Chapitre 27

♫ « Bang Bang »- Jessie J. Ft. Ariana Grande Ft. Nicki Minaj ♫


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Joy
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Plus qu'une petite minute et je serai enfin libérée de cette journée de boulot merdique à souhait. Heureusement, les transmissions à l'équipe de nuit ont été lochées rapidement pour une fois, puisqu'il ne reste plus qu'un seul patient à surveiller. De quoi soulager les collègues acariâtres qui prennent ma relève. Relax les gonz', vous allez pouvoir pioncer toute la nuit si ça reste aussi calme, ne vous en faites pas. J'ai l'impression de n'avoir rien glandé tellement les urgences ont été peu fréquentées aujourd'hui. Uniquement de la « bobologie », rien de bien méchant. Et j'avais surtout tellement hâte d'arriver enfin à ce soir, que je n'ai fait que compter les heures qui me séparaient de la délivrance.

Vingt heures pétantes.

- Wouuuh ! J'ai fini ! Soyez-sages les filles ! À la semaine prochaine !

Elles restent à me regarder avec leurs têtes de pâté de foie. Je ne comprends pas pourtant. Ce n'est pas comme si je leur faisais péter à la gueule que j'allais m'éclater ce soir alors qu'elles sont coincées ici. Tout en ne cachant que très peu mon excitation, je me lève, mon sac à main déjà sur l'épaule et leur fais une révérence avant de m'éclipser en courant vers les vestiaires pour récupérer ma veste.

Je ne suis jamais rentrée chez moi à cette vitesse. Je crois que rien ne pourra gâcher mon enthousiasme. Même notre voisine, qui passe le balais devant sa porte, semble surprise de me voir rentrer du travail avec le sourire. Elle flaire vite ce qui me rend si joyeuse.

- Ne me dites pas qu'il y a encore une de vos petite sauterie de prévue ici ! S'écrie-t-elle, m'obligeant à revenir sur mes pas.

Ce n'est pas comme si elle passait ses week-ends à guetter les moindres va-et-vient depuis la fenêtre de sa cuisine. Je sais très bien que notre vie sociale est une de ses seules sources de distractions.

- Vous pouvez dormir sur vos deux oreilles. Nous sommes de sortie ce soir.

La vieille me dévisage comme si elle s'attendait à ce que je lui dise que nous allons retourner l'immeuble.

- Soyez discrètes quand vous rentrerez. M'avertit-elle en me regardant bien dans les yeux.

Elle a beau être bougonne et constamment de mauvaise humeur, je crois qu'elle apprécie nos petits échanges de civilités sur le perron de la résidence.

- On fera de notre mieux Madame Ziegler. Je vous le promets.

- Je vais tenter de vous croire Mademoiselle Benett.

Quelquefois, je vois presque en elle une version âgée de moi-même. Je suis sûre de terminer comme ça, à regretter le temps passé en réprimandant la jeunesse dépravée. Je donnerai ma main à couper que notre chère voisine n'était pas la dernière pour s'amuser à son époque. Je la laisse à ses occupations et m'empresse de rentrer.

Le bruit d'eau qui coule dans la salle de bain m'indique que Ava est probablement sous la douche. Ce qui est étonnant puisqu'elle était censée rentrer du travail en milieu d'après-midi. J'inspecte les environs pour m'assurer qu'il n'y ait aucun indice d'une présence masculine et toque à la porte.

- Tu es toute seule ?

- Quoi ? Répond-elle après quelques secondes d'hésitation. Euh oui. Pourquoi tu me demandes ça ?

Ni une ni deux, j'entre dans la pièce, obligeant ma pudique colocataire à se cacher derrière le rideau de douche qu'elle avait entrouvert pour me répondre. Je lève une main en l'air, absolument pas gênée de l'avoir vue dans le plus simple appareil.

- Oh ça va, j'ai déjà vu pire !

Ava passe sa tête à travers le rideau, tout en cachant le reste de son corps.

- J'te remercie. Dit-elle en fronçant les sourcils.

- Nan, ce n'est pas ce que j'ai voulu dire, j'en ai vu d'autres quoi ! On a dépassé ce stade, tu ne penses pas ?

Elle me regarde d'un air interrogatif, m'obligeant donc à répondre à ma propre question.

- Bon apparemment non.

Elle semble attendre que je sorte pour terminer de se doucher.

- Oh ça va j'ai compris.

Je m'éclipse pour lui laisser son intimité, tout en laissant la porte de la salle de bain à demi-ouverte pour lui faire la conversation.

- Comment ça se fait que tu ne sois pas déjà prête ?

La connaissant, elle aurait déjà pris les devants pour me laisser la place pour me préparer.

- Je suis restée aider mes collègues à mettre en place le restaurant pour le service du soir. M'explique-t-elle. Ça a été de la folie ce midi.

