Chapitre 19

♫ « Piece Of My Heart » - Janis Joplin ♫


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Joy
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C'est lorsque les dates que l'on redoutait approchent que l'on prend conscience à quel point le temps se joue de nous. Les dernières semaines se sont écoulées plus vite que je ne l'aurais souhaité. À l'issue du week-end, les quatre garçons autour desquels nos vies se polarisent désormais vont mettre les voiles pour assurer une tournée mondiale dont je n'avais pas réalisé l'impact qu'elle pouvait avoir sur nous jusqu'à présent.

La mine déconfite de ma meilleure amie à l'approche de cette date est sur le point de me faire regretter de l'avoir monopolisée en ce samedi après-midi, alors qu'elle meurt certainement d'envie de passer les dernières heures avec son cher et tendre Louis. Seulement, je ne pense pas que le voir s'affairer à empiler ses affaires lui soit d'une grande aide. Elle est bien mieux ici avec Gemma et moi.

- Quelle couleur pour sa bougie ? Demande Ava en fouillant dans le rayon à la recherche de l'intégralité des propositions pour le chiffre un.

Je lève les yeux au ciel face à ce détail totalement futile à mon goût.

- Prends la jaune. Lui répond la sœur de Harry après une rapide analyse de ce qu'elle lui présente sous les yeux.

Gemma esquisse un rictus en me regardant faire ma rabat-joie, faisant ressortir la même fossette que celle de son frère. Elle commence à connaître ma personnalité et préfère en rire qu'en être offusquée.

Notre chasse aux niaiseries reprend de plus belle lorsque nous arrivons au rayon des décorations de table. Dans quoi est-ce que je me suis embarquée ? Je n'en reviens pas moi-même. Déjà que faire les courses, ce n'est pas mon fort, mais arpenter un supermarché bondé de monde pour l'anniversaire d'un mioche, encore moins. Noa est sur le point de fêter sa première année sur Terre et se contrefiche totalement de l'effervescence que crée cet événement. On fait toujours tout un plat d'un premier anniversaire, alors que l'on sait parfaitement que le gamin n'en gardera pas le moindre souvenir.

- Dommage que tu ne sois pas une fille. Déplore Gemma en embrassant le crâne de son fils, face à un ensemble décoratif représentant des licornes sur un fond arc-en-ciel.

J'attrape un paquet de serviettes en papier de la collection en question et le mets dans le caddie.

- Fais-toi plaisir. Rappelle-toi qu'il t'a explosé le vagin il y a un an. Tu as le droit de fêter ça autant que lui, si ce n'est plus.

Ava affiche un air choqué à l'évocation de l'accouchement de notre amie. Je la saisis par les épaules et continue d'avancer.

- Navrée de te l'apprendre, mais... c'est ce qui te pend au nez plus vite que tu ne le penses !

- Non ! Me répond-t-elle vivement. Ce n'est pas dans nos projets.

- Un mariage, un emménagement... Énumère Gemma en se joignant au sujet. Votre relation devient plus que sérieuse. Je pense que Joy n'a pas tout à fait tort.

Je grimace à mon tour. En fait, je refuse qu'un nouveau rejeton vienne perturber nos vies et encore moins celui d'Ava et Louis. Il risquerait d'hériter des plus mauvais côtés des deux. La maniaquerie maladive de sa mère associée au sale caractère de son père. Je n'ose même pas imaginer le mélange. Par contre, j'avoue qu'il serait vraiment canon.

Ava fronce les sourcils en me voyant analyser les traits de son visage pour les associer mentalement à ceux de son chéri.

- Qu'est-ce que tu fais ? Finit-elle par me demander.

- Rien, rien.

Verdict : Ce gosse sera une vraie bombe. Cela dit, Noa est plutôt pas mal dans son genre et commence enfin à ressembler à un humain. Sa tête est de moins en moins disproportionnée par rapport à son corps et il a quelque chose d'assez attachant. Je vais cesser de me perdre sur le sujet sinon je sens qu'on va me le coller dans les bras en moins de deux.

- Votre recherche d'appartements avance bien ? Demande Gemma à ma meilleure amie.

Ava lève les épaules.

