Chapitre 18

PDV Kaede

Mercredi. Cela faisait deux jours que mon Nagisa et cette tomate pas fraîche avaient annoncé être en couple. Deux jours qu'ils roucoulaient, se regardant sans cesse avec des coeurs dans les yeux sous les regards attendris de la classe.

Deux jours que j'avais envie de tuer cette tomate pas fraîche. Je ne supportais pas de les voir ensemble tous les deux, et il était hors de question d'attendre la fin de l'année pour espérer qu'ils ne se séparent. Non, je devais les séparer maintenant. Surtout que, si jamais leur mise en couple remontait aux oreilles de la famille royale, ses fiançailles seront annulées et elle restera. Et ça, c'est absolument HORS DE QUESTION !!

Nagisa était à moi, et rien qu'à moi ! Il n'appartenait pas à cette garce colorée ! J'avais joué la gentille fille quand Nagisa était venu me parler, en lui disant que seul son bonheur m'importait et que j'allais mettre mes sentiments de côté. Mais ça aussi, c'était hors de question. 

Qu'est-ce-que je pouvais faire pour les séparer ? Embrasser Nagisa devant elle pour qu'elle pique une crise ? Non, elle lui faisait beaucoup trop confiance pour ne pas le croire quand il lui dira que c'est moi qui l'ais embrassé. Quand bien même, ça ne résoudrait rien parce qu'il lui courra après ensuite pour la récupérer. Non, il fallait que cette garce retourne en Belgique, mais comment la faire rentrer plus tôt et faire en sorte qu'elle ne revoit plus jamais Nagisa ? Après ça, il sera à ramasser à la petite cuillère et je serai là pour l'aider, il tombera amoureux de moi comme ça. Mais je devais trouver un plan.

Le soir venu, dans ma chambre, je réfléchissais à une idée, me repassant en tête tout ce que je savais sur la tomate pourrie. Puis soudainement, illumination ! Un sourire machiavélique se dessina sur mes lèvres. Elle n'allait pas s'en remettre et Nagisa sera à moi pour toujours !

PDV Saori

Le temps passa, nous étions déjà arrivés à la moitié des vacances de Noël. La sortie à la fête foraine avec la classe avait été géniale et mon p'tit bleu avait été très amusé de me voir courir partout comme une enfant. J'avais voulu tout essayer et j'avais flashé sur un énorme loup en peluche au stand de tir. J'avais eu envie de jouer pour l'emporter mais Nagisa m'avait devancé, voulant la gagner pour moi, et c'était ce qu'il avait fait. Résultat, je ne dormais plus sans. La peluche avait cette odeur boisée teintée d'agrume si caractéristique de mon bleu, une senteur aussi apaisante qu'une journée au coin du feu de cheminée ou qu'une balade dans des bois enneigés. C'était le meilleur parfum au monde pour moi.

Présentement, j'étais allongée sur le canapé de ma chambre, la tête reposant sur les cuisses de Nagisa. On regardait un film mais j'étais plus captivée par le profil enfantin et adorable de mon schtroumpf que sur l'action à l'écran. Le bleu avait la main dans mes boucles et me les caressait tout en ayant le regard rivé sur la télévision. 

Je souris en repensant au cri qui m'avait percé les tympans quand j'avais annoncé à Elisabeth que j'étais en couple. Elle l'avait aussitôt dit à son frère, qui était super content de ne pas avoir à se marier avec moi, du coup. Puis elle l'avait dit à ses parents qui étaient heureux pour moi et qui avaient immédiatement commencé à annuler les fiançailles. Ils comptaient l'annoncer en douceur à mes parents et, à part pour régler deux ou trois bricoles à la fin de l'année, je restais définitivement à Tokyo, auprès de mon bleu.

"Kyukate ?

- Hm ?

- Je me demandais, tu comptes faire quoi du coup, puisque tu restes au Japon ? Tu vas faire des études de quoi ?"

J'écarquillai les yeux. C'était vrai ça, j'allais foutre quoi ? Il n'y avait pas d'études pour devenir archer et la perspective de devenir violoniste était certes attrayante, mais je voulais continuer à jouer uniquement avec Nagisa. Et il était hors de question de faire femme au foyer, j'avais pas envie de renforcer cette image de la femme qui sert qu'à enfanter et s'occuper de la maison.

