Capricorne (22 décembre - 19 janvier)
Bonjour à tous ! Merci de suivre cette fiction. Avant d'aborder ce chapitre (Capricorne : mon signe ;D) je voulais juste préciser que dans la mesure du possible, je respecte les signes astrologiques des personnages. Donc tous les persos dont la date d'anniversaire a été donnée par J.K.R. gardent leur propre signe : pour l'instant, c'est valable pour Hermione (née un 19 septembre), et le perso d'aujourd'hui, que je vous laisse découvrir (né un 9 janvier).
La seule exception sera pour le signe Lion, qui a trois porteurs parmi les personnages que je veux aborder. Deux d'entre eux se verront donc attribuer deux autres signes, mais je le justifierai dans l'intrigue ;D
Voilà, si vous êtes un peu curieux vous pouvez d'ores et déjà chercher qui seront les autres signes... Sinon, j'espère que la suite vous plaira.
Bonne lecture !
Nat'
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Capricorne. Une créature fantastique, mi-chèvre, mi-poisson. Un hybride. Un être de terre et d'eau. Entre deux mondes. Hors des mondes.
Comment aurais-je pu être autre chose qu'un Capricorne ? Je n'ai jamais eu ma place nulle part. J'ai toujours été... entre deux feux. Sur deux tableaux en même temps. Dans les deux camps. Appartenant à tous, mais en fin de compte, n'appartenant à rien. Sans attache. Déchiré. Sang-Mêlé.
Je chasse ces pensées ésotériques de mon esprit. Quitte à divaguer sur l'astrologie, autant se rappeler que le Capricorne est l'animal du dieu akkadien Ea. Le reste, je le laisse à Sybille Trelawney.
Levant les yeux de mes notes, je jette un coup d'œil à ma salle de classe. Cette heure-ci, j'enseigne aux sixièmes années. Gryffondors, et Serpentards. On peut difficilement faire pire, comme mariage...
Ils sont tous là. A me regarder de leur air abruti, en se demandant sur qui la foudre tombera. S'ils croient que cela m'amuse de me tenir devant eux... Les terroriser a toujours eu quelque chose de plaisant, c'est vrai. Et pourtant...
Le professeur que je suis ressentira toujours, je crois, cet espoir inassouvi de voir naître en ses élèves une vocation.
Même lorsque j'enseignais encore les Potions.
Les Potions n'ont jamais été mon domaine de prédilection. Mon domaine d'excellence, ça, je ne puis le nier. Mais ma passion s'est toujours trouvée ailleurs.
Enfin, si je devais m'en remettre à mes passions...
Aujourd'hui j'enseigne enfin la matière qui est chère à mon cœur : la Défense contre les Forces du Mal. Le poste maudit. Quel présage dois-je y voir pour mon avenir ?
Il s'annonce bien sombre, je le crains. Heureusement, je n'ai pas peur de mourir. Il y a bien longtemps que je ne suis plus le Prince de Sang-Mêlé, et bien longtemps que Severus Rogue s'est perdu dans les arcanes de ses doubles jeux. Ma vie entière aura été un rôle, un rôle titanesque. Une comédie de tous les instants, même à mes propres yeux.
Aujourd'hui, j'en suis arrivé à un point où je ne sais plus qui je suis vraiment. Toutes mes certitudes, mes affections, mes goûts, mes choix... tout ceci s'est trouvé aspiré dans les personnalités que je présente à mes deux mondes ennemis.
Le membre de l'Ordre du Phénix, allié d'Albus Dumbledore. Et le Mangemort fidèle, bras droit de Lord Voldemort.
Il y a deux Severus Rogue, et pourtant, aucun n'est le bon. Le véritable moi existe peut-être encore quelque part au fond de mon être, mais il n'a pas de public. Il ne vit pour personne, il ne se montre jamais. Alors, il pourrait aussi bien être mort.
Je ne suis pas Ea, je suis Janus. J'ai deux visages, et pourtant je suis seul. Mi-chèvre, mi-poisson. Quelle part appartient à l'un ou l'autre des camps ?