Ava me donne le feu vert de revenir vers elle une fois sortie de la douche, une serviette autour d'elle.

- Pourquoi tu m'as demandée si j'étais seule tout à l'heure ? Me demande-t-elle tandis que j'arrive dans la salle de bain, armée de la panoplie qui va me donner un look de folie.

- Je ne sais pas, je me suis dit que Louis était peut-être venu directement ici en rentrant.

Elle esquisse un sourire.

- Non, il est arrivé à Londres il y a une heure à peine. Et puis il est avec Calvin et Oli.

- Vous arriverez à vous contenir ce soir ?

Ava me pousse gentiment.

- Bien-sûr.

- Je n'y crois pas du tout.

Heureusement pour elle, sa semaine de séparation forcée avec Louis aura été rythmée par son nouvel emploi, ce qui lui aura permis de ne pas trop penser à son petit-ami. Mais je sais parfaitement que même si elle ne me l'a pas avoué, il lui a beaucoup manqué. À mon avis, leurs retrouvailles vont être... mouvementées.

Je la vois examiner le tas de vêtements et d'accessoires que je viens de déposer sur le meuble à côté du lavabo. Quelque chose me dit que ma nouvelle veste n'est pas à son goût.

- Elle en jette hein ?

- Elle... te ressemble. Finit-elle par dire.

- Arrête ! Elle est canon !

- Oui, mais il faut être toi pour oser porter quelque chose d'aussi tape-à-l'œil.

La veste est un subtil mélange entre le classique par sa forme et l'original par les motifs dorés qui la recouvrent. Elle relèvera parfaitement ma robe noire que je trouvais un peu trop sage portée toute seule.

- Tu vas mettre quoi toi ?

Ava enclenche le sèche-cheveux au moment même où elle ouvre la bouche pour me répondre, si bien que je n'entends qu'un mot sur deux.

- (...) pantalon (...) cuir (...) ceinture (...)

J'acquiesce tout de même à ce que je crois percevoir. Tant qu'il y a du cuir, c'est que c'est sexy. Et puis au pire, on s'en fiche, elle est maquée. C'est moi qui dois briller ce soir.

Ma coloc' termine de se sécher les cheveux et s'empare du fer à boucler.

- Je te laisse tranquille, je vais me préparer dans ma chambre.

- De toute façon, j'ai tellement hâte, que je vais me doucher en deux minutes !

Je commence à me déshabiller tandis que Ava sort de la salle de bain, en prenant soin de fermer la porte derrière elle.

- Tu pouvais laisser ouvert ! J'ai envie de continuer de parler !

Je braille pour l'inciter à ouvrir la porte, chose qu'elle fait dans la seconde. Elle ne s'aventure pas pour autant à passer sa tête de peur que je ne sois nue.

- Je ne suis pas à poil encore, t'inquiète pas.

Je l'entends pouffer de rire, mais elle ne s'aventure pas pour autant sur le sujet. Je renchéris.

- Tu te prépares dans le salon hein, je veux t'entendre.

Elle branche alors son fer à la prise qui se trouve près de l'entrée. Je me suis tellement contenue toute la journée que j'ai besoin d'extérioriser plein de choses. Je profite de l'avoir rien que pour moi, car je sais très bien qu'elle sera collée à Louis une bonne partie de la soirée.

- Au fait, on s'organise comment pour tout à l'heure ?

Plus je m'époumone à travers la porte, plus que je rends compte qu'il faut que j'économise ma voix. On peine toujours à se faire entendre dans les nightclubs.

- Louis propose qu'on les rejoigne à son appartement. Il pense commander des pizzas. Ça nous permettra d'arriver tous en même temps en boîte.

- Cool ! J'ai trop la dalle. Dis-lui de prendre une pepperoni !

De quoi avoir une haleine de cheval pour tenir Calvin loin de moi. Je coupe l'eau de la douche, et ouvre la porte en grand pour évacuer la vapeur. Je passe ma tête dans le salon.

- Et je suppose que tu ne rentres pas dormir...?

Entre temps, Ava a eu le temps de s'habiller et elle peaufine sa coiffure ondulée sur le côté. Effectivement, il y avait bien du cuir dans l'histoire. Son pantalon slim noir en simili fera certainement sensation auprès de Louis. Même s'il essaie de la jouer discret quand il la regarde, on voit très bien qu'il la désire totalement. Elle hausse les épaules, m'indiquant qu'elle ne sait absolument pas où elle terminera la nuit.

- Oh, ne me la fait pas. Tu t'es vue ?

Je l'incite à prendre conscience du sex-appeal qu'elle dégage ce soir. Ava soupire à ma réplique et s'applique à mettre son -mon- rouge à lèvres rouge carmin devant le miroir.

- J'ai tellement hâte de le retrouver, tu ne peux pas savoir.

- Allez, je me prépare en vitesse, et on file retrouver ton Louis !

