Chapitre 2 : L'Affamé


- Je ne t'ai pas trop manqué ?

Mon meilleur ami me souriait, satisfait de son entrée fracassante. Personne ne semblait le reconnaître à part moi. On me toisait avec des yeux interrogateurs comme si j'allais leur apporter une réponse. Comment pouvais-je, un gars banal au physique banal, être pote avec un gars populaire à l'allure d'idol C-pop comme lui ?

Après plusieurs semaines sans nouvelles de lui, la frustration du matin m'emporta soudainement et tout ce que je pus faire était de sauter sur lui en criant :

- Enfoiré !

Je m'étais jeté sur lui en lui prenant son fichu blouson noir dans mes deux poings. Ma hargne était telle qu'elle nous fit tomber tous les deux et je continuais à le plaquer au sol avec tout la force qu'il me restait pour le couvrir d'injures. Yibo semblait amusé de ma réaction. Il se contentait de rire tandis que j'explosais intérieurement, voulant le harceler de tout un torrent de questions.

Pourquoi tu n'es pas revenu ?
Pourquoi tu n'as pas donné de nouvelles ?
Pourquoi tu es parti quand tu m'as vu ?
Où étais-tu ?

Les surveillants ont dû m'interrompre alors que je comptais hurler un bon moment sur lui.

J'étais frustré, anéanti et désemparé. Je pensais qu'il était mort il y a quelques jours et le voilà daignant fouler le sol de notre lycée, tout pimpant. N'avait-il aucune considération pour ce que nous pourrions ressentir ?

- Je te hais !

C'était les derniers mots audibles que je prononçai avant de ramasser mes affaires éparpillées sur le sol. J'étais d'autant plus furieux à l'idée que dans tous les cas, il allait me rejoindre. Nous étions dans la même classe.

Je toquais à la porte de la classe en m'excusant du retard, essoufflé et les cheveux complètement ébouriffés. On me fixait comme si je venais de Mars. Au moment où je m'assis et remis en place mes lunettes, Yibo arriva sur le pas de la porte, saluant tout le monde brièvement alors que personne ne le reconnut. Les filles étaient déjà sous le charme au vu de leur sourire étiré jusqu'aux oreilles.

Il s'assit à sa place habituelle et tout le monde comprit. Le professeur mit un certain temps à réagir devant son apparition soudaine et il lui demanda hésitant :

- Wang, vous allez bien ?

Après tout, ce n'était pas comme s'il était sur les affiches de recherche disparus depuis trois semaines dans toute la ville.

Yibo acquiesça sans donner plus de réponses et sortit ses affaires tranquillement de son sac. Il aperçut mon visage blasé et encore aigri de nos retrouvailles. Ma tête le fit glousser d'amusement alors je décidai de regarder le tableau et de ne plus porter attention à cet énergumène agaçant.

Le cours du matin finit sur les devoirs donnés par le professeur comme à l'accoutumée. Je rangeais mes affaires dans le sac quand une horde composée principalement de femelles passa devant moi pour parler à Yibo. Sérieusement pensais-je. Je roulai des yeux. Je ne pouvais même plus le voir derrière cette muraille de gens. De toute façon je lui boudais et ne m'attardai pas plus. Je sortis vite de la classe énervé.

Le premier réflexe que j'eus est d'appeler son père pour le prévenir de la "résurrection" de son fils. À ma grande surprise, Monsieur Wang était déjà au courant car Yibo l'avait apparemment appelé avant moi. Il semblait heureux et soulagé, ce qui était tout à fait normal pour un père. Mais son fils n'avait plus rien à voir avec ce qu'il était avant. 

J'avais la sensation désagréable d'avoir été abandonné par mon frère.

- Zhan ! Attends-moi !

Yibo se précipitait pour me rattraper dans le couloir. Le premier réflexe qui me vint était de taper un énorme sprint pour lui échapper, comme si je voulais fuir un danger imminent. Toutes les personnes que l'on croisait nous fixaient d'un air confus, se demandant pourquoi ces deux demeurés faisaient une course poursuite dans l'établissement.

