Chapitre 26
♫ « Home » - Machine Gun Kelly, X Ambassadors & Bebe Rexha ♫
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Ava
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Jamais je n'aurais pensé que trouver un logement à acheter sur Londres serait si difficile. Je ne compte plus le nombre de visites effectuées depuis le début de mes recherches. J'ai pourtant l'impression d'inspecter la ville dans ses moindres recoins, pour au final toujours revenir au même constat. La maison de nos rêves n'est sans doute pas encore sur le marché.
Chaque jour, je fais un petit tour sur les sites spécialisés pour repérer les nouvelles propriétés mises en vente dans la capitale, mais quand j'en trouve une intéressante, je ne cesse de la comparer à la belle maison qui nous a filé sous le nez à Hampstead. Alors, je me retrouve à exclure la majeure partie des occasions qui se présentent. Manque de luminosité. Aucun coin de verdure. Trop de pièces. Pas assez de rangements. Trop loin du travail. J'en viens même à ne plus savoir exactement ce que nous cherchons, alors que je ne devrais pourtant pas jouer les fines bouches, d'autant plus que Louis a exigé que le budget ne soit pas une barrière. Il faut que j'ouvre mon esprit à d'autres possibilités et que je laisse mon humilité de côté, et pour cela, rien de mieux que de convier Joy pour m'aider dans cette voie.
- Tu n'as pas vu mes bottines noires ? Me demande ma meilleure amie, soulevant les coussins du canapé que j'avais soigneusement retapés avant son passage.
Je passe après elle pour tout replacer.
- Pourquoi cherches-tu toujours aux endroits les plus improbables ?
Je lui indique du doigt le meuble à chaussures dans l'entrée. Joy saisit mon message, met rapidement la main sur ce qu'elle cherchait et les enfile à ses pieds.
- Il est où cet appartement déjà ? Me demande-t-elle une nouvelle fois.
- À trois rues d'ici, près du square de Cambridge.
Surprise, elle lève les yeux.
- Celui qui donne sur une cité ?
- Oui, je crois...
Cette même cité qui se trouve dans notre quartier, mais qui ne l'a jamais dérangée en quoi que ce soit auparavant.
- Enfin, si je dis ça, c'est pour vous. Ajoute-t-elle en plaçant son téléphone dans son sac à main. Si vivre près d'une zone malfamée ne vous dérange pas...
J'ai comme l'impression que faire cette visite avec moi ne l'enchante pas et qu'elle me le fait sentir. Mon amie a sa tête des mauvais jours et j'ignore ce qui la rend si irritable.
Le temps me paraît un peu capricieux ce matin, alors je décide d'emporter une veste avec moi. Dans ma chambre, je chasse une nouvelle fois Edgar du bac à linge tout juste lavé ce matin. L'animal semble d'humeur égale à celle de sa maîtresse, puisqu'il refuse de prendre part à mes menaces et rejoint instantanément la pile de vêtements propres.
- Joy ! Je n'arrive pas à faire partir ton chat !
J'insiste bien sur l'adverbe possessif pour souligner qu'en aucun cas je n'adhère à sa présence chez nous. Je ne suis vraiment pas faite pour vivre avec un animal, ce qui est un comble pour quelqu'un dont les parents sont vétérinaires. Ma maniaquerie ne me fait voir que les mauvais côtés, comme les poils qui volent partout, les grains de litière au sol, sans parler de cette manie de toujours vouloir griffer ce qu'il y a de plus fragile. C'est bien trop de contraintes.
Mon amie vient à ma rescousse et récupère le chat rebelle dans ses bras, puis l'enferme dans sa chambre.
- Je crois qu'il a une dent contre moi.
- Il sent peut-être que tu ne l'aimes pas. Suppose Joy.
Un sourire en demi-teinte s'ébauche sur son visage.
- Tu es sûre que ça va ?
Étonnée par ma question, elle fronce les sourcils.
- Bien sûr ! Pourquoi ça n'irait pas ?
