10
- Je sais pas !
Il m'énerve. En fait non, je n'arrive pas à savoir si c'est lui qui m'énerve, ou moi-même. Grey s'approche de moi, et me sert dans ses bras.
- Tu ne vas pas me perdre, alors arrête d'avoir peur.
J'ai les larmes aux yeux. Je sais au fond de moi que je ne vais pas le perdre, car malgré tout ce qu'il s'est passé entre nous je tiens encore énormément à lui, et c'est réciproque. En plus, maintenant qu'on s'est retrouvés je me rends compte à quel point j'ai besoin de lui. Je pense que si maintenant je perdais Grey, je m'en voudrais vraiment.
- Lucy. Par rapport à Natsu, je sais que c'est ton ami alors je vais essayer de ne plus être jaloux. Je vais faire de mon mieux.
Je lève la tête vers lui. J'espère qu'il va réussir, même s'il a toujours été jaloux par rapport à Natsu. Je suis contente qu'il me dise ça.
- Merci.
Ce serait le moment idéal pour qu'on s'embrasse, mais je m'éloigne. Pas maintenant.
Nous retournons à la voiture main dans la main. Actuellement, je ne sais pas où j'en suis dans mes sentiments ou dans notre relation, mais je sais que j'ai besoin de lui. Même si je ne l'ai retrouvé que depuis quelques jours, il m'est maintenant impensable de me séparer de lui.
Nous retournons à notre ancien chez-nous. C'était déjà plein de souvenirs avant qu'on vienne, quand j'étais seule, mais maintenant c'est encore pire. Je regrette presque de lui avoir demandé de m'aider. En étant tous les deux seuls ici, on se rappelle des moments du début, où chacun savait qu'on était cette fameuse personne de la boîte, puis où on devait se cacher pour faire quoique ce soit, les moments de doute des parents. Ce sont des bons souvenirs, un peu étranges, mais j'ai passé de bons moments, même si ça n'a pas duré longtemps.
Nous sommes dans ma chambre, en train de trier et ranger mes affaires. Grey a déjà pris ses affaires quand son père et lui ont trouvé un nouvel appartement, mais au moins grâce à lui je peux déplacer les choses lourdes. Et c'est plus amusant à deux.
- Tu gardes ça ?
Il me tend les photos prises par Kanna, celles avec Natsu. Il a probablement fait exprès de directement tomber dessus, car je n'avais même pas fait attention à où elles étaient.
- Oui. Je veux les encadrer dans mon appartement et me rappeler tous ces merveilleux moments ..
Grey sourit.
- Tu pourrais même en faire des photocopies et en garder toujours une sur toi, pour qu'elle te porte bonheur.
- Pas bête ! Mais quitte à les garder autant en faire quelque chose de plus intéressant .. Comme un coussin ou une couverture. Histoire de joindre l'utile à l'agréable !
- Oh carrément ! Et après on les vend ! On sera riche.
Nous nous mettons à rire.
- Tu peux les jeter. Même les brûler si ça te fait plaisir.
Il les lance directement dans le sac poubelle.
- Panier !
- Bravo.
Je le sens vraiment content d'avoir jeté ces photos. Après tout, c'est la raison de notre séparation. Donc cette action est très symbolique, comme s'il voulait faire table rase du passé pour se tourner vers un avenir nouveau. Putain c'est beau ce que je dis. Mais en attendant, je me sens bien de savoir que je n'ai plus à cacher l'existence de ces photos. J'ai l'impression qu'on m'enlève un poids sur la conscience, ce qui est étrange car Grey était déjà au courant. Mais ce n'est plus un sujet de discorde entre nous, et c'est ça qui me soulage.
On se couche finalement assez tard, entre le rangement qui nous a pris beaucoup de temps et trouver un lit où dormir. Bon on dort dans le mien, sachant que le sien est un une place et qu'il fait bien trop chaud pour se permettre d'être à deux dans un lit pour une personne.
Nous nous posons à côté, silencieux. Est-ce que ça va être vraiment possible pour nous de dormir dans le même lit et de ne faire rien d'autre que dormir ?
- Je suis vraiment heureux de t'avoir retrouvé.. dit Grey, à moitié endormi, en prenant ma main.
Possible. Je souris, et sers sa main.
- Moi aussi, si tu savais à quel point..
Et nous nous endormons.