Voilà que je m'égare à nouveau. Mes réflexes me rattrapent. Mon inconscient me guide vers mon stabilisateur, vers la seule et unique chose au monde capable de me rendre mes repères, de me rappeler ma place dans ce monde, et que je vis encore pour quelque chose.
Je cherche les yeux de Potter.
Il est là, à trois rangs au fond de la classe, plongé dans son livre pour ne pas attirer mon attention.
- Monsieur Potter, je l'interpelle, en laissant trainer la dernière syllabe.
Il me regarde, anticipant déjà mes paroles, et pourtant, il semble si... détaché.
- Lorsque vous aurez activé ce qui vous sert de matière cérébrale, peut-être nous partagerez-vous votre opinion.
- Mon opinion, monsieur ?
- Sur le paragraphe de quinze lignes que vous semblez lire et relire depuis plus d'une demi-heure. A moins qu'il ne vous faille le reste de l'heure pour le déchiffrer.
Les ricanements des Serpentards se font entendre à travers la classe. Potter n'y prête pas attention. Il jette un coup d'œil à son livre, puis reprend sans la moindre expression :
- Ça concerne les Strangulos, monsieur.
- A quoi est consacrée la leçon d'aujourd'hui, Potter ?
Il me dévisage. Il sait qu'à ma prochaine réplique, la sentence tombera. Autrefois, ses traits se seraient chargés de haine, d'une violence contenue sous une façade polie. Aujourd'hui, plus rien. Potter est totalement indifférent :
- Je suis navré, monsieur, répond-il. J'ai peur d'avoir été distrait.
Il n'aurait pu faire pire réponse, et il le sait. Comme s'il voulait en finir le plus vite possible. Me couper l'herbe sous le pied, avant que je ne le pousse à bout. Potter a perdu la volonté de se battre. Et cela m'est intolérable.
- Vous avez été distrait..., je répète, lentement. Comment expliquez-vous cela, monsieur Potter ? Encore une énième beuverie dans l'antre des Gryffondors ?
Il ne répond pas.
- Cela ne devrait pas me surprendre... L'ivrognerie, comme les autres tares, cela s'inscrit dans les gènes.
Je ressens un mélange de satisfaction et de dégoût en prononçant ces mots. C'est tout moi. Je viens d'insulter son paternel à mots à peine voilés, devant toute la classe. Ma conscience n'en a rien à faire, j'ai toujours eu pour James Potter le plus grand mépris. Mais Harry n'est pas seulement James...
- Réagissez, Potter ! je hurle soudain.
Je reprends mon souffle. Je ne me suis pas rendu compte que je retenais ma respiration jusqu'alors. Je me tiens penché sur son bureau, au-dessus de lui, et j'ai frappé du poing sur la table. Cela ne me ressemble pas. Je ne sors jamais de mes gonds, jamais, il en va de ma vie. Et pourtant...
Et pourtant, je plonge dans ces yeux verts, et je ne supporte plus de les voir morts :
- Vous êtes aussi amorphe qu'un cadavre sans cervelle ! Réveillez-vous, Potter, c'est le vide dans votre esprit ! Le vide ! Il ne m'a jamais été donné de voir pareille affliction depuis que j'enseigne ici ! Vous faites honte à cette école, à votre maison, et à vous-même, cependant je vous le concède, vous perpétuez bien l'héritage de votre nom ! Êtes-vous capable de saisir un traître mot de ce que je vous raconte, ou l'alcool a-t-il grillé les dernières facultés mentales qu'il vous restait ?
Aucune réaction. Pas de colère. Pas de rancœur. Rien que l'indifférence :
- Je ne sais pas, monsieur.
Je me redresse, la respiration sifflante. De la sueur imbibe le dos de ma robe.
- Dix points en moins pour Gryffondor, je susurre.
Et je retourne à ma place. Je hais ce sentiment de défaite qui s'incruste en moi. Pire que de la défaite, du désespoir. Je contemple Potter, qui est retourné à son paragraphe comme si les cinq dernières minutes n'avaient jamais existé. Ma tentative aura été vaine.
J'ai toujours été dur avec Potter, mais cette année, je bats des records. Je sais que les élèves murmurent entre eux. Ils disent que je m'acharne sur lui avec la férocité d'un chien déchirant sa proie. Ils mettent ça sur le compte de mon sadisme. Ils ont tort.
