Chapitre 32
♫ « Ugly » - The Exies ♫
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Joy
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Les premiers signes du lever du jour commencent à repousser le ciel bleu nuit d'une profondeur captivante entre les gratte-ciel.
- Tu crois qu'on aura le temps de visiter un peu ?
Nous venons d'arriver à New York. Postée devant la fenêtre du dix-huitième étage de l'hôtel où nous posons bagage pour deux jours, j'admire la vue délirante sur les rues éclairées de la ville mythique qui donne l'impression de ne jamais vraiment s'assoupir.
- Ça devrait pouvoir se faire. Me répond Harry en se plaçant dans mon dos.
J'aime tellement quand il fait ça. Le sentir se plaquer contre moi et épouser chaque recoin de ma peau est totalement exquis. Depuis hier, je suis parvenue à réprimer mon désir, car nous n'avons eu que très peu de temps libre à nous accorder. Juste après le concert à Orlando, nous avons embarqué dans l'avion privé du groupe pour rejoindre la « Grosse Pomme ». Il est presque cinq heures du matin et aucun de nous n'a vraiment fermé l'œil depuis la veille.
Son menton se pose au creux de mon cou. Je bascule la tête vers lui, frottant ma joue contre la sienne. Il commence à piquer légèrement de ne pas s'être rasé de près, mais j'aime cette perception inédite. Mes lèvres se posent près des siennes. Harry relâche son emprise pour me permettre de pivoter davantage. Il me rend un baiser chargé de passion, en me serrant une nouvelle fois contre lui. Ses mains se promènent dans mon dos. Les miennes se faufilent dans ses longs cheveux bouclés. Mon corps réagit immédiatement, me faisant comprendre que les cinq semaines d'abstinence qu'il a subi ont assez duré. La chaleur me monte à la tête. Des fourmis me parcourent l'échine sous ses caresses qui ont franchi la barrière de mon t-shirt. Je ne rêve plus que d'une seule chose : qu'il me fasse basculer sur ce lit, m'arrache mes vêtements et me fasse l'amour jusqu'au petit matin.
Son téléphone se met à vibrer dans sa poche. Je prie intérieurement pour que cela ne perturbe pas notre échange qui est bien parti pour se prolonger, mais Harry prend mon visage en coupe et recule légèrement. Il doit probablement percevoir mon agacement dans le souffle qui m'échappe à ce moment-là. Heureusement, il saisit son portable et l'éteint, pour ensuite le délaisser sur le rebord du canapé de la chambre. J'aperçois alors l'écran fissuré en transparence avec la lueur nocturne qui pénètre par la fenêtre qui nous fait face.
Je tremble toujours d'excitation lorsqu'il revient vers moi et me soulève pour mettre à exécution les pensées qui tournent en boucle dans ma tête. Ses yeux brûlants plongent dans les miens et mon monde retrouve enfin son axe quand, de ses mains, il se met à explorer mon dos une nouvelle fois. Il respire vite, me donne un baiser tendre et possessif tout en me déposant sur le matelas moelleux.
- Je n'en reviens toujours pas que tu sois là. Dit-il, comme s'il peinait encore à y croire.
Il s'allonge sur moi. Mes jambes s'enroulent autour de ses hanches et ondulent contre son bassin. Harry s'empare de mes mains et les plaque de chaque côté de ma tête. Ses doigts s'entremêlent aux miens, me laissant prisonnière de ses envies. Le vert de ses yeux brille intensément dans l'obscurité. Il ne m'a jamais regardée d'un air si autoritaire.
- Qu'attends-tu pour me faire l'amour, Styles ?
Il respire vite et presse sa bouche contre la mienne. Alors, une de ses mains lâche prise et glisse vers la fermeture éclair de mon jean. Un gémissement m'échappe quand ses doigts soulèvent l'élastique de ma culotte. Je vois ses pupilles se dilater pour ne transmettre que la faim qu'il a de moi. Je me tords de désir sous lui et Harry joue avec ma patience en se penchant pour effleurer presque innocemment ma bouche sans vraiment la toucher. Mon buste se cambre dès l'instant où ses doigts passent la barrière de bienséance et entament des mouvements à me rendre folle. Ma main libre vient saisir le drap pour le retenir fermement dans mon poing. Harry accélère ses caresses et je sens déjà un orgasme violent se préparer en moi.
