21 Décembre ( première partie)
- À gauche.
J'avançais prudemment un pied sur la rambarde en équilibre précaire, une guirlande de vingt mètres coincée entre les lèvres, une main tenant le rebord du toit au dessus de ma tête et l'autre tenant une agrafeuse pneumatique dont le fil était emmêlé dans mes jambes et menaçait à tout moment de m'envoyer dans le décor dix mètres plus bas.
- Un peu plus à droite.
Il commence sérieusement à me les briser !
Je décalais mon pied à droite.
- Non, en fait à gauche !!
- Tu m'emmerdes, Park!! Marmonnais-je à mon ami qui me regardait depuis la terre ferme, la main en visière pour ne pas être ébloui par le soleil.
La neige s'était arrêtée de tomber et le peu qu'il restait au sol avait fondu, mais un vent glacial s'était levé et la météo annonçait un blizzard dans les heures à venir.
Je ne sentais plus mes doigts, et accessoirement ma bite, qui s'était recroquevillée dans son antre comme un Bernard l'Hermite.
Je maudis les petits Suisses qui avaient décidé d'aller visiter les environs nous laissant seuls avec le psychopathe de Noël qui gueulait des ordres sans lever le petit doigt.
Je regardais en bas et croisais le regard de mon mari qui affichait un sourire un peu crispé à me voir perché en hauteur, connaissant ma débrouillardise légendaire.
Il avait voulu prendre ma place, mais Jimin s'y était opposé en disant qu'il lui fallait un homme fort pour amarrer les structures gonflables au sol.
Je ne sais vraiment pas comment je dois le prendre..
Je regardais d'ailleurs un renne géant se gonfler sous mes yeux, haut de plusieurs mètres et menaçant de m'enfoncer sa corne pointu dans l'arrière train.
Yoongi, lui, était en charge de démêler tout ce fatras et de procéder aux branchements sans que la maison ne parte en fumée.
- Décale-toi de vingt centimètres sur la droite.
- Je vais te les foutre dans le cul les vingt centimètres, tu vas me parler autrement.
Je levais la tête et croisais le regard de la voisine qui ouvrit de grands yeux effarés avant de fermer la fenêtre de l'étage et de tirer les rideaux.
Apparemment elle m'avait entendu et avait décrété que je représentais un danger pour le voisinage, comme toute cette assemblée profondément gay qui vivait dans cette maison.
Jimin m'avait glissé un mot sur ses voisins très conservateurs et très catholiques qui avaient fait des pieds et des mains pour empêcher la vente du chalet quand ils avaient su qui allait l'habiter.
Je tirais la langue en direction de la fenêtre dont le rideau bougea légèrement et me décalais sur la droite.
Mon pied glissa légèrement sur la rambarde mouillée et dans un réflexe nerveux, j'appuyais sur la détente de l'agrafeuse qui expulsa en rafale une vingtaine d'agrafes qui se planta aux pieds de Jimin, avant de finir leurs courses dans un père Noel d'un mètre cinquante qui émit un sifflement de détresse et qui se dégonfla comme un ballon de baudruche.
Yoongi, qui était derrière, se releva les mains sur les hanches en me jetant un regard meurtrier alors que Jimin, qui n'avait même pas été touché, se mettait à hurler de frayeur comme un goret.
- Mais ça ne va pas, espèce d'abruti!!!
- Ça va!! Je ne l'ai pas fait exprès!!
- JE N'ENTENDS RIEN, répondit Jimin alors que mes paroles se perdaient dans le vent qui s'était levé.
- VA TE FAIRE FOUTRE!!! TU AS ENTENDU LÀ?!?
J'étais à deux doigts de lui envoyer l'agrafeuse dans la gueule pendant qu'il continuait à vociférer quand je sentis deux mains se poser sur ma taille et me soulever de la rambarde pour me poser sur la terre ferme, à savoir le balcon du premier étage.
Je levais les yeux pour croiser le regard rieur de mon mari.
