#97 Sourires

Christophe Maé | La poupée.


***






Le silence de la maison occasionnellement brisé par le son des vagues à l'extérieur ou le chant agréable des oiseaux posés fièrement sur leur branche, avaient su me faire soupirer lorsque j'avais quitté le lit pour rejoindre la salle de bains. Mon cœur semblait battre un peu plus librement depuis que les larmes avaient assailli mes joues la veille, en même temps que celles bien trop lourdes de Jimin.

L'air d'ici me permettait de respirer, de me débarrasser de ce stress que je ne parvenais toujours pas à évacuer. Parce que ma mère me préoccupait, et que malgré les paroles du médecin, j'avais ce pré-sentiment détestable. Son état s'améliore, tu n'as pas à t'inquiéter. Lorsqu'elle ira encore mieux, on la renverra en Corée. Il me les avait répété, ces mots, mais au fond de moi, seule la pensée du mensonge me tiraillait. 

Je n'y croyais pas un seul instant, mais de toutes mes forces, je m'accrochais à cet espoir que je voyais déjà disparaître.

C'est mes vêtements au sol et le corps entièrement nu que j'étais entrée dans la douche, les mains en appui sur les vitres et les yeux fuyants. Ma silhouette m'était encore difficile à regarder sans froncer les sourcils. À mesure que le temps m'avait échappé, j'avais pris conscience de la longueur importante de mes cheveux, de leur couleur sombre et dans un sourire, je m'étais promis de les soigner lorsque je le pourrais.

L'eau du jet n'avait pas tardé à combler mon corps alors que quelques frissons agréables caressaient ma peau. J'y avais passé du temps, plus qu'à mes habitudes parce que rien qu'une fois, je voulais profiter, penser à moi. Par-delà la fenêtre, le soleil s'élevait lentement dans le ciel, partageant sa beauté avec le paysage. La chaleur me faisait souvent du bien ces derniers temps. Comme si je m'étais retenue toute une vie mais que je découvrais lentement, les plaisirs que la détente pouvait offrir.

Un peu plus tard, lorsque j'avais quitté la douche, une serviette sur les épaules et le corps vêtu, j'avais rencontré Hoseok dans la cuisine, une tasse fumante entre les doigts et un sourire éblouissant aux lèvres. Et bordel ce qu'il m'avait manqué, ce sourire.

Je n'avais pas eu le temps d'avancer un peu plus. Les bras du rappeur m'avaient rapidement enveloppée dans cette étreinte à la chaleur unique. Pour la première fois depuis des mois, j'avais osé enfiler un débardeur, dévoilant mes bras pour affronter ce corps qui était le mien. Pour commencer à tenir tête à ce reflet dans le miroir. Et comme s'il m'avait détaillée déjà bien avant, Hoseok avait soupiré, le nez enfoui dans mes cheveux et les yeux clos.

Alors j'avais entouré son cou de mes bras.

- Quel est le programme d'aujourd'hui, monsieur Jung?

- Répétition pour nous, et repos pour toi.

- J'ai quand même le droit de danser avec vous?

- Seulement si tu vas bien.

J'avais souri à ses mots, touchée par cette inquiétude qui me faisait un bien fou. Parce que pour la première fois depuis longtemps, on se préoccupait de moi, de ma santé.

Après avoir embrassé l'une de ses joues, je lui avais souri pour disparaître ensuite, prise par ce besoin de voir Jimin. Et comme ça, le cœur léger et les pieds nus, j'avais pénétré les couloirs encore sombres sous l'absence de lumière; les garçons n'étaient pas tous réveillés. Puis dans un sourire, j'avais abaissé la clenche de la porte devant moi. J'aurais voulu réveiller Jimin par quelques caresses, ou des murmures. J'aurais voulu qu'il ouvre les yeux pour me sourire ensuite, mais en m'approchant un peu plus du lit, je l'avais vu grimacer.

C'est là que je m'étais demandée s'il allait bien, ou mieux. J'avais passé une main dans ses mèches noires désordonnées pour observer un peu mieux l'expression de son visage. Ses traits tirés par la fatigue et ses yeux gonflés par les larmes de la veille me montraient qu'il n'avait certainement pas encore récupéré entièrement.

- Tu vas mieux? J'avais murmuré, les fesses posées sur un morceau du lit que le corps de Jimin n'occupait pas.

