Chapitre 22
PDV Saori
Karma et les autres quittèrent l'hôpital, l'heure des visites étant terminée. Je me mis en tailleur en songeant à ce que j'avais réappris.
1. J'avais un frère aîné, âgé d'un an de plus que moi. Il était vraiment sympa même s'il avait l'air assez sadique sur les bords
2. Ledit frère était en couple avec une blonde, Rio, qui se disait être ma meilleure amie.
3. J'avais un majordome qui prenait soin de moi depuis toute petite, Sebastian. Je ne savais pas pourquoi, mais pour moi ça voulait dire que nos parents étaient plutôt riches.
4. Sebastian avait une femme et une fille : Elysabelle et Laura. Elysabelle s'était montrée très maternelle envers moi et Laura n'avait rien dit, ne sachant peut-être comment réagir.
5. Karma avait un meilleur ami : Nagisa. Il avait des cheveux bleu ciel courts et de grands yeux de la même couleur qui me donnaient envie de m'y perdre. D'ailleurs, mon coeur s'était emballée quand il s'était approché. Il était doux et gentil, j'avais carrément l'impression de le connaître, c'était bizarre. Karma aussi m'avait semblé familier mais avec Nagisa, c'était une toute autre histoire. C'est comme si j'arrivais à ressentir l'inquiétude et la souffrance qu'il ressentait lui-même.
6. J'avais menti à l'infirmière. Je ne me souviens pas que de mon prénom et de ce mot "Kyukate", qui faisait référence à moi, j'en étais certaine au fond de moi. Il y avait un autre surnom et des sons qui restaient gravés dans ma mémoire. Sauf que c'était trop insignifiant pour moi pour que j'ose le dire.
J'avais hâte de découvrir le monde en dehors de l'hôpital. Karma m'avait dit qu'il valait mieux que je profite d'avoir perdu la mémoire, ce qui sous-entendait que mon passé n'était pas hyper joyeux et je n'avais donc, pour le coup, pas très envie de retrouver mes souvenirs.
Je fis défiler les photos de ma galerie photo. Toutes remontaient à trois ans, et il y en a beaucoup où je souriais de toutes mes dents avec Karma et où je collais quelqu'un qui ressemblait trait pour trait à Nagisa mais avec de petites couettes.
J'allai ensuite fouiller dans mes contacts. Il n'y en avait pas beaucoup, juste quatre : Sebastian, Grand Frère, Rio de Janeiro, Mon P'tit Schtroumpf. Les trois premiers étaient très explicites, mais le dernier était assez mystérieux. Et c'était d'ailleurs ce surnom dont je me souvenais. Mais à qui faisait-il référence ?
Je tapai dans la barre de recherche le mot "schtroumpf" et il me sortit des petites créatures toutes bleues. Bon, réfléchissons. Si je me souviens de ce surnom, c'était qu'il était important, surtout s'il figurait parmi les quatre seuls contacts de mon téléphone. Si il y avait "schtroumpf", c'était qu'il y avait du bleu quelque part et vu qu'il y avait "p'tit", c'était que la personne en question était petite, peut-être plus que moi.
"Nagisa...", murmurai-je.
C'était logique et, surtout, je me voyais bien l'appeler comme ça, c'était aussi mignon que lui. D'ailleurs, c'était sûrement lui le gars avec les couettes sur les photos. Je devais vraiment être proche de lui pour l'appeler comme ça...
Je souris en pensant au jeune homme aux cheveux bleus mais mon mal de tête me fit grimacer, me signifiant que j'avais assez réfléchi pour aujourd'hui.
La même infirmière que tout à l'heure me donna mon repas et j'en profitai pour lui demander quand je pourrais sortir de l'hôpital.
"Normalement, d'ici une petite semaine."
Je hochai la tête et je mangeai la nourriture immonde de l'hôpital. C'était dégueulasse mais j'avais besoin de force, donc bon... puis je décidai de profiter de la présence de l'infirmière pour marcher un peu. Elle m'aida à me lever du lit et je vis que mes jambes n'étaient pas très stables, ce à quoi elle me répondit que c'était normal, puisque je n'avais pas bougé depuis deux semaines.
Après une dizaine de minutes à faire quelques pas dans la pièce, je me remis au lit, épuisée.
