Chapitre 29
♫ « The Sky is a Neighborhood » - Foo Fighters ♫
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Louis
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Cette consultation ne rime à rien. Je perds mon temps. Je le fais uniquement pour faire plaisir à Ava qui ne supporte plus de me voir prendre des comprimés à longueur de journée à cause de mes maux de tête. Elle a menacé d'en parler à ma mère. Cet ultime chantage a eu raison de mon obstination et a mené à ma présence dans ce cabinet d'un spécialiste de l'audition.
Le type semble calé sur le sujet si j'en juge aux nombreux diplômes accrochés derrière son bureau. Après de longues minutes à m'analyser sous tous les angles, je sens le discours moralisateur arriver.
Je grimace de nouveau lorsqu'il retire son instrument de mon oreille droite au bout duquel brille une petite diode lumineuse. Il l'éteint et me fait face, l'air grave. Vas-y, balance. Je sais déjà que ça va me saouler.
- C'est bien ce que je craignais...
Même si je m'y attendais, ses mots me percutent et je peine à déglutir. Il souffle pour me donner son verdict.
- Vous avez le tympan perforé. M'annonce-t-il en reculant son tabouret à roulettes de manière à bien capter mon attention. Ça explique votre acouphène persistant à droite et la douleur qui l'accompagne.
- Ce qui veut dire ?
Le médecin se lève et repose son matériel sur un chariot métallique, conscient que les mots qu'il va prononcer risquent de ne pas me plaire. Quelqu'un l'a briefé sur mon mauvais caractère ou ça se lit sur ma tronche ?
- Vous êtes malheureusement allé trop loin et les dommages causés à ce stade ne pourront se régler que si vous levez le pied.
Et voilà.
- Vous suggérez donc que j'arrête la tournée ?
- En d'autres termes, oui. Dit-il simplement.
Je secoue la tête, vrillant une nouvelle fois la douleur qui n'est plus anesthésiée par ma prise de médicaments lointaine.
- Il y a sûrement un autre moyen pour résoudre ce problème et me permettre de continuer à monter sur scène.
- Louis, votre audition est quelque chose de précieux à votre âge, surtout avec un métier comme le vôtre, et vous l'avez déjà mise à rude épreuve en la négligeant toutes ces années. Je vous dis en toute franchise que si vous continuez ainsi, il ne sera plus question d'un simple repos pour que tout revienne dans l'ordre. Ce sera irréversible.
Je vois bien qu'il n'ose pas réellement prononcer les mots qui font peur.
- Je vous demande donc d'arrêter les concerts et d'éviter toute source de bruit trop violent durant un certain temps. Ajoute-t-il très sérieusement.
- Combien de temps ?
- Dans votre cas et vu l'état de votre conduit auditif, je dirais minimum trois mois.
Un rire nerveux me sort de la bouche.
- Trois mois ? Vous plaisantez ? Cette semaine de repos est la seule que je puisse m'accorder.
L'homme en blouse blanche se pince les lèvres, navré de constater que je suis aussi buté qu'il l'avait pressenti. Il se lève et rejoint son bureau pour rédiger une ordonnance.
- Je vous mets sous antibiotiques durant huit jours, sans grand espoir sur une amélioration miraculeuse et je vous prescris de nouveaux antalgiques.
Au moment de me tendre le papier, il tente une dernière fois de me raisonner.
- Souvenez-vous bien des mises en garde que je vous ai fournies aujourd'hui quand la douleur deviendra réellement insurmontable.
Je lui arrache presque la feuille des mains et sors sans prendre la peine de lui dire au revoir. J'avance jusqu'au secrétariat pour régler ma note. Ses derniers mots tournent en boucle dans ma tête. Il va me falloir une sacrée dose de calmants.
Après un rapide crochet par une pharmacie, je prends directement la direction du quartier où bosse Ava pour la récupérer après son boulot. J'ignore encore comment aborder le compte-rendu de mon entretien médical avec elle, mais j'espère que l'excitation de la visite que nous allons effectuer en fin de journée prendra le dessus sur ses interrogations.
Ce matin, elle a reçu un message de l'agent immobilier, lui disant qu'il avait sous la main un bien d'exception à nous montrer de toute urgence. Je ne demande qu'à le croire, mais je pense que son enthousiasme vient davantage du prix affiché de cette maison dont nous n'avons pas encore vu la moindre photo.