- Et ton Calvin.

Oh merde, c'est vrai qu'il va falloir que je me coltine celui-là.

_____

Le portier de l'immeuble où vit Louis nous laisse entrer sans nous demander notre identité, comme se fut le cas lorsque nous étions venues la première fois. Il m'a certainement reconnue. Quand on m'a vue une fois, on ne m'oublie pas.

Je ne sais pas comment fait Ava pour s'être habituée si vite à un cadre si exceptionnel. Même moi qui ne suis pas concernée, j'ai du mal à m'y accommoder.

Naturellement, je la laisse entrer la première dans l'appartement lorsque Louis nous ouvre, tout sourire de retrouver sa belle. Ils s'enlacent longuement, me laissant poireauter dans le couloir. Je suis obligée de leur signaler ma présence par un « Hum hum ». Je suis atroce, ils ne se sont pas vus depuis une semaine.

- Quoi ? Me rétorque Louis. Tu veux un câlin toi aussi ?

Il se retourne vers le salon, où j'aperçois ses amis.

- Calvin ! S'écrie-t-il.

Je m'avance, non pas par envie de recevoir une étreinte dont j'ai bien peur de ne plus pouvoir me défaire, mais pour compter combien d'amis il a invité à se joindre à nous. Ma déception est de taille lorsque je n'en compte que deux. Et deux que je connais déjà en plus.

- Ils nous rejoignent après les autres ?

- Quels autres ? Me demande Louis.

- Bah les autres, Niall, Liam, Sonia...

- Euh, tu veux dire Sophia ? Me lance Oli.

- Ouais pardon, Sophia !

- Ils ne pouvaient pas venir ce soir. Répond Louis.

- Et Harry ? Il vient Harry j'espère !

- Oui, si tout va bien, il devrait nous rejoindre directement là-bas. Ajoute-t-il.

Me voilà soulagée. Depuis que j'ai lu l'article le concernant dans The Sun, je n'ai qu'une hâte, me faire mon propre avis sur cette mystérieuse Carolin qui est sortie de nulle-part et avec qui il semble entretenir une relation. Je remarque que Calvin n'a pas l'air enchanté par l'évocation de ce dernier. La soirée promet d'être pimentée.

Le portier monte quelques minutes après notre arrivée, les bras chargés de boites de pizzas. Je parcoure les étiquettes pour m'assurer qu'il ait bien pensé à commander celle que je voulais.

- Oui, ne t'en fais pas. Vu le texto de Ava, il ne valait mieux pas que j'oublie la pepperoni. Me dit Louis, me mettant la boite en question sous le nez.

Il est chou tout de même ce garçon.

Pendant que nous mangeons, Ava monopolise la conversation pour raconter aux autres sa première semaine de boulot. Louis a dû déjà entendre tous ces détails, mais il parvient tout de même à faire comme s'il les découvrait pour la première fois. À les voir ensemble, ils donneraient presque envie de se mettre en couple. J'ai bien dit « presque ».

Avant de partir, Oli décide de gonfler le matelas sur lequel il dormira en rentrant, alors que Calvin se contente de prendre un sac à dos avec des affaires dedans.

- Tu ne prépares pas ton matelas ? Lui demande Louis.

- Tout dépend où je vais dormir ce soir... Répond-il en me lançant un regard lourd de sens.

Beurk. S'il espère vraiment que je vais le ramener chez nous, il se met le doigt dans l'œil. Je me tourne vers Ava tout en écarquillant les yeux. Pas de chance pour moi, l'équation fait que je vais me retrouver entre deux gars célibataires.

- On peut descendre, les taxis sont arrivés. Nous avertit Louis.

- Les taxis ? S'inquiète Ava.

- Oui, j'ai pensé que ce serait mieux si on prenait deux taxis séparés. Les paparazzis ne vous embêteront pas si vous arrivez d'abord toutes les deux.

Il marche un peu sur des œufs en lui expliquant son intention, vu l'expression de Ava lorsqu'elle comprend qu'il faudra de nouveau la jouer le plus discret possible ce soir. Louis semble veiller à notre confort avant tout, mais elle parait un peu froissée par cette situation qui l'oblige à faire comme s'ils ne se connaissaient pas dans les lieux publics. Je comprends sa frustration. Ça ne doit pas être évident de constamment faire attention à leurs moindres faits et gestes à partir du moment où des photographes peuvent percer à jour leur relation.

_____

Notre arrivée à Cirque Le Soir se fait dans le calme le plus complet lorsque Ava et moi sortons du taxi. Je n'aurai pas été contre l'idée d'une arrivée spectaculaire sous les flashs des photographes, mais tant pis.