Je n'entendais plus Yibo crier mon nom derrière moi. Je sortis à l'extérieur et m'arrêtai de courir pour reprendre ma respiration. J'étais très essoufflé mais satisfait d'avoir pu le semer.

- Hey Zhan !

Je levai la tête et le vis sauter du troisième étage la seconde d'après. Horrifié, je poussai un hurlement qui retentit dans toute la cour.

- What the fuck?! M'écriais-je en perdant l'équilibre sur le gravier que j'en fis tomber mes lunettes.

Les étudiants au sol prirent peur et reculèrent de quelques mètres par réflexe.

Il retomba devant moi sur ses deux jambes fléchies, effroyablement stable, sans broncher d'un cil. Ce gars n'était définitivement plus humain.

- Je t'ai rattrapé. Dit-il avec un sourire narquois.

Décidément, il ne ratait plus aucune occasion de se donner en spectacle. J'étais toujours sonné, le cul sur le gravier. Il ramassa mes lunettes et me les tendit, tandis que je l'assassinais du regard. Je les déroba sans mot et les remis sur mon nez, la main un peu tremblante. À ce moment, je ne pus que me résigner à le confronter. Il me tendit sa main, mais entêté que j'étais, je l'ignorai et me mis sur pieds tout seul.

- Pourquoi t'as couru ? Me demandait-il en rigolant.

Je soupirai ennuyé. Il ne voulait pas me lâcher la grappe.

- On en parle quand on sera à la maison si tu veux. Répliquai-je froidement.

- Ça marche. On rentre ensemble à pied comme au bon vieux temps ?

Je roulais des yeux et me mit à marcher sans le calculer, refusant de gaspiller plus de salive avec lui.

- Eh beh. Quelle froideur. S'esclaffa-t'il.

Il alla me rejoindre quand Marius et sa bande l'interpelèrent.

- Hey Wang Yibo. On veut te causer.

Je me retournai aussitôt, inquiet de ce que ces enfoirés mijotaient. Tout le monde contemplait ce duel de regards entre les deux camps : Le revenant et le bourreau.

Yibo soupira longuement comme pour temporiser ses émotions. Son visage s'assombrit et n'avait plus rien à voir avec celui d'il y avait quelques minutes. Je ne pouvais me résoudre à le laisser seul mais il me fit mine de partir sans lui. Il restait mon meilleur ami après tout.

Je les observais se diriger vers le bois derrière le lycée, ce qui m'inquiétait encore plus. Je décidais de les suivre discrètement, en prenant soin de mettre suffisamment de distance pour ne pas me faire repérer. Mon cœur battait tellement fort que ma poitrine semblait se comprimer. Ma respiration fut de plus en plus insupportable. Il était seul face à sept gars. J'appréhendais ce qui allait lui arriver.

Je me cachais entre des gros rochers un peu en hauteur d'une pente, afin d'avoir une vue claire du rassemblement. Mon téléphone filmait la scène et j'avais le numéro de la police ouvert en cas d'urgence.

Les six sbires de Marius encerclaient Yibo, imperturbable.

- C'est quoi ce bordel. Demandait le chef de la bande en le toisant. Tu cherches à nous faire repérer ou quoi ?

Je ne comprenais pas de quoi ils parlaient. Yibo répondit simplement par un ricanement. Marius poursuivit, prêt à bondir sous la colère. 

- J'aurais dû te tuer dès que j'en avais l'occasion avant que tu ne voles le grimoire de mon père. A cause de ma négligence, tu as semé le chaos au lycée et tu menaces l'existence de notre espèce.

Pourquoi ils parlaient de tuer ? Grimoire ? Espèce ? J'étais désemparé face à cette discussion insensée.