Au bout de quelques kilomètres, je m'aperçois que je ne prends absolument pas note des recommandations de l'ORL. Le volume de ma radio frise le déraisonnable. Je n'en fais vraiment qu'à ma tête. Je baisse les basses de moitié, et résultat, j'entends de nouveau mes acouphènes davantage que la musique. Bordel, ça commence à sérieusement me gonfler.
Je suis pratiquement arrivé à Saatchi&Saatchi et envois un message à Ava pour la prévenir qu'elle peut descendre. Au feu rouge, sur ma droite, j'aperçois un kiosque à journaux. Celui-ci affiche fièrement la une d'un torchon à conneries qui me fait une nouvelle fois sortir de mes gonds. Le week-end dernier, un tabloïd a fait paraître des clichés d'Ava raccompagnée chez elle par son patron et a brodé toute une théorie à ce sujet. Ce n'est pas la première fois que les médias tentent de mener la vie dure à notre couple, mais là, c'est différent. Sur de simples clichés résultants d'un moment de malchance, ils ont brodé toute une histoire faisant passer Ava pour quelqu'un qui profite des hommes pour se forger une reconnaissance médiatique. Ma chérie y est décrite comme une croqueuse d'hommes riches et influents. Rien que ça. Mes mains se crispent autour du volant et je démarre en trombe pour m'éloigner au plus vite de cette médisante couverture. Le seul putain de fautif dans cette affaire n'est autre que le type en lui-même. Rien que le fait d'apercevoir de nouveau la série de photos montrant sa main si proche des fesses d'Ava provoque en moi une furieuse envie de débarquer dans son bureau pour lui faire voir le fond de mes pensées. Elle était totalement déboussolée lorsqu'elle m'avait téléphoné suite à cette scène. Je me voyais déjà exploser le portrait de son supérieur, mais à mon arrivée à l'aéroport le surlendemain, elle était parvenue à me raisonner. Seulement, je ne céderai pas. Il me faut la version de ce pingouin en costume pour vraiment mettre au clair cet incident. Si elle ne prend pas la décision de partir, je serais contraint de la prendre à sa place, quitte à avoir une sérieuse discussion avec ce type minable qui lui a offert ce poste.
En tournant au croisement, mon regard se pose instantanément sur elle. Assise sur les marches de l'entreprise, Ava est plongée dans ses rêveries, le nez en l'air, les yeux plissés par le soleil qui lui fait face. Je klaxonne furtivement pour attirer son attention. Son sourire est immédiat et elle s'élance rapidement vers ma voiture pour me rejoindre. Elle a l'air de bonne humeur. J'en conclus que sa journée s'est bien passée, mais qu'elle n'a certainement pas encore discuté des photos avec son patron.
Je lui accorde le temps de s'installer avant d'aborder le sujet qui fâche, seulement ma belle semble déceler mon irritation et hésite à m'embrasser. Je ne lui laisse pas le choix et capture ses lèvres sans approfondir le baiser, ou je risquerais de perdre tout contrôle. Dès l'instant où je brise notre étreinte, ma contrariété me rattrape.
- Tu lui as parlé ?
Ava fronce les sourcils. Son expression déconcertée me pousse à me demander si je n'ai pas employé un ton trop autoritaire.
- Tu es décidé à te soigner ? Me lance-t-elle à son tour, avec la même intonation en relevant fièrement la tête.
Face à tant d'effronterie, je ne parviens pas à maintenir une expression grave et un sourire m'échappe. Je n'arrive jamais à creuser davantage quand elle se montre si inflexible. En prenant une grande inspiration, j'enclenche mon clignotant pour rejoindre la route et m'apprête à improviser une réponse.
- J'ai un tympan légèrement abîmé. Rien de grave. Le médecin m'a mis sous antibiotiques et selon lui, tout devrait rentrer dans l'ordre d'ici quelques jours.
- Quoi, c'est tout ? Rétorque Ava, surprise, mais visiblement convaincue par mon mensonge.
- C'est tout. Je peux poursuivre les concerts sans problème.
Je la vois croiser les bras et s'enfoncer un peu plus dans son siège. Je bascule mon rétroviseur sur elle pour avoir un aperçu de sa mine. Réflexion faite, je pense qu'elle ne croit pas un mot de ce que j'avance, mais ne préfère sans doute pas provoquer la foudre alors que nous allons visiter un bien dans moins d'une heure.
