18 octobre 2025 : Le roi de l'illusion
Violette était une voyageuse confirmée – du moins à travers la péninsule dont elle était originaire. Certes, elle avait déjà voyagé à travers la Royauté des Météores, mais jamais aussi loin.
Villiers murmura à l'oreille de son accompagnatrice :
« La Pointe de Galidor est vraiment le seul endroit autorisé pour les étrangers ?
— Oui. Cela dit, je crois qu'avant le règne du roi Damlorin, ce n'était pas aussi strict. Le pays était moins fermé, il me semble.
— Tu as l'air d'avoir bien peu de certitudes, Violette. C'est étonnant.
— Et c'est bien peu de le dire... » approuva Violette, distraite.
Le regard de la femme fixait une troupe de saltimbanques en pleine action, non loin à leur gauche. Leur spectacle avait l'air d'avoir du succès car de nombreuses personnes s'étaient agglutinées pour les voir à l'œuvre, au beau milieu du marché.
Un homme grand et musclé monta sur l'estrade de fortune, quand le duo d'étrangers s'en approcha. L'artiste, torse nu, avait la peau dorée tatouée avec de nombreux motifs formant des spirales. Villiers était surpris ; il n'avait jamais vu personne de tatoué ici, jusqu'à présent. Mais personne ne s'en offusquait. Etait-ce accetable, d'après les mœurs locales ? Dans son pays d'origine à lui, la Contrée Solaire, c'était tout bonnement impensable !
Dans son trouble, le solaire ne remarqua pas que la voyageuse dévorait l'inconnu du regard. Le duo fut aussitôt fasciné lorsque son tour de passe-passe commença.
L'homme agita un linge mat, puis claqua des doigts et ce dernier devint brillant comme de la soie. Il fit mine de le nouer dans son dos comme une cape, puis tira dessus d'un coup sec. La cape improvisée devint un chemisier. Il fit un grand geste du bras, et l'habit disparut.
Violette commenta :
« Il est doué, ce magicien.
— Il a l'air d'en avoir pas mal ici, mais c'est vrai que la plupart ne sont pas très convaincants. C'est le plus doué que nous n'avons pu voir. Je me sens émerveillé comme un enfant ! »
* * *
Violette s'éclipsa, alors que le soleil était couchant. La voyageuse n'avait aucun scrupule à laisser Villiers tout seul, à présent qu'ils étaient arrivés à la Pointe de Galidor depuis quelques jours. Elle rejoignit l'endroit où elle avait vu le saltimbanque faire son spectacle savant de magie.
L'homme était justement là ; il ramassait quelques accessoires pour les ranger dans une caisse. Il se figea en remarquant Violette qui approcha. Il lui sourit d'un air fermé que Violette n'arrivait pas à déchiffrer.
« Je savais que vous reviendrez.
— Moi ?
— Oui, vous. Je vous ai remarqué lors de ma prestation. Il faut reconnaître que vous ne vous fondez pas vraiment dans la masse.
— Et je prends ça pour un compliment ! » soutint-elle avec fierté.
Le méorien lui sourit, comme amusé. Il abandonna la caisse d'accessoires au bord de l'estrade pour accorder toute son attention à la femme.
« Je m'appelle Violette Prêle-d'Argent ; je suis une voyageuse. Pas seulement une voyageuse ici, mais aussi pour les gens de là d'où je viens. Je m'intéresse beaucoup à tout ce qui est mystérieux.
— C'est pour ça que je pique votre curiosité, en déduisit l'homme, orgueilleux.
— Exactement ! Je ne vous demanderai pas comment vous faites cela, en revanche j'aimerais que vous m'appreniez. Enseignez-moi l'un de vos tours de magie, s'il vous plaît ! Evidemment, je rémunèrerai votre leçon, si cela vous inquiète. Et je précise que c'est juste pour assouvir ma curiosité et mon désir, et nullement pour revendre vos techniques ailleurs !
— Oui... mais non. »
L'homme lui fit face et s'inclina exagérément. D'un coup, il fit un revers de la main, et il disparut. Il avait laissé place à une traînée de poussières brillantes, qui luisaient dans l'espace où il se trouvait un instant plus tôt.
Violette sursauta quand l'artiste lui tapota l'épaule, pour se manifester juste derrière elle.
« Je veux garder mon mystère pour moi. Pas par souci de confidentialité de mes illusions, ni par souhait de ne pas transmettre mon savoir-faire. »
Le visage de Violette se tordit aussitôt en un sourire taquin.
« Pourquoi alors ? Pour préserver le mystère, pour que je revienne vous voir ?
— Exactement ! Il faut bien continuer à piquer votre intérêt, pour que vous reveniez me voir, flirtait-il.
— Mmm... et si je trouvais ici un autre magicien plus doué encore ? le provoqua-t-elle. Vous avez l'air d'avoir pas mal de concurrence dans le coin, dans votre domaine :
— Je ne suis pas un vulgaire magicien. Je suis Cénbam, l'illusionniste. Et croyez-moi, je pense être l'un des meilleurs de mon domaine.
— Pas le plus modeste ! »
Violette en était désormais certaine : elle en pinçait pour ce dénommé Cénbam. Pouvait-on appeler ça un coup de foudre ?
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