- Tsk. Vous croyez vraiment que j'allais laisser vous en tirer après ce que vous m'aviez fait subir cette nuit ? J'ai juste utilisé le livre à bon escient. Et il s'avère que, malheureusement pour vous, je sois un réceptacle compatible.

Yibo craqua bruyamment les doigts de sa main un par un. A partir de cet instant, l'atmosphère s'était refroidie en un éclair et les animaux avaient cessé tout bruit. Mon rythme cardiaque s'était accentué encore plus qu'il ne l'était déjà. Il se passait quelque chose dans l'air. Je ne croyais pas aux esprits mais une présence semblait venir d'un autre monde.  

Mon téléphone ne fonctionna plus. La vidéo s'était arrêtée sans action de ma part. J'avais beau appuyer sur le bouton d'enregistrement, la vidéo ne voulait pas démarrer. L'écran était figé. Je respirai profondément pour éviter de céder tant bien que mal à la panique.

- Tu parles ! Mais tu es bien conscient que tu es condamné à avoir un appétit insatiable pour l'éternité. Cria Marius en position de défense.

Yibo serra les dents et lâcha un long grognement la tête en arrière, agacé.

- Si tu savais comme je n'en ai strictement rien à foutre. Du moment que je suis plus puissant que vous tous réunis, c'est tout ce qui importe.

Un vent fort souffla soudainement derrière mon dos, ce qui me prit par surprise un court instant. Marius se retourna et guetta les alentours. Je me baissai furtivement derrière les rochers pour éviter d'être découvert.

- Tiens. Je sens un humain à quelques mètres ? Dit Marius en humant l'air suspicieusement.

Mon corps était pétrifié. Je ne respirais plus. Je voulais m'enfuir de cet enfer mais mon instinct me criait de ne pas me faire repérer. C'était la mort qui m'attendait. J'assistais clairement à quelque chose où je n'étais pas le bienvenu. Ces mecs n'étaient pas normaux.

Yibo renifla l'air un instant. Ses yeux s'écarquillèrent et son regard sombre croisa le mien en une fraction de seconde. Malgré la distance qui nous séparait, il sut exactement où j'étais. Par surprise, ma main droite glissa sur des cailloux, ce qui émit du bruit. Ma présence fut trahie.

- Il est là-haut ! S'écrièrent-ils.

- Il a tout entendu, il ne doit pas sortir d'ici vivant. Fulminait Marius.

Je me mis à courir aussi vite que je pus. Mes poumons brûlaient et mon cœur était à son rythme maximum. Je n'avais pas la force de crier avec ma respiration haletante. Je ne comprenais rien à ce qui se tramait mais ma vie était en grand danger. Ils voulaient me tuer, c'est tout ce que je savais.

Je me retournais et voyais ces hommes courir à une vitesse folle. Mon pied gauche se prit une branche d'arbre et je me retrouvai à terre. C'était la fin. Je me préparais à mourir.

Le premier mec qui s'approchait allait me sauter dessus quand une main aux griffes acérées transperça le corps de celui-ci. Je vis le visage du mec pâlir, me fixer avec des yeux écarquillés avant de brusquement cracher du sang sur moi. Je sursauta de terreur, aucun son ne parvint à sortir de ma bouche. La main se retira aussitôt de son torse dont la chemise était désormais rouge en son centre.

Il tomba à genoux, révélant Yibo avec l'avant-bras droit rouge écarlate jusqu'aux griffes.

Il s'accroupit et me présenta son dos.

- Monte.

Je ne réagis pas, toujours pétrifié.

- Dépêche-toi ! Rugit-il, me faisant bondir instantanément du sol.

Il me porta sur son dos, me prit les jambes avec ses bras puis il courut à une vitesse incroyable, sautant au-dessus de tout obstacle, dévalant les pentes de la forêt sans aucun problème. Je m'accrochais de toutes mes forces autour de son cou comme si ma vie en dépendait. J'avais peur mais je lui accordais une confiance aveugle à ce stade. Je ne cessais de me demander comment il en était arrivé à avoir un corps d'acier alors que je l'avais vu effroyablement maigre les jours d'avant.