"Je vais faire une générale, comme ça, j'aurais un peu de temps pour réfléchir à mon avenir pro, finis-je par répondre.

- C'est une bonne idée.", approuva mon bleu.

J'étais tellement heureuse que je ne vis absolument pas le temps passer. Février arriva rapidement. J'étais devenue très proche de Rio, ainsi que de Yada, et j'étais désormais parfaitement intégrée au sein de la classe E. Je faisais partie de cette grande famille.

Entre Koro qui avait décidé nous révéler son passé, la bataille de paint-ball qui en avait suivi quelques jours après pour déterminer si on allait le sauver ou non (Nagisa avait lancé l'idée et je l'avais suivi, après m'être souvenue de tout ce qu'il avait fait pour notre classe. Karma avait été contre et du coup... bah baston quoi), le duel entre Nagisa et Karma qui les avaient rapprochés et la mission dans l'espace pour trouver un remède pour sauver Koro.... on avait vraiment pas eu le temps de s'ennuyer. Mais alors vraiment pas.

Kayapute semblait avoir renoncé à ses sentiments pour Nagisa, mais je n'y croyais pas trop. Au moins, elle nous fichait la paix et restait toujours avec Kanzaki et Okuda. Je voyais bien que ça attristait mon p'tit schtroumpf, c'était sa meilleure amie après tout, alors quand elle se décidait à se joindre à nous, je l'acceptais sans broncher.

"Tu sais Saori, t'es vraiment une fille extra, me fit Rio durant la pause, le premier lundi de février.

- Pourquoi tu dis ça ?"

Elle pointa du menton Nagisa et Kayapute, que j'appelais Kayano en présence de Nagisa pour ne pas le blesser, qui étaient tous seuls, un peu plus loin.

"Je serais hyper ultra méga jalouse à ta place, et pourtant tu laisses faire sans broncher. Et quand il veut faire une sortie avec elle, tu acceptes sans protester et tu prévois ensuite un truc avec Yada et moi.

- C'est vrai, je reconnais que même moi, ça m'épate. Genre moi, ça m'énerverait trop p'tite soeur.

- Mais je suis plus rationnelle que toi grand frère. J'ai beau détester Kayapute, elle reste la meilleure amie de Nagisa. En plus, j'ai une confiance aveugle en lui, je sais qu'il ne me trompera pas.

- Et dire que c'est celle qui fait le moins confiance aux gens qui dit ça, ricana Rio.

- C'est vrai que je fais difficilement confiance aux gens, mais on parle de Nagisa là. Au fond de moi, je sais que rien ne peut nous séparer. Et puis, ma confiance est certes difficile à gagner, mais quand c'est fait, c'est irrémédiable, à moins d'acte de trahison évidemment. 

- C'est vrai, même quand tu as appris que Sebastian nous avait empêché de nous parler pendant dix ans, tu ne l'as pas renvoyé et tu ne lui en as pas voulu, admit Karma.

- Parce que, en dehors de ça, il m'a montré une loyauté et un dévouement sans borne. Dans ce genre de cas, je suis capable de passer l'éponge selon la gravité de l'acte. J'aurais sans doute été plus dure si je n'avais pas retrouvé mon frère avant de l'apprendre."

Le rouge me sourit et je lui souris en retour.

PDV Kaede, le soir venu

Enfin, tout était prêt. Fière de moi, je lus une nouvelle fois le mail que j'avais envoyé aux parents des Akabane quelques jours auparavant. C'est pratique qu'ils aient ouvert une boutique, on peut facilement trouver comment les contacter sur Internet.

Monsieur, Madame
Etant en troisième E au collège de Kunugigaoka, qui est classe de votre fille, je me permets de vous prévenir que cette dernière a continué à faire du judo et du tir à l'arc dans votre dos depuis de nombreuses années. De plus, elle a adopté un style vestimentaire et un comportement loin d'être recommandable pour quelqu'un de la haute société. Elle est en couple avec un certain Nagisa, avec qui elle a participé au concours du meilleur violoniste du monde, et, de ce fait, la famille royale a annulé les fiançailles avec le prince Gabriel. Je tenais donc à vous avertir afin de la remettre sur le droit chemin.
Je vous prie d'agréer Madame, Monsieur, mes salutations distinguées.
Signé : une élève de la classe E

Mon sourire s'élargit quand je vis la réponse que j'avais reçu quelques heures après avoir envoyé ce mail.