Le samedi suivant, seul Nagisa vint me voir à l'hôpital. Laura n'était pas venue me voir, et Karma et Rio venaient après leurs cours à l'université. Sebastian était toujours avec moi, dans ma chambre, et Elysabelle était dans son appartement avec Laura. Elle devait se reposer d'après Sebastian.
Présentement, Nagisa me racontait ce qu'il avait fait la veille au soir avec Karma et Nagisa, et il me parlait de la classe E, dans laquelle j'avais été. Avec lui, il y avait Koro, celui qui était apparemment l'ancien professeur de la classe E et un poulpe durant un an ou deux (d'ailleurs, ça m'avait fait rire mais Nagisa m'avait assuré que c'était vrai. Il avait eu l'air tellement sûr de lui que j'avais été obligée de le croire).
Finalement, je me décidai à lui poser la question qui me brûlait les lèvres depuis mon réveil.
"Nagisa ?
- Oui Kyu... euh Saori ?"
Sa langue fourchait souvent de cette manière, quand il s'adressait à moi. C'était assez bizarre d'ailleurs car personne d'autre que lui ne prononçait cette syllabe avant de se reprendre avec mon prénom. Et si c'était lui qui m'appelait Kyukate ?
"Je crois... non en fait, je suis persuadée que c'est toi que j'appelais "p'tit schtroumpf".
- Tu t'en souviens ? Depuis quand ?", s'étonna Nagisa.
Je rougis d'embarras et le bleu rit légèrement.
"Tu as menti à l'infirmière la première fois, c'est ça ?
- Euh oui, comment tu sais ?
- Disons que je n'ai pas besoin de que tu parles pour que je te comprenne. Kyu... euh Saori, c'est important que tu dises tout aux médecins et infirmiers quand tu te souviens de quelque chose, d'accord ?
- Karma dit que je ferais mieux de ne pas me souvenir, comme si mon passé était horrible."
Nagisa se mordit la lèvre, comme s'il approuvait en partie les paroles de Karma.
"J'admets qu'il n'est vraiment pas glorieux au niveau de ton bonheur... (je le savais !) mais pourtant, il y a une période dont je suis certain que tu voudrais te souvenir.
- C'est-à-dire ?
- On était dans la même classe, en troisième, je te l'ai déjà dit. Cette année-là, ou tout du moins, quelques mois durant, tu as été vraiment, mais vraiment heureuse. On a vécu plein de choses ensemble durant ton séjour ici."
Ses yeux brillaient de nostalgie et un doux sourire habillait ses lèvres. Bordel, j'étais vraiment si heureuse que ça ?
"Si j'étais heureuse, pourquoi je semble être partie pendant trois ans ? Toutes les photos de mon téléphone remonte à cette période-là..."
Nagisa perdit son sourire et son regard s'assombrit. Message reçu.
"Tu ne veux pas en parler, je comprends. Quitte à être amnésique, autant se créer de nouveaux souvenirs, non ? Viens, on va dans le jardin.
- Attends, tu es sûre ?
- Mais oui ! Je tiens à peu près sur mes jambes même si je n'ai pas le droit de me lever du lit si y'a personne avec moi."
Nagisa me sourit et m'aida à me lever. Il me soutint ensuite et on sortit dans le jardin de l'hôpital. Afin que les patients ne soient pas dérangés, il n'était accessible qu'en passant par le bâtiment. On était ainsi à l'écart du tumulte des voitures et de la ville d'après un infirmier.
Il nous fallut bien quinze minutes pour l'atteindre et, une fois arrivée, Nagisa m'aida à m'asseoir sur un banc. Je respirai à fond l'air frais. Ça faisait vraiment du bien.
"Tu te sens mieux ? devina le bleu.
- Oh que oui ! Au moins, ça ne sent pas le désinfectant et ce n'est pas blanc de partout."
Nagisa rit légèrement puis on resta un moment en silence, écoutant juste le bruissement des feuilles. Inconsciemment, je me mis à bouger les doigts comme si je jouais du piano.
"C'est étrange...
- De quoi ?", demandai-je en sortant de mes pensées.
Nagisa mima qu'il jouait du piano avant de reprendre.