Potter a changé. Même ceux qui lui sont les moins proches peuvent le voir. Depuis la mort de Black...
Non, je refuse d'y penser. Un seul salaud à la fois.
Quoi qu'il en soit, Potter s'est laissé sombrer. Plus rien n'habite son regard aujourd'hui, si ce n'est l'attente de mourir. Être enfin confronté à ses peurs, à cette ombre qui pèse sur sa vie depuis son enfance, au Seigneur des Ténèbres. Se battre jusqu'au bout, sans y croire vraiment. Mais surtout : se sacrifier. Se livrer au grand rien, au Néant. Pour que l'on n'ait plus jamais rien à lui demander, et plus rien à lui prendre.
Quand je regarde Potter, je vois un mort en suspens. Et cela me révolte, dans chaque fibre de mon être.
Parce que Potter, c'est aussi Lily. Il a les yeux de Lily... Et ces yeux ne peuvent pas être morts.
- Vous aurez une retenue, Potter, j'ajoute à ma sentence.
Réagis, Potter ! Allez ! Je t'en prie ! Un mot, une étincelle, un peu de rage, un peu de passion, un peu de vie, dans ce regard unique dont tu as hérité, dans cette porte sur ton âme, dans le seul et unique lien qu'il me reste avec elle en ce monde !
Rien. Tout juste acquiesce-t-il, avant de faire un effort pour fixer le tableau.
Je suis au bord des larmes. Il faut que je me calme... Mais je ne peux pas supporter de le voir comme ça. Je ne peux pas endurer la mort de Lily encore une fois... Il faut qu'il retrouve espoir, il faut qu'il se batte ! Il faut qu'il vive... C'est la seule chose qui importe. C'est la seule chose qui ait jamais importé. Mon unique raison d'être, depuis qu'elle n'est plus.
Je suis trop perturbé pour continuer... Je contemple ma classe, qui ne perçoit pas mon trouble. Comment l'aurait-elle pu ? Je suis le meilleur acteur que ce monde ait jamais porté. De plus, les gens ne voient que ce qu'ils veulent voir.
Comme la façon dont ils voient Potter, par exemple. Je leur donne une série d'exercices à travailler, et laisse cette pensée se développer. Harry Potter. Le garçon qui a survécu. L'élu. Je sais que tous les faits et gestes de Potter sont instantanément enregistrés et analysés par ses pairs, au quotidien. Il en est probablement conscient, lui aussi. Bien qu'il ait l'air de ne plus en avoir rien à foutre. Le fait est pourtant que chaque personne présente dans cette école, dans cette salle de classe, porte son propre regard sur Potter.
Ils ont tous une conception bien à eux de ce que doit être le fil de ses pensées. Le cours de son existence. Son ressenti. Chacun a sa vision de lui et pourtant, ils ont tous tort. Ils se plaisent à imaginer pourquoi il a changé. Pourquoi il agit de la sorte. Chacun y va de son propre point de vue, les émotions et l'image auxquelles ils veulent le faire correspondre. Bandes d'imbéciles. Je suppose que nous sommes tous condamnés à nous heurter à la barrière de l'Autre. Je suis moi-même un étranger pour mon propre esprit.
Mon regard dérive à nouveau sur Potter. Il ne fait même pas semblant d'écrire. Ses yeux verts perdus dans le vide contemplent le vide. Comme s'il attendait d'y tomber. Comment puis-je le sauver de lui-même ?
Je réprime l'envie de me prendre la tête à deux mains.
Je l'aime, ce petit enfoiré. Pas comme un ami, pas comme un amant, peut-être juste... comme un souvenir. Je l'aime, et je n'ose imaginer ce qu'il penserait s'il savait ce que j'éprouve pour lui. Sans doute pas grand-chose. Au moins avant, il me détestait. Aujourd'hui, je réalise que l'indifférence est le pire des maux.
J'ai déjà peine à m'avouer cet amour à moi-même... Cet horrible sentiment de perversité qui m'étreint, lorsque je me touche en pensant à lui. Pas à lui. A ses yeux.
