Il attendit que l'autre hoche la tête pour tourner les talons, emportant la lame que l'autre avait utilisée, plus toutes celles qui s'étalaient à côté dans la petite pièce, certaines encore propres, d'autres totalement maculées de rouge. Le rouquin n'aimait pas cette sensation de chaleur malsaine du sang encore frais, mais il se força à les prendre. Il n'y était pas aussi sensible qu'Arô, après tout.
-Kôzô ! appela-t-il une fois repassé par-dessus le corps de son frère. Il ne pouvait pas décemment le laisser là, et il avait besoin d'aide pour le porter sans que sa tête ou ses pieds ne cognent quelque part.
Le rouquin aux yeux turquoise arriva quelques minutes plus tard, intrigué car c'était rare que son frère l'appelle.
-Quoi encore ? dit-il d'un ton peu motivé.
-Il faut que tu m'aides à le porter, ça se voit, non ?!
Le plus jeune fixa quelques instants le corps évanoui de son autre frère, avant de hausser les épaules et de prendre ses bras. Il avisa rapidement l'intérieur de la salle de bain, remarquant Dazai torse nu à l'intérieur, qui lui sourit doucement, mais n'eut pas le temps de voir le sang car son aîné s'interposa devant en prenant les jambes.
-Ne regarde pas à l'intérieur, dit-il d'un ton sans appel.
-Pourquoi ? demanda-t-il une fois un peu éloignés de la pièce. Je sais que vous faîtes des choses louches tous les deux, mais je ne pensais pas que vous iriez jusqu'à le faire sans fermer la porte. Pauvre Arô, lâcha-t-il soudainement en secouant la tête, désabusé.
-Attends... Quoi ? demanda Chuuya, ayant peur de comprendre le sous-entendu caché et rougissant. Ce n'est pas ce que tu crois...
-Oh, mais je ne crois rien. Tu fais ce que tu veux, et avec qui tu veux, mais essaies de penser un peu aux autres, continua-t-il en haussant de nouveau les épaules.
-Mais d'où est-ce que tu tiens ça bon sang ? commença à s'énerver l'aîné. Il ne s'est abso...
-Annabelle Montgomery, l'interrompit son cadet. Elle dans ma classe, tu te rappelles ?
Chuuya pesta contre les sœurs Montgomery, pestes l'une comme l'autre. Si même son frère commençait à raconter ce genre d'ânerie, toute la maison allait bientôt être au courant. Lui qui espérait que cela resterait entre les quatre murs de l'école. Il se força à respirer.
-Elle m'a même montré une photo. Mais je ne dirai rien, tu vis ta vie après tout, dit-il alors qu'ils déposaient l'évanoui sur son lit.
-Que... murmura le rouquin, avant de soupirer. Je t'expliquerai tout plus tard, mais je suis plutôt pressé là, dit-il en tournant les talons.
-Je t'en prie, finissez ce que vous avez commencé, mais fermez à clé cette fois !
Le rouquin carra les épaules et pesta mais se retint d'ajouter quelque chose, le brun ayant parfaitement eu le temps de retourner chercher une autre lame.
-Ne t'en fais pas pour mon innocence, j'ai des bouchons pour oreille, ajouta finalement Kôzô tandis que son aîné disparaissait dans le couloir, moqueur. Il récolta un doigt d'honneur mais était plutôt satisfait de son coup.
~
-Aïe aïe aïe, tu fais mal Chuu ! se plaignit Dazai, récoltant simplement que l'autre appuie plus fort.
-Ferme-là, et arrête de dire que tu as mal, parce que tu as choisi !
-J'ai choisi de me blesser avec une lame, pas avec du désinfectant... murmura le brun en détournant le regard et en gonflant les joues.
Le mouvement le fit s'éloigner de son correspondant, qui récupéra son bras et tira dessus sans aucun état d'âme, récoltant encore quelques plaintes.
Il était parti chercher les bandages dans la valise du suicidaire, en en profitant pour jeter absolument tout ce qui était pointu à son insu, puis il avait été chercher le désinfectant et était revenu pour soigner l'autre.
Malgré qu'il cherchait à paraître aussi souriant que d'habitude, Chuuya avait bien vu qu'il était beaucoup plus pâle qu'en temps normal et qu'il semblait fatigué. Il avait fini d'enlever le sang de ses bras, laissant apparaître de nombreuses cicatrices, certaines encore suintantes, d'autres plus anciennes, certaines même de simples marques qui peinaient juste à disparaître.
Il saisit une longue bandelette et commença à l'enrouler autour du bras droit du brun, sentant son regard inquisiteur sur lui et commençant à en être agacé. Il releva donc brièvement la tête pour fixer ses yeux bleus dans ceux de l'autre, qui grimaçait sous la « douleur ».
-Pourquoi est-ce que tu tentes de mourir, abruti ?