La bande de Marius ne se préoccupait plus de nous et avait arrêté de nous poursuivre pour récupérer leur ami blessé et allongé sur le sol.

- TU NE PERDS RIEN POUR ATTENDRE WANG YIBO ! Hurla Marius, faisant voler les oiseaux des arbres.

Sur le chemin de la maison, Yibo me déposa un instant pour laver son avant-bras ainsi que sa veste en cuir au bord d'une rivière. Ses griffes avaient disparu. Une marre écarlate se répandit petit à petit dans l'eau. Cette vue me rappela les scènes de toute à l'heure et me déclencha une envie de vomir immédiate. Je courus dans un buisson.

Après avoir fini, je m'assis sur l'herbe, la tête fiévreuse entre les mains.

- Ça va ? Me demandait-il après avoir mouillé son visage.

Je reculai aussitôt, voulant maintenir une distance de sécurité avec lui.

- Ne m'approche pas. Tu as tué quelqu'un. T'es un monstre ou un truc du genre n'est-ce pas ? J'ai vu que tu avais des griffes. Ne me mens pas. Bredouillais-je.

- Ne t'en fais pas, il va s'en sortir. Je n'ai pas visé son cœur donc il ne va pas mourir pour si peu.

- Tu lui as fait un putain de trou dans le torse ! Comment tu peux en être certain ?

Il soupira et ignora ma question.

- Tu as assisté à toute notre conversation j'imagine ?

- Oui. J'ai rien capté mais j'ai filmé avec mon téléphone.

Il se figea un court instant puis il me dit sérieusement.

- Supprime la. S'il te plaît.

- Pourquoi ? Qu'est-ce que vous me cachez ?

- Ce ne sont pas tes affaires. Crois-moi, tu ne veux pas être pris pour cible.

- Pris pour cible par qui ? Ces gars ? Commençais-je à être agacé.

- C'est plus que ça. Je ne peux pas t'expliquer maintenant. Plus tard si tu veux, je te le promets. Mais là c'est trop tôt.

- Je ne sais pas si je dois te croire ou non.

- Zhan. On est potes. Tu dois me croire et être patient.

- Tu reviens de nulle part et tu ne me donnes toujours pas d'explications. Un vrai pote me dit tout.

- Le plus, tu en sauras. Le plus, tu seras en danger. Supprime la vidéo.

- Non.

Yibo plaça un pied à l'arrière et se mit à courir vers moi d'une rapidité effrayante. Je n'eus pas le temps de lever un cil que mon téléphone avait disparu de ma main.

- Yibo ! Rends-le moi ! Lui dis-je en le suivant et en essayant de le reprendre.

Il tendit le bras en haut pour me narguer tandis que j'essayais de sauter et de me tenir maladroitement sur la pointe des pieds.

- C'est quoi ton code ? Dit-il amusé.

Il me repoussa de sa main gauche et alluma mon téléphone. Son sourire s'estompa aussitôt lorsqu'il vit l'écran de déverrouillage.

- Rends-le moi putain ! Continuais-je.

- C'est qui ? Me demanda-t'il en me faisant voir l'écran.

- C'est ma copine ! Maintenant rends moi mon téléphone.

J'arrivai à lui récupérer de la main , victorieux, mais cela me sembla trop facile. J'avais l'impression qu'il me l'avait cédé. Je le regardais dubitatif et à ma grande surprise son regard paraissait comme vide.

- Tu ne m'avais pas dit que t'avais une copine. Dit-il d'un air blasé mais qui sonnait comme un reproche.

- On vient de se retrouver aujourd'hui ! J'allais t'en parler mais il semble que l'on a été un peu interrompus.

Yibo changea soudainement d'expression, affichant un grand sourire que je sentais forcé.