Elle me cache quelque chose, je le sens. Depuis sa visite chez ses parents, j'ai comme l'impression qu'elle n'est plus tout à fait la même, et il y a de quoi. Lorsque vous avez fuit votre famille durant des années, je n'imagine pas à quel point cela peut être frustrant de constater que vos efforts n'ont aucun effet. Son père n'a même pas cherché à reprendre contact avec elle. L'attitude de cet homme est vraiment à l'image de ce qu'il dégage. Borné et insensible.
- Tu peux me parler, Joy.
Une brèche semble s'ouvrir dans son regard qui évite le mien pour fixer la fenêtre.
- Je... Je vais bien, mais... j'ai comme l'impression de tourner en rond.
- Tu veux dire, ici ?
Ses yeux pivotent vers moi.
- Pas uniquement. Quand je te vois, pleine de projets, je me dis que moi les miens n'aboutissent jamais. J'ai du matériel tout neuf dans ma chambre qui n'attend qu'à être rentabilisé, mais je n'y touche même pas.
Elle marque une pause et avance de quelques pas vers l'ouverture donnant sur la rue.
- Il n'y a pas que ça... La tournée me pèse aussi de plus en plus. J'ai l'impression qu'il s'éclate de son côté et que je ne peux pas partager tout cela avec lui.
- Je te comprends. Je me sens frustrée moi aussi.
Cela fait plusieurs jours qu'une idée me trotte en tête à ce sujet. J'aimerais tellement nous organiser une venue surprise aux États-Unis et les mots de Joy viennent confirmer cette envie. Je m'assieds sur l'accoudoir du canapé.
- C'est totalement égoïste pourtant et je déteste avoir ce genre de pensées. Ajoute-t-elle en se rapprochant finalement de moi.
Elle pose un genou sur la table basse et gesticule par balancements.
- Sans parler du fait que tu vas bientôt partir et...
Elle s'arrête, comme si elle se rendait compte qu'elle en avait trop dit.
- Je ne serai pas loin...
- Je sais, mais c'est encore mon côté égocentrique qui parle. Conclut-elle.
Enfin un sourire. Joy avait sans doute simplement besoin de vider son sac.
- On y va ? Me demande-t-elle en prêtant un œil à l'horloge de la cuisine. L'appartement dont vous rêvez se trouve peut-être à quelques rues d'ici.
Nous prenons la direction de l'axe en question à pied. L'agent immobilier m'a communiqué l'adresse exacte il y a une heure et lorsque j'allume mon téléphone, je tombe sur celui de quelqu'un dont je n'ai plus souvenir d'avoir lu les mots. Pourtant, en les parcourant une nouvelle fois, je me rappelle avoir réceptionné ce SMS d'Alex en plein milieu de la nuit et l'avoir lu dans un demi-sommeil.
Alex, 03:57 : « Salut. Tu vas sans doute trouver étrange de recevoir un message de ma part, surtout à cette heure-ci. Je ne sais plus trop à qui parler en ce moment. J'espère que tout va bien pour toi. »
- Alors, tu la trouves cette adresse ? Me demande Joy qui semble me trouver un peu longue à la détente.
Je lui mets mon portable sous les yeux.
- Mais ! À quoi ça rime ? S'étonne-t-elle après l'avoir lu. Il tente de jouer au plus malheureux pour t'attendrir une fois de plus. Méfie-toi.
- Ça ne lui ressemble pas.
- C'est justement pour ça qu'il te l'a envoyé. Pour que tu te poses des questions.
- Tu penses que je devrais continuer à l'ignorer ?
- Je ne pense rien, c'est à toi de voir. Les gens ont tendance à penser que le temps peut permettre de recoller les morceaux, mais ce n'est pas toujours le cas.
Et Joy mieux que quiconque sait de quoi elle parle. Je n'ai pas revu Alex depuis Noël et il est évident que le temps qui passe apaise ma rancœur envers lui. Les mots qu'il m'a adressés cette nuit m'ont touchée, mais aussi alertée. Je le connais et je sais qu'il n'est pas du genre à se plaindre. S'il l'a fait, c'est qu'il y a une bonne raison et je dois vraiment réfléchir à la pertinence de mon silence.
