8. Me & Mrs Jones
Moi et Mme Jones
Une chose est en train de naître
Nous savons tous les deux que c'est impossible,
Mais c'est beaucoup trop fort
Pour laisser tomber maintenant.
Me & Mrs Jones - Billy Paul reprise par Michael Bublé
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- Taehyung, je peux vous parler quelques instants?
Le cours de danse vient de finir avec la révérence au professeur. Mes chaussons glissent sur le parquet qui a vu passer un nombre infini de danseurs de ballet, mes muscles se détendent enfin lorsque mon corps se relâche, la sueur coule le long de mon dos jusqu'à l'arrondi de mon justaucorps.
J'ai tout donné ce soir pour cet entraînement. Ce corps, c'est la personne avec qui je m'entends le mieux, que je connais le mieux. Quand on est jeune danseur classique, on est comme un pur-sang lâché au galop. On maîtrise davantage son corps plutôt que son mental. Souvent, alors que je pensais que j'étais épuisé, vidé, je trouvais un regain d'énergie que je ne soupçonnais pas.
Je me sens bien même si j'ai mal, dans mon élément et je donnerai tout pour danser encore des heures. Il faut pourtant se raisonner, accepter que son propre corps a besoin de se reposer. J'ai appris à le faire auprès de Jimin qui se raisonnait lui aussi. Sinon lui et moi aurions pu nous y perdre, si même mon père n'était pas venu un nombre incalculable de fois nous chercher pour l'heure du dîner.
- Bien sûr, je réponds, en hochant et baissant la tête.
Je me saisis de ma bouteille d'eau au sol non loin des miroirs, pour en boire une grande partie. Mes collègues étudiants se pressent vers la sortie et les vestiaires. Eun-Byol se retourne quand elle voit que je ne la suis pas, mais aperçoit le professeur près de moi, et elle décide de franchir la porte, dans une envolée de jupon.
La danse permet quasiment de voler avec toute la légèreté qu'elle demande. Elle est bénéfique pour le corps et l'esprit, et défie presque les lois de la pesanteur.
- Taehyung, je sais que vous avez déjà un emploi du temps très chargé et avez fait le choix du double cursus universitaire, en vous positionnant ici chez nous comme suppléant. Mais sincèrement lorsque je vous vois danser, je vois en vous un prochain danseur étoile. J'ai lu les lettres de recommandation de votre premier professeur ainsi que celui du conservatoire de Jeju et je suis entièrement d'accord avec eux.
Le corps est utilisé comme objet d'art, c'est ce que le spectateur va voir et ce qui va être mis en scène, et pourtant, ce corps si précieux en danse est la cible d'une pression dangereuse, La douleur, c'est notre compagne.
J'ai peur de me confondre en excuses en entendant ses mots, alors je m'incline plusieurs fois en signe de reconnaissance.
- J'aimerais vous demander de réfléchir à votre investissement. Nous avons vraiment besoin de vous ici et comme je viens de vous le dire, je pourrais vous emmener loin. Très loin.
On ne s'arrête jamais, je fais moi-même des kilomètres de barre depuis mes dix ans, c'est ma structure, le prolongement de ma colonne vertébrale, c'est ma vie. La douleur est là, elle a toujours été là, mais transcendée. Elles ne sont pas toutes pareilles. Il y a celle qui vient parce que l'on tire trop sur le corps, que nos articulations sont enflammées, cette douleur-là est acceptable et il faut la tolérer. Il y a la douleur après, quand le corps est meurtri après un spectacle, et qu'on en ressort comme roué de coups. Et puis, il faut distinguer la douleur et l'accident. La douleur ne m'empêche pas de danser, l'accident oui. La douleur, il faut l'accommoder, c'est une longue habitude.
- Je vous remercie de votre honnêteté et je vais y réfléchir, je fais en m'inclinant une dernière fois.
On développe une sorte de tolérance, presque une appétence à la douleur. C'est très personnel, le rapport à la douleur. En même temps, on connaît le parcours : plus on avance dans la hiérarchie, plus les places sont rares. Et plus on avance, plus on est résistant à la douleur. On laisse rarement passer sa chance.
- Bien, je suis content d'entendre cela, fait en me saluant une dernière fois mon professeur maître de ballet, Lee Young Cheol. Je connais son parcours, ses résultats époustouflants, son corps magnifique malgré les années et l'âge. Un danseur étoile aux multiples talents.
Je ne devrais pas laisser passer ma chance.
Je le sais, on me l'a souvent dit. J'ai cela dans les veines, dans le sang de ma mère qui coule en moi, cette danseuse classique émérite. Dans ce corps que j'ai façonné avec le temps.
Et puis j'ai eu cette attirance pour la médecine, pour la découverte et l'envie de soigner et réparer. Je ne peux pas dire que les propos de mon professeur remettent tout en question, juste que le fait de danser me fait tellement me sentir en vie. J'aimerai ressentir la même chose quand un jour j'aurai à faire une opération à cœur ouvert. Est-ce que la sensation sera la même? Est-ce que je serai déçu? Est-ce que je m'y perdrai en regrettant de ne pas avoir pris le chemin de l'opéra plus tôt? Je me fais peut-être une idée bien trop utopique du métier de chirurgien cardiaque. Suis-je assez bon dans ce domaine? Je n'y ai pas encore assez fait mes preuves comme en danse, mon lieu de prédilection.
