5 octobre 2022 : amitié

Lilas était allongée. Que faisait-elle ? Elle se contentait de sa position. Sa journée ? Allongée. Elle luttait contre ses démons – du moins c'est ce qu'elle croyait. La jeune femme avait été vaincue depuis longtemps.

Elle passait ses journées à attendre. Attendre quoi ? Elle-même l'ignorait. La moindre notification sur son téléphone la rendait malade. Prise de haut-le-cœur, elle se penchait au-dessus du seau près de son lit. Et comme toujours, elle ne vomit rien.

C'était une chance en quelque sorte, car elle subissait le même phénomène à la vue de la nourriture qu'à celle d'une notification. Elle avait faim. Son estomac réclamait à manger. Lilas essayait de se nourrir, se battait jusqu'au bout. Bec et ongles, elle parvint à manger un petit sandwich triangle. Cela lui avait pris la journée entière.

Quand son cœur la meurtrissait vraiment trop, Lilas se levait enfin de son lit. Je vous assure, chers lecteurs, que c'est de loin le spectacle le plus désolant que j'ai vu. Son corps était tellement amaigri et dénué de muscle qu'il n'était plus capable de retenir ses urines. Alors, quand elle se levait, la jeune devait systématiquement nettoyer le sol ensuite.

Puis, venait une nouvelle épreuve : descendre l'escalier. Oh, comme ses muscles étaient attaqués ! Quand le corps manque de ressources, il puise de l'énergie là où il le peut – il se consume de lui-même. Son âme meurtrie la brûlait vive tout entière. Evidemment, que c'était douloureux pour Lilas.

Une marche après l'autre, elle se tenait à la rambarde car elle considérait très justement le risque de glissade qu'elle encourait. Arrivée en bas, un simple étage descendu, ses jambes la tiraillaient, la brûlaient.

Un répit et quelques haut-le-cœur plus tard, Lilas sortait de chez elle. Le soleil irradiait mais elle n'avait pas conscience de l'été. Son cœur avait vraiment trop mal – elle ne pouvait pas rester indéfiniment là, dans son lit, à se morfondre, pensait-elle. Alors, Lilas se faisait violence : elle sortait de chez elle.

L'air hagard, sa silhouette squelettique parcourait rues après rues. Les passants lui jetaient des regards plein de pitié mais Lilas n'en remarqua que quelque uns. Même en allant vers le monde, elle ne voyait personne : elle s'emmurait dans sa folie.

L'âme en peine finit par rentrer à la maison, des heures plus tard. Ses jambes la tiraillaient beaucoup trop ; Lilas tenait à peine encore debout, frémissante. Elle avait la tête qui tournait – tout tournait encore et encore !

Alors, elle se réinstalla dans son lit, et elle dégaina un morceau de porcelaine brisée. Elle approcha la pointe de sa peau pâle comme la mort. Elle s'interrompit un instant, démunie en voyant son corps : elle pouvait compter ses cotes. Sa peau se recouvrait de duvet, pour la maintenir au chaud – visiblement, les polaires qu'elle ne quittait plus en ce mois d'août ne suffisaient pas à son corps, mis à mal à l'extrême.

Ses limites psychologiques et physiques étaient dépassées. Lilas lâchait complètement. Du coup, elle commença à se fendre la peau. Elle en avait marre, d'être coincée dans ce petit corps incapable, dans cette tête si limitée. Si seulement elle ne souffrait pas autant ! Si seulement elle n'avait pas ce minable petit cerveau, que ses capacités lui permettaient de parvenir à ses fins ! Si seulement ses émotions n'étaient pas si bleues !

Avant d'avoir fini cette entaille, geste de désespoir, elle reçut un SMS. Elle lâcha tout et se pencha au-dessus du seau. Elle jeta un œil à son portable. C'était bien un message, pas une notification quelconque ! Double ration de haut-le-cœur en supplément.

Au milieu de son océan de désespoir, si violent, la jeune femme ressentit une vague de tendresse. C'était Simon. « Moi, je veux que tu vives, Lil' ! »

Depuis de longues semaines bloquées, les larmes dévalèrent ses joues creusées. Qu'est-ce qu'elle avait été stupide ! Comment pouvait-elle haïr autant la vie alors qu'elle avait un tel ami, d'un cœur en or massif ? Il avait été le seul à entrevoir et à considérer son mal-être. Il avait été le seul à prononcer ces mots, à avoir accompagner Lilas pendant des années.

Elle se jura de se reprendre en main. Cette fois, la flamme se ranimait en elle – et il ne serait plus question d'efforts en vain. Lilas n'avait plus le choix de réussir ; pour Simon et pour elle-même ! Son meilleur ami valait la peine de redonner une chance à la vie.

Merci Simon, tu as sauvé notre héroïne de mélodrame. Sans toi, la faim ou la tourmente l'aurait emportée – qui, sait, en quelques jours ou quelques semaines à peine.

« C'est à ça que ça sert, les amis ! »

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