Nos pas nous ont guidés jusqu'au fameux square autour duquel le loft en question se trouve. Munies de l'adresse exacte, nous trouvons rapidement l'endroit, d'autant plus que l'agent immobilier nous accueille avec de grands gestes pour attirer notre attention.
- J'en connais un qui a hâte de vous voir signer un chèque. Me glisse Joy avant que nous n'arrivions à sa hauteur.
Il a dû m'en faire visiter des dizaines. Il doit vraiment penser que je suis difficile.
Après des salutations d'usage, l'homme nous conduit en direction d'un porche descendant sur une petite cour. Il s'agit d'ailleurs du seul immeuble qui diffère un peu des autres dans cette rue.
- Nous sommes ici dans la partie privée qui relie la rue à l'entrée de l'appartement. Nous explique-t-il. Ce qui est pratique, c'est qu'il est tout à fait possible d'y ajouter un portail afin de clôturer totalement la vue et ainsi permettre à votre époux de faire ses allées et venues en toute tranquillité.
Joy émet un gloussement en l'entendant qualifier Louis de la sorte. Il est vrai qu'au bout de la cinquième fois, j'ai fini par cesser de le reprendre à ce sujet. Mon amie se racle la gorge et s'excuse. Le type nous fait alors pénétrer dans une sorte de sas à ciel ouvert donnant sur une entrée totalement vitrée. Le petit jardin japonais aménagé ici offre un sentiment de dépaysement et une fontaine qui émet un bruit léger d'eau vient accentuer cette impression. Je tente de décrypter l'opinion de Joy dans son regard, mais elle ne laisse rien transparaître, jusqu'à ce qu'elle fasse une déclaration qui me laisse sans voix.
- Les gens trouvent ça rassurant, moi, ça m'a toujours fait flipper. Nous dit-elle en pointant du doigt une statue de Bouddha dans un coin.
Le type se perd dans ses mots en voulant lui expliquer que les propriétaires actuels repartiront avec leur décoration et tremble au moment de trouver la clé qui ouvre la propriété. J'adresse un coup de coude à ma meilleure amie et capte son attention pour éviter que le pauvre homme ne m'entende.
- Tu n'es pas sérieuse ?
- Quoi ? Répond-t-elle en haussant les épaules. Si on ne peut plus dire ce que l'on pense...
Je me focalise sur la visite et tente d'occulter son humeur médiocre. De dehors, on aperçoit déjà un intérieur moderne et de très bon goût.
L'agent ouvre la porte et nous incite à entrer. Les vastes fenêtres de l'entrée communiquent avec leurs jumelles à l'opposé du salon, donnant sur un autre espace de verdure dans le même esprit zen.
- Nous voici directement dans la pièce de vie. La lumière a l'avantage de passer par les deux points les plus ensoleillés matin et soir, ce qui fait que l'on ne manque jamais de clarté.
Le sol est recouvert d'un carrelage gris anthracite rappelant un peu l'irrégularité de l'ardoise, mais cela ne refroidit pourtant pas la pièce, meublée avec un mobilier en bois qualitatif. On sent que les personnes qui vivent ici aiment les espaces épurés et neutres, ce qui correspond typiquement à la représentation d'une habitation moderne. Je ne saurais dire si j'aime ou non, mais je dois avouer que tout est vraiment irréprochable.
La cuisine est mise en valeur par de sublimes carreaux de ciment concernant lesquels Joy a une question.
- Ce sont des vrais ?
- Oui, ils sont authentiques.
- On ne dirait pas. Rétorque-t-elle d'une moue pincée.
J'ai l'impression qu'elle tente par tous les moyens de ruiner cette visite, ou de faire fuir le professionnel de l'immobilier. Il ne relève d'ailleurs pas sa remarque et attire notre attention en direction de la terrasse.