-Parce que je n'ai aucune raison de vivre, tout simplement, répondit-il immédiatement en haussant les épaules.
-A d'autre. Tu n'as pas de famille, d'amis, d'objectifs dans la vie comme des rêves ?
La mine encore un peu joueuse de l'autre se transforma en un regard soudain vide et effrayant, il devait vraiment être à bout pour ne plus maîtriser ses expressions faciales à ce point. Chuuya frissonna, persuadé qu'il aurait pu se perdre dans l'abîme des yeux de l'autre tellement ils étaient sombres.
-Non. Mes parents sont morts il y a deux ans, je vis chez mon oncle depuis, et dès que je le pourrai je partirai loin de lui et de sa peste de fille à qui il cède absolument tout. Et si tu veux tout savoir, si, je souhaite savoir ce que ça fait que d'être mort, sourit-il.
Le rouquin serra au maximum la bandelette qu'il avait presque fini d'enrouler autour du premier bras pour faire perdre à l'autre son petit sourire défait. Il avait l'air sérieux, c'était peut-être cela le pire.
-La mort, tu sauras ce que c'est tôt ou tard, tu n'as aucune raison de te presser. Prends le temps de trouver quelque chose qui t'intéresse. Pour ne pas regretter.
Chuuya le quitta à nouveau du regard pour prendre une deuxième bandelette et s'affairer à l'attacher. Il devrait probablement bientôt recommencer d'ailleurs, la première commençait déjà à être imbibée.
-La vie est ennuyeuse, et je sais que je n'y trouverai rien d'intéressant, alors à quoi bon ? Rien ne me retient ici, murmura Dazai tout en regardant les petites tâches écarlates se formant sur ses nouveaux bandages.
Le rouquin soupira, désespéré par cette manière de voir les choses. Il laissa un peu le silence peser, tandis qu'il réfléchissait à ce qu'il allait répondre. Il avait besoin que l'autre reste en vie, au moins jusqu'à la fin de l'échange, sinon il serait compromis. Après, il s'en fichait bien, il ferait ce qu'il voudrait.
-C'est faux, tu as quelque chose. Tu t'es engagé dans un échange, alors tu dois au moins rester en vie jusqu'à sa fin, parce qu'à cause de toi j'ai dû m'y engager aussi ! finit-il par dire.
-Et donc ? dit le brun en regardant de nouveau son correspondant.
-C'est un ordre. Tu restes en vie jusqu'à ce que je reparte du Japon, dans quatre mois. Sinon je te maudis sur plusieurs décennies, dit-il en finissant enfin le deuxième bras et ancrant de nouveau son regard dans celui du brun.
Ce dernier pouffa et détourna encore les yeux, visiblement amusé, mais redevint sérieux en voyant que le rouquin l'était.
-Promets-le moi, sinon tu dors dehors jusqu'à nouvel ordre, menaça pour la deuxième fois de la journée Chuuya.
Dazai soupira, avant de répondre, toujours amusé.
-Très bien, je te le promets. Je resterai donc en vie pour toi ma limace~Mais qu'est-ce qui te dis que je ne mens pas ?
-Ceux qui n'ont plus espoir en la vie n'ont aucune raison de mentir, non ? répondit sarcastiquement le rouquin avant de se lever et de partir, laissant son compagnon méditer là-dessus.
~
Le lendemain, ils visitaient le port le matin et restaient sur la plage l'après-midi, avec des activités prévues en conséquence, comme du volley-ball ou ce genre de chose.
Chuuya, après avoir encore dû réveiller violemment son partenaire, le surveilla d'un œil seulement, lui faisant confiance quant au fait qu'il allait respecter sa promesse, mais au cas où. Il était d'ailleurs allé se coucher sans rien dire la veille, et ne l'avait pas embêté.
Durant le repas de midi, il lança un regard éloquent à son ami bicolore en le voyant s'éloigner de son correspondant. Il avait alors soupiré, et avait murmuré quelque chose dans un japonais approximatif. Atsushi avait alors écarquillé les yeux, prouvant que c'était la première fois que l'autre lui parlait. Mais Ryunosuke s'était immédiatement braqué derrière, encore.
Les autres discutaient paisiblement, des groupes se formant, les européens et les japonais se mélangeant rarement. Seules Higuchi et Margaret étaient restées ensemble.
L'exubérant professeur d'anglais Fitzgerald était donc, en conséquence, en train d'expliquer en long, en large et en travers l'importance de la mixité pour pouvoir découvrir la richesse de la langue et de la culture partagée dans un discours grandiloquent dont il avait le secret, tandis que les professeurs installés un peu plus loin le regardaient, un peu gêné, et qu'aucun élève ne l'écoutait le moins du monde. Mais il ne semblait pas s'en inquiéter outre mesure.