Mes cauchemars avaient recommencé quand je vivais seule, mais personne n'était là pour s'occuper de moi. Je devais subir ca seule, et je dormais donc très mal. J'avais commencé à prendre des médicaments pour mieux dormir, mais j'avais à nouveau des cauchemars. Je ne savais pas quoi faire. Mais bizarrement, depuis que j'ai revu Grey, je vais mieux. Je n'ai pas totalement arrêté de faire des cauchemars mais au moins je ne le vis plus aussi mal. C'est déjà ça.
Ce matin, je me réveille doucement grâce à l'odeur du café. Le meilleur des réveils possibles. Je remarque que Grey n'est plus à côté de moi. Je me lève et descends dans la cuisine. Ca me rappelle des souvenirs, comme quand je me levais le matin et que ma mère avait préparé des crêpes.
- Bien dormi ? me demande Grey en souriant.
Il me sert une tasse de café. Je hoche la tête.
On prend rapidement notre petit déjeuner, pour terminer de ranger et trier au plus vite. En rangeant toutes mes affaires, je me rends compte que j'ai énormément de choses inutiles, des objets que je pensais garder en souvenir mais finalement je n'en ai pas besoin, comme par exemple la tasse que m'avais offert Lisana quand elle était partie en voyage, ou toutes les versions différentes de Nintendogs. C'est mignon, mais ça ne sert à rien.
Je retrouve par la même occasion mon journal intime de quand j'étais au primaire. Honnêtement, j'ai très envie de le jeter, parce que c'est ridicule, mais c'est aussi mignon. Ça me rappelle des souvenirs de cette époque où la vie était simple (je dis ça comme si j'avais une vie horrible, mais c'est plutôt dans le sens où nos seuls bonheurs c'était que nos parents viennent nous chercher à l'école avec des pains au chocolat, ou encore de jouer aux Barbies avec ses amies).
Je le prends, et l'ouvre. C'est parti pour mourir de rire.
- "Chère journal, aujourd'hui maman et papa son venu me chercher a l'école. J'été vraiment contente. A l'école, je me suis disputé avec Lisana. Elle et nul. À cause d'elle, j'ai perdu au jeu des poisson. Je la déteste."
Je me rappelle de ce jour-là. Lisana m'avait pas laissé sortir du filet à temps, et j'ai perdu. C'était sa faute. Enfin dans mon esprit d'enfant de sept ans, c'était sa faute. En réalité, je sais pas si c'était vraiment sa faute ou si elle l'avait fait exprès, mais j'avais vraiment mal pris le fait d'avoir perdu. Je me demande si c'était à cause de ma défaite que j'écrivais aussi mal. Probablement pas.
- La pauvre .. Et dire que tu as écrit ça quand tu étais au primaire et que maintenant c'est toujours ta meilleure amie, dit Grey en essayant de se retenir de rire.
- J'ai écrit bien pire sur elle.
Je tourne les pages, cherchant la phrase exacte.
- "Lisana et amoureuse de Mathieu. Come moi. Et elle lui a fais un bizou. Ces une sorcière qui lance des tour de magie sur les garçon ! Elle devrai brulé." Je crois que j'ai mal pris le fait qu'elle ait fait un bisous au mec que j'aimais.
- Mais tu es horrible ! La pauvre ! Brûler carrément.. T'étais violente quand tu étais petite.
- Le jour où il s'est passé, il y avait eu un incendie à notre école, personne a été blessé mais tout le monde a eu peur, et une salle de classe a entièrement brulé. Donc dans mon esprit d'enfant c'était logique qu'elle doive brûler pour ça.
Grey se met à rire.
- T'es complètement folle ...
- Possible.
Je range mon journal intime. Je sais que je ne devrais pas le garder, mais il est rempli de souvenirs idiots et drôles, alors je veux le garder. Et si vous vous posiez la question, Lisana est au courant de ce qu'il y a écrit. Elle avait écrit encore pire sur moi, alors on est quittes.
On a pratiquement terminé de tout ranger. Ma chambre ne ressemble plus à rien, tout est reparti dans différentes valises/cartons/sacs poubelles. Niveau vêtements finalement je ne garde pratiquement rien. J'ai du refaire toute ma garde-robe quand je suis partie, et j'ai changé un peu de look. Et au moins je me débarrasse de pas ma, de choses. Dans tout ce que j'avais dans mon ancienne chambre, j'ai gardé uniquement mes figurines et autres jeux durement acquis, mes livres, quelques photos souvenirs de mon collège/lycée et des lettres.