- Ça va. J'ai juste un peu le sentiment d'effectuer les recherches seule, et ça ne va pas s'arranger dans les semaines à venir.

- C'est un truc de mecs, tu sais. Lui dit-elle pour la rassurer. Ils préfèrent déléguer ce genre de choses. Profite et choisis quelque chose qui te plaît.

- Et n'oublie pas que je serai là pour t'aider dans ton choix.

Ava me rend mon sourire.

- Je suis relativement surprise que mon frère n'en ait pas fait de même avec toi. Me confie Gemma. Ça ne lui ressemble pas.

Elle plaisante j'espère ? Encore heureux qu'il ne l'ait pas fait. Harry sait que je tiens bien trop à mon indépendance pour me faire une telle proposition. On est bien mieux chacun chez soi avec la possibilité de passer du temps chez l'autre quand l'envie nous prend. Tout est parfaitement clair dans nos têtes à ce sujet.

- Vous allez faire comment pour le chat ? Ajoute-t-elle, soucieuse de connaître les détails techniques que nous allons mettre en œuvre.

- Harry me laisse un double de ses clés et je compte amener Edgar à Paddington une bonne partie du temps.

Ava me fait pivoter vers elle.

- On n'a jamais évoqué ce détail ! S'écrie-t-elle avec des yeux paniqués. Dois-je te rappeler l'état dans lequel il a mis l'appartement de Louis quand vous n'étiez pas là ?

- Relaxe ! Vous n'avez pas su le dompter comme il faut. Il va bien se tenir avec moi.

- Tu as intérêt à avoir raison. Rétorque-t-elle en soupirant.

- Ne m'engueule pas ! Souviens-toi que la principale responsable de la présence de cet animal est ici présente et n'aimera sans doute pas savoir qu'il est si encombrant !

Gemma esquisse un sourire exagéré et reprend le fil de ses recherches pour esquiver le sujet.

Une fois à la caisse, la facture est extrêmement salée et Noa n'a rien trouvé de mieux que de commencer à pousser sur ses cordes vocales pour bien nous faire remarquer. Je prends la directive du rangement des courses pour ne pas avoir à calmer son caprice.

Nous prenons la direction de la sortie en abordant le sujet qui commence à me préoccuper de façon régulière, à savoir, le contenu de mon compte en banque qui s'amoindrit à vue d'œil et ma future recherche d'emploi.

- Je ne suis pas sûre de pouvoir retravailler à l'hôpital pour le moment.

- Trouve-toi un petit job en attendant. Suggère Gemma.

- C'est ce que j'envisage. J'ai bossé presque un an dans un Starbuck's avant de faire mes études d'infirmière. Ça me plairait bien de retrouver quelque chose dans ce genre.

- Ils recherchent peut-être du monde chez Muriel's Kitchen. Me dit Ava. Je pourrais en toucher un mot à une ancienne collègue de là-bas.

- Pourquoi pas. Par contre, vous n'êtes pas cool de prendre cette direction pour rejoindre le parking. Je suis fauchée et vous allez me faire passer devant...

Je coupe ma tirade par moi-même. En un simple coup d'œil, l'hystérie me gagne.

- Oh mon dieu !

Je m'avance d'un pas affirmé en direction de l'entrée d'un magasin Sephora dont le rayon mis en avant sur la devanture me fait de l'œil.

- Ils ont la nouvelle palette Huda Beauty !

J'abandonne les filles et rejoins l'objet de mon désir pour enfin admirer de mes propres yeux les fards que j'avais repérés il y a plusieurs semaines sur le compte Instagram de la marque de cosmétique. À ma droite, une nana semble aussi émerveillée que moi. Je me lance la première et teste du bout de l'index la couleur d'un sublime fard irisé dans les tons brique.

- Oh bordel ! Regardez ça !

Je l'étale sur le dessus de ma main et l'avance sous le nez de la jeune femme.

- Bluffant. Explose-t-elle à son tour, envoûtée par cette scintillante explosion visuelle.

- C'est grave dans la tendance ! Matez-moi ces pigments à en faire pâlir de jalousie une drag-queen !