Je le salue à mon tour, fait des pas discrets jusqu'à la sortie et m'engouffre dans les vestiaires hommes. J'ai cette chance que nous ne sommes pas nombreux, comparés aux danseuses. J'ai toujours eu du mal dans tous les vestiaires possibles et inimaginables, depuis ceux de la piscine municipale à laquelle nous allions avec la classe de primaire, aux vestiaires du lycée pour les sports collectifs. J'ai toujours eu plus de facilité dans ceux de l'école de danse de Jimin, devenue mon repère, non pas de brigands mais d'étoiles en tout genre.
Je me change rapidement avec mon fameux rituel (je ne change jamais l'ordre de mes gestes) préférant faire attendre mon corps brûlant et las pour me doucher à mon domicile où je me sentirai bien plus à l'aise.
J'attends Eun-Byol à la sortie, mon sac à l'épaule, en saluant les quelques autres danseurs garçons qui partent aussi, dont l'un me sourit avec beaucoup d'insistance en passant devant moi. Il me semble timide mais bon danseur, je l'ai vu évoluer sur le parquet. Il est assez élancé et me lançait de temps à autre des regards en étudiant mes gestes. Je fais rarement attention, très souvent concentré sur moi-même et la musique, mais le poids lourd de ses orbes m'a, pendant quelques secondes sur toutes les autres restantes, bousculé.
- Pourquoi Kim Soo-Hyun te regarde comme ça? On dirait le même regard que ton aesh....dit Eun-Byol lorsqu'elle est à mes côtés.
Elle ne comprend pas ou ne veut pas comprendre l'attrait des hommes entre eux. Pour elle c'est incompréhensible, pour moi, normal et anodin. Alors que peut-être, c'est plus profond?
- Il a l'air super gentil et danse très bien.
- Et....? me fait-elle sans comprendre.
Avec moi, elle est servie, je ne suis pas toujours très clair dans mes explications.
-Et rien. Jeongguk n'est pas gentil, c'est différent, j'ose dire, alors que mes sentiments se bousculent davantage en moi lorsque je l'évoque. C'est bien plus difficile de parler de quelqu'un comme lui, un point d'interrogation à lui tout seul, plutôt que ceux qui gravitent dans mon monde au quotidien, dans ma passion.
La danse me convient. Comme dans certaines activités sportives de haut niveau, la danse classique fait appel à la discipline et aux exigences physiques, à la compétitivité, aux attitudes très critiques et perfectionnistes des professeurs, à l'acceptation de la souffrance émotionnelle et physique. Cela peut inciter les élèves à se couper des émotions négatives dans le moment présent, à éviter de ressentir ses propres émotions nocives. Ce processus de répression de la pensée et des émotions fait que nos peurs peuvent s'accumuler chez certains d'entre nous jusqu'à l'anxiété grave. Ce n'est pas mon cas. Mon autisme pour une fois me sauve la mise. Je n'ai pas d'anxiété quand je danse, je me libère au contraire, je ressens comme si rien ne m'entrave ni ne m'enchaîne. Je me sens libre de tout.
- Et le professeur te voulait quoi? Je suis sûre qu'il t'a dit que tu dansais comme un dieu! Tu es fantastique Taehyung, c'est ton premier cours et déjà tu les as tous surpassés. J'aimerais être celle avec qui tu feras un duo, tu nous vois tous les deux? Mon dieu ce corps que tu as! On s'est déjà tous entraînés avec le groupe les jours précédents et tu arrives comme une fleur et tu fascines déjà tout le monde...
- J'adore les fleurs, je murmure en regardant un chewing-gum écrasé sur le trottoir.
Je l'entends pouffer de rire.
Seo-Joon est censé venir me chercher en voiture, je suis un peu en avance et je suis certain qu'il proposera de ramener Eun-Byol même si elle habite à dix minutes à pied d'ici.
- Taehyuuuuung, râle-t-elle en me suppliant de lui répondre, parce que forcément je dévie du sujet principal. Le beau et talentueux professeur devant lequel elle bave est venu me parler en personne plusieurs minutes de suite. Et elle est jalouse, certainement un peu.
Elle attend ma réponse, je ne veux pas la froisser et puis mon téléphone sonne dans ma poche. Je le sors et vois le numéro de ma petite soeur s'afficher.
- Il m'a dit que j'étais bon, c'est tout. Hayun m'appelle, il faut que je lui réponde!
- Pas de soucis, je vais rentrer, moi! Ton tuteur ne va pas tarder, ne bouge pas d'ici, d'accord? On s'appelle demain Tae n'oublie pas, et tu me raconteras tout ça!
Elle m'embrasse la joue comme elle fait souvent en se haussant sur la pointe de ses ballerines à talons en cuir vernis et me fait un petit coucou de la main avant de se retourner.