- Attends. Pas si vite.
Suite à mon murmure, il cesse ses sollicitations à l'instant où je ne suis plus qu'à un battement de cœur de la jouissance. Il se redresse ensuite et se débarrasse de son t-shirt. La vue de son torse nu m'a tellement manquée. Tout en lui m'a tellement manqué. Son corps parfait me ferait presque oublier que je ne crois pas en Dieu. Qui d'autre a pu façonner une telle anatomie, si ce n'est une intervention divine ? Il se déshabille sous mes yeux et je profite du spectacle en oubliant moi-même de retirer ce que je porte. L'idée m'a alors à peine effleurée qu'il revient sur moi pour le faire à ma place, vêtu uniquement de son boxer. Un sourire lui fend le visage lorsqu'il retrouve sa croix autour de mon cou, celle qui ne me quitte plus jamais.
Il fait rouler ma culotte sur mes cuisses. Je lève les bras et les accroche à ses épaules pour plaquer une nouvelle fois son corps contre le mien. Puis, saisissant ses hanches pour le tirer vers moi, c'est là que je m'aperçois que quelque chose semble lui faire défaut. Je ne le sens pas durcir contre moi. Il ne bande pas.
- Serre-moi fort.
Mon supplice provoque une sorte de blocage en lui. Son visage enfoui dans mon cou remonte vers le mien. Il effleure ma peau de sa joue rêche et me regarde avec contrariété.
- Je suis désolé. Dit-il simplement. Je n'y arrive pas.
Prise de court par son aveu, je cesse moi aussi tout mouvement de hanches. Il souffle de plus en plus fort et ses sourcils froncés témoignent de son embarras mêlé à la colère.
- On peut attendre plus tard, si tu préfères ?
- Non ! Me répond-t-il d'un ton vexé. Je refuse que ça recommence !
Je réalise qu'il fait allusion à la période post-accident où son activité sexuelle avait été mise à mal par les lésions qu'il avait subies.
- Calme-toi, je t'assure que ça ne presse pas. On est tous les deux fatigués, toi le premier, alors ça n'aide pas vraiment à se concentrer.
Je l'incite à s'allonger et incline ma tête contre son torse. Son cœur bat si vite que j'ai rarement perçu une telle agitation en lui. Je saisis le drap et l'enroule sur moi en guise de barrière pour qu'il ne perçoive pas que mon envie à moi est belle et bien présente. Je ne tiens pas à ce qu'il se sente encore plus mal de ne pas avoir d'érection.
- Il n'y a rien de plus pitoyable. Ajoute-t-il, s'accablant davantage.
- Eh, je t'assure que ce n'est rien.
Ma remarque lui tire un soupir. Il se met une telle pression sur les épaules, comme si finaliser notre rapprochement par l'acte en lui même était une nécessité absolue. Je le sens dépité. Il finit tout de même par capituler en venant déposer un baiser sur mes cheveux et enfouit ensuite son nez dans ma chevelure pour respirer mon parfum. Son corps se relâche enfin.
- Ce n'est que partie remise. M'avoue-t-il, cédant face à ma détermination à le rassurer.
Même si mon désir est indéniable, je n'ai pas forcément besoin que l'on fasse l'amour dans l'immédiat. Être dans ses bras me suffit amplement. Je me rapproche un peu plus et moule mon corps au sien en passant une jambe entre les siennes.
- J'ai beaucoup trop de contrariétés en tête. Ajoute-t-il en joignant ses mains autour de moi.
- Tu veux parler de Robin ?
- Entre autres. Acquiesce-t-il en haussant une épaule.
Je relève la tête. Il semble beaucoup plus préoccupé par la santé de son beau père que je ne le pensais.
- Si tu as des questions à me poser, n'hésite pas.
Je suis persuadée qu'il a déjà fait beaucoup de recherches sur la maladie de Berger, mais qu'il n'a pas trouvé toutes les réponses qu'il attend. Un long silence s'installe. Harry bouge de manière à rétablir un contact visuel avec moi. Je me perds de nouveau dans ses yeux.
- Ça se passe comment quand on veut donner un rein ? Me demande-t-il d'un air déterminé.