Elle se met à rire tandis que je continue la démonstration avec les autres couleurs. Fascinée, elle finit par saisir une des palettes pour se la payer et me remercie de mes conseils. Elle repart souriante, avec ma convoitise entre les mains.

La voix de Gemma me fait me retourner.

- Ne cherche plus. Me dit-elle. Tu tiens ton prochain job.

- Comment ça ?

- Tu te rends compte de ce que tu viens de faire ? Ajoute-t-elle.

J'ouvre grand mes yeux et les fais naviguer de gauche à droite.

- Joy, tu as tout du profil d'une "influenceuse". Me dit-elle finalement, comme si c'était évident pour tout le monde. Il faut absolument que tu lances un blog ou une chaîne YouTube pour conseiller les jeunes femmes. Ton franc parlé ferait un tabac, j'en suis sûre.

- Ah bon, tu crois ?

- Absolument ! Garde cette idée dans un coin de ta tête. Je suis certaine qu'il y a un filon à explorer.

Je ne me suis jamais considérée comme un modèle à suivre. J'ai déjà du mal à m'accepter, alors faire part de ma façon de voir les choses à des jeunes femmes ne m'a jamais traversé l'esprit. J'avoue cependant qu'avoir une armée de clones Benett derrière moi m'amuserait beaucoup.

- Allez, on décolle. Nous rappelle à l'ordre Ava qui est parvenu à venir à bout des pleurs de Noa. Il pèse une tonne dans mes bras.

Gemma la délivre et nous repartons de la galerie commerciale pour entamer les préparatifs de la soirée à venir. Plus que deux jours et il s'en va. L'énumération par la pensée de l'organisation des prochaines heures me rassure. Autant qu'elle me perturbe.

_____

Harry et moi ne sommes pas du genre à nous coucher si tôt habituellement, à tel point qu'il fait encore jour lorsque nous rejoignons le premier étage. Le week-end a été épuisant et je crois que nous avons tous les deux besoin de nous retrouver au calme pour savourer les derniers instants avant son départ. J'ai vraiment beaucoup de mal à me dire que je vais devoir patienter plus de quinze jours avant qu'il ne revienne à Londres.

Je m'avance en direction de la salle de bains. Il reste dans mon dos, les mains dans les poches de son jean noir. Un étrange sourire illumine son regard. Je comprends rapidement d'où lui vient cette gaieté lorsque mes yeux se posent sur un objet inconnu sur le rebord du meuble vasque.

- Qu'est-ce que c'est que ça ?

Harry lève innocemment les épaules et ne répond pas à ma question.

- Pourquoi il y a un sac Sephora à côté de ma trousse de toilette ?

- Je n'en ai aucune idée. Répond-t-il, toujours avec son excès de bonne humeur.

Gemma. Je me précipite vers le paquet rouge et noir et en ressors la sublime palette Huda que j'avais zyeuté hier en présence de sa sœur. Un petit cri d'excitation m'échappe.

- Tu as conscience que je vais être méga bonne avec ça sur les yeux et que tu ne seras même pas là pour en profiter ?

- Je te préfère sans rien, tu le sais.

J'inspire un grand coup et me fige aussitôt. Il me regarde de bas en haut en prenant tout son temps. Sous ce regard admiratif, n'importe qui se sentirait la plus belle femme du monde. Mon corps en vibre tout entier.

- Prends ton temps. Finit-il par me dire en me faisant signe qu'il va attendre dans la chambre.

J'espère qu'il ne se sera pas endormi. J'aspire à mieux pour notre dernière soirée ensemble.

Lorsque je sors de la douche, Harry est allongé sur le lit. À plat ventre, il regarde son téléphone qu'il lâche aussitôt lorsque j'éteins la lumière de la salle de bains. Il tourne la tête pour me regarder. Ses yeux me dévorent une nouvelle fois durant tout mon cheminement jusqu'à lui. Je me glisse sous la couette, tandis qu'il reste prostré au-dessus. Il finit par tirer sur le drap pour vérifier une théorie qui semble le titiller.

- C'est nouveau ça, non ? Me demande-t-il en pointant du doigt mon nouvel ensemble en tissu satiné couleur rose poudré.

- On ne peut rien te cacher à toi.