Il me prit l'agrafeuse des mains et enclencha la sécurité avant de la poser sur le sol.
Ah ,c'est ça le bouton bleu...
Puis il récupéra la guirlande que j'avais toujours coincée entre les dents et la posa également au sol avant de me claquer une fessée sur le cul.
- Allez file avant de tuer quelqu'un, je vais m'en occuper, dit-il en se baissant pour poser ses lèvres sur les miennes.
- Mais...
- Pas de mais, tu files avant de crever Jimin.
Mi-vexé, mi-soulagé, je regagnais la salle de jeu par laquelle il était arrivé et descendit dans la cuisine en passant par le salon. La télévision marchait pour les murs car les gosses avaient déserté l'endroit et étaient parti dehors pour s'extasier devant la version géante de leur héros préféré.
Je passais à côté du canapé où Kitty se léchait la foune avec application dans une pose des plus vulgaires alors que Yeontan mâchouiller quelque chose que j'identifia comme le bonnet de Jimin.
Avec un sourire sadique, je tapotais la tête de mon chien pour le féliciter et lui glissais un des chaussons de mon meilleur ami en guise de bonus avant de ranimer le feu, de me faire couler un thé bouillant et de ressortir par la porte d'entrée.
Jimin continuait de gueuler des ordres, emmitouflé dans sa doudoune Dior. Je levais les yeux et envoyais un baiser à mon mari en guise d'encouragements avant de me diriger vers le Père Noël gonflable qui ressemblait dorénavant à une crêpe.
Les cheveux dressés sur la tête, Yoongi essayait d'apposer une rustine sur le trou fait par les agrafes.
- Je peux t'aider?
Il leva la tête vers moi et me lança un tel regard que je reculai d'un pas.
Dieu merci, le camion du livreur arriva à ce moment-là manquant de se manger le Rudolf géant dont le nez clignotait.
Je me fis la réflexion qu'en pleine nuit , nous n'étions pas à l'abri de voir atterrir un avion dans le jardin qui nous aurait pris pour une piste d'atterrissage.
Le chauffeur descendit avant de se diriger vers l'arrière et d'ouvrir le hayon. Je m'approchai de lui et il me regarda avant de demander.
- Famille Park-Min ?
- Ah non, non, moi, je ne suis pas de la famille de ces tarés. Je suis juste un ami, enfin des fois je me le demande parce que la plupart du temps ils essayent de me buter. Là, on est venu passer les fêtes avec eux, mais je me demande encore si c'est une bonne idée parce que chaque fois ça finit en Hiroshima mais bon, là il y a mon mari.
Là, lui dis-je en désignant Jungkook perché à dix mètres du sol et dont on voyait les fesses moulées dans un jean noir, car il avait retiré sa doudoune pour être plus à l'aise. Il est canon, non ? Même après toutes ces années , je ne peux m'empêcher de choper une érection chaque fois que je pose les yeux sur lui. Ça fait deux jours qu'on n'a pas niqué, bon après c'est sa faute , il m'a dit que j'étais une grosse feignasse, vous imaginez ? Je regrette un peu de lui avoir dit de se la mettre sur l'oreille car ça commence à me gratter. C'est dur quoi, vous comprenez? demandais-je au livreur qui jetait des coups d'œil affolés autour de lui.
Je regardais autour de nous pour voir ce qu'il cherchait des yeux, mais ne voyait rien d'inhabituel, si ce n'est Jimin qui s'était foutu à chialer parce que la guirlande n'était pas pile poil au centre de l'alignement du poteau et Yoongi qui rouait de coups le Père Noel en plastique, pour passer ses nerfs je suppose.
Je fixais donc son visage à nouveau en clignant des yeux avec une expression courtoise. Il monta dans le camion et je reculais brusquement quand une dizaine de cartons tombèrent à mes pieds. Je n'eus pas le temps de dire quoique ce soit que le chauffeur était déjà remonté dans sa cabine et passait la première en faisant crisser les pneus à tel point qu'une giclée de boue fut projetée directement vers moi .