D'ailleurs, il insista pour faire des équipes totalement mixtes au volley l'après-midi, ce que les élèves n'approuvèrent pas du tout, car il ne pouvait pas y avoir de concurrence. Ils profitèrent donc qu'il s'éclipse pour se « rafraîchir » -ce n'était pas pour les filles normalement ?- Pour avoir l'approbation des trois autres professeurs, Rimbaud, Kunikida et Melville, à l'unanimité.
Une bonne ambiance régna durant toute l'après-midi, mais aucun ne réussissant à se départager car ils alternaient victoire et défaite. D'ailleurs Fitzgerald n'avait pas l'air bien concerné par le sort de ses élèves, n'ayant pas le moins du monde remarqué que les équipes avaient changées.
Malheureusement il y avait trop de vent et de trop grosses vagues pour qu'ils aillent se baigner, et plusieurs filles ne voulaient pas, donc ils finirent par chanter des chansons japonaises comme anglaises sur la dune en attendant l'heure à laquelle ils avaient prévus de rentrer.
La soirée se passa tranquillement pour Chuuya, à l'instar de la journée, c'est-à-dire sans tentative de suicide, bien qu'il eût cru à un moment que le brun allait se jeter du haut de la dune, ou même du port encore un peu plus tôt.
La journée les ayant tous les deux fatigués, ils allèrent se coucher plutôt tôt, mais Dazai commença à lui parler alors qu'il s'endormait. Au début, il comptait lui dire de se la fermer, mais finalement il écouta car il lui raconta la manière dont ses parents étaient décédés et comment était sa vie au Japon.
Ils dormirent donc relativement tard cette nuit-là, mais le rouquin avait l'impression que l'autre s'était enfin ouvert à lui, et qu'ils pourraient peut-être partir sur d'un peu meilleures bases.
Ce qui est drôle avec ce genre d'échange, c'est qu'on a l'impression que cela passe à la fois très vite et très lentement, mais c'est toujours quelque chose de riche en expérience.
~
Chuuya arriva le lendemain matin à l'école, trempé car cette fois-ci son correspondant lui avait fait croire qu'il était parti s'habiller, ce qui était le cas, mais il s'était ensuite enfermé dans la salle de bain. Lorsque le rouquin était parti le chercher car ils allaient être en retard, il l'avait aspergé avec le jet d'eau de la douche.
Malheureusement, étant déjà en retard, il avait juste changé rapidement de pantalon et de chemise, ses cheveux ayant suffisamment pris l'eau pour goutter sur ses vêtements secs.
Et évidemment il commençait par son exposé d'histoire. Il fusilla son partenaire du regard tandis que celui-ci esquissait un petit sourire ravi et qu'ils rentraient en classe. Mais à leur plus grande surprise, le cours, qui aurait dû commencer il y a de cela dix minutes, ne l'était pas.
Le principal Dostoïevski se tenait sur l'estrade et parlait avec son petit air de fouine qui lui était propre, tandis que la majorité des élèves étaient effrayés. D'ailleurs il n'y avait pas que la classe de Chuuya, mais tous les élèves participant à l'échange également.
Lui et Dazai se faufilèrent donc discrètement vers le fond de la salle tandis que le directeur semblait en plein discours sadique, au vu de son visage satisfait. L'envie du brun de se faire remarquer étant surpassée par sa curiosité, il ne dit heureusement rien et personne ne remarqua leur retard, hormis Ranpo peut-être, mais lui s'en fichait.
Le rouquin mit un certain à comprendre, car il n'était pas là au début, mais comme le discours s'adressait majoritairement à un japonais -Kaiji, penaud devant l'estrade, en l'occurrence- le professeur Rimbaud le traduisit ensuite.
Apparemment, le jeune homme blond avait fait sauter la moitié de la ferme dans laquelle il séjournait chez Steinbeck, et ce dernier était, comment dire... Vexé ? Sa famille n'avait pas beaucoup de moyen, aussi avoir autant de réparations à faire était une vraie calamité pour eux, Chuuya les comprenait.
Néanmoins, il avait tout de même un peu pitié du jeune japonais. Comme tous ceux présents dans la salle d'ailleurs. Même son correspondant, malgré sa fureur apparente, semblait le prendre en pitié. Car il allait désormais être hébergé chez le directeur en personne.
Tous avaient frissonnés à cette affirmation, puis ils étaient repartis en cours tranquillement, la majorité des japonais soutenant d'une petite tape amicale le blond, et son amie Yosano tentant elle aussi de lui remonter le moral.
Et visiblement elle réussit, car ils repartirent bras dessus bras dessous d'un air entendu. Chuuya aurait juré avoir entendu le mot « citron » dans son discours.
Enfin, le professeur Ivan, fidèle à lui-même, annonça qu'il s'était malheureusement trompé de sujet pour les exposés, et que le coefficient n'était en fait pas de trois mais de quatre. Mais qu'il fallait voir le bon côté des choses, ils avaient jusqu'à mardi pour le faire.
