XXVII • Fée Maléfique à vendre

La Cité Blanche était magnifique. 

Elle n’avait rien à envier à la capitale avec ses toits bleus en coupole qui se hissaient tels des dômes protecteurs et ses murs blancs ou couleur de l’ivoire. Son sol pavé de pierres gris pâle semblait neuf dans une grande partie de la ville, comme si on avait rénové chaque parcelle de la Cité pour donner l’impression à quiconque entrant ici qu’il serait le premier à y poser les pieds. 

De nombreuses boutiques, échoppes, établissements et magasins en tout genre trônaient, longeant les rues, les encadrant tels de bons petits soldats postés en haie d’honneur pour écarter le passage et laisser le flot d’habitants se mêler à celui des visiteurs qui venaient en nombre chaque jour à chaque mois de l’année. De jolies fleurs ornaient les balcons de plusieurs maisons, de nombreuses enseignes se côtoyaient entre elles. A droite, Le Renard de Feu semblait bondé de monde. Il était midi après tout, et les clients s’attablaient, se bousculant presque pour avoir une place dans ce pseudo-restaurant qui ressemblait davantage à une auberge mais qui, pourtant, savait attirer l'œil des curieux. Un renard à la belle fourrure rousse ornait d’ailleurs l’enseigne et la devanture du lieu, fier gardien qui souriait aux passants. A gauche, si l’on tournait la tête, l’on pouvait apercevoir un attroupement d’enfants qui fixaient avec envie les vitrines du magasin de jouets Le Paradis de Monsieur Byrne. Sur la grande porte rouge de la bâtisse était lisible le nom du magasin, gravé à même le bois en lettres d’or. Juste en-dessous, et seulement si on y prêtait attention, l’on pouvait lire la devise du propriétaire inscrites en belles lettres dorées et fines : “Le Bonheur des Petits peut aussi faire celui des Grands”. La Cité toute entière bouillonnait de monde, joyeuse et en effervescence. Si on avançait encore, on pouvait voir une multitude de personnes dîner en terrasse, profitant de la chaleur du soleil, dans d’autres lieux de restaurations qui se faisaient concurrence comme le Café-pâtisserie Chez Amélia ou encore les éternels rivaux de la Cité Blanche qui se livraient à un semblant de compétition amicale, le deux restaurants Becky & Betty et Les Délices de Candice. Les réverbères se dressaient fièrement dans chaque allée, guettant la tombée de la nuit pour remplir leur tâche cruciale : guider les âmes égarées dans les ténèbres vers la plus infime source de lumière. Les saltimbanques, actuellement occupés à faire leurs magnifiques spectacles de rues sur la Grande Place, y avaient accroché des affiches et pancartes colorées un peu partout, comme pour avertir la ville entière de leurs futures représentations. Un peu plus loin encore, on pouvait contempler l’atelier d’un peintre ou encore une libraire à l’enseigne couleur d’encre mais aux lettres blanches et presque brillantes, comme si quelqu’un s’était amusé à les saupoudrer d’argent. Puis, enfin, venaient les boutiques pour toutes sortes de choses : chaussures, vêtements, plantes médicinales et remèdes contre les maladies, produits de beauté, etc. 

Au milieu de toutes ces bâtisses, une boutique en particulier, savant mélange d’ivoire et de plusieurs nuances de marron auxquelles se mêlait la couleur du sable, pouvait attirer les regards d’enfants trop curieux pour pas leur chemin mais guère plus courageux pour oser franchir la porte qui les séparaient de l’intérieur de ce bâtiment. L’enseigne affichait en belles lettres cursives couleur ocre jaune le titre suivant : La Maison Enchantée. Grand, l’édifice comportait trois étages et un rez-de-chaussée. Comme pour indiquer la composition du bâtiment, le coloris des murs à l’extérieur formait un magnifique dégradé allant de la teinte du parchemin pour monter progressivement vers l’ivoire et enfin, terminé par le blanc qui correspondait au troisième et dernier étage. Le tout surmonté, bien entendu, d’un magnifique toit bleu profond en coupole ! 

Depuis la devanture, les enfants ne pouvaient distinguer qu’une multitude d’étagères peuplées de vieux livres à la reliure en cuir ou en satin, agrémentés de fils d’or et de lettres qui brillaient tout autant mais ne pouvaient être lisibles depuis l’extérieur. Des fioles, des babioles ou encore d’étranges objets étaient tranquillement lovés les uns contre les autres, attendant patiemment un éventuel collectionneur qui passerait par là et sauraient prendre soin d’eux ou encore un potentiel acheteur qui ne manquerait pas de trouver son bonheur pour peu qu’il soit intéressé par les antiquités, les objets rares ou encore tout ce qui tenait de la magie. 
Tout était soigneusement rangé. Chaque vase, chaque coupe d’argent sertie de citrines ou de petites opales, etc, absolument chaque objet avait sa place en ces lieux. 

Une fois que les enfants cessaient de contempler l’intérieur de la boutique, il pouvait aller voir près de l’entrée. Accrochée à la poignée de la porte marron foncé et aux motifs décoratifs ocre jaune formant de très jolies arabesques, une belle affiche blanche avec dessus une annonce écrite en lettres bleues et calligraphiées semblables à la police d’écriture de l’enseigne. Le message était le suivant :

↞ Fée Maléfique à vendre ↠    

A tous les spécialistes des créatures féériques et aux magiciens en herbe : La Maison Enchantée cherche un acheteur pour Blake, jeune mâle appartenant à la race des Fées Maléfiques !

Faute d’avoir pu obtenir des résultats positifs lors de la période d’apprivoisement autorisée par la Cité Blanche, le propriétaire, Monsieur Kurt Murphy, se voit dans l’obligation de vendre la créature à quelqu’un qui sera plus apte au dressage de Fées, sous peine de se voir attribuer une amende pour hébergement non-autorisé de créature magique. Monsieur Murphy dispose d’un délai de deux semaines pour vendre le jeune Fae. Passé ce délai, il écopera d’une amende s’il ne remet pas la créature aux autorités de la Cité Blanche !   

Nous rappelons que selon les lois de la ville, les Fées sont reconnus comme des êtres vivants à part entière : l’esclavage, la maltraitance (physique et psychologique) ou le meurtre de Fées Maléfiques vaudra un procès, et selon la gravité du crime la prison ou la peine de mort !



Voilà pour aujourd'hui ! Ce texte-ci est la suite de "Une famille en os". J'espère que cela vous a plu, n'hésitez pas à me dire ce que vous en avez pensé (les lieux, l'ambiance, les descriptions) en commentaires. 🙂

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