Il esquisse un sourire en coin qui fait ressortir ses fossettes et renifle en plissant le nez. Je fonds quand il fait ça. À cet instant précis, je sais que je suis foutue et ses yeux qui lisent en moi le savent aussi.

Harry continue de me fixer intensément un long moment. Ce duel de regards me transperce de part en part et mon cœur s'emballe dans ma poitrine sans me demander mon avis.

- Tu comptes rester sur les draps encore longtemps ?

- Oh non, ne t'en fais pas. J'ai d'autres projets en tête.

Immédiatement, il se hisse sur ses jambes et retire un à un ses vêtements jusqu'à ne garder que son boxer. Superflu, mon cher. Tu peux l'enlever sur-le-champ. Je déglutis péniblement à cause de mes pensées. Il a le corps le plus parfait que je n'ai jamais vu. Joy, ferme la bouche, c'est indécent.

Fier de son effet, la couette vole sous ses mains et Harry vient se poster au-dessus de moi, provoquant un éclat de rire que je ne contrôle pas. Ses coudes de part en part de mon visage, il ne s'appuie que très légèrement contre mon corps, mais je sens déjà que cette proximité l'excite au plus haut point. Son haleine me caresse le visage. Nous respirons le même air. La pointe de son nez vient frôler le mien. Je me mords la lèvre pour résister à l'envie de fondre sur lui. Il m'observe encore, comme s'il voulait mémoriser chaque trait qui me caractérise.

- Tu es bien étrange ce soir.

Il sourit une nouvelle fois. Pour faire taire mes sarcasmes, il pose ses lèvres sur les miennes et m'embrasse avec tendresse. Ce n'est pas trop tôt. Très vite, notre baiser se fait de plus en plus vif et son étreinte se rythme de lents mouvements contre mon bas-ventre. Je tremble littéralement d'excitation.

Harry relève la tête et met fin subitement fin à ce rapprochement.

- Chaton, je vais te prendre. Confesse-t-il, le regard chargé d'envie. Là, tout de suite.

Sa voix est rauque et propulse mon désir à son paroxysme. Je le laisse prendre les commandes en lâchant ses épaules. Mes mains viennent se poser sur les coussins de chaque côté de ma tête, lui laissant la possibilité de faire ce qu'il veut de moi. Conquis, il prend l'initiative de retirer une à une les bretelles qui retiennent le haut de mon ensemble. La lingerie glisse sous ses doigts, révélant ma poitrine à ses yeux affamés. Je n'en reviens toujours pas de l'effet que cette vision procure en lui, n'ayant jamais été flattée par mon manque de formes à cet endroit de mon anatomie.

Harry se met à caresser mes seins. Je perds la tête. Sa bouche les prend d'assaut, soulevant chez moi des gémissements de pur plaisir. Il poursuit ensuite sa descente langoureusement, créant un sillon enflammé jusqu'à l'élastique de mon short. Mon corps se crispe à nouveau d'excitation, avide des sensations provoquées par cette langue exploratrice. Des frissons me recouvrent la peau, créant un contraste saisissant avec la chaleur de son souffle. Une de ses mains ne quitte pas mes seins, tandis que l'autre fait glisser le dernier vêtement qu'il me reste jusqu'à mes chevilles. Quelle dextérité.

Il écarte mes jambes -qui ne demandent que ça- et vient se caler entre elles. Une violente décharge électrique me parcourt le corps lorsque sa langue part explorer mon intimité. Ses mains sont désormais agrippées à mes hanches. Ainsi, il me sent tressaillir un peu plus à chacune de ses caresses. Il me cajole. Me lape. Ses yeux se relèvent et s'ancrent aux miens. Le regarder me procurer un tel plaisir est d'un érotisme incroyable auquel je ne me suis pas préparée. Au creux de mon ventre se noue un ressort qui actionne les mouvements de mon bassin en harmonie avec sa langue. Harry enfouit un peu plus son visage entre mes cuisses. Je n'en peux plus. Le sentir. Le voir. L'entendre gémir lui aussi. Je suis emprise à une overdose de sensations. Tout mon corps se tend et mes yeux se ferment. Vague après vague, l'orgasme déferle en moi. Il me possède tout entière.