Chère élève de la classe E
Nous vous remercions sincèrement de nous avoir prévenu de son comportement contraire à l'étiquette. Nous allons envoyer du personnel pour la ramener en Belgique afin de corriger cela immédiatement, nous ferons en sorte qu'elle accepte de se marier au prince Gabriel, plutôt que de sortir avec un pianiste de bas étage.
Tous nos plus sincères remerciements,
Monsieur Daisuke Akabane

Profite bien de tes derniers instants de liberté Saori Akabane, l'enfer t'attend sous peu. Et patiente encore un peu Nagisa. Bientôt, très bientôt, tu auras oublié cette garce qui t'a retourné le cerveau...

PDV Karma

"Je n'arrive toujours pas à me faire aux bentos délicieux que vous fait Sebastian ! s'extasia Rio le mardi midi, en piquant sans cesse dans mon repas, alors qu'on mangeait au chaud dans la salle de classe (Koro étant parti manger je-ne-sais-où).

- Haha ! Je lui demanderai de t'en faire si tu veux, proposa Saori.

- Avec plaisir !!

- Et toi p'tit schtroumpf ? T'en dis quoi ?", reprit ma soeur en se tournant vers son copain.

En guise de réponse, ce dernier lui piqua un sushi dans son bento, ce qui la fit rire. Je souris, attendri. Ces deux-là étaient vraiment heureux ensemble, je n'avais pas vu Nagisa rayonner ainsi depuis... depuis toujours en fait. Quant à Saori, elle était encore plus souriante que lorsque je l'avais vu tiré à l'arc la première fois. Sans le bleu, jamais ma soeur n'aurait fait un tel chemin. Et dire que Rio et moi n'étions quasiment pas intervenus pour une fois.

"Ils vont bien ensemble, murmura Rio en regardant Nagisa tenter d'attraper le bento de ma soeur, qui le maintenant bien haut en riant.

- Ouais, je suis heureux pour eux. Quand je pense que, sans ce petit nain bleu, ma soeur n'en serait pas là... je veux dire, elle ne serait pas aussi libre ni aussi elle-même sans lui. Sans lui, elle aurait été obligée de se marier avec un ami et de vivre pour toujours une vie qui ne la rendait pas heureuse. Quoiqu'il arrive, rien ne les séparera. Ils s'attirent comme l'aimant et la ferraille depuis le début."

Ma petite amie ne répondit pas mais se contenta de sourire en les regardant comme une maman qui veillait sur ses enfants.

"Et peut-être que sans eux, on se serait jamais mis ensemble.", ajouta finalement Rio. "Ou, en tout cas, on aurait mis plus de temps. A force de se réunir pour essayer d'établir comment les mettre ensemble, on a passé beaucoup de temps ensemble donc, dans un sens, c'est grâce à eux."

Elle ponctua sa phrase d'un baiser sur mes lèvres, que je m'empressai de lui rendre. On baignait tous les quatre dans la joie, le bonheur et l'insouciance. Sauf qu'on était loin, très loin, de se douter que tout allait basculer d'ici peu.

Alors que tout le monde discutait joyeusement en mangeant, des hommes en noir défoncèrent la porte, nous faisant tous sursauter. Ils étaient armés et semblaient avoir mis hors d'état de nuire Karasuma car l'un des hommes le jeta aux pieds de Madame Pouffe, inconscient. Saori regarda les hommes et pâlit. Elle sortit son collier et détacha le pendentif pour s'armer de son arc. Elle sortit les quatre flèches qu'elle avait toujours dans son sac et les rangea toutes, sauf une, dans le carquois, parmi les flèches anti-sensei, qu'elle passa autour de sa taille.

"Kyukate, c'est qui ? s'inquiéta Nagisa.

- Des gens qui travaillent pour nos parents. Leurs cagoules portent le logo de la bijouterie des Akabane.

- Alors...", balbutia Rio.

Le visage dur, ma soeur encocha la flèche qu'elle avait gardé, prête à sortir de sa cachette pendant que les hommes interrogeaient la blonde assassin pour savoir où était Saori.

