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J'ai finalement pris une décision. J'ai choisit avec qui j'avais envie de passer ma soirée. Et j'espère ne pas regretter ce choix.

Je vais rejoindre ... Zeleph. Oui je sais, c'est étonnant. Mais je ne veux pas lui poser de lapin, et laisser tomber sans rien avoir essayé. Alor c'est ce que je vais faire : essayer. Je vais rencontrer vraiment Zeleph, et je verrais bien ce qu'il se passera par la suite.

J'arrive devant le restaurant. Mon téléphone sonne pile à ce moment-là. J'ai quinze minutes de retard, je m'attendais à pire. Je rentre, et le trouve rapidement. Nous nous faisons la bise.
- Désolée pour le retard, j'ai eu un imprévu. J'aurais dû te prévenir.
- Ne t'en fais pas. J'étais un peu en retard aussi, j'avais peur que tu m'aies attendu.
Oh. Ça me rassure, je me sentais mal à l'aise d'arriver en retard. Surtout parce que j'ai aidé mon ex à rentrer chez lui. C'est pas le genre de choses à dire lors d'un premier rendez vous. Enfin je crois, parce que c'est mon tout premier rencard.
- Alors... Tu as passé une bonne journée ?
Zeleph paraît un peu gêné. Il essaye de meubler la conversation, alors que je suis nettement plus intéressée par la carte.
- Désolée. Tu ne veux pas qu'on choisisse d'abord ? J'ai vraiment faim en fait.
Il sourit.
- D'accord.

C'est lui qui a choisit le restaurant, je ne m'attendais pas du tout à quelque chose d'autant haut de gamme. Ça fait plaisir, même si c'est cher c'est toujours agréable de savoir que tu vas bien manger.
- Tu as choisis ce que tu voulais ?
Il hoche la tête.
- Oui. Une cote de bœuf, et toi ?
- Woaw de la viande. Quel homme viril.
Il sourit, hésitant à rire. Merde. J'ai dit ca à voix haute ?
- Désolée.. Je ne pensais pas dire ça à haute voix.
- Tu n'as pas à t'excuser. C'est sur que c'est très cliché, mais ça fait longtemps que je n'ai pas mangé de viande. Mon coloc est vegan, alors la viande c'est interdit chez moi.
- Oh c'est triste. C'est un motif pour déménager ça normalement.
Il rit.
- Ouais mais il fait la vaisselle, alors c'est un avantage non négligeable.
Monsieur est une princesse. À tous les coups, son coloc fait tout le ménage et lui ne fait rien.

- Tu m'étonnes.
- Et toi ? Tu vis en coloc aussi ?
- Non. Je vis seule.
J'essaye de ne pas paraître froide, mais j'ai un peu du mal.
- La chance !
- Ça dépend. Parfois c'est mieux de vivre avec quelqu'un, au moins il est la pour t'épauler quand tu es trop bourré, et vous avez des choses à vous raconter. C'est une ambiance différente.
- Alors pourquoi tu prends pas un ou une coloc ?
Si je me faisais trop de films je me dirais qu'il sous entend "pourquoi tu me prends pas comme coloc ?" alors que je sais bien qu'il ne veut pas être pris juste comme coloc.
- Je connais personne ici.
- Pourquoi ? Tu viens d'arriver ?
Je pensais qu'il allait me répondre quelque chose comme "tu me connais moi c'est le principal" mais heureusement il ne l'a pas fait.
- Ouais. Et je sors pas, alors c'est compliqué de faire des rencontres.
- Et tu as pas rencontré des gens dans ton école ou à ton travail ?
- Je ne fais pas d'études, et je bosse chez moi, alors non.

Le serveur s'approche de nous. Nous commandons à manger (il a finalement pris un tartare avec des frites, et j'ai choisit une escalope milanaise, aussi avec des frites), ainsi qu'une bouteille de vin. Je vois que Zeleph veut m'impressionner en faisant semblant de connaître les vins, mais ça ne marche pas vraiment. Triste.