Joy déplore rapidement l'absence de piscine, mais l'agent immobilier lui répond de ne pas se fier aux apparences. En effet, muni d'une télécommande, il actionne l'ouverture de la terrasse qui laisse alors place à une petite étendue d'eau. Peu impressionnée, mon amie n'ajoute rien concernant cette prouesse technologique, alors que moi je suis clairement séduite par le concept.
- Ce qu'il oublie de te dire, c'est que l'exposition n'est pas idéale. Me confie-t-elle à voix basse. Vous aurez du soleil le matin, mais plus rien passé midi. C'est dommage.
Je dois avouer qu'elle marque un point.
L'appartement se décline sur deux niveaux, l'étage étant réservé à la partie nuit. Joy souligne ne se sentir bien dans aucune des pièces proposées, déstabilisant totalement le pauvre agent. Je découvre en même temps que lui qu'elle est tout à fait sérieuse en déclarant vouloir une chambre à elle dans notre futur logement. Il s'en réfère d'ailleurs immédiatement à moi concernant ce léger détail.
- C'est une condition dont vous aviez omis de me parler.
- Ne vous inquiétez pas, ça ne change strictement rien au fait qu'il nous faille quatre chambres, pas plus.
- Oui, ils ne comptent pas faire une équipe de foot. Ajoute Joy en lui faisant un clin d'œil. Au grand dam de Monsieur...
En toute discrétion, je lui tire la langue.
- Bien, vous me rassurez. Nous dit-il en avançant vers les parties non visitées. Nous pouvons poursuivre avec la deuxième salle de bains et nous terminerons avec le balcon qui surplombe le quartier.
J'accapare une nouvelle fois Joy pour qu'elle se tienne à carreau pour les prochaines minutes.
- Calme-toi un petit peu, tu veux ? S'il nous lâche, on va se tailler une réputation horrible et personne ne nous trouvera jamais un endroit où vivre.
Son sourire vaut toutes les réponses.
- Joy... Ne me rends pas la tâche encore plus difficile qu'elle ne l'est déjà.
Je me sens aussitôt honteuse envers Louis d'avoir dit une telle chose. Il n'y a absolument rien de difficile dans cette étape de notre vie de couple, mais Joy ne cesse de me renvoyer une culpabilité qui commence à me peser.
Elle passe son bras autour de mes épaules.
- Je vais m'y faire, Miller. Il faut juste que je me fasse à l'idée que l'on va bientôt couper le cordon toi et moi.
- Et j'imagine que t'octroyer une chambre chez nous sera la meilleure façon de le faire en douceur...
- Tu as tout compris.
Mon déménagement ne changera pas grand-chose à notre quotidien. Je continuerai à la voir aussi souvent que maintenant, à la différence que notre appartement ne sera plus le mien.
- Dans le pire des cas, si vous avez qu'une grande chambre, je ne prends pas beaucoup de place. Ajoute Joy en haussant les sourcils.
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Cela fait plus de quinze jours que les One Direction écument le territoire américain. Les appeler par leur nom de groupe est d'ailleurs toujours aussi étrange pour moi, comme si j'avais du mal à réaliser que je partage ma vie avec l'un d'entre eux. Leur tournée aux États-Unis est si intensive qu'ils n'ont pas suffisamment de repos pour pouvoir rentrer sur Londres. Le décalage horaire ne leur serait d'aucune aide.
Avec Joy, nous avons repris la routine qui nous convient et avons cessé d'entreprendre de visiter des appartements ensemble pour le bien-être de notre amitié. D'ailleurs, je pense laisser tout cela un peu en stand-by le temps que Louis revienne. Je trouve beaucoup plus logique que nous ayons tous les deux un coup de cœur pour le même endroit plutôt que de lui imposer un choix.