Ma tête bascule légèrement en arrière. Je ne parviens pas à dissimuler mon étonnement qu'il me pose d'emblée une telle question. Je ne pensais pas qu'il était déjà dans une telle optique.
- Ce n'est pas un acte anodin, mais tu as tout à fait le droit d'y penser.
Son interrogation prouve une nouvelle fois à quel point Harry est un homme entier. Avec lui, c'est tout ou rien. Il émet un long soupir et semble attendre que je développe.
- De ce que j'en sais, il y a une expertise médicale et psychologique avant les dons faits de son vivant. Dans mes souvenirs, les démarches sont assez longues.
Je suis pratiquement sûre qu'il y a plus de trois mois d'examens en tout genre pour le donneur et le receveur, puis s'ensuit une surveillance médicale accrue pendant près d'un an. Rien que de l'imaginer de nouveau dans un lit d'hôpital me fait frissonner.
- Es-tu vraiment prêt à subir ça après tout ce que tu as vécu l'an passé ?
- Je n'en sais rien, mais j'y pense de plus en plus.
D'une main dans ses cheveux, je lui indique qu'il peut continuer à m'en parler s'il le désire. Je n'ai pas à guider sa réflexion. Peu importe ce qu'il décidera, je serais toujours là pour l'épauler.
_____
- Tu me dis quand tu es prêt et on y retourne ! Indique Julian tandis que Harry se prépare à enregistrer derrière le micro.
Mon amoureux boit une dernière gorgée d'eau et s'apprête à reprendre le morceau sur lequel il bute depuis tout à l'heure. Assise les genoux relevés contre la poitrine, je tente de me faire toute petite dans un coin de la chambre en assistant à cet enregistrement improvisé. Il m'avait dit qu'ils avaient pour habitude de procéder ainsi lorsqu'ils sont en tournée. Je trouve ça remarquable qu'ils puissent obtenir une qualité de son irréprochable pour un album alors que ce que j'ai sous les yeux est assez étonnant. Harry est isolé phoniquement pour éviter que le son ne se propage dans toute la pièce. Julian est dos à lui et écoute le résultat dans les retours. Seules Sasha et moi pouvons profiter de sa voix claire qui résonne lorsqu'il reprend son couplet.
D'un signe de la main, il indique à son ami qu'il est prêt à reprendre et active son téléphone, sur lequel les paroles défilent. Sasha se lève et se rapproche en arborant un air sérieux pour prêter l'oreille à la moindre note qu'il produit. Je serais incapable de discerner les irrégularités qu'elle relève, alors que j'imprime chaque détail de ce qui se déroule devant mes yeux. Pour moi, il chante divinement bien.
Julian lance la piste que j'entends à travers leurs casques. Harry a la particularité de découvrir une de ses oreilles de manière à entendre les conseils de sa coach. Une nouvelle fois, la note qu'il tente de sortir ne parvient pas à hauteur de ses espérances. Il s'arrête, agacé, mais Julian ne sourcille pas et attend qu'il se ressaisisse.
- Ne te focalise pas sur cette note. Lui dit Sasha. Pense à celle d'après et tu verras qu'elle va sortir toute seule.
Elle le laisse se concentrer et rejoint Julian face à l'ordinateur qui orchestre l'enregistrement. Harry reprend tout de suite après et parvient enfin à obtenir ce qu'il souhaite. Le voir s'en réjouir donne instantanément le sourire à tout le monde, moi y compris. Je saisis un peu mieux pourquoi il tenait tant à y parvenir. Son professionnalisme refait aussitôt surface lorsque Julian fait le point sur ce qu'il lui reste à réaliser.
Harry saisit sa bouteille au sol et s'adresse à moi.
- Tu peux me la remplir, ma chérie ?
Ravie qu'il me confie une mission et qu'il ne m'ait pas oubliée dans mon coin, je me lève. Cependant, un malaise s'opère devant mes yeux. Sasha, qui semble ne pas avoir remarqué qu'il me parlait, tend sa main vers lui. Tu ne l'as pas relevé son « ma chérie » qui m'était adressée ? Harry pivote vers elle, le regard grave, secoue brièvement la tête, créant chez elle un mouvement de recul. Je continue à progresser vers lui et saisis la bouteille, tout en tentant de l'interroger du regard sur ce qu'il vient de se passer. Sasha blêmit et tente de se reconstituer une attitude. La respiration ample de Harry me laisse pantelante lorsque j'attrape l'objet en plastique. Le silence qui règne dans la pièce accentue mon anxiété et personne ne semble vouloir dire un mot sur ce qu'il vient de se produire. Ils peuvent faire comme si tout était normal, on ne m'enlèvera pas de la tête qu'il vient de se passer un truc vraiment trop bizarre.