- Tu fais quoi comme boulot ?
C'était la question que je redoutais. Je ne sais pas s'il va ou non me juger. Si c'est un passionné je suis bien tombée,mais sinon c'est un peu dommage.
- Je suis joueuse professionnelle.
- À quoi tu joues ?
Dis comme ça, c'est vrai que c'est compliqué de savoir. Et puis si tu as un esprit un peu tordu, tu peux tu imaginer beaucoup de choses.
- Aux jeux vidéos.
Zeleph semble surpris, mais dans le bon sens. Le serveur nous ramène notre bouteille de vin, et nous sert. Je bois un verre.
- Ah.
Peut être pas dans le bon sens alors.
- Je reviens. Je dois aller aux toilettes.
Zeleph hoche la tête.

Je me dépêche de trouver les toilettes. Tout ne se passe pas bien. Il paraît curieux, et tout allait bien jusqu'à son "ah". Il doit penser que ce n'est pas un vrai métier ou quelque chose dans le genre... Mais non. Je me fais trop de films. C'est juste que ce n'est pas courant, et c'est relativement nouveau de pouvoir gagner sa vie en jouant aux jeux vidéos. Surtout que les filles sont un peu moins présentes dans ce domaine, alors c'est doublement étonnant. Rien de plus.
Finalement je retourne auprès de Zeleph.

Je m'installe à ma place. Vu le regard qu'il me lance, j'ai l'impression d'être dans un interrogatoire. J'aurais dû m'enfuir.
- Et tu ne fais pas de vrai métier à côté ?
Je souris, étonnée par sa question. J'avais simplement supposée qu'il puisse me dire ça, mais je ne pensais pas qu'il me le dirait sérieusement.
- Ce n'est pas un vrai métier pour toi ?
- Parce que pour toi c'en est un ? Tu joues aux jeux vidéos, ce n'est pas un travail, m'explique Zeleph.
- Et alors ? À partir du moment où je suis payée, c'est un travail. Même si c'est pas quelque chose ou je me saigne, je bosse pas à l'usine à l'aube ou quoi, mais c'est quand même un travail.
Zeleph soupire. Qu'est-ce qu'il va me sortir encore ?
- Et du coup tu passes tes journées à jouer aux jeux vidéos ?
- Ouais. Je suis une passionnée.
Mon rencard me fixe.
- T'es une geek ? Enfin non, c'est encore plus poussé... Tu es une otaku c'est ça ?
- J'en sais rien. Je me définis pas comme ça, mais peut-être.
- Et tu as déjà eu un copain virtuel ? Qui existe pas vraiment mais avec qui tu sortais... Genre sur des jeux de drague ?
Je me mets à rire. C'est quoi cette question ? C'est un peu la même chose que s'il avait été en prépa et que je lui demandais s'il avait déjà eu une poupée gonflable.

- Et dire que j'ai raté une soirée bien meilleure pour passer un moment avec toi.
Nos plats arrivent pile à ce moment-là.
- Qu'est-ce que tu fais ? demande Zeleph en me voyant me lever.
- Ça ne se voit pas ? Je pars.
Zeleph m'attrape le bras, et me fait comprendre que je dois me rassoir, ce que je fais un peu sous la pression. Merde.
- Tu restes. On ne se barre pas comme ça en plein milieu d'un rendez-vous.
- Même si la personne avec on a un rendez-vous n'est pas forcément sympathique ?
Il fronce les sourcils.
- Mange. Tu pourras partir à la fin du repas, mais pas avant.
Super. Ça c'est de la soirée. Je suis obligée de rester manger avec un mec qui dénigre ce que je fais. Quelle ambiance de folie. Comme si j'allais me laisser faire.
- Et donc ? Tu n'as pas répondu à ma question. Tu as déjà eu un copain virtuel ?
- Ouais j'en ai pleins en même temps. C'est vachement pratique pour savoir avec quels types de mecs il ne faut pas sortir. C'est dommage que ce ne soit pas pareil en vrai, que tu n'aies pas de petite description pour te dire si oui ou non tu devrais sortir avec ce mec, ça aurait évité des moments comme celui-là.