Lorsque mes sens s'apaisent enfin, je rouvre les yeux et le regarde se lécher les lèvres. Harry remonte lentement vers moi et me glisse quelques mots à l'oreille.

- Tu n'as aucune idée à quel point tu es délicieuse.

Le tissu de son boxer est tendu par son érection massive. Je ne tiens plus et le lui fais savoir par des mots simples et directifs.

- Viens vite.

Il me fixe, les yeux grands ouverts. S'il ne me libère pas très vite, je prends les commandes et grimpe sur lui. Son sous-vêtement se retrouve enfin par terre et la seule vue de ce que j'ai devant moi suffirait à me faire jouir une nouvelle fois.

Harry ne perd pas une seconde et tend la main vers sa table de chevet pour en retirer un petit carré. Il arrache l'emballage et place le préservatif sur son sexe. J'enroule mes jambes autour de sa taille en m'agrippant à ses cheveux et plonge mon regard dans le sien. Je veux voir ses yeux verts lorsqu'il se glisse en moi.

- À mon retour de tournée, je veux qu'on arrête d'en utiliser. M'avoue-t-il en indiquant le papier métallique délaissé sur le lit. Je ne veux plus aucune barrière entre toi et moi.

Une explosion de frissons me surprend suite à ses mots qui sonnent davantage comme un réel engagement plutôt qu'une simple précaution dont il souhaite se débarrasser. J'ai le sentiment qu'il ne veut pas uniquement parler de préservatif, qu'il veut que l'on avance dans notre relation, mais qu'il craint de me brusquer. Je lui souris et approche ma bouche de son oreille.

- J'ai déjà hâte d'y être.

L'idée de découvrir de nouvelles sensations à son retour me met déjà dans tous mes états. Son regard est sombre et passionné. À son expression, je réalise que cette nuit ne fait que commencer. Nous sommes si proches qu'il lui suffit d'un simple mouvement de hanche pour se lover en moi. D'une poussée, Harry me pénètre lentement, me coupant littéralement le souffle. Ce moment délicieux me fait perdre pied à chaque fois. Celui où je me dis que je suis entièrement à lui.

Nos corps fusionnent. Nos cœurs aussi. Il y a tout juste un an, je goûtais pour la première fois au plaisir de sa peau contre la mienne. À cette période-là, rien ne nous prédestinait à être ce que nous sommes devenus l'un pour l'autre. Je ne savais pratiquement rien de lui, mis à part que nous nous emboîtions à merveille. Un simple rapprochement avec un premier baiser mémorable a marqué le début de notre relation lors d'une contre-soirée où nous ne pouvions être que deux. L'attirance que nous avions était électrique. Magnétique. Je ressentais ce besoin viscéral de le posséder. Qu'il me possède en retour. Le tout sans aucune attache affective.

Ma mémoire divague au rythme de ses coups de reins. J'ai encore des souvenirs intacts de ce qu'il s'est passé sur sa table ce jour-là, quelques minutes seulement après m'être présentée à sa porte. Une onde de chaleur remonte le long de ma nuque au fur et à mesure que les traces de cette nuit voluptueuse me parviennent. C'était tellement fou, passionné et charnel que je serais incapable de donner un chiffre si on me demandait combien d'orgasmes et de minutes de plaisir il m'a offerts. C'est un peu triste quand on y pense de se dire que nous n'aurons plus jamais l'occasion de revivre cette première fois. Ce moment unique où l'on se découvre et s'observe. Mais à bien y réfléchir, je crois que je revis cette même frénésie à chaque fois.

Les yeux de l'homme qui est en moi ne me quittent pas un seul instant. Hypnotisée, je savoure les sensations qu'il me prodigue en me perdant dans son regard. Harry se redresse et accompagne mon dos avec ses mains pour que ma poitrine ne le quitte pas. Nos lèvres se scellent une nouvelle fois et les lents mouvements de nos bassins sont tout simplement divins. Cette position où je me retrouve assise face à lui offre une tout autre dimension au plaisir qui me consume. Son besoin de proximité n'a jamais été aussi présent que ce soir, propulsant nos ébats dans un romantisme assumé.

Harry quitte ma bouche un bref instant.