- Mes félicitations. Tu pécho enfin, c'est pas trop tôt... Ricanait-il.

- Tu rigoles ? C'est toi qui dit ça ? T'es pas mieux.

- Bah. Ça va changer à partir de maintenant... Je ne suis plus le même Yibo ! S'exclamait-il en clignant de l'oeil.

- Sérieusement, comment as-tu pu changer autant ? Que t'est-il arrivé ?

C'était la question qui me brûlait les lèvres depuis ce matin. L'écart entre le Yibo d'avant et le Yibo de maintenant était trop grand. Je ne pouvais croire à un changement de physique et de comportement aussi radical.

Le meilleur ami que je connaissais était tout le temps sérieux, s'énervait pour rien et se plaignait à longueur de journée. Il était la personne la plus dramatique que j'avais connu de toute mon existence. Désormais, je me trouvais face à un playboy dragueur, qui aimait attirer l'attention et qui en même temps semblait ne plus être capable d'exprimer des émotions sincères. J'étais persuadé que j'avais affaire à un imposteur.

- Rassure moi, tu n'es pas un Terminator ? Demandais je hésitant.

Il explosa de rire, ne s'attendant pas à une telle question après autant de tension.

- Si, et j'ai été enlevé par des aliens. Dit-il les yeux en larmes.

- S'il te plaît, sois sérieux deux secondes... C'est vrai ?

J'avais eu un doute.

- Si tu supprimes la vidéo, je te dirai tout. Absolument tout.

Je m'exécutai en lui montrant l'écran. Mon doigt glissa sur la petite corbeille et je lui montrai même la suppression dans le fichier "Photos/Vidéos supprimées".

- Je suis clean maintenant. Lui dis je les bras levés.

Il acquiesça et resta muet un petit moment.

- J'attends que l'on rentre à la maison mais je te préviens. Tu risques de ne pas me croire.

- Oh tu sais, j'ai vu tout un tas de choses aujourd'hui que je croyais impossibles donc ne t'en fais pas, je pense te croire. Répondis je avec un bon sarcasme.

- Rentrons sans plus tarder dans ce cas.


.

- Un entraînement spécial, tu dis ?

Je levai un sourcil. Nous étions assis sur son lit.

- Oui, d'où mes nouvelles capacités physiques. Tu te souviens de mon tournoi d'arts martiaux ? J'ai été repéré. Je ne devrais pas te le dire mais j'ai travaillé pour une équipe spéciale et secrète du gouvernement. J'avais interdiction de communiquer avec l'extérieur, mon portable a été confisqué et je n'avais aucun moyen de contact pour vous joindre. Je suis désolé.

- D'accord. Et tu peux m'expliquer la partie où tu m'avais foutu un vent quand je t'ai vu dans le bois, le jour où il y a eu un orage ?

Yibo fronça les sourcils.

- Quel bois ? Tu as dû te tromper. J'étais dans un hôtel de la ville voisine qui est à 3h d'ici. J'ai même une preuve.

Il sortit de son sac un reçu de CB, un ticket avec l'hôtel concerné à son nom. Les preuves étaient irréfutables.

- Effectivement, je me suis trompé. En y réfléchissant il n'avait rien à voir avec toi niveau morphologie. J'ai cru avoir affaire à un toxico.

Je me sentis presque rassuré. Yibo sourit et me fixait sans rien dire, observant la moindre de mes réactions.

- Qu'est-ce qu'il y a ? J'ai quelque chose sur le visage ?

- Oui. Répondit il. Sur tes cheveux, ne bouge pas..

Son visage se rapprocha doucement du mien tandis qu'il enlevait ce je ne sais quoi dans mes cheveux. La dernière fois qu'on était aussi proches physiquement c'était en primaire à la piscine dans des vestiaires étroits. Je pouvais ressentir son souffle sur ma peau, voire son odeur vanillée.

Je me demandais ce qui ne tournait pas rond chez moi.

