- Yibo! Ça va ? Eh !

Haikuan tentait de réveiller l'évanoui au sol. D'autres personnes s'étaient rassemblés autour de lui, attirant l'attention de Zhan.

Entendant le nom du châtain, il confia son plateau à Yu Bin avant de se précipiter vers lui. Les personnes s'écartèrent à son passage, laissant le brun s'approcher de son ami allongé et inconscient.

- Yibo !

Il se mit à genoux, prenant son visage entre ses mains. Le brun se retourna vers Haikuan.

- Vite, il faut le ramener chez lui.

Celui-ci resta muet un instant puis acquiesça. Ils le soulevèrent tous les deux en même temps.
Une fois sortis de l'université, Haikuan appela le chauffeur privé de Yibo.

Une berline noire aux vitres teintées arriva quelques minutes plus tard et ils partirent en direction de chez lui.
Le chauffeur jeta quelques coups d'oeils interrogateurs dans le rétroviseur intérieur à Zhan dont les yeux fixaient le paysage.
Il croisa le regard de Haikuan, assis sur le côté passager, et lui lança un regard confus.

- Que fait cet humain ici ? Lui demanda t'il par télépathie.

- Ne t'en fais pas, tu n'as rien à craindre de lui.

Haikuan observait Zhan, intrigué par leur lien. Le brun ne quittait pas le visage endormi de son ami, reposé paisiblement sur son épaule. Aucun  mot ne fut échangé durant la route.

.

- ZhanGe, puis-je te poser une question ?

Les deux étaient dans la chambre du châtain. Yibo était désormais allongé sur son lit en habits confortables.

Zhan hésitant, détourna le regard de la fenêtre pour faire face à Haikuan.

- Tu connais la vraie nature de Yibo. N'est-ce pas ?

Le brun hocha de la tête.

- Tu sais donc ce que nous sommes.

Zhan ne répondit pas. Il baissa les yeux sur le visage du châtain endormi, se contentant d'observer les paupières closes de celui-ci.

- Qui es-tu réellement pour Yibo ? Poursuivit Haikuan. Ne voyant aucune réaction de la part du brun, il poursuivit. Je sais que tu es quelqu'un de précieux pour lui. Depuis que tu es arrivé dans notre classe, jamais je n'aurais cru possible de voir autant d'émotions sur son visage. Il est froid... Sauf avec toi, un humain. Intriguant, n'est-ce pas ?

Tandis que Haikun observait attentif le moindre de ses expressions faciales, Zhan retroussa ses lèvres, effrayé de révéler leur lien.  

- Il est mon meilleur ami depuis la primaire.

- Tiens donc, ceci explique cela. Dit Haikuan pensif. Il redirigea son attention dans les orbites du brun, esquissant un léger sourire. 

- Ce n'est pas possible. L'attention-Non... L'obsession qu'il te porte dépasse largement l'amitié. C'est plus que cela. Quelque chose de beaucoup plus fort.

Les mains de Zhan devinrent moites. Ses yeux fuyaient le regard curieux de Haikuan.

- J'entends les battements de ton cœur s'affoler. C'est donc vrai ? Constata celui-ci.

- C-C'est plus compliqué que tu ne le crois.

Haikuan prit place sur un des sièges de la pièce, parcourant un de ses bouquins fétiches.

- Dans notre code, il nous est formellement interdit d'être amis avec les humains. Encore moins, amants. Cela amène à la création de métisses, autrement appelés les sang-mêlés. En général, ils ne font pas long feu. Dès la naissance, les enfants ne peuvent contrôler leur soif de sang. Ils n'ont pas de pensée propre et sont uniquement dirigés par leurs instants vampiriques. Dès que le gouvernement repère un nouveau-né, il est tué sur le champ... Mais comme dans tout, il y a des exceptions. Dans l'histoire des vampires, il y en eut un qui réussit à atteindre l'âge adulte. Il avait une pensée propre. Un érudit doué, puissant, pouvant se nourrir de sang et de nourriture humaine. C'était le sang-mêlé parfait.

- Wei Wuxian, je présume ? Répondit Zhan, le regard toujours sur Yibo.

- Oui, son histoire me fascine depuis que je suis petit. On raconte qu'il était aussi beau et aussi fort que le Prince. Qui sait, peut-être qu'il le surpassait. Cependant, ce serait insulter la famille royale.

- Je dois y aller. Interrompit Zhan en se levant de la chaise. J'ai quelques choses à régler à l'université.