"Ouais, ils viennent pour moi. Restez à l'abri, je vais les faire partir.

- Kyukate, tu n'as que quatre flèches et ils sont une dizaine... souligna son copain, inquiet.

- Je sais, c'est pour ça que je les ai mises avec les flèches anti-sensei. D'apparence, elles sont identiques aux vraies flèches, mais pas à la texture. Si j'arrive à les tromper, ça devrait le faire. Veillez à ce que les autres ne bougent pas."

Je hochai la tête et on s'éparpilla silencieusement. Les hommes ne nous prêtèrent pas attention car ma soeur avait surgi de sa cachette, la flèche prête à partir sur un des hommes.

"Dame Saori, vous voilà enfin, dit un homme.

- Veuillez nous suivre sans faire d'histoire, nous avons pour ordre de vous ramener en Belgique, ajouta un deuxième.

- Jamais ! Je ne rentrerai pas. Les fiançailles sont annulées et je ne suis plus la marionnette de mes parents ! D'ailleurs, qui les a prévenu de où j'étais ? Répondez !"

C'est vrai ça ? Comment ils avaient su dans quel bâtiment elle était ? Et comment ils avaient pu neutraliser Karasuma ? C'était un monstre ! Remarque, vu le fric qu'avaient nos parents, ils avaient dû mettre les moyens pour ramener Saori. Mais comment ils avaient su qu'elle leur désobéissait ? Sebastian n'aurait jamais fait ça, Nagisa encore moins, et Rio non plus n'aurait jamais rien dit, de même que la plupart de la classe. Depuis qu'elle était elle-même, aucun ne semblait avoir une quelconque rancoeur envers ma soeur...

Saori sembla parvenir à la même conclusion car elle raffermit sa prise sur son arme fétiche.

"Partez ou je vous descends.

- Vos parents se doutaient que vous diriez ça Dame Saori. C'est pourquoi ils ont prononcé la menace suivante : si vous ne venez pas, nous descendrons un par un tous vos camarades, à commencer par le stupide pianiste qui vous sert de copain, répondit celui qui semblait être le chef du groupe.

- Vous bluffez."

Je voyais bien dans ses yeux qu'elle commençait à paniquer et qu'elle cherchait à gagner du temps pour que Koro rentre, mais pile quand on avait besoin de lui, il était absent.

"Vous croyez ?"

Un des hommes pointa son arme à feu sur Okuda, qui était la plus proche de lui. Saori déglutit, alors que j'essayais de convaincre les élèves de mon côté de ne pas intervenir.

"Saori, ne fais pas ça. Ne sacrifie pas une nouvelle fois ton bonheur pour le bien-être des autres ! Koro va rentrer, il a intérêt ! Je sais qu'il va rentrer d'une seconde à l'autre, il n'a pas le choix !"

Je cherchai Nagisa du regard, et quand nos yeux se croisèrent, je vis dans son regard bleu ciel qu'il pensait la même chose que moi.

Ma soeur laissa courir son regard sur l'ensemble de la classe. Elle essayait de paraître neutre, mais ses yeux brillaient, preuve des larmes qu'elle essayait de retenir. Ce fut là que je sus que ça ne servait à rien, que tout allait redevenir comme avant.

"Est-ce-que j'ai la certitude que mes parents ne leur feront aucun mal si je vous suis ?

- Kyukate, non !", cria Nagisa, la voix brisée par les sanglots.

Elle ne lui répondit pas, elle ne se tourna même pas vers lui. Mais je sus aux larmes qui dévalaient les joues de Nagisa qu'il avait compris que sa décision était déjà prise.

"Ils nous ont assuré que si vous faîtes ce qu'ils veulent, comme épouser le prince Gabriel, les termes de votre contrat passé s'étendra à toutes vos connaissances ici.", affirma le leader.

Saori baissa la tête, avant de faire de même avec son arc et de laisser tomber sa flèche.

"D'accord. Laissez-moi faire mes adieux et récupérer mes affaires. Je vais prévenir Sebastian de faire mes bagages.

- Inutile, il est déjà au courant.", répondit le leader. "Vous avez deux minutes."