J'active le GPS sur le tableau de bord.
- Primrose Hill du coup, c'est ça ?
Ava acquiesce et cherche l'adresse complète sur son téléphone.
- Au 24 Elsworthy Road. Dit-elle en tapant les indications.
L'appareil nous indique une vingtaine de minutes de route. Avec la circulation dense, on peut compter le double. Je sais d'avance que je ne parviendrais pas à tenir ma langue durant tout ce temps sans qu'elle m'explique pourquoi elle n'a pas parlé à Magnus Djaba de l'événement de vendredi dernier.
- J'ai répondu à ta question. Toi en revanche, tu n'as rien dit, trésor.
- Je n'ai pas vu le patron de la journée. Répond-t-elle rapidement. Il était en rendez-vous à l'extérieur.
La raillerie a disparu de sa voix et elle semble tout à fait sincère.
- Qu'est-ce que tes collègues en disent ?
Je ne suis pas prêt à faire l'impasse sur cette mise au point qu'elle tente de repousser le plus possible depuis mon retour.
- Absolument rien.
- Arrête. Ça doit forcément faire parler.
- Je t'assure que non. Pas que je sache en tout cas.
Je meurs d'envie d'arrêter la voiture pour avoir une sérieuse discussion entre quatre yeux avec elle. Ava minimise bien trop l'impact que toutes ces rumeurs finiront par avoir sur sa réputation au sein de l'entreprise et plus généralement, sur l'image que les gens qui croient les saloperies relayées par la presse à scandales auront d'elle.
- Tu dois exiger un démenti de ton patron. Je ne vois pas d'autre solution.
- Un démenti ? Répète-t-elle en élevant la voix.
Enfin. Je commençais à m'inquiéter.
- Il ne fera jamais une chose pareille ! Ajoute-t-elle, convaincue de ce qu'elle avance.
- Bien évidemment qu'il le fera si tu es claire avec lui.
Je marque une pause en me rendant compte que des klaxons me sont adressés. Je laisse en effet une distance considérable entre ma voiture et celle de devant. Je reprends une grande inspiration et poursuis.
- C'est soit il éteint le feu qu'il a allumé, soit tu démissionnes.
Agacée, Ava tape fortement sur ses cuisses.
- Réfléchis un peu à ce que tu dis ! Enchaîne-t-elle avec la même contrariété. Je ne peux pas quitter mon boulot comme ça pour un simple malentendu !
- Un simple malentendu ? Tu m'as dit toi-même que tu pensais à un coup monté pour que Saatchi&Saatchi soit partout dans la presse !
Elle secoue vivement la tête.
- Crains-tu vraiment pour ma réputation ou plutôt pour la tienne ? Me demande-t-elle après quelques secondes de réflexion.
Je n'arrive pas à croire ce que je viens d'entendre.
- Tu viens réellement de me poser cette question ?
Tête baissée, elle reste silencieuse. Une place se libère à ma gauche. Mon esprit ne fait qu'un tour et j'en profite pour garer ma voiture. Je coupe le moteur et la musique de fond que nous n'écoutions pas, mais qui comblait les lourds silences entre nos répliques. Je détache ma ceinture de manière à pouvoir pivoter vers elle.
- Ne me dis pas que tu penses sérieusement que je t'emmerde avec tout ça uniquement pour sauver mon honneur ?
- Non... J'ai dit ça sans vraiment réfléchir.
Elle ne me regarde pas, prouvant par cette simple attitude que cette affaire l'affecte bien plus qu'elle ne le prétend. Je lui tends une main, qu'elle accepte.
- Je refuse que des connards s'en prennent à toi et se permettent de mettre toutes ces merdes sur ton dos.
Le contour de sa joue s'arrondit, mais elle ne lève toujours pas le regard vers moi.
- Je refuse encore plus qu'un putain d'enfoiré se croit tout permis parce qu'il pense t'avoir offert un poste en or, alors que tu vaux mille fois plus que ce job qui te sape le moral à chaque initiative que tu entreprends.
Je perçois désormais des sanglots étouffés qu'elle tente de dissimuler grâce à une mèche de cheveux qui lui cache partiellement le visage. Sans réfléchir, je l'attire contre moi et la serre étroitement dans mes bras. Je sais que ce contact ne fera qu'accentuer son besoin de craquer, mais ça devrait lui faire du bien d'extérioriser.