Tandis que nous pénétrons dans le sas pour payer nos entrées, un mouvement de foule se fait entendre à l'extérieur, laissant penser que Louis et les autres sont arrivés à leur tour. Ils entrent presque en terrain conquis, puisque le gérant du nightclub les laissent passer sans qu'ils n'aient besoin de se présenter. Une fois la double porte bien fermée, Louis s'approche de Ava pour lui faire un baiser sur la joue. Calvin, quant à lui, ne perd pas le nord. Il me guide par la taille vers le lieu des hostilités. Merci, ça mais ira. Je venais certainement m'éclater ici bien avant toi.

Mes yeux s'acclimatent à la luminosité des projecteurs et se posent immédiatement sur un visage qui m'est devenu familier. Harry a déjà pris place dans un coin de la salle. La pièce est cloisonnée en plusieurs ambiances, allant du style rococo au style des plus vulgaires et décalés. Ava semble d'ailleurs un peu surprise par l'atmosphère clairement érotique de l'endroit. Plus nous nous approchons de Harry, plus j'aperçois enfin la personne qui l'accompagne. Il est venu avec elle. C'est donc officiel, ils sont ensemble. D'ici, elle est exactement comme je l'ai imaginée : un maquillage impeccable, une coiffure millimétrée et une tenue minimaliste, qui laisse apparaître ses longues jambes de mannequin. J'ai l'impression qu'il est en quête de la perfection lorsqu'il se met en couple avec des filles aussi parfaites esthétiquement parlant.

Harry nous accueille avec le sourire et fait les présentations. Heureusement, elle me tend la main. J'avais peur de rester collée à sa joue tellement son fond de teint est luisant. Par contre, elle a une façon de serrer la main que je déteste. Tout est dans la nonchalance, comme si ça lui coûtait de rentrer en contact avec des inconnus que visiblement elle n'a pas envie de connaître.

Je me défais de Calvin, qui est toujours collé à moi, pour m'approcher du grand brun et le saluer à mon tour. Je n'ai pas besoin d'entreprendre quoi que ce soit puisqu'il vient naturellement vers moi et me sert dans ses bras quelques secondes, en captant bien mon regard.

- Tu vas bien ? Me demande-t-il tout bas.

- Oui.

Je réponds très simplement, un peu prise au dépourvu par sa question.

- Je te remercie de t'en soucier.

Il est vrai que la dernière fois qu'il m'a vue, je n'étais pas au top de ma forme. Mais en une semaine, je dois dire que mon état d'esprit s'est nettement allégé, en partie grâce à la perspective de cette soirée. Harry est le genre de personne qui n'oublie jamais toutes ces petites attentions, qui ne représentent pas grand chose, mais qui pourtant font du bien à entendre venant de quelqu'un comme lui. Je ne sais pas s'il s'en rend bien compte, mais un simple « Tu vas bien ? » signifie beaucoup dans sa bouche. Je pense que trop souvent, on considère comme acquis ces choses données gratuitement. On ne devrait pourtant jamais s'habituer à ce genre d'amabilité.

- Je vais au bar. Dit-il ensuite, à l'intention de tout le monde. Qui veut quoi ?

- Une Margarita pour moi.

Mon choix est validé par mon amie.

- Deux ! Ajoute Ava.

- Un Martini, mais sans olive. Répond la blonde.

Sa demande me fait rire intérieurement. Où as-tu vu un Martini sans olive toi ? C'est sûr qu'une petite olive se retrouvera directement sur tes hanches, ma pauvre. Elle a enfin daigné lever le nez de son téléphone et ouvre la bouche pour la première fois depuis tout à l'heure. L'intonation de sa voix prête elle aussi à sourire tellement elle est maniérée. Harry lui fait signe qu'il revient, certainement pour l'inciter à ne pas le suivre jusqu'au bar pour rien, et Louis part avec lui pour commander le reste des boissons. Je m'assoie sur la banquette après avoir retiré ma veste, en prenant soin de laisser une distance relative avec Calvin, qui n'a toujours pas saisi le message malgré mes tentatives de lui faire comprendre qu'il est vraiment lourd. Ava prend place à côté de moi et inspecte les environs, un grand sourire perplexe aux lèvres lorsqu'un animateur maquillé en clown déjanté s'approche de notre tablée. J'essaie de la rassurer en lui glissant quelques mots à l'oreille.

- Ça parait un peu loufoque au début, mais crois-moi, on s'y fait vite.

Louis et Harry risquent d'en avoir pour un petit bout de temps avant de ramener nos commandes. Nous restons alors à nous regarder dans le blanc des yeux. Calvin et Oli se donnent un air cool, mais bizarrement, quand Louis n'est plus là, plus personne ne dit un mot. Je me demande ce qu'ils peuvent bien faire dans la vie ces deux-là. Probablement rien. Je me tourne vers Carolin, qui a de nouveau les yeux rivés sur son smartphone. C'est écrit sur mon front que je suis quelqu'un de lambda ? Quelque chose me dit qu'elle n'est pas du genre très sociable avec les gens qui ne sont pas de son monde. Je vais essayer de tâter le terrain pour la tester un peu.