Et moi je la regarde partir dans la nuit, éclairée par le halo de lumière des réverbères.
Une autre voix féminine rencontre alors la mienne. Je fais du sur place, je n'ai pas vraiment froid avec mon sweat à capuche bien trop grand sur moi et mon jogging par dessus mon legging, mais je préfèrerai déjà être au chaud dans ma nouvelle maison.
💗 Coucou petit frère !!!!
🐻 Hayun ne cris pas!
💗 Tu fais quoi? me dit-elle sur un ton plus doucereux, elle n'est pourtant pas du genre à prendre en considération mes ressentis primaires.
🐻 J'attends mon tuteur je sors de mon premier cours de danse
💗 Et?? Dis-moi!!!!!
🐻 Et?? pourquoi vous avez tous ce mot à la bouche? C'était génial. Voilà tu es contente? Jimin sera toujours le meilleur professeur que je n'ai jamais eu, mais j'avoue qu'en avoir d'autres depuis lui me fait voir la danse avec d'autres couleurs et subtilités.
💗 Oh j'aime ce que tu dis. Et tes cours, tout ça, ça va?
Elle n'est pas toujours à se soucier de moi de cette manière. Et je sais que j'ai toujours du mal à décoder ses intentions. J'essaie d'analyser, même si ce n'est pas facile et une petite lumière me fait dire "Demande-lui si elle ça va, c'est pour cela qu'elle te demande!". On m'avait appris ce qu'étaient les questions ouvertes et les questions fermées, l'intérêt qu'on doit porter à l'autre dans la communication et le fait de faire attention à ne pas trop parler de soi-même en laissant l'autre s'exprimer. Je crois donc que c'est ce qu'elle veut.
🐻 Oui ça va. Et toi, comment...vas-tu?
Je suis fier de moi, j'ai posé la question.
💗 J'ai rompu avec Ji-Ho.
Oh c'est donc ça. Ma petite soeur de 16 ans aurait-elle un chagrin d'amour?
🐻 C'était un débile, j'ose dire.
Ok, d'accord, je ne prends pas de pincette avec elle en disant cela, ni ne compatis à un potentiel chagrin.
-💗 Mais !!!! Tae, mince tu....je l'entends souffler, se racler la gorge, elle ne semble pas pleurer ni être trop triste, enfin je ne crois pas. Bon, ok peut-être qu'il l'était un peu....
🐻 Yun, c'est un débile de 18 ans qui sortait avec toi juste pour te montrer à ses potes en scooter parce que tu es belle et qu'il voulait te.....Enfin tu as compris mettre dans son lit. Est-ce qu'il a, est-ce que vous avez...?
💗 Tae !!!! Non. On ne l'a pas fait.
🐻 Tant mieux! Il n'avait rien pour lui, à part son abonnement à la salle et son torse musclé. Et même ça...ce n'était pas très convainquant.
Je fais une mine de dégoût, mais elle ne peut pas voir, mais je pense qu'elle a compris au son de ma voix.
💗 J'ai compris Tae, râle-t-elle.
🐻 Non tu n'as pas compris que te mettre avec un débile ne te fera pas te sentir mieux ou plus heureuse. Les parents t'en ont déjà parlé.
Ma soeur a toujours eu besoin d'un peu plus de mots d'amour, de tendresse et de câlins. Je sais que la perte de notre mère lorsqu'elle avait 5 ans y est pour quelque chose.
💗 Si je t'écoutes Jeon Taehyung, il n'y a que papa et Mimi en hommes parfaits sur cette terre! Jamais je ne rencontrerai d'homme aussi bien qu'eux
🐻 Alors ne rencontre personne!
Elle râle encore plus. Je suis autiste, ne l'oublions pas, je n'ai pas les meilleurs conseils ni surtout les meilleures réponses à apporter. Les miennes sont surtout pragmatiques.
💗 Dis celui qui n'a jamais vu le loup
Je ne réponds rien. Ne pensez pas que je ne sais pas ce que veut dire cette expression, elle me l'a elle-même expliqué un matin au petit déjeuner avant l'arrivée de Ji-An, en me parlant de verge se glissant dans le corps de l'autre puis de la fameuse explosion de sperme, avant que le lait ne coule de ma bouche de façon éhontée et qu'une céréale ne se coince dans ma gorge. Mes pères m'avaient expliqué certaines choses, mais dans la bouche de Hayun avec son rire déplacé et sa confession d'avoir vu du porno en cachette avec ses copines, cela n'avait pas eu le même effet. D'accord, je n'ai jamais eu de relation sexuelle, ni de sexe de femme ou d'homme en face du mien, mais cela ne veut pas dire que je ne peux pas la conseiller, non?
Oui, enfin... effectivement peut-être pas. Elle en connaît définitivement plus que moi.
💗 Je devrais peut-être me mettre avec une fille?
🐻 C'est toi qui vois Hayun....je réponds sans la moindre gêne. Sur ce sujet, il n'y a jamais eu de tabou dans notre famille.