- Il y a plein de choses que j'ai appris à tolérer avec le temps.
Sa tête vacille pour acquiescer, comme si elle comprenait où je veux en venir.
- Alex qui reprend contact avec toi... Aucun problème, je prends sur moi et je dois dire que je gère plutôt bien.
Elle se met à rire légèrement contre mon épaule, où je sens l'humidité de ses larmes s'y déposer.
- Mais cette histoire avec ton patron, je ne peux pas laisser passer.
La gorge nouée à mon tour, j'espère vraiment qu'Ava se résonnera et saisira mon point de vue. Elle se détache de moi et sourit timidement, mignonne comme jamais avec ses yeux brillants. Elle baisse le regard en direction de l'épaule contre laquelle elle était appuyée.
- J'ai ruiné ton t-shirt. Dit-elle d'un air désolé.
Je soulève son menton et rapproche mon visage du sien. Mon amour reprend un air sérieux.
- Ne m'oblige pas à faire justice moi-même. Dis-moi que tu feras le nécessaire.
Cette phrase sort tout droit d'un film de super héros. Ava fuit mon regard et abaisse le miroir pour s'essuyer les joues. Elle finit par rediriger ses yeux sur moi.
- Je suis en vacances dans moins de deux semaines. Dit-elle. Accorde-moi ce temps-là pour réfléchir et promis, je demande un entretien avec lui dès ma reprise.
Elle attend que je réplique.
- Bien, ça me va.
J'embrasse son front et rallume le moteur pour me réinsérer dans la circulation. Elle n'était peut-être pas prête à intégrer cette nouvelle épreuve imposée par son existence médiatique. Je n'aime pas la voir pleurer, surtout quand je suis responsable de son chagrin, mais il fallait que l'on crève l'abcès avant que je reparte aux États-Unis.
Nous arrivons à Primrose Hill avec une légère avance sur l'agent immobilier. Ava en profite pour se refaire une beauté afin de masquer toute trace de ses larmes de tout à l'heure, alors que je lui assure que ça ne se voit absolument pas. Nous sortons sur la rue pour repérer la maison qui nous a fait nous déplacer jusqu'ici. Le quartier chic, similaire à celui où nous aurions rêvé de nous installer à Hampstead, est visiblement très calme. La bâtisse située au numéro 24 se trouve dans l'angle et a l'avantage de ne pas être mitoyenne. Un mur relativement haut dissimule toute la partie jardin qui semble s'étendre sur une bonne centaine de mètres le long de l'autre rue. La façade, typique des maisons du coin, est partiellement recouverte de lierre. Ava examine elle aussi les abords qui nous sont accessibles à ce stade.
- Ça s'annonce plutôt bien. Conclut-elle en me rejoignant.
- C'est pas mal, mais j'attends de voir si l'intérieur vaut le coup.
- Je pense qu'elle cache bien son jeu. Regarde, il y a une porte dissimulée sur la gauche. Je me demande bien à quoi elle mène.
Une petite entrée est effectivement placée en contrebas de la maison. Tandis que nous nous interrogeons, le vendeur de maisons huppées apparaît et vient nous saluer.
- Je ne voudrais pas me prononcer trop vite, mais je pense que cette fois-ci, il se pourrait bien que ce soit la bonne. Nous annonce-t-il le visage déformé par un sourire exagéré.
Moins de gaz, mon gars. Tu nous as sorti ça des dizaines de fois déjà.
- Je vois que vous vous interrogez sur cette mystérieuse porte. Ajoute-t-il. Je vous invite d'abord à visiter la partie principale et vous comprendrez vite à quoi elle se rattache.
Je ne peux m'empêcher de lui adresser une petite pique en parlant de la même façon que lui.
- Tant de mystères ! Vous piquez ma curiosité !
Ava me tape discrètement le dos pour souligner qu'elle n'adhère pas à ma moquerie, mais le type n'en prend pas note et nous invite à le suivre en direction du jardin situé à l'avant.
- Nous sommes sur une vieille bâtisse victorienne construite en 1932. Commence-t-il à expliquer tout en cherchant la clé de l'entrée principale dans l'énorme trousseau qu'il a en mains. Les fenêtres en alcôve font la particularité de ces maisons et le parement extérieur en pierres brunes est représentatif de l'époque.