- Carolin, c'est bien ça ?

La blonde décroche un sourire en constatant qu'elle est au centre de l'attention.

- Oui, c'est ça.

- Pas trop dur le boulot ?

- En ce moment ça va, je suis en « off ». Explique-t-elle de sa voix haut perchée. Du coup je profite au maximum des moments avec Harry.

Sans déconner ?

- Tu es du milieu toi aussi ? Enchaîne-t-elle.

Elle est sérieuse ? Moi, mannequin ? La perche qu'elle me tend est bien trop intéressante pour que je ne la laisse passer. Je donne un léger coup de coude à Ava pour lui faire comprendre qu'il va me falloir toute son attention dans les secondes qui vont suivre.

- Nan, moi je suis actrice. Je suis actuellement sur un tournage ici à Londres. Mais je n'ai pas vraiment le droit d'en parler, c'est assez confidentiel, tu sais, James Bond, tout ça... Enfin, j'en ai déjà trop dit...

Je sors tout ça d'une traite et dans une spontanéité assez remarquable. Je crois que je vais vraiment me lancer dans le cinéma en fait. Les deux gars à notre table gloussent discrètement, certainement heureux que je pimente un peu cette rencontre.

- Nan ? Tu tournes avec Ben Affleck ? S'exclame-t-elle d'un air ébahi.

Qu'est-ce qu'elle me raconte ? Mon dieu, elle confond James Bond et Batman. Tout le monde sait très bien que le nouveau 007, c'est Tom Hardy. Elle est géniale. Il faut que je renchérisse, je sens que ça pourrait être drôle. Malheureusement, le jeu va prendre fin aussi vite qu'il a commencé, puisque Harry et Louis reviennent avec nos consommations.

- T'es pas possible. Me glisse Ava, en riant à son tour.

- On peut bien rigoler un peu. C'était trop tentant.

Je m'empare du verre de Margarita que Harry a laissé devant moi et le remercie d'un clin d'œil. Nous avons tous le sourire, si bien que les deux absents trouvent cela un peu suspect.

- Vous parliez de quoi ? Nous demande Louis.

- De son tournage ! Répond Carolin en me désignant.

Telle une incorrigible menteuse, je fais comme si je n'avais rien entendu et fais tournoyer les glaçons de mon verre. L'incompréhension se lit sur leurs visages, mais Ava fait comprendre à Louis de ne pas chercher plus loin.

- Ah ok, je vois. Acquiesce-t-il comme s'il venait de capter.

Harry, lui, ne relève pas et reste indifférent, comme si la situation ne le concernait pas.

Petit à petit, la montée de la musique m'indique que la soirée avance malgré nous. La discussion est plutôt rythmée au final, effaçant mes aprioris, même si nous ne sommes qu'un tout petit groupe. J'ai l'impression que Harry est contraint de toujours avoir un œil sur sa copine pour ne pas qu'elle se sente seule, car elle ne participe que très peu à la conversation. En comparaison, Louis et Ava ne nous font pas sentir que nous sommes de trop. Ils sont l'un à côté de l'autre sans pour autant être démonstratifs. Et contre toute attente, Oli se montre plutôt intéressant, et surtout moins relou que son ami, qui n'a d'yeux que pour moi. C'est limite s'il n'est pas jaloux que j'adresse la parole à son pote. J'en viens même à regretter ce cher Niall, qui est beaucoup plus subtil et plus marrant au final.

Rapidement, je ressens le besoin d'aller me défouler sur la piste et invite ma colocataire à venir avec moi. Louis, Calvin et Oli nous suivent alors. Voyant que Harry et Carolin restent cloués à la banquette, je leur fais signe pour qu'ils nous rejoignent. Mais visiblement, mademoiselle ne veut pas abîmer ses Louboutins.

J'ai rarement vu Ava aussi déchainée. Avec son haut blanc et les lumières noires, on ne voit qu'elle. La prochaine fois, je sors les paillettes. Mais il n'y a pas à dire, elle assure la petite. Louis immortalise le moment en la filmant elle et ses amis, tout en sautillant sur place. Dans l'excitation du moment, je me surprends à ne plus repousser Calvin, l'incitant même à se coller un peu plus à moi. Du coin de l'œil, je constate que l'ambiance est aussi montée d'un cran du côté de Harry et sa petite-amie, qui se roulent des patins à l'abris des regards.

Les quatre Margaritas pèsent lourdement sur ma vessie, et le fait de me déhancher n'arrange pas les choses. J'interpelle Ava en m'égosillant.

- Pause pipi ?

Cette dernière est plus occupée à dévorer du regard son beau brun. Calvin me regarde de haut en bas, attendant une invitation qui ne lui parviendra jamais. Je tourne aussitôt les talons, en effaçant cette image de mon esprit.