Le rouquin l'aurait bien étripé, il l'avait fait exprès. Il était réputé pour faire ce genre de fourberie aux élèves en permanence, néanmoins il était tout de même parfois sérieux, alors à moins d'avoir un très bon flair -ou juste rien à faire des mauvaises notes- ce professeur vous rendait chèvre.
Ils eurent encore une heure de mathématiques et une heure de science avant de partir pour la salle de sport à environ une demi-heure de l'école. L'après-midi était dédiée aux découvertes sportives en tout genre, les élèves choisissant ce qu'ils souhaitaient faire.
Dazai choisit évidemment l'escalade -il ne lui avait pas fallu plus que de voir la corde pour le convaincre- et Chuuya l'avait accompagné car c'était une activité qu'il appréciait également. Il aimait bien être en hauteur, il se sentait en sécurité.
Encore une fois la journée passa vite, se terminant par une partie de base-ball collective ou les mêmes équipes que la veille furent créées. Mais cette fois, les japonais se firent écraser à plate couture.
Ils rentrèrent ensuite à la maison, après tous les frères de Chuuya, qui en profitaient pour chahuter car leur mère était encore au travail. Le rouquin alla directement dans sa chambre et laissa son correspondant prendre part aux jeux des petits démons roux dans le but d'avoir la paix pour faire ses devoirs.
Qu'est-ce qu'il pouvait haïr son professeur d'histoire. Son week-end allait être chargé, ils avaient prévu le lendemain d'aller à la plage avec les Akutagawa pour faire de la voile et du paddle, la météo prévoyant du beau temps.
Et dimanche, ils pique-niquaient tous ensemble avant le départ de l'avion direction Yokohama dans la soirée, aussi le matin se rendaient-ils à un laser-game. Il espérait donc avancer suffisamment sur son exposé pour être tranquille ensuite, bien que cela ne le motive pas.
Seulement, c'était réellement idyllique de penser pouvoir travailler dans le calme. Il avait mis ses boules Quies, achetées le lundi en même temps que les vêtements du brun, et n'entendait donc pas ce qu'il se passait à l'extérieur.
Il n'entendit donc pas, en conséquence, le silence qui régna soudainement, tandis que les six démons vivant sous le même toit -ses cinq frères et Dazai- avaient finis par se mettre d'accord pour arrêter de se battre entre eux et de s'attaquer à une cible qui en valait bien plus la peine.
Les cinq Nakahara, craignant la colère de leur aîné, n'avaient jamais tenté le coup auparavant, mais ils étaient un de plus et Dazai pouvait être très convaincant avec des schémas, étant donné qu'il ne parlait pas en anglais.
Et ni une ni deux, Chuuya se retrouva saucissonné dans une couche de couverture tenues par une des cordes de son correspondant, ayant été pris par totale surprise et n'ayant pas eu le temps de comprendre ce qu'il lui arrivait avant que le piège ne se referme.
Il regarda d'un regard haineux mais où perçait tout de même un éclat joueur les coupables et se débattit comme un beau diable pour se libérer. Au début, rien ne se passa, mais à force d'acharnement, il finit par enfin se défaire de ses liens et partit à la recherche de ses agresseurs, tous déjà cachés dans les recoins de la maison.
Lorsque Fuku, mère de toute cette petite fratrie, rentra finalement, elle eut l'agréable surprise de tous les trouver attablés et sages comme des images, bien qu'elle n'en sût jamais la raison.
La soirée passa tranquillement, jusqu'au moment d'aller se coucher pour les deux plus âgés. Dazai, qui avait déjà récupéré de la journée, déclencha une guerre de polochon dans la chambre de Chuuya. Celui-ci, récalcitrant au départ et se disant qu'il était trop tard pour ce genre de gaminerie, avait fini par marcher lorsqu'il s'était rendu compte qu'il ne dormirait pas tant que l'autre n'en aurait pas marre.
C'est donc gaiement que les oreillers volèrent dans toute la pièce, les matelas devenant des boucliers, les draps des moyens de camoufler son action, les peluches étant rapidement utilisées par manque d'oreillers.
Le rouquin commençait enfin à vraiment apprécier la présence de l'autre, et leurs éclats de rire furent si bruyants qu'Arô et Jûrô, les deux plus âgés après Chuuya et dormant dans la chambre voisine, ne tardèrent pas à se joindre aux festivités, tous les deux contre leur invité.
Puis rapidement les trois plus jeunes les rejoignirent discrètement tandis que Fuku dormait déjà à l'opposé, ne se doutant pas de ce qui se passait. Ils prirent le parti de Dazai, et finalement tous s'endormirent dans la chambre des deux plus âgés, fatigués mais hilares.