Je me dirige vers la salle de bains sans exiger d'explication. Ce qui m'agace pendant que l'eau remplit la bouteille, c'est que je ne vois plus ce qu'il se passe dans la pièce attenante et ça me stresse. Avant de revenir, je me surprends à ralentir le pas face à la porte pour tenter d'apercevoir un indice qui validerait mon ressenti. Harry est sur son téléphone et pianote frénétiquement un message. Sa mâchoire est crispée. Dans les secondes qui suivent, Sasha sort le sien de la poche de sa veste. Bordel, il y a un truc louche qui se trame ici.
Lorsque je refais irruption dans la pièce, la coach range immédiatement son portable et regarde par la fenêtre. Je suis persuadée qu'elle perçoit ma suspicion à son égard. En revenant vers Harry, l'idée me traverse de l'embrasser à pleine bouche pour bien lui faire savoir que je ne me laisserais pas berner par elle. Voyant que Julian est toujours dans son monde, je décide de mettre mes pensées à exécution. Harry est clairement surpris par mon élan affectif, mais ne me laisse pas diriger seule ce baiser.
La porte de la suite s'ouvre derrière moi. Je découvre Louis, les yeux écarquillés de nous découvrir dans une telle posture.
- Ça bosse dur ici à ce que je vois. Nous lance-t-il en rigolant.
Je recule légèrement sans désunir notre étreinte.
- Niall ! S'écrie Louis en direction du couloir. J'ai retrouvé la chambre !
Le blond accourt alors, visiblement éprouvé d'avoir cherché où se diriger.
- Toi et ton sens de l'orientation... Souffle-t-il à Louis en pénétrant dans la pièce.
- Eh, c'est moi qui supervise. Lui répond-t-il. Tu me parles sur un autre ton, jeune homme.
Je capte rapidement que leur présence est due au fait que Niall est le prochain à venir enregistrer ses parties.
- J'amène le petit pour sa séance. Confirme Louis en tapotant l'épaule du concerné.
Je ne me suis pas aperçue que deux heures viennent de s'écouler. Je ne pensais pas qu'ils étaient capables de tenir un planning si millimétré. Le Louis du boulot n'est décidément pas le même que dans la vie de tous les jours.
- Piste validée ! Scande Julian en s'étirant. On reprend demain.
Il se lève et saisit son paquet de cigarettes, en tend une à sa collègue. Harry se débarrasse du matériel audio, tandis que je me dirige vers le couloir. En ramassant mon sac, je me heurte brusquement à Sasha qui prenait elle aussi la direction de la sortie pour accompagner Julian. Confuse, elle m'adresse un long regard.
- Je suis désolée. Me dit-elle avec une certaine insistance, en maintenant ses mains sur mon bras.
Mes sourcils traduisent mon scepticisme.
- Ce n'est rien.
J'ignore si elle s'excuse pour notre collision ou pour le malaise qu'elle a créé tout à l'heure. Quoi qu'il en soit, je vais l'avoir à l'œil dorénavant.
Durant notre progression jusqu'à l'autre partie de l'hôtel où se trouve notre chambre, Harry se montre très pot de colle, à tel point qu'il nous arrête juste avant d'entrer pour m'embrasser une nouvelle fois.
- Je ne supporte pas quand on nous interrompt. Me dit-il à l'issue de ce rapprochement déroutant.
- Qu'est-ce qu'il t'arrive tout à coup ?
- Est-ce qu'il faut une explication pour embrasser sa copine ?
Ce n'est pas vraiment le baiser en lui-même qui me pose question, mais plutôt son comportement. Je suis persuadée qu'il a en tête de vouloir rattraper notre séance ratée de ce matin à peine nous aurons passé la porte. Est-ce uniquement un stratagème pour me faire oublier la scène ambiguë qui vient de se dérouler devant mes yeux ?