Pour une fois, les toilettes des femmes ne sont pas bondées. Je tombe nez-à-nez avec mon reflet dans un des miroirs.

- What ?!

Je m'écrie à voix haute en grimaçant. Oh putain, j'ai oublié de mettre de la laque en partant. Je le sais en plus que j'ai tendance à friser avec l'humidité. Oh, la cata'. On dirait un croisement entre Bonnie Tyler et un caniche défraîchi. Je tente désespérément de minimiser le désastre du bout des doigts, mais rien n'y fait. C'est ce moment précis que choisit Madame Parfaite pour faire son apparition.

- Dis, t'as pas une brosse à cheveux ? C'est une véritable catastrophe.

Carolin m'indique sa ridicule petite pochette argentée.

- Désolée, j'ai à peine de la place pour mon téléphone et un gloss. Me dit-elle, faussement confuse.

Elle se positionne devant la glace pour raccorder son maquillage. Son portable n'arrête décidément pas de vibrer.

- Ben dis-donc, tu es sacrément sollicitée.

- Ouais, c'est un peu la folie depuis une semaine. Dit-elle. J'ai de plus en plus de propositions de contrats, je ne sais plus où donner de la tête.

- Comme je te comprends.

Elle ne perce pas l'ironie dans ma phrase, plus occupée à répondre à ses interlocuteurs virtuels. Elle continue de m'expliquer son rythme de vie « bien trop difficile au quotidien ». Je pouffe de rire avec elle faisant comme si je partageais son désarroi. J'ai presque envie de lui dire qu'elle ne s'adresse pas à la bonne personne pour se plaindre de sa petite vie modèle. Pauvre petite sotte, tu n'as aucune idée de ce que j'ai vécu dans la mienne.

Bon, avec tout ça, je n'ai même pas pris le temps de me soulager. Heureusement, Carolin est contrainte de prendre un coup de fil « super important », me libérant de cette conversation à sens unique.

Lorsque je ressors du cabinet, elle est toujours en pleine conversation. Si j'ai bien tout suivi -non, c'est faux, je n'écoutais pas- elle doit répondre à une interview concernant sa vie privée. J'en déduis donc que les médias s'intéressent beaucoup à elle grâce à sa nouvelle relation avec le chanteur des One Direction.

Au lieu de rejoindre un Calvin surexcité sur la piste de danse, je décide de prendre l'option du Harry tout seul sur sa banquette. Il attend patiemment que sa pimbêche revienne.

- Je pense qu'elle en a pour un petit moment.

Toutes les options sont envisageables avec cette phrase. Je prends place à côté de lui.

- Alors, tu as eu du monde à la galerie hier soir ?

Ma question semble le surprendre, tandis qu'il termine son verre. Il m'explique qu'il y a eu moins de monde qu'au vernissage, mais rien d'étonnant, car les places sont limitées pour éviter les débordements et les intrusions de personnes peu concernées par le projet. Je sens qu'il apprécie mon intérêt pour ce nouveau passe-temps qu'il s'est trouvé. La blonde met beaucoup plus de temps à revenir que je ne l'aurais pensé. Il commence à ruminer de ne pas la voir sortir. Une idée me vient. Je lui propose de nous lancer dans un jeu que j'adore faire en boîte : imaginer la vie des gens. Harry se prête facilement à cette distraction et a une sacrée imagination, si bien qu'il se surprend lui-même à passer un très bon moment en ma compagnie. Un certain malaise suit cet instant de complicité, et il se met à guetter toutes les cinq secondes la porte des toilettes, pour s'assurer d'avoir encore un peu de temps à me consacrer. Mais comme je suis loin d'avoir ma langue dans la poche, il faut que je lui dise ce que j'en pense.

- Ta meuf là... Tu n'as pas l'impression qu'elle se sert de ta notoriété pour propulser sa carrière ?

Oups. Aurais-je visé juste ? Harry s'enfonce dans son siège en croisant les bras et fuit ma question. Puis, il me fusille du regard, mais ne répond rien.

- Je ne voulais pas te froisser. Je te dis juste ce que je pense. Je n'aurai pas pu le garder pour moi.

Harry se penche vers moi, les coudes sur les genoux, prêt à me dire quelque chose. Mais nous sommes interrompus par une main sur mon épaule qui m'interpelle. Je me retourne et constate qu'il s'agit de Calvin qui m'invite à les rejoindre. Mais quel boulet, sérieusement. Je n'ai pas le temps de dire quoi que ce soit sur son intrusion malvenue qu'une chanson qui cartonne en ce moment résonne dans le club. Je me lève et me retourne vers Harry, qui semble prêt à nous accompagner sur la piste.

- Allez, t'as le temps, éclipse-toi tant qu'elle n'est pas là !