Les hommes sortirent mais je sus qu'ils étaient dans le couloir, à attendre ma soeur. Aussitôt qu'ils furent sortis, tous les élèves se jetèrent sur Saori pour lui faire un câlin, de même que Madame Pouffe. Ma soeur nous le rendit tristement, même si elle souriait pour faire bonne figure.

"Saori, t'étais pas obligée, sanglota Kurahashi.

- Si, parce que votre sécurité est ce qu'il y a de plus important pour moi.

- P'tite soeur, on en a déjà parlé... dis-je doucement.

- Je sais, mais les circonstances sont différentes."

Tout le monde pleurait, sauf Terasaka mais je voyais bien que c'était parce qu'il se retenait.

"Oye, ne change surtout pas, compris ? Ne redeviens pas cette guindée affreuse que tu étais quand on t'a rencontré ! marmonna la brute.

- Promis."

Cette promesse était vide de sens, pour elle comme pour moi, de même que pour Nagisa et Rio. On savait parfaitement qu'elle n'allait pas pouvoir tenir cette promesse, et je pense que tous s'en doutaient également. 

Ma soeur miniaturisa son arc et le crocheta au cordon avant de le passer sous son uniforme, pour le cacher. 

Elle récupéra ses affaires avant de me prendre dans ses bras.

"Grand frère, découvre qui m'a dénoncé et fais-lui payer d'une manière ou d'une autre. Je compte sur toi. Je vais faire en sorte que tu gardes au moins contact avec Sebastian pour qu'il puisse te donner de mes nouvelles. Veille sur p'tit schtroumpf pour moi, d'accord ? Ne le laisse jamais arrêter de jouer du piano ou même arrêter de sourire.

- Tu sais, je suis sûre que c'est Kayapute. Elle semble pas triste de te voir partir.

- C'est ce que je pense aussi, mais tire ça au clair pour moi. 

- Promis !"

Elle se détacha, essuya la larme qui coulait sur ma joue et m'embrassa le front comme pour me dire "prend soin de toi, je t'aime.". Elle prit ensuite Rio dans ses bras, qui était à côté de moi. J'entendis donc ce qu'elle lui dit.

"Toi et Karma, découvrez la vérité pour moi. Et je veux que toi, ma meilleure amie et future belle-soeur, tu veilles aussi sur Nagisa. Je veux qu'il soit heureux. Si je sais qu'il est heureux et qu'il sourit, alors ça m'aidera à garder pied. Et pitié, sauvez Koro. Je veux que Nagisa ait quelqu'un qui le comprend comme moi je le comprends.

- Compte sur moi, FBS.

- FBS ?

- Future Belle-Soeur."

Saori lâcha un rire, à la limite entre la tristesse et la joie avant d'étreindre de toutes ses forces son schtroumpf pour la dernière fois. Avec les autres élèves, on tourna le dos pour leur laisser un minimum d'intimité pendant que Madame Pouffe essayait de réveiller Karasuma, en vain. Il avait dû être endormi avec un gaz encore plus puissant que celui de Smog, à Okinawa. Je ne voyais pas ce qu'ils faisaient, mais je savais qu'ils s'embrassaient fiévreusement, avec tout l'amour et la passion qu'ils éprouvaient l'un pour l'autre, avec toute leur détresse car ils savaient que c'était leur tout dernier baiser, leur tout dernier instant un peu heureux. Ils devaient aussi sûrement se chuchoter des conseils, conseils que ma soeur ne pourrait certainement pas suivre, ni même le bleu qui allait sûrement déprimer, mais elle comptait sur nous pour que lui les suive au pied de la lettre. Et je savais aussi qu'elle espérait qu'il se trouve quelqu'un d'autre et qu'il soit aussi heureux qu'avec elle.

Puis l'instant fatidique arriva. L'instant où elle s'approcha de la porte, embrassant d'un regard nostalgique la salle et notre classe. L'instant où elle franchit cette foutue porte avant de la fermer. L'instant où elle repartait vers une vie qui la rendait malheureuse. L'instant où tous, même Terasaka, s'écroulèrent sur eux-mêmes pour pleurer. L'instant où je perçus le sourire victorieux de Kayapute. L'instant où Nagisa le perçut, comprenant que sa meilleure amie avait tout fait pour le séparer de sa belle. L'instant où il lui adressa un regard furieux, déçu, triste, un regard qui dit qu'il ne lui pardonnera jamais. L'instant où son sourire à elle s'effaça, comprenant l'énorme boulette qu'elle avait faite, comprenant qu'elle avait perdu son meilleur ami par jalousie aveugle. 