💗 Non vraiment, je préfère les torses larges et les bras forts. Si tu en connais, fais-moi signe, je prends l'avion direct et j'arrive!!!
Elle s'esclaffe imagine déjà la scène j'en suis certain, et j'essaie d'imaginer autour de moi où je pourrais en voir sans que je ne le lui dise - il est hors de question que Hayun fugue pour un garçon même si elle en est capable, la diablesse. J'entends du bruit derrière elle lorsqu'elle dit "je suis au tel avec Tae!", un "coucou Tae!!" d'une autre petite voix féminine, celle de ma petite soeur qui me manque tant elle aussi, et un"je t'aime Taetae, j'espère que tout va bien?!" de la part de mon papa Jimin.
Le bruit grésille à mon oreille et je dois raccrocher en voyant Seo-Joon se garer devant moi.
En voiture je ne parle pas beaucoup. Je pense à Jeongguk et ne sais pas pourquoi. Dans ma chambre après le repas, je continue à penser à lui, à toi.
Et puis quelquefois, je ne supporte pas le silence de mes doigts, surtout lorsqu'ils ne dansent pas. Ne pas danser, ne pas parler ou ne pas écrire, c'est me taire une autre fois. Alors les mots que j'entends dans ma tête, trop complexes à exprimer aux autres, glissent vers le papier, y dansent pour s'exprimer. Je ne sais pas combien j'ai de journaux intimes.
À défaut de le faire par la parole. Mais cela a l'air de te plaire. Tu n'es pas habitué au bruit je crois, et je ne comprends pas encore pourquoi. Peut-être me laisseras-tu découvrir un peu de toi. Même si nous sommes si différents toi et moi. Comme le creux d'une vague qui nous sépare continuellement.
Mais je ne peux m'en empêcher, il y a des moments où ma langue se délite et se dénoue, elle parle une langue qui pourrait t'effrayer tellement elle débite d'informations en tous genres et je sens que cela te fait beaucoup. Surtout lorsque tu lèves les yeux au ciel ou ronchonne.
Et puis, je vais apprendre avec le temps que tu sais sourire et rire, et que finalement tu aimes t'étouffer du vacarme, et non pas du silence. Tu aimes la cacophonie de ce que tu vis.
Et cela me donnera un bien joli tournis.
☆
Je ne sais pas si je compte encore les jours. Ceux qui me filent entre les doigts, ce que je crois vivre mais qui sont finalement l'ombre d'un rien, ou seulement d'un sourire que j'arriverai à esquisser sur mes lèvres.
Deux semaines ou un peu plus que je suis ici.
C'est la fin d'après-midi, on est vendredi, j'ai eu d'autres cours de danse depuis la première fois, d'autres trajets vers l'université, d'autres échanges avec mes colocataires, ou avec Jeongguk mais ceux-ci trop peu intéressants. Je n'arrive pas encore à m'y faire, ni à sa présence à mes côtés, ni à cet endroit labyrinthique qui me happe et que j'aimerai quelquefois vomir.
Les cours me plaisent, je commence à m'habituer au rythme et faire connaissance avec d'autres étudiants. Eunwoo est toujours aussi agréable, il m'a d'ailleurs invité à une prochaine soirée pour fêter le premier mois de cours et les nouveaux étudiants de première année de médecine. Je verrai si je m'y rends.
Je le ferai pourtant et je ne serai pas au bout de mes surprises, de mes confusions ou de bien pire.
Je me sens bien en cours, sauf ceux d'une des professeurs qui vient me souffler son haleine détestable dans le cou lorsque nous sommes en TD de biochimie. Je fais beaucoup d'efforts mais cet aspect de ce que je dois subir n'est pas dans mes cordes. Je suis sorti du deuxième cours avec la bile remontant dans ma gorge et j'ai dû me rendre aux toilettes pour essayer en vain de vomir.
Pathétique.
Oui,
je sais.
Jeongguk n'a pas compris, accroché derrière la porte à me faire la morale.
- Je ne comprends rien, tu as mal digéré, c'est quoi ce bordel?
- Non, je ne veux plus aller à ses cours.
C'est idiot pour certains, mais pas pour moi, quand on a de l'hypersensibilité olfactive. J'ai envie de m'accroupir au sol, de serrer mes genoux contre moi et me mettre en boule. Que plus rien ne m'atteigne. Enfouir mon nez dans mes vêtements et mon odeur et ne plus être agressé. Être rassuré. Mais ici c'est bien trop sale et je pourrais perdre la notion du temps à rester ainsi, même si Jeongguk est là à veiller sur moi.
- Je peux savoir ce qui te donne ce droit ?
- La prof est dérangeante. On est une trentaine dans le cours mais c'est toujours vers moi qu'elle vient. Elle s'approche lorsque nous avons une expérience à faire en groupe, elle vient au-dessus de moi pour me féliciter et son haleine est insupportable.
- Pourquoi tu te fous au premier rang aussi?
Oui pourquoi je fais cela?
Parce que j'ai toujours fait ainsi, cela me rassure, je me concentre mieux, je m'y sens bien. Mais pas là. Et c'est insupportable. Je ne peux rien y changer.