- Joy, je...

Il interrompt nos mouvements. Les mots semblent se cramponner à ses lèvres. Tu quoi ?

- Tu vas tellement me manquer. Ajoute-t-il finalement.

J'étouffe sa confession d'un baiser. Je refuse de gâcher notre instant en pensant une nouvelle fois à son départ, mais j'ai comme le sentiment que ce ne sont pas ces mots qui ont failli lui échapper il y a quelques secondes. Que lui aussi se retient. Comme moi je me retiens. Plus qu'à n'importe quel autre moment, je prends conscience de l'ampleur de ses sentiments et des miens au passage. Est-ce que c'est ça faire l'amour avec l'homme qu'on aime ?

La nuit commence à tomber et nos ombres dansent désormais sur le mur, projetées à la simple lueur de l'éclairage urbain. J'aimerais que cet instant dure encore de longues minutes, mais je ressens tellement de plaisir que je sais que la fin est proche. Harry place sa main entre nous et entreprend de me caresser avant d'accélérer le mouvement qui va nous propulser vers l'orgasme. Nos gémissements se font écho. J'accompagne le balancement de ses hanches. Mes jambes se resserrent autour de sa taille, le poussant à me pénétrer encore plus loin, encore plus fort. La chaleur qui se déploie tandis qu'il comprend toutes mes envies me fait perdre la tête. Dans un énième coup de reins, j'explose de plaisir. Harry se délivre lui aussi et s'agrippe fortement à moi.

Sa tête est calée contre ma poitrine. Nos souffles saccadés s'apaisent avec l'inertie. Je finis par me laisser tomber en arrière. Il se retire, m'extirpant un dernier soupir. Je me blottis contre lui quand il se rallonge. Ses bras m'entourent.

Le temps est comme suspendu et le silence a quelque chose d'apaisant. Ni lui ni moi ne souhaitons quitter cette bulle rien qu'à nous. Putain. Je suis dingue de lui. Je suis folle amoureuse. Je l'aime. Je l'aime depuis des mois. Et demain, il s'en va. Il part pendant quinze jours et j'ai bien peur de ne pas pouvoir faire sans lui.

Ses yeux fixent le plafond. Il semble pensif lui aussi. J'ignore s'il réalise que c'est en quelque sorte notre premier sexanniversaire que nous célébrons, mais Harry est du genre à vouloir commémorer les dates importantes. C'est son côté sentimental et romantique.

Un miaulement lointain me fait soudainement relever la tête. Je me redresse sur mes coudes.

- Ne me dis pas qu'il est encore dehors à cette heure-ci ?!

Harry se met à rire.

- Détends-toi. Il fait sa vie.

- Il fait sa vie ? Mais, c'est un bébé !

Les plaintes s'intensifient et je réalise qu'Edgar est en réalité à la fenêtre de la chambre. Je sors du lit en vitesse pour aller lui ouvrir. Il se faufile entre mes jambes en ronronnant. Harry se lève à son tour et tire sur le rideau.

- Ne refais jamais ça. Me dit-il autoritairement.

Je fronce les sourcils, ne voyant pas très bien où il veut en venir.

- Tu es nue. Ajoute-t-il en me regardant.

- Oui, et ?

- À cette heure-ci, il n'y a plus de vigile devant. Imagine si un photographe est à l'affût de l'autre côté de la rue.

Son attention me touche. Je sais que je ne suis pas très précautionneuse à ce sujet et il me répète sans cesse qu'il faut que je sois sur mes gardes concernant les paparazzis qui gravitent autour de nous. Harry ne supporte pas l'idée que notre vie soit dévoilée, que les gens cherchent à s'immiscer dans notre quotidien. Possèdent notre intimité.

- Je vais suivre de près les réseaux sociaux dans les jours à venir.

- Pourquoi dis-tu ça ?

- Juste pour savoir ce que vous ferez en Asie.

- On ne fera pas grand-chose, à part jouer dans une ville différente presque tous les soirs.

Il me sourit et laisse filer quelques secondes avant de reprendre.

- D'ailleurs, tu penses supporter ce qui va venir ? M'interroge-t-il.

- Supporter quoi ?