L'instant où je me promis de lui faire payer ce qu'elle venait de faire. L'instant où je me dis que la grande gentillesse et tolérance de ma soeur l'avait perdu. Si elle s'était plus méfiée de cette courgette, peut-être qu'on aurait pu éviter ça. L'instant où je me dis que la naïveté de Nagisa doublée par le monde en rose qu'on voyait en étant amoureux les avaient perdu tous les deux. Si on s'était tous davantage méfiés.... 

L'instant où je me dis que, non, ce n'était pas la faute de ce couple si parfait qu'ils formaient, mais bien de celle de la courgette/yandere que le bleu avait choisi comme meilleure amie.

L'instant où Koro débarqua joyeusement, trois milliards d'années après la guerre. L'instant où il perdit son sourire en voyant nos visages effondrés. L'instant où il remarqua l'absence de ma soeur. L'instant où il trouva la flèche que ma soeur avait laissé tomber.

L'instant où Nagisa hurla de détresse pure. Un hurlement qui aurait pu fendre le coeur pourtant inexistant d'un rocher. Un cri à fendre l'âme, un cri qui n'exprimait qu'une petite partie de toute la détresse que ressentait ce petit bleu, une détresse bien trop importante pour un si petit corps. Cet instant où Rio et moi, effondrés, entraperçurent un instant la descente en enfer qui nous attendait pour pouvoir refaire sourire un jour ce petit nain bleu qui avait été pour ma soeur, durant un temps, la lumière au bout du long couloir sombre.

Cet unique instant où tous n'avaient envie que d'une seule chose : pleurer jusqu'à mourir de dessèchement ou noyé par nos propres larmes. Car c'était encore une fois pour la sécurité de quelqu'un qu'elle avait une nouvelle fois sacrifié sa liberté si durement acquise. Sauf que cette fois-ci, elle l'avait fait pour toute la classe, élèves comme professeurs, amoureux comme amis ou camarades. Et c'était bien plus dur à encaisser pour moi que la première fois.

Cet instant où je pris conscience que nous ne la reverrions jamais de nouveau, hormis dans les journaux dans quelques années. Cet instant où je compris qu'on ne pouvait rien faire pour la ramener, car ça ruinerait son sacrifice, car ça empirerait sa situation.

Cet instant où je hurlai moi aussi de toutes mes forces, pour évacuer ma rage, ma tristesse, mon impuissance. Cet instant où, même sans savoir ce qu'il s'était passé, le poulpe pleurait à chaudes larmes comme nous. Cet instant où tous crièrent de toutes leurs tripes, un cri qui aurait pu faire exploser la lune si elle n'était pas déjà détruite. Un cri qui laissa dans notre bouche le goût amer de l'impuissance, de la fatalité.

Cet instant où, parmi ce maelstrom de sentiments, je me jurai d'un jour faire payer mes parents qui ne faisaient que causer le malheur de ma petite soeur, juste pour le fric et le prestige. Cet instant où j'espérai que Sebastian ou n'importe qui dans ce foutoir de château belge serait là pour soutenir Saori comme nous aimerions tous le faire...

Cet instant où, par jalousie, une personne du groupe avait gâché pour toujours la vie d'une des nôtres, en plus de celui qu'elle disait aimer.

Cet instant où Kaede Kayano, en voulant séparer Saori et Nagisa, avait provoqué la dépression chez le petit pianiste bleu, cet instant où elle l'avait fait plus souffrir que n'importe qui au monde. Cet instant où je sus que Nagisa avait choisi de couper les ponts définitivement avec elle.

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Peu importe combien de fois je relis ce chapitre, je pleure... j'ai l'impression de ressentir la douleur de "mes" personnages...

Bon, j'espère que ce chapitre vous a quand même plu. Il pourrait presque signer la fin de la fanfic, mais no panic ! L'histoire va jusqu'au chapitre 31, avec en plus un épilogue ! 

On se retrouve samedi pour le chapitre 19. Je vous préviens tout de suite, on aura un saut dans le temps de 3 ans, donc préparez-vous !

Biz,
Angel

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