La vie de célibataire, ça va un temps, mais maintenant, j'ai vraiment hâte qu'il rentre. Plus que quarante-huit heures. Ces deux semaines d'abstinence commencent également à avoir raison de ma faculté à ne pas penser constamment au sexe. Oui, je le dis franchement, je suis en manque. Je crois que je me suis fait la réflexion au moment où mes yeux n'ont cessé de dériver sur les attributs de mon cher binôme de travail. J'ai bien cru qu'Andy allait finir par le remarquer et j'ai dû prendre de la distance. Seulement, je n'ai absolument pas cessé d'y penser puisque Louis et moi avons échangé des messages relativement explicites sur ce que nous aimerions nous faire l'un l'autre. Résultat, je suis encore plus excitée et frustrée à la fois. Pour la peine, j'ai même fini par accepter qu'il me donne un coup de fil ce soir afin d'avoir recours à une pratique bien connue des couples qui ne se voient pas souvent, à savoir, le sexe par téléphone. Je ris intérieurement rien que d'y penser, car je sais que je n'arriverai pas à me laisser aller totalement. Louis s'est donné le défi de parvenir à ses fins. Je n'y crois pas vraiment, mais ça a le don d'attiser ma curiosité.
Je termine comme toujours avec une bonne demi-heure de retard sur le planning habituel. Je fais un léger détour par le bureau d'Andy pour le saluer, mais ne m'y attarde pas. Il va vraiment finir par croire qu'il me trouble. Le parking souterrain est pratiquement vide à cette heure-ci. Tout en marchant, je tape un message pour prévenir Louis que je prends la route.
Moi, 19:12 : « Je file. Je t'appelle en arrivant... J'ai hâte. »
Louis, 19:13 : « Dépêche-toi trésor. Je bande déjà. »
Ah oui, carrément. Il me tarde de mettre la clim. Je jette mon sac sur le siège passager et mets rapidement le contact pour rentrer -je ne raffole pas des sous-sols- mais ma voiture se met à toussoter. Elle m'a déjà fait le coup ce matin. Je coupe le contact et lui laisse un peu plus de temps pour chauffer et relance le moteur, mais c'est encore pire, celui-ci émet un bruit sourd et lâche totalement. J'ai beau réitérer, il n'y a rien à faire, ma Mini ne coopère plus. Et merde. Je reste un moment dans l'habitacle pour chercher une solution. Appeler une dépanneuse en fin de journée va me coûter un bras et ruiner ma soirée. Je vais plutôt la laisser ici et commander un taxi pour rentrer. Évidemment, le sous-sol est le seul endroit où le réseau est inexistant. Je quitte mon véhicule en restant sur mes gardes et presse le pas pour rejoindre la rue.
Mon application me donne dix minutes d'attente. L'endroit n'est pas le plus desservi et avec les bouchons, les taxis peinent à se frayer un chemin plus rapidement. Une grosse berline allemande entre dans le parking. Je comprends qu'il s'agit du chauffeur privé du patron lorsque j'aperçois celui-ci filer à l'intérieur. Je crois bien qu'il m'a vue.
La voiture remonte l'allée et j'entends ses freins crisser à ma hauteur. Je garde le regard rivé dans la direction opposée jusqu'à ce que je redoutais n'aie lieu.
- Je vous raccompagne ?
Je feins l'effet de surprise en me retournant vivement. Magnus a baissé sa vitre.
- Oh, euh... Non, ça ira, mon taxi est proche.
- Vous êtes sûre ? Ça ne me dérange vraiment pas. Ça vous fera économiser de l'argent.
Je reste hébétée et regarde une nouvelle fois mon téléphone. Le taxi qui est supposé arriver semble à l'arrêt. Mon patron sort de sa voiture et me tient la portière. Je me retrouve dans l'incapacité de refuser.
- Montez. Insiste-t-il de nouveau.
J'annule la course que j'avais commandée et grimpe à l'arrière de la luxueuse Mercedes. Magnus se rassied sur la place de gauche après mon passage.
- Merci, c'est très gentil de votre part.
- Ce n'est rien. Répond-t-il d'une voix grave. Cela ne nous imposera qu'un léger détour. Vous vivez bien à Paddington ?
- Oui, tout à fait.