- Ton coeur bat très vite. Que se passe-t'il ? Chuchota-t'il à mon oreille me faisant sursauter.

- Quoi ? Répondis je en sortant de mes pensées un peu embarrassé.

- Tadaa ! S'exclama-t'il victorieux. Une petite branche était coincée dans tes cheveux ultra épais.

J'ignorais quoi dire sur ce qui venait de se passer. Je n'eus pas le temps d'y penser plus car son père toqua sur la porte de notre chambre. Il ouvrit en tenant un plateau contenant nos deux repas.

- Hello les boys ! Je vous ai apporté votre dîner en pensant que vous voudriez être tous les deux pour vos retrouvailles. En revanche, vous ne manquerez pas de descendre pour le dessert n'est-ce pas ? Je l'ai fait pour fêter le retour de Yibo. Dit Monsieur Wang les yeux en croissant.

- Oh génial, merci papa ! On arrive toute à l'heure. Répondit Yibo en prenant le plateau.

Yanli et Xichen se cachaient derrière les jambes de Monsieur Wang et nous regardaient d'un air curieux. Le dernier vint faire un petit câlin à son grand-frère tandis que Yanli restait en retrait.

- Tu ne viens pas faire un câlin à ton grand-frère Yanli ? Dit Yibo en tendant les bras.

Yanli le fixait d'un regard étonnamment méfiant. je ne l'avais jamais vue comme ça avec lui. Elle l'esquiva et partit se réfugier dans mes bras au lieu des siens.

- Bah ! M'écriais-je en lui tapotant le dos. Pourquoi tu ne vas pas voir ton vrai grand-frère ?

- C'est parce que je suis parti sans rien dire. Elle doit être fâchée. Dit Yibo en se grattant la nuque.

Néanmoins ça m'étonnait venant de Yanli. Elle ne semblait vraiment pas à l'aise en sa présence. Elle me murmura soudainement quelque chose à l'oreille, et ce qu'elle dit me glaça le sang.

- Ce n'est pas mon frère.

Je sais que les enfants sont sensibles à certaines choses. Je partageais déjà le sentiment de Yanli quand j'avais revu Yibo ce matin. Et elle ne fit que confirmer mes craintes. Je n'étais pas le seul à avoir une sensation bizarre.

- Bon Yanli, tu viens avec Papa ? On va laisser BoBo et Zhan ensemble.

Elle partit furtivement de la chambre et descendit les escaliers aussi vite qu'elle put.

- À toute à l'heure ! Dit Monsieur Wang.

Il ferma la porte et un lourd silence planait dans la chambre. Yibo plaça une table basse devant son lit et il se mit assis en tailleur sur mon matelas pour me faire face.

- Merci pour ce repas. Dit-il en joignant ses mains.

Je fis de même et nous prirent nos baguettes pour attaquer nos bols.

- Alors ? Comment t'as rencontré ta copine ? Demandait-il.

- Hum. Au cyber-café de la ville, 3 jours après que tu aies disparu. Elle est dans notre lycée aussi, classe 1D... Hey- ça va ? 

Je voyais Yibo faire la grimace suite à des bouchées de riz. Il donnait l'impression de vouloir vomir. Il ne répondit pas. A la place, il prit une grande inspiration, avala et reparla comme si de rien n'était. 

- Vous vous êtes mis ensemble au bout de combien de temps ?

- Je sais plus... Deux semaines?

- C'est rapide. Sortit-il en regardant son bol avec un ton un peu froid.

- Le courant passait très bien. On verra mais on s'aime beaucoup. J'ai enfin ma première copine haha. Dis-je un peu gêné.

-... Je vois que tu as pu trouver une distraction pendant mon absence. C'est super.

Il me regardait, toujours en mangeant. Je ne sus quoi répondre. J'étais un peu pris au dépourvu car je ne savais pas si ce qu'il venait de dire était une blague ou un reproche. Il souriait mais son expression était énigmatique. Un silence de plomb se réinstalla de nouveau avant que je ne le brisa un peu maladroitement.