"Ta mémoire ne se souvient pas, mais on dirait que ton corps le fait pour toi. Tes doigts semblaient jouer une musique invisible que tu aurais joué des milliards de fois, comme si tu la connaissais par coeur.
- Comment tu sais ça ?
- Parce que je fais du piano depuis longtemps, même que je t'accompagnais.
- Je joue du piano ?
- De ce que j'en sais, un petit peu mais tu es surtout une violoniste. Après, je ne sais pas si les choses ont changé."
Une violoniste... ça expliquerait les bribes de musique dont je me souviens... il faudra que j'en parle aux médecins.
Je sentis Nagisa prendre ma main et la serrer dans la sienne, ce qui me fit rougir, surprise. Ce dernier sourit à ma réaction.
"Qu'est-ce-qui te fait sourire ? bougonnai-je.
- Tu es toujours aussi mignonne, c'est tout."
Je devins aussi rouge que mes cheveux et esquivai son regard en jouant avec une boucle écarlate. Il rit légèrement avant de changer de sujet, à mon grand soulagement.
"Cela te dirait que, une fois que tu seras sortie de l'hôpital, je t'emmène redécouvrir la ville ?
- Evidemment ! J'ai envie de tout voir ! Et surtout, de manger autre chose que la nourriture insipide de l'hôpital...
- Haha ! Je te ramènerai du chocolat si tu veux, je sais à quel point tu adores ça."
Il me fit un grand sourire éclatant qui fit accélérer les battements de mon coeur. Bordel, qu'est-ce-qu'il m'arrivait ? Pourquoi mon corps réagissait comme ça quand il était près de moi, depuis mon réveil ? Est-ce-que, d'une quelconque manière, il le reconnaissait ?
"Ce serait cool, merci.
- Avec plaisir. On pourra même jouer ensemble si tu veux, Karma a déposé ton violon dans ta chambre et il y a mon piano qui y est installé, vu que j'ai emménagé chez vous avec Rio."
Etrangement, cette proposition était davantage plus attrayante que celle de m'amener du chocolat ou de me faire redécouvrir la ville...
Je me souvins alors d'une enveloppe que Laura avait glissé dans le poche de mon jean le jour de mon réveil. Jean que je portais actuellement. Je fouillai donc les poches et trouvai ladite enveloppe, ainsi qu'un collier avec un pendentif en forme d'arc. Ce dernier tomba au sol mais Nagisa le ramassa.
"Tu l'as gardé ?
- Euh... je suppose que oui, vu que je l'ai visiblement toujours."
Il me passa le collier autour du cou avant de s'attarder sur ce que j'avais à la main. Il rougit comme pas possible. Je voulus l'ouvrir mais il posa ses mains sur les miennes pour m'en empêcher.
"Ne... ne l'ouvre pas s'il te plaît !
- Pourquoi ? Si je l'ai, c'est qu'elle est importante pour moi dans un sens, non ? Et puis, pourquoi t'es tout rouge ?
- Tu n'as pas changé, tu n'as toujours pas ta langue dans ta poche...", rit nerveusement Nagisa. "Je... je ne sais pas si elle est importante pour toi mais c'est moi qui l'ais écrite et... c'est trop tôt pour que tu lises son contenu.
- C'est toujours trop tôt...", boudai-je. "Moi, je veux savoir.
- Saori, on ne veut pas trop t'en dire car la moindre information pourrait ramener ta mémoire.
- Et c'est mal ?
- Non, mais tu l'as dit toi-même tout à l'heure. Il vaudrait peut-être mieux que tu ne retrouves pas tes souvenirs et que tu en construises de nouveaux.
- Mais..."
Il posa un doigt sur mes lèvres pour me faire taire, et je rougis aussitôt.
"Ecoute, je veux juste que tu sois certaine de vouloir retrouver la mémoire. On a tout le temps devant nous, que ce soit pour créer de nouveaux souvenirs ou juste pour te raconter ce qu'on sait sur toi. Réfléchis et prends le temps qu'il te faut pour prendre ta décision. Si tu veux toujours savoir, alors je te raconterai, mais tu dois savoir qu'il y a plus de malheur que de bonheur."
"Mais c'est important pour toi que je me souvienne !". C'était ce que j'aurais aimé répondre mais les mots ne sortaient pas. Pourtant, une nouvelle fois, il sembla comprendre ce que je voulais dire.