Je recevais beaucoup de lettres de mon père, et ma mère m'en écrivait aussi de temps en temps quand on se disputait. Ces lettres sont certainement sur les choses que je veux le plus garder sur tout ce que j'ai.
On a tout terminé alors on fait une petite pause goûter. Une "petite" pause qui dure depuis déjà une heure.
- Et toi ? Tu étais comment quand tu étais petit ?
Je n'en sais pas grand chose sur lui finalement. Enfin je sais ce qu'il a vécu avec ses parents, son oncle, mais je connais plus les faits dans leur globalité que des petites anecdotes ou des souvenirs. Et je suis curieuse.
- C'est à dire ? Tu veux savoir quoi exactement ?
- Parle moi de tes histoires d'amour.
- Quand j'étais au primaire, j'ai été amoureux d'une fille, enfin amoureux comme on peut l'être au primaire. Elle était dans ma classe, on passait notre temps à se disputer puis à rire. Sauf que quand je me suis déclaré elle m'a simplement répondu qu'elle était pas amoureuse de moi mais qu'elle m'aimait comme un ami. Je me suis fait friendzone à même pas dix ans, j'avais un bel avenir amoureux devant moi.
Grey sourit. C'est à la fois un peu ridicule et mignon.
- Ma première vraie copine, c'était au lycée. Au collège en habitant chez mon oncle, même si j'avais eu l'idée d'avoir une copine c'était impensable avec mon oncle.
- Mais il n'y avait personne qui te plaisait ?
- Je faisais pas attention aux gens autour de moi, j'étais le gars bizarre assis au fond de la classe qui parlait à personne et mangeait seule à la cantine. Donc même s'il y avait eu quelqu'un, peu de chances que ce soit réciproque.
Il soupire. Maintenant il raconte ça avec facilité, mais c'est vraiment triste. Il ne parle pratiquement jamais de cette époque, car je sais que même s'il n'a plus de mal à en parler au fond ca lui fait encore mal.
- Tu m'impressionnes.
- Pourquoi ?
Il ne se rend pas compte.
- Comment tu as fait pour tenir en étant chez ton oncle pendant tout ce temps ? Tu devais te sentir seul.
Je sais que c'est indiscret, mais il devait être vraiment fort mentalement pour ne pas penser au pire.
- J'avais espoir que mon père vienne me chercher un jour, et c'est cet espoir qui m'a fait tenir, et surtout j'étais convaincu qu'un jour la roue tournerait pour mon oncle et qu'il aurait ce qu'il méritait. Et c'est ce qui est arrivé, lâché Grey.
- T'es admirable. Malgré tout ça tu restes calme, positif. Je sais pas comment tu fais, comment tu as fait... Je me sens si faible comparée à ça...
Il pose sa main sur la mienne.
- Ne te compares pas à moi, ça sert à rien. On a pas vécu les mêmes choses, alors on réagit pas de la même manière aux événements.
- Mais ... Je me sens ridicule.. J'étais totalement vide il y a deux ans, quand tu m'as quitté et que ma mère est morte. J'étais juste une larve, je ne faisais plus rien à part pleurer, et regretter ...
En disant que je pleurais, les larmes coulent toutes seules. Grey se lève et vient se poser à côté de moi. Il passe son bras autour de mon épaule, et me sert contre lui. Il me caresse les cheveux.
- Arrête de pleurer. En attendant, tu te sens ridicule mais tu as réussis à surmonter ça toute seule. Tu n'avais personne pour t'aider, et tu y es arrivée. Alors ne te sens pas faible, je ne pense pas que tout le monde aurait pu réagir comme tu l'as fait. Ne compare pas nos vies, on a chacun notre histoire.
J'ai l'impression de me faire engueuler.
- Et regarde-toi aujourd'hui, tu es forte. Honnête. Audacieuse. Alors même si c'était dur, tu as réussis et tu en es ressortie encore meilleure.
- J'ai pensé à me suicider les jours ou j'étais au plus mal.
Je l'ai dit.
- Moi aussi. Et en attendant, on est là pour en parler. Donc c'est qu'on l'a pas fait, on est en vie. Alors ne pleure plus..
Je sens de l'émotion dans sa voix. Je n'avais jamais dit ça à personne, pas même à Lisana. Et entendre que Grey a eu les mêmes pensées me rassure car il ne me trouve pas folle ou excessive. Mais .. Et si Grey l'avait vraiment fait ? J'aurais vécu ma vie sans le rencontrer, et tout aurait été différent.