Sauf que ma phrase est vite démentie lorsque Carolin s'avance vers nous. Harry réfrène son envie de nous rejoindre. Il n'y a décidément rien à garder chez cette fille. Poubelle, poubelle, poubelle. C'est vraiment dommage, car il ne mérite pas de perdre son temps avec ce genre de nana inintéressante et sans cervelle.

Ava m'impressionne à se lâcher autant. Même si elle a certainement un petit coup dans le nez qui l'aide à se désinhiber, elle ne se comporte habituellement jamais de la sorte en public. Elle est plutôt du genre à s'interroger mille fois sur ce que les gens vont bien pouvoir penser d'elle si elle se comporte de telle ou telle manière. Là, elle semble ne plus avoir une once de self-control, ce qui est loin de déplaire à Louis, même s'il ne la quitte pas d'une semelle de peur qu'un autre mâle ne s'approche. Elle me saute au cou au moment où j'arrive à leur niveau.

- Au fait, je pense que je ne vais pas rentrer ce soir... M'avoue-t-elle.

- Tiens donc...

Très peu surprise par cette déclaration, j'entame une nouvelle danse endiablée avec elle, comme si la piste nous appartenait toute entière. Le changement est radical quand je la compare à la petite campagnarde perdue dans la grande ville qu'elle était quand je l'ai connue il y a deux mois à peine. Mais cette nouvelle version de Ava n'est pas déplaisante, bien au contraire.

Tandis que l'ambiance est à son apogée et que toute la boîte est en effervescence, je ne peux m'empêcher de tourner mon regard de nouveau vers Harry, qui me fait de la peine tellement il a l'air de s'ennuyer. J'espère que cette soirée l'aidera à ouvrir les yeux sur elle.

Après une bonne demi-heure de déhanchés infernaux, nous rejoignons les deux inactifs, qui à mon avis ne vont pas tarder à mettre les voiles. J'ai comme le sentiment que Carolin fait exprès d'accaparer toute son attention à partir du moment où nous revenons vers eux. À quoi ça rime d'agir comme ça ? J'ai beaucoup de mal à saisir.

De mon côté, Calvin tente une nouvelle approche. Une cigarette plaquée derrière l'oreille, il me tend la main pour m'inciter à l'accompagner dehors pour fumer.

- Non merci, ça ne me dit rien. Et en plus, je ne fume pas.

- Allez, viens au moins prendre un peu l'air avec moi ! M'implore-t-il.

- C'est très gentil de penser à mon bien-être, mais sans façon. Je suis très bien ici.

- Joy... Continue-t-il.

Mais il est aussitôt interrompu par la lourde voix de Harry, que personne ne s'attendait à entendre hausser le ton de cette manière.

- Tu ne peux pas la lâcher deux minutes merde ? Elle t'a dit qu'elle ne voulait pas venir !

Tout le monde autour de la table semble surpris par son intervention. J'étais loin de me douter qu'il écoutait les implorations pesantes de mon interlocuteur.

- C'est quoi ton problème ? Rétorque sèchement Calvin. Ça ne te suffit pas d'avoir toutes les nanas que tu souhaites, il faut aussi que tu joues au sauveur à tout bout de champ !

Offensée par cette réplique à son intention, Carolin émet un son pour exprimer son mécontentement d'être réduite au simple bon vouloir de Harry. Ce dernier se contient face à l'autre abruti qui finit par jeter l'éponge et demande à Oli de venir avec lui dehors. Je remarque que Louis n'a pas l'air très surpris. Ce n'est probablement pas la première fois que cela arrive. J'avais cru déjà déceler que c'était tendu entre eux il y a quelques semaines. Je remercie Harry intérieurement de m'avoir débarrassé de Calvin.

Comme je l'avais pressenti, ils profitent de ce moment pour nous dire qu'ils vont y aller. Carolin ne perd pas une seconde pour nous faire sentir qu'elle a hâte de déguerpir. Harry prend le temps de nous dire au revoir.

- Merci quand même d'être venu.

Oui parce que, ça ne saute peut-être pas aux yeux, mais c'est moi qui à la base était à l'origine de cette soirée.

- Ça a été un plaisir de te revoir, dans de meilleures circonstances. Me dit-il, tandis que Carolin l'attend un peu plus loin. Je te préfère nettement comme ça.

Et moi, je te préférais nettement comme la semaine dernière... Sans Miss podium accrochée aux basques. Ils s'éclipsent, ne nous laissant plus qu'à trois face à nos verres à moitié vides.

- Et bien, on ne peut pas dire que la soirée soit une réussite.

- Tu t'es amusée non ? Me demande Louis.

- Oui, je ne peux pas dire le contraire.

- Moi aussi je me suis amusée ! Nous sort Ava.

Belle intervention venant de quelqu'un qui est loin d'être sobre. J'ai bu exactement la même quantité d'alcool qu'elle, mais l'effet n'a pas été le même sur moi. La pauvre, elle a eu une semaine éprouvante, elle devait être fatiguée avant même de mettre les pieds ici.

