7 octobre : Personne ne veut prendre sa place
Plus de cinq millions d’années…Des milliards de milliards d’âmes perdues à aiguiller… À les punir de leurs erreurs et péchés (notion toute récente inventée par les monothéistes)… Et me voilà, fatigué de tout ça ! Le « diable », « Sheitan », « Lucifer », « Seth »… J’ai eu beaucoup de noms toutes ces années… Mais aujourd’hui, je suis las… Las d’être le maître du Mal sous Terre…
Alors j’ai convoqué un conseil des pires âmes d’en-dessous, mais aussi les plus impartiales, celles qui pourraient condamner un vivant à notre éternité, uniquement en regardant ses actes et non son apparence… J’ai convoqué cinq âmes parmi les plus justes : Jeanne-Marie, Sarah, Constantin, Sokar et Aristée.
Ma préférée était largement Jeanne-Marie : une ancienne « faiseuse d’anges » tuée par le frère d’une femme qu’elle a tuée par accident pendant un avortement… Elle aurait pu aller au Paradis, mais même au paradis, à l’époque, l’avortement faisait débat… Dieu n’aime pas les conflits, d’où sa facilité à m’envoyer les âmes pour lesquelles il hésite… Mais au moment où j’allais prononcer la phrase consacrée « Moi diable, Maître des Enfers, je fais de toi mon héritière... », un halo de lumière transperça le toit de mon domaine et entoura Jeanne-Marie. C’est alors que Dieu s’exclama : « Jeanne-Marie ! Je te gracie de tous tes crimes, je reconnais mon erreur de t’avoir envoyée ici-bas et te rappelles à moi ! ».
Jeanne-Marie se mit alors à s’envoler dans ce tunnel lumineux, en direction de mon ennemi de toujours.
Mais je ne perdis espoir et désigna Sarah, une ancienne sorcière près de la région de Salem, qui avait assassiné plusieurs hommes de son village, en représailles du massacre de Salem. Un peu rancunière, mais avec un sens de la justice aiguisé. Mais alors que je prononçais la phrase, à nouveau, le halo de lumière blanche revint et se fixa sur Sarah : « Sarah ! Je te gracie de tous les crimes, je reconnais mon erreur de t’avoir envoyée ici-bas et te rappelles à moi ! ».
Sarah s’envola alors à son tour, le sourire aux lèvres.
De colère, je me suis tourné vers Constantin, un idiot qui avait tué son frère pour une histoire de concours de chasse, alors que son frère revenait des Croisades. Mais je n’eus le temps que de prononcer « Moi, diable... » et l’halo revint : « Constantin ! Je te gracie de tous les crimes, je reconnais mon erreur de t’avoir envoyé ici-bas et te rappelles à moi ! ». Constantin partit à son tour.
Je ne devais pas avoir l’air ravi car Sokar et Aristée me regardaient d’un air inquiet. Alors j’ai à nouveau essayé avec Sokar, crétin... égyptien,... histoire de mec bourré qui tue des gens, blabla… Et la lumière reperça mon plafond : « Sokar ! Je te gracie de tous les crimes, je reconnais mon erreur de t’avoir envoyé ici-bas et te rappelles à moi ! »
En hurlant, je me mis à commencer à prononcer la phrase à Aristée, un pêcheur.. Antiquité... noyades... non-assistance à personnes en danger... blablablablaaa… Et la putain de lueur revint, et la voix de ce Con : « Aristée ! Je te gracie de tous les crimes, je reconnais mon erreur de t’avoir envoyé ici-bas et te rappelles à moi ! ».
Je crois bien que mon cri résonna dans tout l’Enfer, car les murs se mirent à trembler. Cinq candidats, cinq graciés ! Alors je suis monté sur Terre, rencontrer mon ennemi de toujours, dans un joli parc anglais. Il était là, dans la peau d’une jolie blonde aux yeux d’or.
« Jolie peau… C’est qui cette fois ?
- Une femme trans, répondit Dieu. Morte en ayant sauvé un couple qui pourtant venait de l’insulter… Et toi ?
- Un mage breton du dixième siècle... qui avait escroqué toute une région…
- Ah oui, c’est vrai… Elias… Quel dilemme son pote d’ailleurs… Tu te souviens ? Merlin ?
- Change pas de sujet Emmanuel ! Pourquoi tu m’as piqué mes candidats ? Ce n’est pas digne de toi, c’est quasiment diabolique !
- Parce que tu es mon ami, Lucifer ! Oui, tu es mon opposé, mon Némésis... Mais surtout mon ami ! Qui pourrais-je embêter si tu prends ta retraite ?
- Prends aussi ta retraite ! Et nous pourrions flâner dans ce monde, sans contraintes !
- J’aime trop mon boulot pour ça… Tu le sais…
- C’est facile pour toi… Tu ne côtoies pas des âmes tourmentées tous les jours ! Je suis fatigué !
- Tiens encore vingt ans ! Juste pour moi ! Et après je te promets qu'on l'aura, ce cottage anglais!
- T’es chiant... »
Depuis ce jour, au fond de mon enfer, j’attends ma retraite, comme les humains… Jusqu'au jour où, enfin, quelqu'un prendra ma place....
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