- Elle doit bien t'aimer, l'intello qui lève toujours la main...
Il se moque je sais qu'il se moque. J'ai de nouveau un spasme, dans le vide car rien ne se passe, rien ne sort de mon estomac et les odeurs de toilettes sur lesquelles je suis penché n'arrange rien. J'en suis dégoûté. J'ai beau avoir passé une lingette avant, l'odeur d'urine de mâles est encore présente et immonde et n'arrange pas les choses. J'ouvre finalement la porte et Jeongguk, maintenant les reins collés aux lavabos face à moi, me regarde avec ses yeux ronds, les mains dans les poches et suspicieux.
Je dois être blanc comme mes draps. Je m'approche de l'évier, fais couler de l'eau et en prends un peu dans ma paume pour m'en passer sur le visage.
- Je n'irai plus. Ou alors elle doit se laver les dents et la langue. Je pourrais peut-être lui écrire un mail pour lui demander, ou même au doyen? À la faculté? Ou mettre un mot dans son casier?
Jeongguk se passe la main dans ses cheveux en signe d'énervement. Je le sais, ça doit gronder en lui, je le vois parce qu'il bouge de nervosité, écarquille ses prunelles puis éclate de rire pour se moquer.
- Comment on appelle ça? C'est du racisme envers la mauvaise haleine?
- Arrête de te moquer. Je ne suis pas halitophobique puisque cela la concerne elle. Mais ça m'est insupportable. Je n'irai plus, je n'irai plus et tu ne me forceras pas!
- Je connais cette prof, on le sait tous qu'elle a ce problème. Alors fais un effort! En dehors de ça, elle est pas mal, non? Elle est jeune, elle n'a même pas trente ans et elle est bien foutue.
Qu'est-ce que cela vient faire là? Il est sérieux en plus.
- Je ne regarde ni les profs ni les filles! Je m'offusque, bien sûr que je m'offusque.
- Donc les hommes?
Je me retourne réellement vers lui en fronçant les sourcils et en plaçant mon sac à dos sur mon épaule en vue de partir.
- Je regarde....tout. Je n'en sais rien, pourquoi je devrais choisir?
- Pansexuel alors.
Je fronce encore davantage les sourcils en le regardant un peu plus cette fois-ci. Je fais un effort pour effleurer ses yeux sombres mais uniques et scintillants comme des galaxies. Aujourd'hui, Jeongguk est habillé simplement, sans bijou argenté, avec un large baggy vert olive et un débardeur blanc. Il a certainement chaud, car il a enlevé sa chemise à carreaux qu'il tient d'un doigt à son épaule, nonchalamment. Mais bien sûr, cela lui donne une allure de mauvais garçon.
Encore.
Et....c'est troublant.
- Pourquoi tu me colles une étiquette? Je suis Taehyung, c'est tout.
- Taesexuel....?
Je ne le regarde plus, je ne comprends pas ce qu'il cherche, ce qu'il veut savoir de moi, ce qu'il attend de moi, ce mot inventé. Et je ne comprends pas sur le coup qu'il essaie de détourner mon attention de mes angoisses. J'en frissonne, mon corps se sent encore mal de mon précédent mal-être. Je me retourne pour ne pas avoir à croiser son regard. Mais je rencontre celui du miroir, le reflet de l'homme en face de moi. Celui qui se tient là, en polo à col bien repassé, comme lui a appris son père à le faire, ses cheveux peignés et en place, son visage équilibré avec son nez droit et ses yeux fins, ses grains de beauté, son collier en or bordant son cou. Sa main grande et fine qui vient toucher ses lèvres. Suis-je cette personne? Ce garçon élancé et taillé pour danser, qui a grandi et est devenu un homme? Celui en face de moi qui ne sait pas qui il est? Qui ne sait pas qui aimer?
- C'est joli.... je murmure alors en réponse, deux minutes après. Je ne sais pas s'il a entendu, si le fait que je réponde tardivement ne l'induit pas en erreur. Jeongguk est encore derrière moi et je le vois me regarder, sans pudeur. Parce que je viens de me scruter dans le miroir et il pourrait penser que je parle de moi alors que je parle de son néologisme.
Je réfléchis trop, me pose trop de questions. Il est pourtant si simple d'accueillir la nouveauté comme une découverte.
Je suis juste Tae.
Pour comprendre certains mots, il faut parfois comprendre leur silence. Jeongguk est un homme de peu de mots. De gestes plutôt.
Et j'aime autant.
Moi je suis juste Taehyung, un homme autiste qui essaie de survivre dans ce monde intrigant mais aussi épatant.
Comme lui.
J'aime finalement comment il me décrit. Et peut-être qu'un jour, je lui ressortirai.
Je me dirige vers la porte pour sortir d'ici et enfin partir. Il me suit de près, me donnant mon sac de danse que j'ai oublié dans un coin - j'ai cours juste après - je ne sais pas comment il fait pour aller aussi vite et tend le bras au-dessus de moi pour pousser la porte et me laisser passer.