Il se lève brusquement, et tape son poing sur la table.
- Tu me manques de respect là ?
Il parle fort, tous les clients sont tournés vers nous.
- Attention tu viens de tremper ta main dans le ketchup.
- Il y a un problème monsieur ? demande un serveur.
- Ça ne vous regarde pas, retournez faire votre travail, dit Zeleph en jetant le serveur.

Je profite de l'inattention de Zeleph vis-à-vis de moi pour sortir de table. Le serveur s'éloigne aussi, et Zeleph est seul. Je m'approche de la sortie, et il se tourne vers moi, l'air énervé. Il a ete inattentif quelques micro secondes mais c'était miraculeusement assez pour que je puisse m'éloigner de lui.
- Lucy ! Je ne t'ai pas autorisé à t'en aller.
Un vigil s'approche de Zeleph, et l'attrape.
- Monsieur vous devez vous en aller. Vous dérangez les clients, et vous importunez cette demoiselle.
Je laisse un peu d'argent pour payer le repas, et un peu plus pour leur patience sur le comptoir avant de sortir du restaurant, le souffle coupé.

J'ai eu peur. Je reste devant, essayant de calmer ma respiration.
- La police arrive, soyez tranquille, me dit un serveur quelques minutes plus tard.
Il allume une cigarette. Il m'a un peu surprise à arriver comme ça, mais c'est lui qui est intervenu tout à l'heure. Je dois le remercier.
- La police ? Carrément ?
- Il a dérangé les clients, et a donné un coup à un des employés. C'est un restaurant haut de gamme, les gens veulent être au calme. Et les seuls événements qui perturbent le calme sont des demandes en mariages, et non des disputes.
Je soupire, un peu rassurée que la police vienne (même si c'est quand même un poil excessif).
- C'était votre petit ami ?
- Non. Je l'ai rencontré hier. Premier rendez-vous.
Le serveur se met à rire.
- Un peu chaotique le premier rendez-vous.
- Oui. Un peu. D'ailleurs.. Je voulais vous remercier pour être intervenu tout à l'heure.
- Il n'y a pas de quoi.
Aucun de nous ne parle. Ça fait du bien d'échanger avec une personne normale et agréable. Je me sens mieux maintenant.
- Merci encore pour tout. Je vais y aller.
- Vous rentrez seule ?
Je hoche la tête. Il va me proposer de me raccompagner ?
- Alors passez par cette rue, l'autre est mal fréquentée la nuit. Il vaut mieux que vous rentriez saine et sauve après une soirée comme celle-là.
C'est juste trop mignon de me dire ça. Bon je suis touchée pour pas grand chose, mais ça fait plaisir.
- Merci beaucoup.
- J'espère vous revoir, me dit le serveur.
- Un jour peut-être.

Je m'éloigne. J'aurais dû lui demander son prénom. Je reviendrais dans ce restaurant. Je sors mon téléphone, et remarque les douze appels manqués de Zeleph. Comment on bloque un numéro déjà ? Ah oui voilà. Bien mieux. J'avoue que je regrette un peu.. C'est parti en couilles assez vite, mais pas dans le sens que j'espérais.
Je regarde mon bras, celui que Zeleph a attrapé tout à l'heure. J'ai une trace, celle de ses doigts. Putain ...

Je ne sais pas quoi penser de cette soirée. J'ai envie de m'énerver, de pleurer.. Je n'ai pas envie de rentrer chez moi. Je ne veux pas être seule ce soir. J'ai besoin de me défouler, de marcher, de faire quelque chose. Normalement quand je suis dans cet état, les jeux vidéos m'aident. Mais là je n'ai pas envie de rentrer. Je ne sais pas quoi faire.. Est-ce que je devrais aller voir Grey ? Non. Qui sait ce qu'il pourrait se passer entre nous... Mais c'est mon seul ami ici. Ça pourrait me faire du bien. Je suis un peu mitigée.