- Si je l'ai pas fait, c'est uniquement parce que j'avais peur. Je n'avais plus d'espoir à ce moment-là, j'avais l'impression d'assister à ma vie, de ne plus m'appartenir. Mais j'avais peur de me rater, et que ce soir mon oncle qui me tue. Alors je n'ai jamais osé sauter le pas. Ces pensées sont restées à l'état de pensées, et heureusement sinon j'aurais pas vécu tous les bons moments que j'ai vécu par la suite ...
Je sèche mes larmes. Grey est vraiment positif. C'est agréable à entendre. J'ai l'impression d'être à un de ces moments dans les films ou tout est perdu, tout le monde va mourir mais par un coup de chance finalement le héros gagne. Les paroles du brun sont comme ce coup de chance, ce soutien, cette aide qu'on apporte au héros pour qu'il triomphe. Et c'est ce dont j'avais besoin en ce moment.
Ce n'était peut-être pas la meilleure idée au vu de notre discussion de tout à l'heure, mais j'ai demandé à Grey si on pouvait aller au cimetière. J'en ai besoin. Même si je me pense heureuse, je regrette de ne pas avoir pu dire à ma mère la vérité, et même si maintenant elle n'est plus de ce monde je sais qu'elle m'entendra de là où elle est.
J'ai pris un beau bouquet de fleurs. Je suppose qu'il y en a déjà, que Silver amène régulièrement, mais je veux lui ramener le mien. Un pas forcément fait avec ses fleurs préfères, mais un qui ressemble à notre relation : conflictuelle et chaotique mais au fond on s'aimait énormément.
Je suis devant la tombe de ma mère. Grey est resté à l'écart. J'ai besoin d'être seule sur cet endroit sur lequel je peux me reposer. Je dépose le nouveau bouquet, a côté d'un ancien composé de pivoines (signé "S").
- Maman.. Je sais que tu m'attendais depuis longtemps. Mais j'avais besoin de temps. Autant pour digérer ton départ, mais aussi pour savoir quoi te dire..
Les larmes me montent aux yeux. Je l'imagine assise à la table du salon, face à moi, le visage fatigué après une longue journée de travail, mais le sourire aux lèvres attendant impatiemment que je lui raconte ma journée.
- Déjà je veux que tu me pardonnes. Je n'ai pas été une fille exemplaire, je faisais tout pour te contredire et c'est que quand tu es partie que je me suis rendue compte d'a quel point j'avais besoin de toi dans ma vie. Même si on était pas toujours d'accord, je sais qu'au fond tu ne voulais que mon bien. Mais.. Je ne t'ai pas écouté. J'ai désobéi à quelque chose de très important Maman.
J'essuie mes larmes. Je veux finir ce que j'ai à dire sans être submergée par l'émotion.
- Même si aujourd'hui je suis heureuse, ca m'a pesé sur la conscience que tu ne sois pas au courant. Maman... J'apprécie vraiment Grey. Je ne sais pas si je suis amoureuse. Mais j'aime passer du temps en sa compagnie, et j'ai besoin de lui. Tu m'avais interdit qu'il se passe quelque chose avec lui, mais il s'était déjà passé quelque chose bien avant qu'il vienne habiter à la maison. Alors avant même que tu me donnes cette règle, elle était déjà rompue...
Je souris. C'est assez bizarre en vrai, mais je ne lui en ai jamais parlé alors elle ne pouvait pas savoir.
- Je suis heureuse Maman. Je fais ce que j'aime dans la vie. Tu ne serais pas fière car j'ai pas continué mes études, mais je gagne ma vie en faisait quelque chose qui me plait, et tu m'as toujours dit que c'était le plus important. Je me débrouille toute seule, et j'arrive à cuisiner des pâtes. Alors Maman, ne t'inquiète pas. Je vais bien. Je t'aime. Tu me manques.
On est partis chercher quelque chose à manger. J'ai dit tout ce que j'avais sur le cœur, d'une traite, car je pense que je ne reviendrai jamais ici. Je n'ai plus de regrets par rapport à ma mère, j'espère simplement qu'elle m'a entendu.
Je sais qu'elle serait déçue de voir ce que je suis aujourd'hui, mais je me sens bien dans ma peau. Je suis heureuse, et c'est tout ce qu'une mère souhaite pour sa fille.
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