Chapitre 14: Vingt-huit autres tributs - District 3
Ce qu'en disait Louison :
Lorsque j'ouvre les yeux, il fait encore sombre. Mon pelage est humide, poisseux, trempé de sueur, car la nuit n'a pas été bonne. J'ai rêvé de la Moisson, des Jeux, de la Mort. La nuit précédant la Moisson, rares sont ceux dont ce n'est pas le cas. Cela serait insignifiant si ce rêve, ce cauchemar, ne se réalisait pas pour vingt- neuf d'entre nous. Je sais pourtant qu'à ce titre du moins, j'ai encore de la chance. Ici, au district trois, il arrive assez souvent qu'un carrière proie se porte volontaire. J'espère que ce sera une fille cette année. Ainsi, je n'aurais aucune chance d'être tirée. Cela, malheureusement, on ne peut pas le savoir.
Mon cœur bat très vite, comme si je venais de courir pendant longtemps. Je pense que c'est plutôt la peur. Je viens de me réveiller, je n'ai donc pas couru. Quoique, dans mon cauchemar, mon rêve, je courrais peut-être.
Il fait encore un peu nuit, mais plus pour très longtemps. Il fait noir encore, mais pourtant j'en suis sûre, le jour va bientôt se lever. Nous sommes trop pauvres pour que j'aie, comme les vacanciers du Capitole, un réveil sur ma table de chevet. Mais je le sais. Comment ? Je ne sais pas. Je le sais, c'est tout.
Je me lève. Il est trop tard pour que je me rendorme. De toute façon, je ne pourrais pas me rendormir. Et puis il ne vaut mieux pas essayer. Dans mon rêve, j'allais bientôt mourir quand je me suis réveillée. Si je me rendors, je vais surement mourir. Et il vaut mieux de pas mourir en rêve. Surtout la veille de la Moisson. Il parait que ça porte malheur.
Le sol est froid sous mes pattes lorsque je me lève. Je vais à la fenêtre, je plonge mon regard dans la nuit, et j'attends. J'attends que le soleil se lève. Je reste immobile à regarder la nuit, puis les premiers éclaircissements, ceux qui annoncent la jour, puis le premier rose du matin, puis le festival des mauves, et des rouges, puis le premier ciel bleu qui vient cacher ce sang, puis le soleil qui se lève petit à petit, les insectes qui commencent à voler, les oiseau qui commencent à chanter, les feuilles qui vibrent sous la rosée. On dirait presque le printemps. Et moi, je ne bouge pas.
J'entends des pas dans la cuisine. Ma mère vient de se lever. Je la rejoins. Elle me prend dans ses bras en murmurant « Louison. » Elle a peur. Elle a peur que je sois piochée à la Moisson. Moi aussi. En fait, c'est un peu plus compliqué. Il y a des moments où je me dis que je n'ai que très peu de « chances » d'être tirée, puisqu'il n'y a que 13 papiers à mon nom et qu'il y aura peut-être une volontaire, il y a des moments où j'oublie complètement que c'est aujourd'hui, et il y a des moments, où j'ai tellement peur que je n'arrive presque plus à respirer.
Peur ou pas, je dois m'habiller et je dois y aller. Comme il faut faire bonne impression si l'on est choisi, comme ceux qui se montrent trop négligés peuvent avoir des ennuis, ma mère me prête une ancienne robe qui était à elle quand elle avait mon âge. Elle est faite dans un tissu léger dont je ne connais pas le nom. Elle est entièrement blanche avec deux volants sur la jupe et un nœud à la taille. Elle est un peu grande pour moi, mais celle que j'avais l'année dernière est trop petite. C'est l'une de mes petites sœurs qui la met cette année. Comme elle vient d'avoir 11 ans elle a seulement 2 papiers à son nom dans l'urne et elle ne risque pas grand-chose. Ma sœur jumelle, Jeannette, a 8 papiers à son nom, elle n'a pas pris de tessaers cette année. Je suis celle qui a le plus de tessaers dans la famille.
En tout, nous sommes six sœurs à pouvoir être choisies cette année. J'espère que cela n'arrivera pas.
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