- Et bien sûr Taehyung, NON tu ne lui écriras pas, me dit-il alors que nous nous trouvons dans le couloir.
En fait, nos discussions n'en finissent jamais. Peut-être que j'aime en définitive.
- Mais! m'opposé-je à ses dires.
Que j'aime cette alternance de mots et de silences.
- Mais rien du tout! Tu arrêtes avec ça et tes idées qui vont trop loin et tu la laisses tranquille. Peut-être qu'elle connaît son problème et n'y peut rien. Mais ce dont tu parles pourrait à long terme s'apparenter à du harcèlement.
Son ton est tranchant et sans appel, et je réfléchis à ce mot fort que je n'aime pas. Il voit que je fais la moue, que je serre la hanse de mon sac un peu trop énergiquement, que je suis mal à l'aise avec ce qu'il m'ordonne. Et pourtant je ne m'y oppose pas. Je sais au fond de moi qu'il a raison, même si j'ai du mal à l'admettre. Alors j'essaie de trouver des solutions, lorsque nous sortons dehors.
- Et lui offrir des chewing-gums? Ou un traitement en pharmacie?
Il lève les yeux au ciel, j'ai l'impression qu'il veut rire ou au contraire me crier dessus, mais il se pince les lèvres pour garder son sérieux.
- Non plus, Taehyung. Ou pour Noël? Bon plus sérieusement, la semaine prochaine on essaie le self du resto universitaire. Il est temps que tu y mettes les pieds.
De cela, je ne suis pas convaincu.
☆
- Putain c'est pas possible! râle Jeongguk en regardant devant lui à plusieurs mètres. Après notre discussion, nous nous retrouvons ici.
Il est 18h et je dois me dépêcher de partir à pied pour rejoindre mon cours de danse. J'ai de la marche, mine de rien.
Une femme fait des grands signes devant un van assez coloré et elle semble regarder vers nous. De la musique bruyante en sort et lorsque nous nous rapprochons (parce que je suis à la trace Jeongguk), nous ne sommes pas dit au revoir et finalement même si cela ne fait que deux semaines que nous nous connaissons, je sais déjà qu'il attendra de me regarder partir dans la bonne direction, pour partir à son tour vers ses occupations.
Pourtant ce soir, son programme a l'air différent. Parce qu'il connaît la femme qui maintenant le hèle avec de grands gestes. Et un homme qui sort sa tête de la portière conductrice du combi.
Et à partir de maintenant mon monde à moi va de nouveau s'ouvrir à d'autres horizons.
- C'est pas possible d'être aussi bruyants et pas discrets, crache Jeongguk en paroles mais aussi avec ses mains. Il est énervé dans tout son corps, autant dans ses gestes, que dans sa voix ou son visage je crois.
Jeongguk parle avec ses mains.
- Appa, baisse le son, c'est n'importe quoi bordel !!!
Jeongguk parle la langue des signes.
- J'ai trop bien réglé les basses! lui répond-il l'autre.
J'avais déjà vu un reportage sur la langue des signes et j'avais été subjugué. Je crois que je le suis encore. Jeongguk traduit tout en paroles dans notre langue, il a sûrement l'habitude de faire ainsi. Mais du coup, il ne cache rien de ce qu'ils se disent et cela me rend tout bizarre. De rentrer dans leur univers je veux dire. D'en être éclaboussé alors que je n'y étais pas préparé. D'y être projeté alors que jamais je n'aurais imaginé Jeongguk y évoluer.
C'est lumineux et presque aveuglant. Alors je m'accroche pour suivre.
- Éteins appa, on se croira à une soirée de dégénérés! C'est la honte. Vous me foutez la honte devant la fac! Ça ne vous a pas suffi l'année dernière? Pourquoi vous êtes là? Je vous avais dit que-
- On est vendredi! Et comme tous les vendredis depuis que tu es rentré à l'école à 6 ans tout beau avec ton petit sac, mon bébé, nous venons te chercher avant d'aller travailler en famille. C'est la tradition! Viens faire un gros câlin à ta mère, mon grand garçon que j'aime!
La femme tellement expressive, se penche vers lui en l'étouffant de son corps mince pourtant, pour le serrer contre elle. Pendant que l'homme éteint la musique.
Il y a tant de ressemblances entre lui et Jeongguk. Il est encore beau pour son âge, très bel homme avec les mêmes yeux, mais paraît beaucoup plus simple et calme qu'elle. Je ne sais pas quel âge peut avoir la femme et je pense que sur une échelle de graduation de beauté, elle doit être au sommet. Sa robe courte et très féminine la met parfaitement en valeur ainsi que son maquillage et ses cheveux longs. Elle est jeune comme mon père et semble très avenante. Peut-être un peu trop. Cette famille semble turbulente, joyeuse et dynamique.
- C'est qui? dit-elle en se reculant et en me montrant du doigt.
- Quoi?
- Qui est ce jeune homme derrière toi? C'est ton nouveau petit copain? fait-elle avec un énorme sourire en se dandinant pour que Jeongguk me traduise à voix haute.