- J'suis bloqué. Sa voix étouffée avait embrasé mon inquiétude déjà grandissante.

Il était là, allongé sur le ventre et ses yeux fixant les miens, les bras croisés sous l'oreiller. Et j'avais fini par comprendre qu'il n'arrivait pas à bouger sans gémir de douleur. Ces derniers temps, Jimin se plaignait souvent de douleur aux cervicales et dans le bas du dos. Je n'avais pas attendu longtemps avant d'enjamber son corps pour m'installer sur ses fesses, les mains sur sa nuque.

- T'y arriveras pas comme ça, Seo. Ça doit claquer pour me débloquer.

J'étais consciente que ce genre de pratique dépassait mes capacités, mais j'étais certaine d'une chose, c'est que débloquer son dos restait dans mes cordes. Alors j'avais posé un genoux sur le bas de son dos et fermé les yeux lorsque Jimin avait douloureusement gémi sous mon poids. Du bout des doigts, j'avais remonté son haut jusqu'aux trapèzes pour tâter ses os du dos. C'est après quelques instants que j'avais trouvé ce que je cherchais.

- Je suis désolée. J'avais soufflé, le visage voilé par mes mèches.

En même temps, j'avais exercé une forte pression sur ses vertèbres et avec du mal — mon poids avait beau lui faire mal, il n'en restait pas moins insuffisant — j'avais touché ce point. Son cri étouffé dans les oreillers et ses yeux durement fermés me faisaient comprendre qu'il ne supporterait plus très longtemps.

Puis après un long moment passé et dans un claquement plus prononcé que les autres, le bruit de quelques os s'était fait entendre; j'avais souri au soupir de soulagement de Jimin qui, le visage enfoncé dans les coussins et la respiration désordonnée, avait semblé retrouver la vie.

Je n'avais plus bougé pendant un moment, préférant attendre qu'il aille mieux avant de faire le moindre geste. Plus tard, lorsque son souffle s'était fait plus régulier, il avait tourné la tête, le visage marqué par les traits de l'oreiller.

- Viens là... 

Mon sourire ne lui avait pas échappé, avait paru lui plaire. Et moi, dans des mouvements maladroits, j'avais quitté son dos pour me retrouver à côté de lui, dans ses bras et allongée.

- Je peux rien faire pour ta nuque.

- Jungkook s'en chargera.

Il effleurait la peau de mon bras du bout des doigts, faisant hérisser mon poil d'une manière agréable. Bientôt, c'est toute sa main qui avait enveloppé mon poignet et ce n'est que quelques secondes plus tard que j'en avais compris la raison. Le soleil avait parsemé la chambre de quelques-uns de ses rayons et je voyais très nettement les traits de son visage.

- Comment va ta brûlure? Sa voix était faible, douce, encore voilée par le sommeil.

- Les médecins se sont chargés d'en prendre soin.

- Ils ont eu raison, tu ne l'aurais jamais fait de toi-même.

Je lui avais infligé un léger coup sur le torse, consciente qu'il avait raison. Ses doigts avaient tracé leur chemin sur mon bras, pour effleurer mon épaule et arriver à mes clavicules, juste au-dessus de ma poitrine.

- Tu le fais encore... Il avait murmuré, une lueur mystérieuse dans le regard.

- Fais quoi? Moi, j'avais penché la tête, curieuse.

- Te gratter.

C'est là que j'avais saisi ses paroles, lorsque ses yeux avaient croisé les marques que je m'étais infligées sous la douche en frottant.

- C'est plus fort que moi.

- Tu fais ça parce

- C'est pas ce à quoi tu penses, vraiment. Je m'étais redressée, pour lui montrer que je parlais sérieusement. L'eau me provoque de fortes démangeaisons et parfois, c'est tellement insupportable que j'ai besoin de gratter pour que ça s'en aille. Les marques restent après la douche mais ça ne fait pas mal.

Peut-être pour soulager les griffures, il avait caressé les parcelles de peau rougies par mon passage. Elles s'étalaient sur plusieurs endroits, allant de ma poitrine jusqu'à mes épaules et quelques fois, sur l'espace de mon dos. J'en avais aussi sur les cuisses mais tout partirait dans les minutes à venir.

- Je vais danser avec vous aujourd'hui.

- Pas si tu

- Je vais très bien.