Je décide finalement d'appeler un taxi, qui arrive miraculeusement moins de vingt minutes plus tard. Je lui donne l'adresse de Grey, hésitant toujours à y aller. Et je ne sais même pas s'il est chez lui. C'est possible qu'il n'y soit pas, et qu'il soit sorti. Je vais peut-être même le déranger.. Je ne sais pas. Finalement je suis devant chez lui. Je ne connais pas trop cette partie de la ville, tout paraît si différent. J'habite dans un quartier calme et assez riche, mais si on marche un peu on se retrouve rapidement dans un quartier plutôt jeune, et animé. Alors qu'ici, c'est très calme. Enfin, les rues sont calmes mais il y a pas mal de boîtes et bars. Les gens ne font pas de bruits dehors. C'est un peu contradictoire qu'il y ait autant de boîtes mais si peu de bruit. Ça doit être agréable de vivre ici... Bref.

Son nom n'est pas marqué sur l'interphone, mais je me rappelle que sur le papier qu'il m'avait montré il y avait un autre nom. Je vais chercher quelque chose qui me semble familier. Meilleure technique au monde. Je sonne à son appartement un peu sur un coup de tête. Je voulais m'en aller, mais c'est un peu tard.
- Oui ? répond une voix à l'interphone.
Une voix inconnue. Féminine.
- Il y a quelqu'un ? demande-t-elle.
Je n'ose pas répondre. Je me sens bête. J'ai pensé passer la soirée avec Grey après lui avoir dit qu'on se verrait une prochaine fois, et forcément il a prévu d'autres plans. Une autre fille. Il fallait que je m'y attende. J'ai les larmes aux yeux.
- Allô ? redemande la fille.
- Désolée.. Je me suis trompée d'adresse..
- Vous allez bien ?
Elle a entendu que je pleurais ?
- Oui. Merci beaucoup. Bonne soirée ...
Je m'éloigne.

Quelques secondes plus tard, une voix m'interpelle.
- Eh ! Attendez !
La fille de l'interphone. Je me retourne. Elle est seule, en culotte, débardeur et pieds nus est en train de me courir après dans la rue. Ses longs cheveux blonds ondulés sautent au fur et à mesure de ses pas. Elle se rapproche de moi, qui trop surprise par la scène qui se déroule en face de moi, n'ose plus bouger.
- C'est vous qui pleuriez à l'interphone non ?
Ses grands yeux verts me fixent. Elle fait à peu près la même taille que moi, à peu de choses près. Je ne sais pas quoi lui répondre. Je me sens bête.
- Heu ...
Mes yeux se remplissent de larmes
- Allons allons.. Ne pleurez plus ! Venez chez moi, j'ai un remède magique qui empêche les larmes de couler!
Je suis un peu surprise mais je me laisse faire.

Nous montons chez elle. Elle a un petit appartement très mignon, décoré avec beaucoup de blanc et les nuances. Il y a des coussins partout. Ça paraît confortable. Elle m'indique de m'installer sur le canapé et de retirer mes chaussures pour que je sois plus à l'aise. Elle revient quelques minutes pus tard avec une tasse de thé.
- Tiens. C'est pour toi.
Elle est passée au tutoiement ? Bon on a l'air d'avoir le même âge alors ce serait bizarre qu'elle continue de me vouvoyer.
- Merci.
- Alors pourquoi tu pleures ? Raconte-moi tout.
Je bois le thé.
- Oh pardon, j'ai failli oublier le principal ! Je m'appelle Mavis Vermillon. J'ai 20 ans. Et toi ?
Je repose la tasse de thé, après avoir tout fini.
- Lucy Heartfilia. J'ai 19 ans.
- Cool ! Enchantée de te rencontrer Lucy, dit Mavis en me tendant sa main, accompagnée d'un immense sourire.
Je la sers, en souriant à mon tour.

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