Le chauffeur acquiesça et l'invita à le suivre. Haikuan déclina la course, choisissant de rester pour veiller sur Yibo.

.

Quelques heures plus tard, le châtain ouvrit lentement les paupières, sonné et fiévreux. Les échos de la voix de Zhan semblaient toujours proches de lui.  

- ZhanGe ? 

Un gloussement lui répondit. Haikuan leva les yeux de son bouquin, observant la mine à peine réveillée de Yibo. 

- Navré. Il est parti depuis un moment. 

Yibo soupira, clairement déçu. Le vampire renchérit, décidé à taquiner le châtain. 

- Je vois que ton meilleur ami te manque déjà. 

- Ce n'est pas mon meilleur ami.

- Tu admets que c'est ton petit copain ? Fit Haikuan d'un sourire narquois.

Yibo lui jeta un regard des plus noirs.

- Il n'y a rien entre nous. 

- Mmh.

Haikuan devina sans mal la situation. Voyant la frustration évidente de son ami, il le prit comme un aveu. Yibo était clairement amoureux mais Zhan demeurait réservé sur le sujet. Les sentiments ne semblaient pas réciproques et la tension était palpable entre les deux. Haikuan n'insista pas.  

Une notification de téléphone mit un terme à leur conversation. Yibo chercha la source du bruit et il remarqua un smartphone noir posé sur le coin de son lit. Il l'attrapa, pensant être le sien mais il tomba sur un selfie de Qing en écran de déverrouillage. C'était le smartphone de Zhan.

Un appel s'ensuivit aussitôt, provenant de la jeune fille. Yibo observa l'écran un instant, le doigt hésitant sur quelle touche glisser. Il finit par décrocher, approchant lentement le portable de son oreille. Avant qu'il ne puisse prononcer le moindre son, Qing fut la première à parler : 

- A dans une heure au restaurant "XXX", je t'aime. 

Yibo ne répondit pas, laissant la malheureuse face au silence. Cette information lui coupa toute envie de lui informer qu'il était en possession du téléphone de son petit copain. Il raccrocha sans dire mot.  

- Merde ! S'écria le châtain en soulevant la couverture.

- Eh ! Que fais-tu ? Interrogea Haikuan.

- Il faut que j'y aille. Où est Henry ?

- Il est parti faire quelques courses. Eh ! 

Yibo sortit de la chambre d'un pas pressé. Haikuan, inquiet de ce qu'il s'apprêtait à faire, le suivit jusqu'à son dressing. 

- Ne me dis pas que tu comptes y aller...

Toujours silencieux, le châtain sortit sa veste et son casque de moto.

- J'ignore ce que tu comptes faire mais je te déconseille de le faire. 

Haikuan soupira face à l'entêté qui se trouvait devant lui. Définitivement ignoré, c'était en vain qu'il essayait de le retenir de monter sur sa moto. Il assista au départ enragé de celui-ci, le moteur vrombissant et les pneus crissant furieusement sur le gravier avant qu'il ne disparut de sa vue. Un drame allait se produire cette nuit. Il soupira.

.

Zhan courrait essoufflé en direction du restaurant. Son bus eut du retard et il n'avait aucun moyen de prévenir Qing. 

Une fois arrivé, il la vit à la table, clairement inquiète. Il s'empressa de la rejoindre, haletant et transpirant. 

- Enfin, je me demandais ce qui t'était arrivé ! J'avais si peur comme tu ne décrochais plus... Dit-elle. 

- J'ai oublié mon téléphone chez un ami... Pardonne moi.

Désormais détendue et rassurée, elle prit ses deux mains, tentant de le réconforter. 

- Ce n'est pas grave... Profitons de cette soirée tous les deux. 

Zhan se râcla la gorge. Il ignorait si c'était le bon moment de lui dire. Il se sentait terriblement coupable et redoutait le moment où il gâcherait cette soirée.  

- A propos de ça, il y a quelque chose que j'aimerais te dire. 

Qing acquiesça, intriguée par cette déclaration. Zhan ne voulut pas ruiner l'ambiance tout de suite, il préféra attendre. 

- Mangeons d'abord. Dit-il avec un sourire amer. 

Un vrombissement de moto depuis l'extérieur interpella Zhan. Il aperçut à travers la baie vitrée un homme sur une Kawasaki ZX-10R verte émeraude. La couleur flamboyante et le design sportif de celle-ci suscita l'admiration de nombreuses personnes dans le restaurant. Celui-ci se gara puis il entra dans le restaurant, le casque toujours sur la tête. 