- Putain vous me cassez les couilles! lui répond-il sans ménagement.
- Tu lui as vraiment traduit ça? Je lui chuchote tout en sachant qu'ils ne peuvent pas m'entendre.
- Oui.
- Oh....
- Il ne faut pas croire mais les sourds sont assez cash et ouverts. Et démonstratifs aussi.
- D'accord, je réponds avec des yeux brillants d'intérêt. Je suis subjugué je crois par leur volubilité gestuelle.
- Taehyung, voici mon père et ma mère. Et Hani ma petite soeur qui ne sert à rien et assise à l'intérieur, elle n'entend rien elle non plus. Eomma, c'est....l'étudiant que je dois guider dans la fac pour mon job. Taehyung. Il vient de Jeju.
Sa mère semble assez patiente, attend qu'il ait fini de parler pour parler à son tour de façon très enjouée. Son visage s'illumine à chaque expression qu'elle veut faire passer lorsqu'elle comprend.
Et moi je comprends que Jeongguk est le seul entendant de sa famille.
- Bonjour, je fais en m'inclinant à 90 degrés.
Je ne sais pas m'exprimer dans leur langue et je n'ose pas les regarder en face, mais j'espère qu'ils comprennent par mon attitude que je suis respectueux.
- Ça va, arrête de t'incliner autant! fait son père et posant sa main sur mon épaule pour me relever, pas autant de manières avec nous! Jungkook me traduit en soufflant, je suppose qu'il est habitué à le faire constamment. Traduire, je veux dire.
- Mais tu ne nous avais pas dit qu'il était aussi mignon !!! Tu es trop beau petit ange, fait-elle en s'approchant très près. Elle prend mes joues qu'elle malaxe dans ses deux paumes. Un câlin s'impose !!!! dit-elle ensuite.
Elle me serre alors dans ses bras sans me demander, m'étouffant avec sa poitrine généreuse. Le père semble un peu plus discret et part triturer les boutons du lecteur radio-cd.
- Non Eomma, n-...C'est pas vrai! Je suis désolé! Il pousse sa mère de moi. Arrête eomma! C'est ma vie! me fait-il à moi sans traduire en se mettant devant sa mère pour ne pas qu'elle voit ce qu'il me dit. C'est...je ne voulais pas que tu vois tout ça, ça ne te regarde pas.
- Ettt?! Elle le pousse de devant elle. Il ne connaît pas encore les câlins de la famille! Il doit s'habituer.
- Putain non, vous faites chier !! Foutez-lui la paix. On se côtoie juste pour les études, on est pas amis.
Jeongguk se retourne vers moi en entendant mon silence. Même s'il y est habitué, il ne connaît pas le mien. Je bavasse trop à ses oreilles d'habitude et entre le silence de leurs gestes qui s'agitent dans l'air et le mien, il ne sait plus où donner de la tête.
Surtout lorsqu'il voit la mienne.
J'essaie juste d'afficher mon plus beau sourire. Parce que, je ne sais pas, c'est ce que ces gens m'inspirent. Des sourires. Enfin je ne sais pas faire, alors j'essaie de toutes mes forces. Très fort. C'est un peu forcé, je crois.
- Pourquoi tu as ce sourire aussi con? On ne voit que tes dents, détends-toi on dirait que tu as coincé des allumettes aux quatre coins. Tu fais peur mec, franchement ça craint.
-Genre peur comment? Je m'inquiète.
Sa mère nous regarde attentivement car Jungkook ne traduit pas. Elle lui donne un coup de coude pour qu'il le fasse mais il la repousse gentiment.
- Genre... ça aveugle tu vois? Genre poupée Chucky.
- Oh mince! je fais en faisant la moue de désespoir.
- Alors? Pourquoi il fait la tête? Tu lui racontes quoi? Guggie?
- Qu'il sourit comme un con. Tu n'as qu'à lire sur nos lèvres au lieu de te plaindre eomma.
Sa mère parle alors en signant.
- Que j'arrête de faire le fils indigne et que je l'amène à la maison pour un repas? Non eomma, fait Jeongguk toujours en traduisant tout.
- C'est gentil, je réponds en toute innocence.
- Non, je te rappelle que je ne suis pas gentil.
- Tu viendras au restaurant, Jeongguk t'a parlé de notre restaurant au marché couvert? De notre travail? Tu es tout maigrichon, je te ferai à manger, tes parents sont trop loin alors je vais veiller à ce que tu te nourrisses bien ici!
- La gênance... finit par dire Jeongguk qui semble même rougir un peu.
Je ne connaissais rien de lui et en dix minutes, j'en ai appris plus sur ce garçon que n'importe qui je crois. Je ne recule pas et ose même dire :
- Mes grands-parents tiennent un café en bord de mer dans la campagne de Jeju.
Je vois que sa mère regarde mes lèvres, j'ai peut-être parlé trop vite mais Jeongguk s'empresse de traduire en faisant toujours la tête, sans plus rien exprimer, impassible. Elle sourit et hoche la tête et il finit par ajouter :
- C'est surréaliste cette conversation entre vous. Eomma fiche-lui la paix. En plus il y a plein de trucs qu'il n'aime pas manger et ne le touche plus comme ça, il n'aime pas non plus!