~
Le lendemain, la mère de famille fût inquiète en ne voyant personne se lever bien que cela fût le week-end, surtout qu'ils devaient tout de même accueillir les Akutagawa dans une heure environ avant de partir. Elle fouilla alors dans toute les chambres, et eut la surprise de découvrir la chambre de son aîné sans dessus dessous, les enfants dormant au hasard d'un matelas ou d'une couverture, parfois des mains ou des pieds dans la figure d'un autre.
Ils étaient si mignons qu'elle décida de prendre une photo et de l'envoyer à Fuku Akutagawa, ce qui plus tard pourrait nuire à son fils aîné, mais elle n'en avait pas conscience. Car son correspondant se servait actuellement de son ventre comme d'un oreiller.
Puis elle décida de les laisser encore dormir une trentaine de minute, avant de revenir les réveiller brutalement au jet d'eau -au fond elle avait toujours rêvé de le faire, et là elle pouvait se le permettre car elle devrait changer tous les draps quoi qu'il arrive.
Tous se réveillèrent en sursaut et la fusillèrent d'un regard meurtrier et glacial, notamment causé par cette méthode beaucoup trop brusque et ayant tous un caractère bien trempé et caractériel. Seulement ils avaient de qui tenir, car elle le leur rendit et ils se levèrent alors définitivement, toute envie de rébellion étant partie. Car quand la rousse aux yeux bleu comme l'océan vous fusillait du regard, c'était vraiment effrayant.
Mais elle reprit son expression rieuse, montrant aux enfants les photos qu'elle avait prise, Chuuya rougissant de nouveau tandis que Kôzô lui lançait un regard entendu. Qu'est-ce qu'il ne donnerait pas pour le frapper. Mais cela restait son frère, et sa mère était présente. Il trouverait cependant sûrement un autre moment pour le faire.
Toute la maison fut en effervescence durant les vingt minutes qui suivirent, à qui mieux mieux cherchait sa chaussette, son pantalon, qui voulait la place dans la salle de bain, aller aux toilettes...
Ils étaient sept, rien de bien étonnant à cela. Mais lorsque Dazai prenait la salle de bain, c'était pour bien souvent plus que le temps qu'il leur restait, et il avait malheureusement réussi à s'y glisser en deuxième après Shirô, si bien que tous les autres avaient décidé de prendre le jet de Fuku pour faire rapidement leur toilette.
Ils furent miraculeusement à l'heure lorsque leurs invités arrivèrent, toujours ponctuels. Atsushi avait d'ailleurs l'air cette fois-ci un peu plus à l'aise qu'au début de l'échange, ce qui rassura Chuuya quant au fait que son ami faisait des efforts.
Kyoka et Gin semblaient aussi un peu plus ouvertes, bien que cela restait dur à dire. Enfin, ils partirent direction la plage, où ils avaient loué le matériel nécessaire.
Les trois correspondants eurent beaucoup de mal et tombèrent réellement souvent, provoquant les rires de leurs homologues vivant en Europe, car ils étaient tous japonais en quelques sortes. Et puis voir Dazai rater quelque chose, ou Kyoka et Atsushi ressortir de l'eau avec un regard désabusé, cela avait quelque chose de réjouissant tout de même.
Les trois concernés, n'appréciant pas, firent discrètement une alliance pour couler leurs trois partenaires ainsi que les cinq petits démons roux. Le brun élabora la stratégie, qui consistait à les prendre chacun son tour à trois contre un.
Au début, ils n'y parvinrent pas car ils n'avaient décidément pas l'habitude et tombaient sans cesse avant de parvenir à leurs fins, mais en début d'après-midi, ils réussirent enfin, et finirent à l'eau à la suite de ceux qu'ils avaient poussé.
S'ensuivit une grande bataille d'eau et de noyade où tous participèrent de bon cœur, même Ryunosuke, étonnamment, tandis que les deux Fuku regardaient de loin, n'en perdant pas une miette et s'amusant de la réaction de leurs enfants.
Ils rentrèrent quand la nuit commença à tomber, et passèrent le reste de la soirée au manoir Akutagawa, où ils s'enfermèrent après le repas pour se raconter des histoires faisant peur -une idée proposée par Dazai, et où Chuuya devait jouer l'interprète, à son plus grand malheur.
Mais en même temps, ses plus jeunes frères semblaient avoir vraiment peur, alors il accepta. Il fallait dire que le manoir était plutôt lugubre et donc propice à ce genre d'aventure.
Ryunosuke faisait en réalité de réels efforts pour se faire comprendre, bien qu'assez discret. Lorsque son correspondant, visiblement très bavard une fois la timidité passée, commençait à lui parler en anglais, il le reprenait gentiment jusqu'à ce qu'il parvienne à s'exprimer, et bien que lui aussi parle en anglais, il expliquait chaque mot que l'autre ne comprenait pas.
Il ne voulait pas le montrer mais il était capable de se montrer attentionné. Même s'il gardait toujours son expression renfermée, plus un masque qu'autre chose.