- Ne penses pas que... J'étais toujours inquiet tu sais. Je pensais à toi tout le temps et n'arrivais pas à faire mes nuits.

Je me justifiais car je ne voulais pas qu'il se fasse des idées. Certes, Qing m'avait consolé, soulagé un peu ma peine en m'apportant une histoire nouvelle mais je n'avais pas oublié mon meilleur ami.

- Je peux voir des photos de vous deux ? Demandait-il soudainement.

Je lui tendis mon téléphone avec mon album photo, il passait avec son doigt nos selfies et s'arrêta sur celle où on s'embrassait.

- T'as l'air épanoui avec elle. J'admets qu'elle est mignonne. Dit-il avec un sourire en coin.

J'allais répondre quand mon téléphone se mit à vibrer et à afficher "Qing ❤️" avec sa photo de contact.

Je demandais à Yibo de me passer mon tél mais il décrocha et répondit à ma place.

- A quoi tu joues ?! Passe la moi ! Chuchotais-je agacé.

- Allô ? A qui ai-je l'honneur ?

Yibo mit en haut parleurs.

- Zhan ? T'as une voix bizarre. Dit elle.

- Petite question : quelle est ta taille de poitrine ?

- Hein ?

Yibo se retenait de rire tandis que je le fusillais d'un regard meurtrier.

- Salut ma belle, c'est juste mon crétin de pote. Dis-je en mettant fin à ses conneries et en reprenant le téléphone.

Je désactivai le haut-parleurs pour avoir une conversation plus intime pendant dix minutes puis je raccrochais sur un "Je t'aime".

- Beurk. Que c'est niais. Fit Yibo avec une grimace de dégoût.

Je rigolais, cela ressemblait bien à ce que dirait mon meilleur pote.

- Quand tu trouveras la bonne, tu verras ce que c'est. Vu comment tu es beau gosse et intelligent, je pense que tu auras du choix parmi tes nombreuses prétendantes.

Yibo ne répondit pas et fixait vaguement la table. Ses mains se recroquevillèrent sans que je ne compris pourquoi.

- Yibo ?

Il se leva soudainement.

- Je pars faire un tour.

- Mais, à 22h ? Répondis-je confus.

Il me ferma la porte au nez sans rien dire de plus, me laissant seul comme un idiot encore une fois. Je levai les bras en signe d'exaspération.

[[ Fin du point de vue de Zhan ]]

Yibo se promenait au bord d'un fleuve non loin d'une départementale. Les cigales rythmaient l'atmosphère nocturne sous une demi-lune bien lumineuse.

Il repensait aux mots de Zhan et se mit à rire en secouant la tête.

- Toujours aussi bête. Soupirait-il.

Il aperçut une femme adossée à sa voiture les feux allumés au bout du chemin. Il entendit des pleurs et s'approcha pour voir ce qu'il se passait.

- Hum... Excusez-moi ? Vous allez bien ? Demandait-il hésitant.

- Non, pas trop... Mon copain vient de me plaquer et il est sorti de la voiture.

- Mince... Je suis navré.

Yibo s'adossa également sur la voiture à côté d'elle.

- Je peux vous ramener si vous le voulez. Cela me gêne que vous soyez seule ici, surtout à cette heure.

La jeune femme hésita encore sanglotante puis elle le regarda de plus près. Ce jeune inconnu ne semblait être menaçant. Au contraire, elle tomba immédiatement sous le charme de Yibo. Bien bâti, les cheveux clairs tombant juste au-dessus de ses yeux noirs mystérieux.
Elle vit une opportunité d'oublier sa rupture un instant.

- Je veux bien. Dit-elle tout d'un coup pleine d'entrain, plongée dans le regard de celui-ci.

Yibo lui sourit en retour.

Et la lune devint rouge écarlate.











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