- Comment ça, il n'aime pas? fait-elle en fronçant les sourcils comme le fait son fils de temps en temps. Allez, demande lui aussi où il doit se rendre s'il veut qu'on le ramène! Il va falloir qu'on aille travailler ensuite.
Jeongguk ne me traduit pas et sa mère lui donne une petite tape à l'épaule en semblant le gronder.
- Mes parents veulent savoir si tu as besoin d'être ramené, lâche-t-il par obligation. Il souffle fort.
- Je dois juste rejoindre l'Académie de Danse du Korean Ballet et donc-
- Oh oh!!! j'adore la danse! Guggie dis-lui que j'ai fait de la danse classique petite! J'étais tellement belle dans mon petit tutu. Comme ta sœur, mais elle n'a pas voulu continuer la rebelle! En ce moment, elle ne fiche rien, elle veut abandonner le lycée, tu te rends compte? Et moi j'ai été Miss Korea à 18 ans, ça compte n'est-ce pas? D'ailleurs je suis l'organisatrice d'un nouveau concours de beauté-
Jeongguk souffle de nouveau en traduisant et en râlant.
- Eomma, tu lui parlais trajet, pas de tes concours bidons!
- On va le déposer avant d'aller au restaurant, intervint le père de Jeongguk.
Jeongguk me traduit en même temps en montrant son désaccord :
- Non, je ne pense pas-
- Je veux bien! Oui ! je réponds aussitôt, empêchant mon acolyte de répondre à ma place. Je ne sais pas comment on dit oui dans leur langue, mais je pense qu'ils ont compris quand je les vois sourire.
Je ne sais pas ce qui me prend, je ne monte jamais en voiture avec des inconnus à part avec quelqu'un de confiance. Je me convaincs en me disant que je dois faire plus confiance à Jeongguk. C'est sûrement cela qui m'a décidé.
Je ne peux plus faire machine arrière, je vais devoir monter dans leur van un peu défraîchi qui sent la vanille artificielle d'un petit sapin suspendu, rempli sur la carrosserie d'autocollants hippies, de grigris qui pendent au rétroviseur et aux poignets au plafond au dessus des vitres, d'une moumoute sur le volant et de coussins colorés à l'arrière. Je réalise que c'est finalement très joli et que j'ai osé dire oui sans peur. Je devrais être fier de moi. En espérant que ces personnes ne soient pas des kidnappeurs qui iront demander une rançon à mes pères. Il ne manquerait plus que cela.
Il y a le silence au bout de mes doigts ce soir.
Et puis le soleil se couche. La lumière ambrée qui passe à travers les vitres est magnifique, il va sûrement faire beau demain. J'ai toujours voulu capturer les infinitésimales particules de lumière dans la poussière qui vole autour de nous. Comme maintenant. C'est presque impossible, mais j'ai essayé tellement de fois, faisant jouer les ombres sur les murs ou la vitre qui laisse passer les rayons du soleil.
C'est le phénomène de la réfraction qui nous parle à ce moment-là. Il est muet en l'absence de lumière.
C'est beau.
Et ce soir, le moment est beau, dans cette ambiance un peu caramélisée, un peu surréaliste et loin d'être silencieuse, dans cette bonne humeur qui transpire d'eux. Dans les couleurs chaudes et rosées avant le bleu sombre de la nuit et qui réchauffent mon cœur. Je suis assis entre Jeongguk et sa petite soeur qui me fait penser à la mienne, les sourires planent, les rires s'envolent autant que les gestes qui parlent et les yeux qui se croisent, la musique qu'ils mettent à fond pour saisir un infinitésimal rythme qu'ils pourraient percevoir et qui caracole dans l'habitacle.
Et moi j'ai l'impression de danser, mais d'une autre manière.
Et je crois que grâce à toi, Jeongguk, je peux ressentir pour la première fois un arc-en-ciel d'émotions qui s'affiche d'un sourire sur mon visage.
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J'espère que vous avez aimé ce chapitre. Je sais que je mets du temps à publier pour cette histoire, et donc le public n'est pas toujours forcément là (c'est aussi un sujet particulier qui ne plaît pas a tout le monde) mais pas d'inquiétude, je continuerai à la publier, et le plus régulièrement possible.
Merci à ceux qui sont encore là et suivent les aventures de Taehyung.
Vous en savez enfin un peu plus sur Jeongguk et sa famille. Et vous comprenez maintenant pourquoi c'était difficile au début pour lui de comprendre Taehyung qui a peu d'expressions sur le visage ou fui son regard, alors que Jeongguk a été élevé dans un milieu où c'est tout le contraire, où il est nécessaire de se regarder pour se comprendre, et où il y a malgré le silence beaucoup de vie. Il devait accompagner au départ un malentendant de 2ème année, d'où sa grande appréhension.
Bonne semaine à vous, et à bientôt 💗
Bêta-correctrice Jessyceleste79
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