Il entre le premier en ne lâchant pas ma main. C'est moi qui désunis ses doigts, le laissant quelque peu surpris. Pour lui éviter de réitérer, je rejoins le lit où repose ma valise et procède à un rangement sommaire dans le but de lui montrer que je ne suis pas vraiment d'humeur à poursuivre son idée.
Il vient se poster de son côté du lit et commence à retirer ses vêtements. Je relève lentement les yeux sur lui et tente de ne pas laisser paraître mon étonnement de le voir procéder ainsi pour me faire comprendre ses intentions.
- Je vais prendre une douche vite fait. Me dit-il finalement, laissant l'intégralité de ce qu'il porte sur la couette.
- Ok.
Il s'éloigne en ne cherchant pas à me faire changer d'avis et ne referme pas la porte derrière lui. J'aperçois son reflet dans le miroir. Mon esprit ne fait qu'un tour en constatant que ses affaires sont délaissées sous mes yeux. Fébriles, mes doigts effleurent légèrement la poche arrière de son jean où est censé se trouver son téléphone. Il est bien là. Mes yeux se relèvent lentement en direction de la salle de bains, où l'eau chaude a déjà embué la pièce. Il ne se doute absolument pas de ce que j'ai en tête. Il faut que j'en aie le cœur net.
Mon souffle s'amoindrit comme si je voulais me rendre la plus discrète possible. Ma main agrippe le téléphone et déverrouille l'écran en formant la lettre « J » que je l'ai si souvent vu faire. La lumière jaillit sous mes yeux. Au moment où j'enclenche l'icône des messages, je perçois l'écho de mon propre cœur battre dans mes oreilles avec le stress qui me monte au cerveau. Je laisse défiler les contacts sous mes yeux. Son dernier message échangé provient d'un certain Aaron. Je descends alors plus bas. Louis, Niall, Jeff... Aucune trace de Sasha. Les seuls contacts féminins récents avec qui il a discuté sont sa sœur, sa mère et moi. Ce que j'ai vu tout à l'heure n'était donc que le fruit du hasard et mon esprit l'a interprété comme étant équivoque.
Je relève la tête. L'eau coule toujours, mais je dois faire vite. Harry passe rarement plus de cinq minutes à prendre une douche. J'ouvre alors l'application qui mène à sa boîte mails. La catégorie « Privé » me saute immédiatement aux yeux. À l'intérieur, je n'ai une nouvelle fois pas mieux à me mettre sous la dent. Il y a moins d'une vingtaine de messages archivés. Cependant l'un d'eux retient mon attention par son sujet surprenant.
« De : Harry Styles <[email protected]>
À : The Sun Magazine <[email protected]>
Objet : Demande d'anonymat sous peine de poursuites judiciaires
Bonjour,
Il y a quelques heures, un paparazzi travaillant régulièrement pour vous m'a photographié en présence d'une jeune femme à la sortie du club Le Libertine. Je requiers votre bon sens et vous demande de ne pas divulguer son visage dans la presse. Prenez ces mots avec le plus grand sérieux, car dans le cas contraire, je me retrouverais dans l'obligation de faire appel à un avocat pour le non-respect de sa vie privée et de la mienne.
Amicalement,
Harry.»
À l'issue de ma lecture, je suis percutée par le fait que cet échange parle en fait de moi. Le mail date du 17 mars 2019, soit le soir où nous avons discuté ensemble pour la première fois. Mes mains sont moites. J'ai une boule dans la gorge et le ventre noué d'avoir osé douter de lui. Mon index supprime toute trace de mon activité clandestine et éteint l'écran. Quelques secondes plus tard, le jet de la douche se coupe lui aussi. Depuis le premier jour de notre rencontre, Harry ne veut que mon bien-être.
Il réapparaît dans mon champ de vision. Sa main essuie une partie du miroir recouvert de buée. En transparence, il remarque que mon regard est posé sur lui et me renvoie un sourire auquel je réponds immédiatement, et au même moment, je crains de trop baisser ma garde face à ses beaux yeux. Même si je n'y connais rien à la vie de couple, il y a tout de même des signaux étranges que je ne peux simplement pas ignorer.
*** Trente heures plus tôt. ***
- Ça va bien se passer. On se retrouve tout à l'heure.