Finalement cela se termina en soirée pyjama, tous restant dormir dans l'immense salon qui servait de pièce à vivre au manoir, ayant rapporté les oreillers et les couvertures qu'ils avaient pu trouver et piquer dans les nombreuses chambres de la maison.
Si bien que lorsque les deux mères décidèrent d'aller se coucher, elles ne trouvèrent absolument plus aucun drap pour elles, et les enfants mimaient de déjà dormir.
Elles se regardèrent, complices, et s'installèrent au milieu de l'îlot de lit et de matelas, se fichant bien des protestations faussement endormies et passant donc la nuit avec leurs enfants.
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Tous les correspondants devaient se réunir le lendemain matin devant les portes du laser game, ils avaient réservé la salle pour deux heures, et miraculeusement tous furent à l'heure. Ce fut même Ranpo qui traîna Poe derrière lui cette fois-ci, si bien que tous se demandèrent silencieusement ce qu'il avait encore pu -plutôt dû- lui raconter. Kaiji était en retard, et complètement paniqué. Ce qui devait s'expliquer par le fait qu'il avait tout de même dormi chez le directeur, et ce deux fois.
Tous avaient leurs bagages avec eux, sachant qu'ils ne rentreraient pas de la journée chez eux. Ils les laissèrent donc à l'entrée.
Puis ils entrèrent, pour deux sessions de quarante-cinq minutes avec une pause au milieu. Les japonais souhaitant se venger pour le base-ball, ils refirent les deux mêmes équipes et s'engagèrent dans une lutte sans merci.
Rapidement, les européens furent totalement dépassés. Ranpo élaborait une stratégie digne d'un champ de bataille -ils avaient encore une fois parié de la nourriture entre eux, donc il était toujours plus motivé- tandis qu'il arrivait à utiliser au mieux les aptitudes de chacun.
Dazai jouait l'appât en se baladant nonchalamment comme à son habitude -mais ayant un esprit de compétition il souhaitait particulièrement gagner- tandis que « l'équipe scientifique » posait des bombes où le brun attirait les ennemis, ce qui les enchantaient particulièrement.
Atsushi et Oda travaillaient en binôme d'un autre côté du terrain, l'un ayant d'impressionnants réflexes et l'autre semblant pouvoir prévoir quelques secondes à l'avance d'où les autres allaient les assaillir, une sorte de sixième sens utile uniquement dans ce genre de situation.
Ils parvenaient donc à esquiver habilement les tirs ennemis tout en en renvoyant comme ils pouvaient, bien qu'ils mettaient malheureusement beaucoup de temps à viser. Cette stratégie reposait donc aussi et surtout sur Naomi et Jun'Ichiro, complètement camouflés un peu au-dessus d'eux, qui inondaient de balles leurs ennemis en vue.
Quant à Kyoka et Higuchi, elles arpentaient tout le terrain comme de belles diablesses, parfois seules, parfois dos à dos, ne se laissant aucun répit et n'en laissant aucun à leurs adversaires. Et puis enfin venait Ranpo, qui se déplaçait juste de temps à autre lorsqu'il sentait qu'on allait le débusquer, ou lorsqu'il voyait une occasion en or de bombarder l'adversaire une bonne dizaine de fois avant de se faire lui-même avoir.
Les européens tentaient de se défendre comme ils pouvaient, même si c'étaient surtout les deux Akutagawa et Chuuya qui parvenaient le mieux à s'en sortir. Gin avait déjà débusqué trois fois les Tanizaki, et les deux garçons fonçaient dans le tas, Ryunosuke complètement, et le rouquin tentant tout de même de réfléchir un minimum avant.
Poe représentait une cible facile, ayant même réussi l'exploit de se tirer lui-même dessus tellement il manquait de dextérité. Lucy tentait de suivre le rythme imposé par les étrangers, mais elle manquait de discrétion et d'endurance, surtout avec sa robe très colorée. Tout comme Margaret d'ailleurs, bien que celle-ci parvienne au moins à viser convenablement.
Lovecraft passait presque inaperçu car il n'esquissait quasiment aucun mouvement et que sa tenue comme ses cheveux se fondaient parfaitement dans le décor. Il se prit d'ailleurs plus de balles perdues que de balles lui étant réellement destinées.
Louisa, Mark et Steinbeck avaient tenté de faire front contre les groupes ennemis, Mark posté en embuscade car il visait très bien tandis que Steinbeck fonçait dans le tas et que Louisa tentait de formuler des plans plus concrets tout en paniquant totalement. Malheureusement elle perdit tous ses moyens lorsque sa correspondante s'avança au coin d'un des murs, son sourire habituel collé au visage, et elle s'évanouit.
Ce qui interrompit la deuxième partie de laser game en plein milieu, la première ayant été couronnée de succès pour les étrangers et la deuxième, à peine entamée, se finissant encore sur une égalité.