Ignorant l'interpellation des serveurs, il s'approcha de la table de Zhan et Qing à grand pas. Les deux, surpris, levèrent la tête vers l'homme casqué. Celui-ci prit le poignet de Zhan, le forçant à se lever et attirant l'attention de tout le monde. Le brun se défit de l'emprise, outré. 

 - Vous êtes malade ou quoi ?! Qui- 

Zhan se tut lorsque cet homme enleva son casque. Rien qu'à la chevelure châtain, plusieurs personnes le reconnurent d'office. 

- Ce n'est pas Wang Yibo des UNIQ ? S'exclama une jeune fille à ses amies. 

- Si, c'est lui ! Oh mon dieu, qu'il est beau ! 

Des smartphones se levèrent pour le prendre en photo.

- Qu'y a -t'il ? Et que fais-tu là ? Questionna Zhan confus. 

- Ecoute moi, cette femme est sournoise et maléfique. Ne t'approche plus d'elle. Murmura-t'il très sérieux. 

Le brun soupira. Il lui fit signe de parler à l'extérieur loin du bruit et des regards, tandis que Qing se retrouva seule, interloquée par cette scène. Les deux garçons se mirent dans un coin où personne ne pouvait les déranger. Zhan croisa les bras. 

- Qu'est-ce que tu essayes de faire ? T'es devenu dingue ?

- Tu ne te souviens pas d'elle car elle s'est effacée de ta mémoire. Mais Qing est une vampire puissante et elle veut te posséder ! Elle t'a menti sur ce qu'elle était réellement ! 

- Tu délires. Rit Zhan.

- Je suis sérieux ! C'est une psychopathe ! Elle a tout fait pour t'arracher à moi- 

- Arrête, Wang Yibo. Arrête ce petit jeu. 

- Je ne plaisante p-!

- Arrête ! Coupa Zhan au bord des larmes. Tu mens... Elle est ma meilleure amie, la personne la plus douce et attentionnée que je connaisse. C'est impossible...

Yibo s'approcha de lui, la voix presque tremblante. Qu'en était-il de lui et ses sentiments, après toutes ces années ? N'était-il pas aussi doux et attentionné ?

- Ge, je te jure devant le monde entier que je ne mens pas. Pourquoi le ferais-je ? J'ai eu des visions récemment. Elle n'est pas ce que tu crois... Elle nous a manipulé tous les deux. Crois-moi, je ne veux que ton bonheur...

- N'es-tu pas excessivement jaloux plutôt ? Ou blessé par le fait que je t'ai "remplacé" pendant que tu étais absent ?

- Ge... Je-

Leur conversation fut interrompue par Qing qui se tenait à quelques mètres d'eux. Ne sachant quoi faire, elle se contenta de les regarder, les mains crispées.

- Je... Hoqueta-t'elle.

Yibo s'interposa immédiatement entre Zhan et elle, empêchant tout rapprochement.

- Eloigne toi de lui, sorcière.

- Yibo ! S'écria Zhan, les veines se dessinant sur sa mâchoire.

La jeune fille prit peur tandis que le  vampire serra son cou étroit de sa main droite.

- Je vais te prouver qu'elle n'est pas ce que tu crois.

Le brun s'empressa de lui agripper le bras.

- Ça suffit ! Tu veux la tuer ou quoi ?

Qing voyait le visage de Yibo se crisper de frustration. Malgré l'emprise autour de son cou, elle se mit à sourire, le regard moqueur, satisfaite de la situation.

- Espèce de salope.

Sous la colère, Yibo employa plus de force dans ses doigts, prêt à réduire ce cou en miettes. Elle feignit de hurler de douleur, enrageant Zhan. Celui-ci finit par le gifler d'une force phénoménal, mettant fin à cette querelle houleuse.

- Tu es un monstre. Ne t'approche plus d'elle, et de moi.

Les yeux du châtain étaient toujours rivés sur le visage de Qing. Celle-ci lui lança un énième rictus silencieux, triomphante de cet interlude. Yibo se retenait de la tuer sur le champ mais voyant l'expression mi-effrayée, mi-haineuse de Zhan, il se retrouva dans une impasse.

Tu es un monstre.

Cette phrase faisait écho à tellement de souvenirs douloureux. Dans ses ultimes retranchements, il trouva les mots qui retinrent Zhan.

- Zhan, je t'aime.

Le brun se racla la gorge.

- Est-ce Yibo, ou Wangji qui parle ? Car je ne sais plus qui tu es.