Les mots de ma meilleure amie me font réaliser que je suis totalement effrayée de revoir Harry. Ce qui est vraiment absurde. Je ne devrais pas me mettre dans tous mes états. Ava me connaît à tel point qu'elle lit en moi sans que je n'aie formulé quoi que ce soit en ce sens. Je lui souris pour tenter de la rassurer. Allez Joy, toque à cette fichue porte.
Ma main exécute mes ordres dans les secondes qui suivent. J'inspire profondément l'air qui me fait défaut et n'ai pas le temps d'expirer que le souffle de la porte qui s'ouvre devant moi m'en empêche.
La stupéfaction que je lis dans son regard me laisse sans voix. Le temps est suspendu et semble s'éterniser dans l'attente d'une réaction de sa part. Il porte une tenue de sport et tient son téléphone dans sa main droite, sur lequel sont reliés des écouteurs. Je perçois d'ailleurs l'écho d'une musique entraînante et comprends qu'il ne m'a probablement pas entendue frapper. Il partait simplement faire son footing matinal. Moi qui craignais de m'imposer, c'est exactement ce que je suis en train de faire en changeant ses plans à la dernière minute.
Pour briser l'embarras, je me décide enfin à dire quelque chose.
- C'est moi.
Ok, j'aurais pu trouver mieux. Harry retire ses écouteurs.
- Depuis combien de temps es-tu là ? Me demande-t-il sur un ton prévenant. Je n'ai rien entendu.
Il ne me laisse pas le temps de répondre et s'élance vers moi, à tel point que mon sac à main glisse de mon épaule. Cette étreinte a pour effet de faire retomber mes nerds en un instant. Et les siens aussi. J'enfouis mon nez dans son cou et réalise à quel point son odeur m'a manquée durant ces cinq semaines. Harry me serre contre lui comme s'il ne voulait plus que je lui échappe. Ses mains témoignent d'une certaine impatience à la manière dont il malaxe mon t-shirt sans pour autant l'agripper.
Craignant que ce moment d'intimité ne soit perturbé par les va-et-vient de l'hôtel, je recule légèrement. Il saisit mon intention en attrapant la valise à mes pieds et m'invite à entrer. J'ai le sentiment qu'il atterrit seulement maintenant, en refermant la porte de sa chambre derrière moi. Il délaisse mon bagage sous le bureau qui occupe l'entrée de la pièce, referme son carnet qui était ouvert sur le dessus et se retourne vers moi.
- Je n'en reviens pas que tu sois ici. M'avoue-t-il en revenant instantanément sur ses pas.
À cet instant, j'ignore totalement de quelle manière me comporter. Je me sens presque stupide d'avoir eu l'idée de le rejoindre en tournée, comme un boulet qui s'incruste dans son univers. J'imagine que dans la chambre d'à côté, les retrouvailles sont nettement plus enthousiastes et naturelles. Ce qui me perturbe, c'est que je ne parviens pas à décrypter ses pensées. Est-il content que je sois là, ou bien prend-t-il ma venue comme une inquisition dans sa vie professionnelle ?
- Les comédies romantiques nous mentent sur toute la ligne.
Mon amoureux ne saisit pas où je veux en venir.
- Ça rend beaucoup mieux sur un écran ce genre de surprises.
Harry me sourit enfin.
- Je ne m'y suis peut-être pas pris comme il fallait. Dit-il en passant une main sous ma mâchoire.
Mes yeux basculent sur ses lèvres qui se rapprochent de plus en plus des miennes. Je prends note de chaque détail, comme s'il s'agissait de notre tout premier baiser. C'est un sentiment assez étrange, un peu comme celui qu'on échangerait après une dispute, alors qu'elle n'a pas vraiment eu lieu. Sa manière d'embrasser ma bouche tout en délicatesse est elle aussi très différente de d'habitude. Tellement différente que je n'ose rien entreprendre. Je le laisse faire comme il veut. Seules mes mains se posent autour de ses hanches. Je réalise que je lui ai probablement manqué autant qu'il m'a manqué et c'est sa manière de me le montrer. Une vague de sérénité m'envahit à cette pensée. J'ignore d'où lui vient ce nouvel entrain, mais je dois avouer que j'y pendrais vite goût.
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