- L'effervescence autour du groupe va reprendre. Il va y avoir énormément de jeunes femmes à graviter autour de nous.

Je vois clair dans son jeu. Il me teste. Il veut jauger mon niveau de jalousie. Je décide d'en faire de même.

- Si tu supportes l'idée de me savoir seule à Londres, je pense pouvoir survivre au fait que des milliers de jeunes femmes vont certainement fantasmer sur toi dans les jours à venir.

Lui comme moi savons que je viens de mentir. Je ravale ma salive après ma tirade en réalisant au même instant qu'en réalité, je ne suis pas du tout prête pour ça. Je refuse d'admettre qu'une grande majorité des fans qui seront face à lui vont avoir des pensées vicieuses le concernant. Je tente de faire bonne figure tandis que Harry sonde mon regard, mais quelque chose vient de s'éveiller en moi. Comme un besoin d'anéantir la moindre personne qui se mettra sur mon passage. Un instinct de chasseuse.

- J'ai confiance en toi, chaton. Finit-il par avouer.

Je crois que j'aurai préféré le savoir un peu inquiet. La jalousie qu'il avait manifestée à l'égard de Finn lorsque je lui avais malencontreusement envoyé un message qui était destiné à mon ancien collègue avait quelque chose d'extrêmement excitant.

- Moi aussi.

Je tiens à ce qu'il parte l'esprit tranquille, mais j'ai l'impression qu'il n'y croit pas du tout et sa question vient confirmer mes soupçons.

- Donc, ça ne te rend pas jalouse ? Insiste-t-il.

- Pour l'instant... non.

J'attends de voir ce que son départ va générer en moi, mais je suis déjà sûre d'une chose. J'ai peur. J'ai vraiment très peur de l'effet que cet éloignement va engendrer.

- Je suis terrifiée à l'idée de me retrouver seule et ça ne me ressemble pas du tout !

Ces mots me coûtent et pèsent une tonne lorsqu'ils sortent de ma bouche, à tel point que je n'ose plus le regarder.

- Joy.

Je relève la tête. Son sourire. Son merveilleux sourire. Le plus beau du monde. Il me donne petit à petit la force de m'affirmer. De me dévoiler. À cet instant, je n'ai qu'une seule envie. Embrasser cette fossette qui me rend extrêmement vulnérable.

- Tu ne seras jamais seule.

Jamais seule. Ses mots me transpercent et anéantissent mon angoisse irréversible de l'abandon. Harry parvient à sortir ce qu'il a sur le cœur avec une telle aisance. Je me sens tellement nulle de ne pas y arriver. Les semaines passent et je peine toujours à poser des mots sur mes sentiments. Dans ma tête, ils sont pourtant désormais clairs comme de l'eau de roche.

Je lui rends son sourire. Je sais qu'il attendra. Qu'il ne m'en veut pas. Qu'il a conscience que s'extirper d'une carapace comme la mienne ne se fait pas avec facilité, mais une chose est sûre, je n'ai jamais été aussi attachée à ce point à quelqu'un. Harry sait me témoigner son attachement avec une telle intensité qui me rend dépendante de lui. Je réalise que s'il me quittait, je serais une épave. Je n'ai jamais été dans un tel état avec les autres hommes qui sont passés dans ma vie. J'avais le sentiment que le fait de ne pas être atteinte émotionnellement me donnait un sérieux avantage. Chaque échec amoureux me glissait dessus, si bien que je passais d'une relation à une autre en un claquement de doigts.

Alors que je tente toujours de trouver mes mots, Harry me fait signe de ne pas continuer à me torturer avec ça. Pour masquer mon stress, je passe une main dans mes cheveux. Harry la saisit aussitôt et la pose sur son torse nu. Jamais personne n'a autant gonflé le peu d'estime que j'avais pour moi. Harry a le don d'aider ceux qu'il aime à croire en eux.

Lorsqu'il me soulève délicatement pour me poser une nouvelle fois sur le lit, plus rien n'existe. Une intensité nouvelle se déploie dans ses yeux. Ses yeux. J'y vois ce qui me manquait avant que nos vies ne s'entrechoquent un an auparavant. De l'amour. Son amour.

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