Je me retrouvais debout au milieu de cartons, couvert de boue des pieds à la tête et ma tasse pleine d'une substance marronnasse qui me fila une nausée.
Yoongi, qui avait fini de maraver la gueule du père Noël qui n'avait rien demandé, arriva vers moi et me détailla de la tête aux pieds, bientôt rejoint par Jimin et par Jungkook qui venait de descendre du balcon.
- Mais qu'est-ce-que tu as fait à ce pauvre chauffeur? demanda mon meilleur ami.
- Mais rien!!! Je lui tapais la discussion tranquille et d'un coup, il a vrillé total et je me serais cru dans Chucky, dis-je en époussetant ma doudoune, ne faisant qu'étaler un peu plus la boue. Non mais vraiment les gens, des fois, je me demande ce qu'ils ont dans le cul.
- Bien sûr, les gens... commenta Yoongi.
Jungkook sortit un mouchoir de sa poche et vint m'essuyer le visage.
- Tu devrais aller te changer, mon coeur.
Je jetais un coup d'œil aux dégâts puis haussais les épaules.
- J'irais quand on aura fini. Qu'est-ce-qu'il reste à faire?
Jimin claqua des mains comme un môme surexcité.
- Il ne reste plus qu'à allumer, ça va être magnifique. Attendez, je vais chercher les mômes.
- On le fera quand les autres arriveront. Faudrait rentrer tout ça d'abord, dit Yoon en désignant les cartons, c'est quoi d'ailleurs? demanda t-il à Jimin.
- C'est les décorations intérieures.
- Je peux savoir combien ça a coûté?
- Tu ne veux pas savoir mon chéri, roucoula mon meilleur ami en passant ses bras autour du cou de son mari.
- Mouais, bon allez au travail et après on se pose un peu.
...
Une fois le matériel rangé, tout le monde douché enfin moi surtout , nous nous étions attelés à l'ouverture des cartons de décorations qui seraient posées le lendemain.
Les petits Suisses étaient rentrés pour le dîner et nous avaient raconté leur périple dans un marché local du coin qui leur avait permis de faire leurs emplettes pour Noël.
Je m'attendais donc à recevoir comme cadeau pour le réveillon, des chaussons faits en poils recyclés de chèvres mohair teints au moût de raisin.
Je notais mentalement de photographier Jimin quand il ouvrirait ses paquets pour voir sa tête décomposée.
Après le repas qui s'était constitué d'une raclette pour nous, ce qui avait d'ailleurs fait hurler les enfants de joie, et d'un consommé de céleri pour Filibert, nous nous étions emmitouflés pour sortir dans la nuit glaciale pour assister à l'illumination de la maison.
Malgré quelques jurons de Yoongi, qui s'était emmêlé les pinceaux dans les prises, nous assistâmes enfin à l'allumage de l'éclairage, comme d'ailleurs toute la population à cinq kilomètres à la ronde.
La maison clignotait comme un vaisseau spatial et au vu des mouvements désordonnés du rideau des voisins, j'en conclus que nous étions les seuls à qui cela plaisait, même si je dois dire que c'était extrêmement kitsch .
Même Filibert, qui était aussi muet qu'une carpe, leva son pouce en signe d'approbation.
Le plus difficile fut de faire rentrer les enfants qui hurlaient de joie pour les convaincre de les mettre au lit. Je sortis donc l'arme suprême à savoir la promesse d'un chocolat chaud orné de petites guimauves pour les convaincre.
Chacun se délecta de son délice chocolaté et nous pûmes avec un grand soupir de soulagement envoyer notre progéniture au lit.
Filibert, à qui le lait de soja faisait apparemment office de somnifère, les suivit déjà à moitié endormi, accompagné de Hoseok qui clamait qu'il allait se coucher tout en regardant Jin.
Pathétique...
Jimin eut alors une illumination et nous proposa un petit jeu de société...
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