Il ouvre la porte repeinte en gris et nous invite à entrer avant lui. Main dans la main, Ava et moi pénétrons dans une immense pièce ouverte. Le sol est recouvert d'un parquet brut certainement ancien, mais entretenu avec soin. Des escaliers suspendus, donnant une touche de modernité incontestable, font angle sur la droite. Juste à côté, deux pièces aménagées en chambres font face à une sublime cuisine qui occupe toute la partie gauche. La luminosité est remarquable, surtout dans la pièce commune, où d'autres escaliers d'au moins trois mètres de large desservent une extension en contre-bas. L'ouverture a été munie de verrières qui encadrent toute la séparation, mélangeant subtilement le style industriel avec l'ancien remis au goût du jour.
L'agent immobilier nous explique que l'intention des anciens propriétaires était de faire en sorte de parfaitement conserver les traces du passé, comme l'énorme cheminée à foyer ouvert repeinte en blanc, tout en y ajoutant de la modernité. Pari gagné. Le carrelage de la cuisine retient tout particulièrement l'attention d'Ava.
- Tommettes en nid d'abeille d'époque. Lui confie le vendeur.
Estomaquée, elle ne répond rien et admire encore plus ce qu'elle foule de ses pieds. En nous approchant davantage de l'accès au fond de la pièce, je constate qu'un côté des escaliers est totalement lisse. Ava demande si cela servait à y faire passer un fauteuil roulant, mais le type se met à rire en répondant qu'il s'agit en réalité d'une rampe de skate-board. Les yeux de ma chérie roulent immédiatement en ma direction et lisent en moi.
- N'y pense même pas. Me dit-elle, comme si la maison nous appartenait déjà.
- Mais enfin, une rampe de skate, bordel ! Le type qui a fait ça est un génie !
Un fou rire nous prend et l'agent nous invite à descendre les marches. La partie du bas est en rez-de-jardin et s'étend tout en longueur. Nous retrouvons sur la gauche la fameuse porte qui donnait à l'extérieur, permettant, si on le souhaite, un accès direct dans cette partie de l'habitation. Totalement vitrée, l'extension offre accès à un salon/salle à manger très cosy, muni d'un poêle à granulés dernier cri. J'y vois déjà notre petit groupe y faire des soirées d'enfer. Au milieu, se trouve un bureau professionnel avec accès à une terrasse protégée du moindre vis-à-vis. Parfait pour les barbecues en été. Puis, la dernière partie est un autre salon, plus intimiste, qui offre le clou du spectacle. Une longue piscine rentabilise le reste des espaces extérieurs, avec un accès à la fois interne et externe. À ce stade, je suis déjà prêt à signer, alors que nous n'avons pas encore vu le reste de la maison.
Le gars jubile totalement en voyant nos visages émerveillés.
- Je vous invite à mettre le pied dehors pour rentrer de nouveau dans l'ancienne bâtisse afin de visiter le reste.
Le jardin offre juste ce qu'il faut de verdure sans que ce ne soit trop contraignant à entretenir. Des arbres hauts cachent les maisons avoisinantes et brisent parfaitement la vue, ce qui fait qu'on ne se sent pas du tout épiés.
- Pour résumer, il y a donc trois niveaux. Vous venez de voir le second dans lequel nous accédons dès l'entrée. Nous arrivons donc ici au premier niveau.
Ce qui fait office de sous-sol à la maison d'origine a été transformé en immense salle de divertissement avec appareils de sport et vieux jeux d'arcade. Je dois avoir un lien de parenté avec le type qui a pensé tout ça. C'est la seule explication.
Nous montons ensuite au dernier étage où trois chambres nous attendent. La plus grande est une gigantesque suite de près de trente mètres carrés, dans laquelle une salle de bains et un dressing finissent de nous en mettre plein les yeux.
L'agent immobilier se frotte les mains, au sens figuré comme au sens propre et nous laisse un instant seuls. Ava s'avance en direction de la fenêtre, où la vue sur un parc avec le soleil couchant n'est qu'un argument supplémentaire pour saisir cette opportunité.
- On est d'accord ? Il nous la faut !
Ma chérie pivote vivement vers moi, le regard pétillant.
- Il nous la faut. Répète-t-elle avec assurance. Je n'en espérais pas autant, mais elle est clairement au-dessus de toutes celles que nous avons visitées jusqu'à présent.