Il m'avait regardée droit dans les yeux, et par ce geste, j'avais cru me retrouver nue devant lui. Il m'avait observée, avait détaillé une lueur dans mon regard, certainement. Comme pour y attraper un mensonge, ou une vérité camouflée. Mais je ne mentais pas. J'allais bien. Après un moment à batailler avec ses mots silencieux, il avait soupiré pour me serrer un peu plus contre lui et sans doute ne m'étais-je pas attendue à ses prochaines paroles.

- Tu me rends un service?

- Hm... Ma voix étouffée dans son haut ne l'avait pas empêché de comprendre.

- Tu peux te peser... devant moi?

Nous n'étions pas restés dessus une éternité. Je n'avais pas cherché à lutter, à le contredire ou à m'énerver. Parce que n'avais plus rien à lui cacher et je savais qu'il s'inquiétait plus qu'il ne le laissait paraître. Alors j'avais quitté son lit, les pieds nus sur le carrelage et le cœur battant; j'avais toujours été effrayée lorsque la balance se retrouvait devant moi. Je l'avais placée aux pieds du lit, là où Jimin s'était lentement redressé pour s'asseoir.

Ma tête me répétait que je faisais certainement une erreur, et cette voix me murmurait combien j'allais être déçue de tous ces efforts inutiles depuis des semaines.

Pourtant, en montant sur la balance... En constatant les chiffres maigres, mais bien plus prometteurs qu'autrefois, j'avais souri tout en entendant Jimin qui venait de respirer à nouveau. Ce n'était pas exceptionnel, mais pour moi, pour lui, sans doute était-ce un pas énorme.


41.03kg


Puis Jin avait appelé mon nom de la cuisine, me faisant me relever en même temps que Jimin. Mes yeux avaient croisé les siens encore embrumés et dans un dernier sourire, j'avais posé mes mains sur ses épaules pour me hisser sur la pointe des pieds ensuite et embrasser ses lèvres pour disparaître de la chambre sans qu'il ne le voit. En réapparaissant à l'encadrement de la porte, j'avais pouffé devant son air perdu mais surtout, face à l'épis sur le haut de sa tête. Et dans un rire spontané, j'avais soufflé en disparaissant de nouveau:

- Va te débarbouiller!







***







Sous un ciel bleu et dénué de nuages de vapeur, sous la mélodie des vagues et la sensation de l'eau emportant les corps dans l'océan, les éclats de rire trop sincères d'une petite fille résonnaient à travers la faible brise d'un soleil d'après-midi. Elle était heureuse, Soo Min. Ses cheveux sombres collaient son visage tandis que dans ses yeux, brillait cette lumière à l'innocence attendrissante.

Elle était heureuse, Soo Min.

Ou presque.

Dans les bras de Taehyung et prête à sauter dans ceux de Hoseok, elle avait crié qu'elle arrivait, qu'il devait se préparer et que surtout, il ne devrait pas la lâcher. Et à quelques pas d'eux, le bas du corps enfoncé dans l'eau et une balle entre les doigts, Jin avait annoncé qu'il allait lancer. Les yeux plissés, Taehyung ne s'était pas empêché de garder la petite contre lui, pour veiller sur elle, lui montrer que son petit cœur avait le droit de poursuivre son chemin.

Dans des gestes tendres et sans la brusquer, il l'avait retournée, prêt à la laisser s'envoler vers son aîné à qui le sourire ne fanait plus. Alors il l'avait lâché dans des rires répétés, sous le ciel et son soleil, au-dessus de l'eau et ses vagues, pour la voir atterrir dans les bras d'Hoseok.

Là, elle avait crié de joie, heureuse d'avoir réussi à survoler l'océan le temps d'une seconde. Et le nez effleurant celui du rappeur, elle avait déplacé l'une des mèches sombres de celui qu'elle avait rencontré.

- On ne voit plus tes yeux, Hobi! Elle s'était exclamée, le visage rayonnant et le cœur battant librement.

Elle en avait besoin, Soo Min. De cette joie, elle en avait besoin. Pour combler ce trou au fond d'elle. Celui qui laissait ses larmes dévaler ses joues lorsqu'elle avait trop mal pour pouvoir les retenir.

- Qu'est-ce que j'aurais fait sans toi, hm? Il avait murmuré en déposant ses lèvres sur sa tempe.

- Je lance! Et Jin n'avait pas attendu avant d'attaquer, la balle entre ses doigts et les yeux moqueurs.