Ils ne pouvaient donc absolument pas se départager, et, en allant au parc un peu plus loin pour pique-niquer, ils décidèrent de tout partager.
Le repas se passa dans une ambiance conviviale, toute l'électricité qui avait régnée le matin avant le début des hostilités dissipée.
Après le repas, Yosano annonça qu'ils pouvaient utiliser son ordinateur pour faire un karaoké, ce qu'ils firent de bon cœur. Après avoir entendu tout le monde chanter horriblement faux pour la majorité par groupe de quatre ou cinq, ils contraignirent Chuuya à chanter seul, car tout le monde dans l'école connaissait la rumeur comme quoi il chantait merveilleusement bien.
Tous rirent en voyant son regard meurtrier qu'il lança à ceux qu'il considérait comme ses amis ainsi qu'à son correspondant qui le regardait moqueusement, expression qu'il perdit tout de même en l'écoutant.
Le temps s'écoula tranquillement, puis ils se dirigèrent tous vers l'école, où les attendaient leurs professeurs au grand complet. Ils étaient un peu en retard et ceux-ci commençaient à s'inquiéter de ne voir personne arriver, n'ayant pas eu vent de leur activité commune. Ils faisaient en quelques sortes leurs adieux à l'établissement, avant de se rendre à l'aéroport.
Seulement, alors qu'ils se dirigeaient tous justement vers la rue pour s'en aller, Kaiji et Yosano les interrompirent. Puis, avec un regard fier et complice, ils appuyèrent en même temps sur un bouton rouge.
Soudain, des feux d'artifices, posés à on ne sait quel moment, surgirent du sol pour s'élever dans les airs. La nuit commençait à tomber, si bien qu'on les discernaient tous.
Les élèves regardèrent, émerveillés, tandis que les professeurs ne savaient pas trop quoi dire. Kunikida était d'avis de tout arrêter, mais encore une fois personne ne l'écoutait, et ils trouvaient que c'était une plutôt bonne idée, bien qu'il aurait fallu qu'ils en soient averti au préalable, et qu'ils ne savaient pas où ils avaient bien pû se les procurer et surtout, comment ils avaient pû à eux-seuls tout programmer.
Le spectacle fut de toute beauté, et, au moment du grand final, après cinq minutes, il se passa ce qu'il devait arriver. Une erreur de calcul sur une trajectoire, et une vingtaine de petits pétards se dirigèrent subitement vers l'école, sous les regards écarquillés de toute l'assistance, tandis que Kaiji appuyait frénétiquement sur sa télécommande pour empêcher les suivants de s'y diriger également, tandis que Yosano se mordait l'ongle en disant qu'elle l'avait bien dit.
Mais cela ne s'arrêta pas, et encore une petite cinquantaine de pétards allèrent s'écraser contre les murs de l'établissement, dont plusieurs salles et murs sautèrent, tandis que tous regardaient désormais, impuissants.
Evidemment, à la suite de cela, les deux fautifs se prirent un copieux sermon tandis qu'ils se dirigeaient tous vers l'aéroport, ne souhaitant pas être en retard, mais Rimbeau et Melville étant restés pour appeler le directeur et règler les problèmes adminstratifs que tout cela allait engendrer. Et pourtant, lorsque les adultes en eurent terminé, les deux adolescents se promirent de le réussir quatre mois plus tard, pour accueillir les européens.
Enfin les japonais montèrent dans l'avion après avoir salué leurs correspondants, tout sourire pour la majorité. Même si Atsushi craignait un peu du vol, au vu de ce que lui avait dit Ranpo. Il avait effectivement envoyé un message à sa mère, lui disant de ne pas s'inquiéter car l'avion risquait de prendre du retard.
-Alors, dit Akutagawa après avoir fait un signe discret en réponse à celui du gris qui venait de disparaître à l'intérieur de l'engin, tu es allé jusqu'où avec ton correspondant ? demanda-t-il sans même tourner le regard vers Chuuya.
Ce dernier se crispa, exaspéré que tout le monde pense réellement ce genre de chose.
-Je pensais que tu n'étais pas du genre à croire aux rumeurs, dit-il d'un ton amer et moqueur.
-Certes, et je n'y crois pas, mais ton attitude et ton regard ont changé.
Le rouquin soupira, avant de fusiller l'autre du regard. Ils se fixèrent durant un petit moment, avant que Chuuya ne sourit.
-Je pourrais dire pareil de toi. Ton expression s'est adoucie.
Ils se fixèrent encore un peu en silence dans le blanc des yeux, avant de pouffer et d'abandonner le sujet. Ils se reverraient dans quatre mois, peut-être même plus tôt d'ailleurs si eux allaient au Japon entre temps. Ils auraient encore donc tout le loisir d'aviser à ce moment.