- Alors, c'est l'essentiel. Conclut Louis, en passant un bras autour des épaules de mon amie.

Le climat s'est quelque peu refroidit depuis le départ de Harry.

- On décolle ? Nous propose Louis.

- Sage idée, si tu veux pouvoir profiter un temps soit peu de l'énergumène ici présente.

- Eh ! Je te signale que mon cerveau est toujours actif ! Me lance Ava.

Nous nous dirigeons vers la sortie au même moment où les deux potes de Louis se décident à revenir de leur pause clope. Apparemment, des taxis attendent déjà à l'extérieur pour raccompagner les gens qui commencent à rentrer. J'imagine qu'il va falloir user du même stratagème qu'en début de soirée et m'apprête donc à leur dire au revoir pour rejoindre un véhicule différent du leur. Mais Ava en décide autrement.

- Louis, j'aimerai beaucoup que l'on sorte de cette boîte ensemble.

Elle appuie sa décision en ne quittant pas son regard.

- Tu es sûre de toi ? Lui demande-t-il, comme pour s'assurer que l'alcool ne parle pas à sa place.

- Certaine.

L'aplomb de Ava ne laisse pas de place au doute. Elle est déterminée à prouver qu'elle tient à lui, et de la même manière, montrer au monde qu'elle partage désormais sa vie.

- Dans ce cas.

Louis sert fermement la main de mon amie dans la sienne, puis fait signe au videur d'ouvrir la porte. Une pluie aveuglante de flashs s'abat sur nous dès l'instant où nous sortons dans la rue. C'est assez perturbant, mais aussi exaltant d'être à ce point sollicité de droite à gauche. Nous décidons de nous entasser dans le premier taxi à disposition. Je prends le temps pour regarder Ava et m'assurer qu'elle ne regrette pas d'avoir pris cette décision, mais vu son visage ébloui, elle semble finalement davantage libérée d'un poids que sous le choc de cette scène hors du commun.

- Bienvenue dans le monde des vautours. Lui lance Oli, tout sourire.

- Ils ne vont pas te laisser tranquille maintenant. Ajoute Calvin. La Terre entière va vouloir connaître le nom de celle qui a tenu la main de Louis ce soir.

- Arrêtez ! Vous allez lui faire peur !

- Non, tout va bien, au contraire. Dit-elle, confirmant mon idée.

Je suis d'autant plus contente pour elle que Louis parait aussi assumer pleinement ce retournement de situation. Tout ce que j'espère, c'est que nous pourrons tout de même continuer à avoir la tranquillité toute relative qui nous appartient encore.

Même si Ava ne rentre pas dormir chez nous, ils décident tout de même de faire un crochet par Paddington pour me déposer. Ils en profitent aussi pour calmer leur fringale matinale par une grosse commande dans un fast-food de nuit au coin de la rue.

Une faible lueur à la fenêtre de notre voisine m'indique qu'elle est probablement sortie de son lit en entendant les portières du taxi claquer dans la rue. Tout en montant les marches qui mènent à l'appartement, je réfléchis à ce que je pourrais bien faire pour lui montrer qu'elle est loin d'être une pro de l'espionnage. Je décide d'apposer ma bouche recouverte de rouge à lèvres criard sur le carreau de sa cuisine, sachant pertinemment qu'elle se trouve juste derrière. La belle marque de ma bouche signe avec subtilité mon effronterie maladive et mon besoin impertinent d'être égale à moi-même en toute circonstance.

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Un élan de panique s'empare de moi à mon réveil. J'ai totalement oublié de prendre mon traitement hier soir. Je fais valser ma couette, prête à remédier à cet oubli, mais lorsque je me rends compte qu'aucune pensée néfaste ne parasite mon esprit ce matin, je décide de ne pas mettre les pieds en dehors de mon lit. Hier fut une journée durant laquelle je n'ai pas une seule fois pensé à mes satanées pilules, ce qui me surprends grandement tellement les engloutir rythme mon quotidien depuis très longtemps. Je n'ai pas pour autant envie de m'en réjouir trop vite. Un jour à la fois. Mais il est vrai qu'une journée qui commence sur une pensée positive ne peut qu'aller dans le bon sens. Lorsque l'on prend conscience que l'ennemi que l'on combat n'est autre que soi-même, on réalise qu'avancer ne peut pas venir de quelqu'un d'autre. Le fond est le meilleur endroit pour commencer à relever la tête, car la seule direction à prendre est vers le haut. Je ne suis plus la personne que j'ai été et je sais que je ne le serai plus jamais. Je ne suis pas non plus tout à fait celle que j'espère devenir un jour. Je suis en cours d'amélioration. Soyez patients. Cher passé, je te remercie pour toutes ces leçons. Cher futur, Joy Benett est enfin prête à t'affronter.


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