Comment sait-il où j'habite ? Il en connaît peut-être plus sur moi que je ne le pense.
- Donnez votre adresse exacte à Gavin. Me dit-il en tapotant brièvement l'épaule de son chauffeur qui attend ma réponse pour redémarrer.
- 48 St. Michael's street.
L'homme reste silencieux et entre simplement l'indication que je lui ai fournie dans son GPS et reprend la circulation. Voyant que mon patron a davantage le nez sur son téléphone, je me résous à en faire de même sans craindre de lui manquer de respect.
Au bout d'un certain temps, je constate que je suis totalement crispée sur mon siège, comme si le moindre geste risquait d'attirer son attention sur moi. Ce n'est pas normal de se sentir si mal à l'aise face à son supérieur, mais au-delà de la hiérarchie qui nous sépare, il y a quelque chose chez lui qui impose de s'écraser.
Sa lourde voix me coupe dans mes pensées et je tente de masquer mon sursaut.
- Vous pourriez prétendre à un quartier bien plus chic. D'ailleurs, ce n'est pas dans vos projets ? J'ai cru comprendre que vous alliez emménager avec Monsieur le chanteur.
À l'entente de sa tirade, je pivote vivement le regard dans sa direction pour lui faire comprendre que le dédain que je relève dans ses paroles ne me plaît pas.
- C'est exact, mais il me semble n'en avoir jamais parlé avec personne au boulot.
- Vous savez, les choses se savent vite chez nous.
Je tente de réfléchir, mais je ne vois vraiment pas d'où ça a pu fuiter. Dans l'angoisse, je scrute le GPS du chauffeur pour voir où nous en sommes. Je n'ai qu'une hâte, c'est de quitter cette voiture. Heureusement, la circulation se dégage et nous ne sommes plus très loin.
Pour lui faire comprendre que je ne souhaite pas poursuivre cette discussion, je me mure dans le silence et rallume mon portable. Cinq minutes après, l'arrêt salvateur arrive enfin. Je sors mes lunettes de soleil dans le but d'imposer une distance. Magnus se détache et sort immédiatement, mais je lui coupe l'herbe sous le pied en ouvrant ma portière avant qu'il ne le fasse.
Avec la chaleur estivale, la rue est animée et m'apporte un sentiment de réconfort.
- Si vous avez besoin d'un chauffeur demain matin, n'hésitez pas. Se propose-t-il.
Je pensais qu'il s'arrêterait là, jusqu'à ce que je perçoive sa main glisser le long de mon dos. Ses doigts ont le temps de s'arrêter à la courbe de mes fesses avant que je ne m'échappe de ce contact déplacé.
- Je pense que « Monsieur le chanteur » trouvera une solution.
- Comme vous voudrez.
Je l'entends de loin me souhaiter une bonne soirée, mais j'ai déjà filé jusqu'aux grilles de ma résidence. Un peu sonnée par ce qu'il vient de se passer, je reste un petit moment prostrée à ressasser la scène dans ma tête. C'était quoi ça ?
Lorsque j'atterris un peu, les sons qui m'entourent finissent par m'englober et me rassurer, jusqu'à ce que le bruit familier du focus d'un appareil photo ne me fasse me retourner. À plusieurs mètres de là, je remarque un objectif braqué sur moi.
- Il ne manquait plus que ça.
Je souligne mon agacement en fixant le paparazzi, avant de filer à vive allure. Ça fait des lustres qu'ils ne sont pas venus dans le quartier. Pourquoi aujourd'hui ? Mon cœur bat à tout rompre. J'ai l'impression de fuir un malaise qui me colle à la peau et l'ambiance estivale ne m'est plus d'aucun soutien.
Une fois passée la porte, je n'attends pas une seconde de plus et lance un appel en direction de Los Angeles. Louis décroche immédiatement.
- Enfin... Je suis plus que prêt. Me dit-il d'emblée d'une voix chargée de désir.
Essoufflée, je réalise que je ne sais même pas par où commencer.
- Il vient de se passer un truc vraiment bizarre...
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