Dans son maillot de bain bleu foncé, Soo Min avait crié qu'elle n'avait pas peur et qu'elle allait l'attraper, cette balle. Aussi, et d'une voix emplie de malice, elle avait demandé à Hoseok de la hisser sur ses épaules nues et bronzées par les rayons du soleil et sans même hésiter, il l'avait attrapée pour l'y placer, les mains délicatement posées sur ses mollets découverts.

Les jours défilaient, offrant à ces personnes, une chance de pouvoir recommencer, d'à nouveau pouvoir rire, sourire et quelques fois... pleurer. Et c'est ce qu'ils appelaient vivre. Ce qu'ils demandaient... pouvoir profiter et surtout, ré-apprendre à savourer les sensations qu'ils avaient pourtant cru oubliées.

- Jinie est tombé dans l'eau! Et la voix aiguë de la petite avait fendu l'air, provoquant les rires des trois hommes à ses côtés.

C'est dans un dernier lancer de balle que Taehyung s'était approché pour une fois encore, la serrer dans ses bras et lui donner, ce qu'elle n'osait plus réclamer. Parce que Soo Min n'était pas fautive et que ses rêves ne devaient pas être brisés. Que le soleil brillait et que ces sourires, devaient être préservés.

- Min-ah! Sur le sable et un tube coloré entre ses doigts, Yoongi avait haussé le ton, une main au-dessus du front pour un peu mieux et sous la puissance du soleil, observer la fillette dans l'eau. Viens par ici que je te mette de la crème!

Il avait souri lorsque, toujours dans les bras de Taehyung, elle l'avait pointé du doigt. Puis les pieds dans ses claquettes et les yeux voilés par des lunettes de soleil, Yoongi s'était installé sur un des transats de la plage, une serviette blanche posée sur l'un de ses genoux. Ses lèvres s'étaient courbées en apercevant la petite courir vers lui, le corps entièrement trempé et le visage dissimulé par ses cheveux lâchés.

- Viens par là. Il avait soufflé en tendant les bras vers elle. Personne ne t'a mis de crème.

- C'est pas moi c'est Kookie! Sans hésitation, elle avait accusé le jeune chanteur.

- Alors Jungkook va se faire gronder. En même temps, il avait déplié la serviette pour l'y envelopper.

- Il fait des bêtises.

- Tout à fait. Et doucement, il avait frotté ses cheveux, puis son visage pour terminer par le bout de son nez. 

- Je vais retourner dans l'eau? Yoongi avait senti l'inquiétude dans la voix de la fillette et dans un sourire, il avait hoché la tête.

- Pourquoi tu ne pourrais pas?

- Alors tu viens avec moi?

- Absolument pas.

- Pourquoi?

- Parce que?

- Pourquoi?

- Parce que...

Elle avait croisé les bras sur sa poitrine, les joues gonflées et l'air boudeur. Et Yoongi ne s'était pas empêché d'éclater de rire, conscient qu'il était le plus fort à ce jeu. En étalant la crème sur le corps de Soo Min, il l'avait vu observer le mouvement des vagues, déjà envieuse à l'idée de pouvoir y retourner. Yoongi s'était dit qu'elle était infatigable pour un aussi petit bout et il avait bien regretté sa faiblesse lorsqu'elle l'avait tiré vers la mer, le suppliant de venir jouer avec elle et les garçons.

Il avait cru être le plus fort à ce jeu, mais son cœur n'avait pas su faire face à ces petits yeux scintillants, à ces joues rougies et ces doigts entourant les siens. Là, Yoongi avait su que même lui, n'était pas capable de le lui refuser.

Et au loin, les pieds sur le sable et le corps droit... à quelques mètres de l'eau et les yeux embués, Na Seo voyageait parmi ses souvenirs, ses larmes et ses rêves. Parmi ses songes.




Et son univers.







***


hello!
pour une fois j'ai pas mis quatre mois avant de publier et j'en suis contente!

j'espère qu'il vous a plu, que vous aimez la relation des garçons avec la petite Soo Min et que l'histoire vous porte toujours. je reprend l'écriture tout doucement et je vais essayer de publier plus souvent sur cette histoire!

un moment avec hoseok, j'en connais une qui a souri ptdrrr

j'espère pouvoir vous faire voyager en cette période de confinement. surtout faites attention à vous!

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top