- Parfait, dans ce cas... Elle est à nous.
Prise d'un rire nerveux, Ava me suit en direction du couloir où l'agent attend notre conclusion sur cette visite pleine de surprises.
- Alors ? Nous demande-t-il, déjà persuadé que notre réponse fera fructifier ses affaires.
- Alors, vous avez plutôt intérêt d'être sûr de vous sur ce coup, parce qu'on emménagera ici que vous le vouliez ou non.
Il se met à glousser d'excitation.
- Je vous assure qu'il n'y a aucun risque cette fois-ci, elle n'est pas encore sur le marché.
- Bien, sortez les papiers. On la prend.
En quelques minutes, l'offre est remplie et prête à être présentée au propriétaire. Ava souligne ce coup de folie après avoir assimilé le prix que je vais débourser pour nous l'offrir. La réalité est telle qu'il va bien falloir qu'elle se fasse à l'idée que je ne compte pas la mettre dans une galère financière avec cet achat. Qu'elle le veuille ou non, je vais régler la totalité. Il n'en a jamais été autrement dans mon esprit.
En repartant, le gars nous confirme que l'on peut considérer qu'elle est désormais à nous. Pour moi, c'est assez simple à intégrer, mais pour Ava, je pense que c'est vraiment surréaliste. Après le départ de l'agent immobilier, nous restons tous les deux à la regarder en silence quelques minutes de plus. Il ne m'est encore jamais arrivé de pénétrer quelque part en ayant le sentiment d'être déjà chez moi. Cette maison regroupe vraiment tout ce dont nous rêvions, si ce n'est plus, et je suis d'autant plus ravi de l'avoir trouvée avec ma chérie. Elle immortalise le moment en nous prenant en photo devant notre futur chez nous, puis nous repartons le cœur léger.
- Resto pour fêter ça ?
- Je demande aux autres s'ils sont disponibles ? Me demande Ava en attachant sa ceinture.
- Tu lis dans mes pensées.
Inutile de préciser que nous avons tout autant hâte de l'annoncer à nos amis.
- J'envoie un message à Joy.
Quelques secondes après avoir démarré, elle reçoit une réponse et fronce les sourcils.
- C'est quoi ce délire... Murmure-t-elle en relisant les mots qu'elle a sous les yeux.
- Quoi ?
- Tu ne vas pas me croire... Harry ne rentre pas.
L'enfoiré.
- Apparemment, il a perdu son passeport. Ajoute-t-elle en me regardant, comme si j'étais détenteur d'une version plus plausible.
Je secoue vivement la tête et un rire m'échappe.
- Mais bien sûr...
Ava redouble d'inquiétude et attend que je développe.
- Ça recommence... Harry n'est définitivement pas le même quand il est à L.A.
- Arrête, tu me fais peur.
- Non, pas de quoi avoir peur. Je dis juste que son attitude là-bas ne s'explique pas.
Son portable en mains, je vois bien qu'elle ignore comment rebondir suite à cette annonce inattendue. Je n'en reviens pas que Harry ose agir de cette manière avec sa petite amie. D'abord, il décale son retour, pour au final lui annoncer qu'il ne vient plus du tout. J'imagine qu'il avait peut-être ce stratagème en tête depuis dimanche dernier, mais qu'il a préféré le faire à sa manière pour ne brusquer personne et risquer de se faire remonter les bretelles par l'un de nous. Je ne crois absolument pas à son alibi de passeport perdu.
- Dis-lui de ramener ses fesses quand même. On va se le faire ce resto, avec ou sans lui.
Ava retrouve un semblant de sourire et tape immédiatement le message.
- Elle est partante.
- Parfait.
J'ignore vraiment à quel jeu joue Harry. Avec lui, il est totalement impossible de savoir ce qui lui passe par la tête. Leur couple en a grave bavé depuis un an et il préfère rester avec Jeff et sa bande de potes. Je ne comprends pas et tout ce que j'espère, c'est que Joy ne souffrira pas une nouvelle fois et surtout par sa faute. On ne sauve pas quelqu'un pour ensuite le malmener dès que la situation est rétablie. Je ne suis peut-être pas réputé comme étant le plus mature du groupe, mais il y a des règles avec lesquels je ne déroge pas. Alors s'il fait le con, je n'hésiterai pas à le lui faire savoir.
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