"Je veux que tu prennes cette décision pour toi, pas pour les autres. Je ne veux pas que tu choisisses de savoir juste parce que Karma, Rio ou moi le souhaitons, mais parce que toi tu le souhaites, d'accord ? Tu as déjà trop sacrifié au nom des autres, alors penses d'abord à ce que tu veux cette fois-ci."
Ses yeux bleus m'imploraient de l'écouter et exprimaient une tristesse infinie qui me serra le coeur. Je dégageai une de mes mains pour aller doucement caresser la joue du bleu, qui me sourit avec tout l'amour et toute la tendresse du monde.
"Je te le promets Nagisa. La dernière chose que je veux, c'est te faire souffrir."
Son sourire s'éteint et il baissa le regard.
"Pourquoi tu dis ça, alors que pour toi, je suis un inconnu ?
- Dis pas ça. Pour ma tête, tu es un inconnu, mais pas pour mon coeur. Je sais qu'il y a un truc entre nous, je l'ai ressenti dès que tu as commencé à me parler et je continue à le ressentir dans ta manière d'agir avec moi."
Et dans les folies de mon corps, mais ça c'était une autre histoire...
Je déposai un baiser sur son front et l'enlaçai.
"Aller, ne t'en fais pas pour ça. Tu arrives peut-être à me comprendre sans que je parle, mais c'est réciproque, oublie pas. Et ça, c'est la preuve que, souvenirs ou non, t'es toujours important pour moi. Car ce genre de choses, une amnésie peut pas l'effacer.
- C'est toi qui est à l'hôpital et pourtant, c'est toi qui me réconfortes...", rit Nagisa.
Je ris également puis Koro vint nous voir pour nous annoncer que l'heure des visites était terminée et que Sebastian, Nagisa et lui devaient repartir. Je rangeai donc la lettre dans ma poche et le bleu m'aida à remonter.
"Je te ramènerai de quoi t'occuper demain, comme des livres ou des films. Ainsi que tu-sais-quoi."
Il ponctua sa phrase d'un clin d'oeil.
"Amène mon violon aussi, s'il te plaît.
- Tu es sûre ?
- Ouais, je veux voir un truc."
Nagisa me sourit gentiment.
"D'accord. Au pire, tu as mon numéro dans ton téléphone. Si tu veux parler, envoie-moi un message ou appelle-moi.
- C'est d'ailleurs parce que "Mon P'tit Schtroumpf" était dans mes contacts que j'ai rapidement fait le rapprochement avec toi.
- Tu m'avais appelé comme ça ? Cela ne m'étonne pas de toi... pouffa Nagisa.
- Et moi, je m'appelle comment dans ton téléphone ?"
Il me sourit mais ne répondit pas, je compris alors qu'il me le dirait si jamais je souhaitais retrouver la mémoire.
"D'accord, je comprends.
- Tu es vraiment la meilleure.
- Je sais. Tu viens toute la journée aussi, demain ?
- Non, j'ai des travaux à terminer pour lundi. On n'est qu'au début de l'année donc je n'en ai pas beaucoup, mais tout de même. Je viendrai sûrement dans l'après-midi. Tu ne t'ennuieras pas trop d'ici là ?
- T'inquiète, je ferai un peu de sport avec Sebastian. Et par sport, j'entends marcher dans les couloirs. Si je veux pouvoir être capable de marcher toute seule rapidement, je dois m'entraîner.
- Haha ! Cela te ressemble bien ma Saori. Bon je vais y aller. Ne force pas, d'accord ?
- D'accord.", répondis-je en rougissant.
Il déposa un baiser sur le dessus de ma tête et sortit de la chambre. Juste avant de franchir le pas de la porte, il m'adressa un dernier sourire éclatant qui donna le top départ au marathon pour mon coeur.
Une fois parti, je me laissai tomber contre l'oreiller en soupirant. Je l'aimais, ça c'était certain. J'avais beau avoir perdu la mémoire, je me souvenais encore de la signification des mots que je devais sûrement savoir avant. Et mes symptômes correspondaient à la définition de l'expression "tomber amoureux". C'était peut-être pour ça que je l'avais surnommé comme ça d'ailleurs...
Bon, plus important : voulais-je retrouver la mémoire ou non ?
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