Le cadet mit ses genoux à terre, voulant prouver sa sincérité.

- Je ne peux pas vivre sans toi. Admit-il, le visage empli de désespoir.

-  Yibo...

Le brun s'approcha de lui d'un pas hésitant.

- Zhan... Pardonne moi. J'ai tellement de choses que tu ignores. Laisse moi te raconter tout et tu comprendras ! J'ai juste besoin que tu m'écoutes.

- Gege, allons-nous en! S'écria Qing en agrippant le bras de Zhan.

Cependant, le brun refusa de bouger. Il ne sut quoi répondre face à une telle sincérité.

- Yibo...

Il s'agenouilla également face au châtain et prit délicatement son visage entre ses mains. Son visage se rapprocha lentement du sien. Le cadet, pris de court par ce geste, ferma les yeux pour accueillir ses lèvres avec joie. Mais au lieu de ça, il entendit un ricanement.

- Quel pitoyable imbécile fais-tu, Wangji. Tu n'as pas du tout changé.

Le châtain ouvrit les yeux avec horreur, réalisant le subterfuge tandis qu'il avait volontairement baissé sa garde. Il reconnut le sourire mesquin de Wei Wuxian.

- Jouer le fragile Xiao Zhan t'amadoue d'une telle facilité... C'en est d'un ennui... Répugnant. L'esprit de Wang Yibo t'affaiblit.

Avant que le châtain ne puisse prononcer un mot, Wuxian plongea ses canines dans son cou sous le regard choqué de Qing. Des coulées de sang dévalèrent du cou de Yibo. Il engloutit une quantité énorme en un temps record, vidant le Prince d'une grande partie de son énergie. Wangji s'écroula au sol tandis que Wuxian se releva tout en s'essuyant les lèvres.
Qing, médusée par la scène, n'arrivait pas à croire ce qu'il se passait.

- Pourquoi es-tu si surprise? N'était-ce pas ton but de me réveiller ?

Le sang-mêlé arbora son oeil gauche rouge.

- Si... Si, maître Wei. Bredouilla-t'elle en s'agenouillant fébrilement.

- Malheureusement, il ne va pas mourir comme ça. Soupira-t'il. Il reste un membre de la famille royal. En revanche, je suis complètement revigoré. Son sang est bien utile.

Il lècha les dernières gouttes écarlates sur les commissures de ses lèvres. Wangji trouva la force de croiser le regard de Wuxian mais sa vue se troubla d'un épais flou.

- Z-Zhan...

Il tenta de toucher le bout de sa chaussure mais sa main atterrit sur le bitume. Le vampire était désormais inerte.

- Tsk. Quelle plaie.

Il fut prit d'une violente migraine. Des souvenirs du passé l'envahirent, le sang de Wangji ayant ravivé son corps.

Son esprit se superposa à celle du Prince un court instant, mais cela semblait durer une éternité.

- Wei Ying, c'est mon vrai prénom.

Admirant les traits délicats de ce visage immaculé posé sur ses cuisses, Wangji dégageait les quelques mèches noires obsidienne de celui-ci pour avoir une meilleure vue de ses yeux et sourcils. Les deux hommes venaient de se réveiller après une nuit voluptueuse.

- C'est beau. Sourit-il timidement.

- Puis-je connaître celui de mon Prince ?

Wuxian imita son geste, glissant ses doigts dans les doux cheveux blonds du sang royal. Le Prince hésita mais finit par le murmurer d'entre ces fines lèvres.

-... Lan Zhan.

Le vampire blond ne l'avait jamais dit à quiconque avant lui. Cet homme était le seul qui arrivait à faire disparaître le monde autour de lui. Le brun afficha un sourire encore plus lumineux que celui d'avant, continuant de faire fondre le cœur de glace de Wangji.

Le Prince traçait les contours de son visage de ses doigts, savourant ce moment si calme et apaisant. Le bonheur qui en découlait lui semblait irréel. C'était donc ça, d'avoir une âme sœur à ses côtés.

De retour à la réalité, Wuxian avait le regard perdu, déstabilisé parce qu'il venait de voir. Il n'avait aucun souvenir de ce moment. Sa haine l'avait longtemps effacé, mais revoir cette scène ne le laissa pas indifférent. Il tenta de regagner son sérieux devant Qing songeuse.

- Tu ne perds rien pour attendre, Wangji. Finit-il par dire avant de le laisser seul au milieu du parking, suivi de près par elle.