~
Atsushi, qui se retrouva mystérieusement entre Kyoka et Dazai, et derrière Yosano et Kaiji, eut tout le loisir de comprendre ce qu'il se passait, bien que cela le dépassait. Le plus âgé avait donc accepter de lui expliquer, dans sa grande mansuétude.
Car depuis le départ de l'avion, les deux jeunes gens étaient totalement concentrés, l'ordinateur de Yosano entre eux-deux, leur téléphone chacun de leur côté et des écouteurs sur les oreilles. La jeune femme parlait régulièrement, disant des phrases dignes d'une tour de contrôle, tandis qu'elle se retenait parfois de pouffer.
-Tu vois, en réalité, ils n'ont pas fait que les imbéciles la semaine dernière. Ils ont minutieusement enregistré toutes les fréquences, tous les paramètres qui permettent aux pilotes de se repérer. Ils interceptent les ondes émises par la tour de contrôle, en modifiant leur voix ainsi que légèrement le message envoyé, car actuellement ils doivent paniquer en bas, sourit Dazai en expliquant la situation à Atsushi.
-Mais, les pilotes n'ont pas d'indicateurs de position ou autre ?
-Si, Yosano se charge de tout ce qui est annonce et directionnel tandis que Kaiji gère les compteurs pour qu'ils affichent une information fausse. Ils sont parvenus à trouver la fréquence de quasiment tout la semaine dernière.
-Mais, il n'y a pas moyen de savoir que l'on ne vole pas actuellement dans la même direction ? s'inquiéta le gris.
Dazai ne lui répondit pas. Lui aussi avait son rôle à jouer, celui d'attirer l'attention des hôtesses trop curieuses et s'approchant d'un peu trop près de ses amis. Il mima un malaise, et ne répondit donc qu'une trentaine de minutes plus tard, une fois son « malaise » passé et l'hôtesse loin.
-Si, c'est pour ça qu'ils ont prévu un itinéraire où il n'y aura que des nuages tout du long, ainsi que d'une durée similaire à l'originel, sourit le suicidaire.
-Et ils ont fait tout ça en une seule semaine ? Et où est-ce qu'on va ? commença à réellement s'inquiéter le gris.
-Chuuut ne parle pas si fort, tu vas nous faire repérer. Dans les faits ils avaient déjà prévu tous les programmes, il leur manquait seulement quelques données essentielles. Quant à la destination, dit-il en souriant de plus belle, nous nous rendons dans une autre ville jumelée, en France. A Lyon !
Le gris frissonna, c'était totalement à l'opposé de Yokohama en partant de San Diego. Ils allaient probablement avoir plus d'un jour de retard, et encore si les problèmes avec l'avion se réglaient rapidement, car il craignait surtout pour l'atterrissage du leur hors itinéraire planifié.
Car même s'il n'en savait pas énormément sur le sujet, il savait que c'était une mécanique relativement précise. Ses deux camarades étaient des monstres. Ils avaient préparé cela, en plus du feu d'artifice raté, et ce en une seule petite semaine remplie d'activités. Il soupira néanmoins, personne n'y pouvait rien à l'heure actuelle, et il tenta de se changer les idées.
Il commença donc à parler avec Kyoka, avec qui il avait finalement réussi à nouer un petit lien. Il l'avait entendu parler pour la première fois durant cette semaine, et, au final, elle n'était pas si effrayante que cela, juste un peu timide sur les bords.
Quant à Dazai, il sourit pour lui-seul en imaginant déjà les sales coups qu'il allait pouvoir faire au rouquin lorsqu'il viendrait chez lui. Il lui avait dit de vivre, et il l'avait promis. Donc c'est ce qu'il allait faire, mais il allait en profiter au maximum pour faire sortir Chuuya de ses gonds, ça, personne ne le remettrait en cause.
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Kunikida, déjà malmené durant sa semaine à l'étranger, failli étrangler tous ses élèves lorsqu'il apprit que la destination avait été modifiée. Personne ne comprit ce qu'il s'était passé, les pilotes se confondant en excuse, seuls les quelques concernés, bien que mimant l'innocence, jubilaient totalement.
Ils pourraient prendre un avion qui partait dans une vingtaine d'heures, aussi accorda-t-on à tous les élèves quartier libre dans la ville pour la journée. Ce qu'ils ne se privèrent pas de faire, tandis que le professeur de mathématiques tentait désespérément de reprendre son calme, ce qui s'avérait compliqué au vu des injonctions de son collègue.
Au final, ils prirent une semaine de plus, l'itinéraire encore une fois modifié par les deux diables, qui s'arrêtèrent au bout de la troisième fois lorsque Ranpo leur dit qu'après ils se feraient avoir, pleinement satisfait d'avoir pu faire le tour des magasins de bonbons dans d'autres pays.
Leurs homologues européens, quant à eux, n'eurent pas non plus cours de cette semaine-ci, mais pour une toute autre raison. Dans leur cas, c'était car de l'établissement fermé pour cause de travaux.
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