Oui, autant dire les choses crument. Les yeux de Potter, les yeux de Lily, éveillent en moi la seule chose qu'il reste d'humain. La seule flamme qu'il reste à allumer. Alors je durcis, je me caresse, et je jouis en pensant à ces yeux unis aux miens. Et juste après, je souffre. Je me sens misérable et sale et honteux et seul. Moi aussi, je voudrais mourir. Mais j'ai ces yeux à sauver.
La sonnerie retentit, toute la classe se vide. Potter part parmi les premiers. Il ne saura rien des pensées qui m'animent. Pour le bien de tous, je crois.
Alors que je m'apprête à retourner dans mon bureau, pour me soulager de la charge que ces tensions viennent d'accumuler en moi, un détail retient mon attention. Drago Malefoy. Ou plus exactement, un bleu, sur la joue de Drago Malefoy.
Le Serpentard est occupé à ranger consciencieusement ses affaires. J'ignore s'il n'a pas l'intention de se presser, ou s'il cherche seulement un prétexte pour se retrouver seul avec moi. Pour me parler, sans oser se l'avouer...
Je soupire intérieurement. Mon ardeur est instantanément retombée.
- Drago, je l'appelle alors qu'il passe la porte.
Il se retourne, me dévisage. Drago n'est pas mort. Mais il souffre. Et je sais pourquoi.
- Approchez une minute, je lui intime.
Il s'exécute sans rien dire. Ses vêtements sont ajustés au millimètre près. Sa coiffure soignée, sa tenue droite et ferme. Seul le bleu sur sa joue contraste avec sa pâleur parfaite. Un ange tombé du ciel, un ange meurtri. Je regarde plus attentivement. Je regarde au-delà des apparences. Quand on sait comme moi ce qu'il faut chercher, on repère rapidement les marques de griffure, le long des bras et sur les poignets. La rougeur un peu trop prononcée des lèvres.
C'est la rentrée, nous sortons tout juste des vacances de Noël. Drago revient tout juste de deux semaines au Manoir Malefoy, avec ses parents. Avec le Seigneur des Ténèbres. Sa première cohabitation en tant que Mangemort. Et donc, sa première... initiation.
- Vous allez bien ? je lui demande.
Je sais bien que non. Pour marquer ses fidèles, le Seigneur des Ténèbres ne se contente pas d'un sortilège ancré à vie dans la chair. Non, le Seigneur des Ténèbres fait bien plus que cela. Il vous prend votre honneur, votre dignité, et votre âme. Il éteint la moindre parcelle d'espoir en vous. Il détruit tout ce qu'il y a à détruire, prend tout ce qu'il y a à prendre. Il fait taire tout ce qui aurait pu se révolter en vous. Et pour ce faire... il vous profane.
- Comment allez-vous, Drago ? j'insiste en lui faisant comprendre que je sais ce qu'il a enduré.
Il m'accorde un sourire froid, une tentative pour se préserver :
- Aussi bien qu'il est possible d'aller.
Sa voix est brisée. Peut-être parce qu'il a crié. Peut-être qu'il s'est débattu. Oui, sans doute. Le Seigneur des Ténèbres aime que l'on se débatte. Il ne le fait pas à tous ses fidèles, non. Uniquement à ceux qu'il veut transformer en sa chose. Et aussi, en punition.
Ce n'est pas juste. A travers Drago, c'est Lucius Malefoy que Voldemort a puni. Ce salopard... Laisser son fils se faire violer sous son propre toit... Peut-être même sous ses yeux...
- Si vous avez besoin de parler...
- Ce n'est pas nécessaire.
Il veut partir, je le retiens :
- Drago ! Il me l'a fait aussi.
Il secoue la tête :
- Je savais à quoi je m'engageais, déclare-t-il.
Puis, d'une voix plus dure :
- Vous ne pouvez rien pour moi.
Et Drago Malefoy s'en va. Il part rejoindre Potter dans les ombres... Ils ont bien plus en commun qu'ils ne le supposent, ces deux grands ennemis. Deux faces d'une même pièce, deux victimes d'un même bourreau, d'une même guerre.
Je les regarde, et je me demande...
... où est la différence ?
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