Allongée sur un large rocher, mes jambes pâles badigeonnées de monoï, je bronze comme je peux tout en essayant d'oublier les gloussements de Marly et Jonathan.

Après l'épisode du « je t'abandonne dans ma voiture poubelle pour aller baiser avec mon mec dans les bois », nous sommes arrivées dans un coin paumé de Lozère, ma meilleure amie, son copain, son petit-frère et moi.

Les tentes à peine plantées dans l'immense colline appartenant à son oncle, nous avons filé jusqu'à la rivière de son enfance, seul endroit intéressant du coin. Quelques familles et un groupe d'adolescent se chamaillant près d'une « cascade » qui n'en est pas vraiment une, un soleil transformant les rochers en four et une musique incompréhensible sortant d'une enceinte Bluetooth un peu plus loin...

Sah, quel plaisir.

Je pourrais me sentir à la plage en fermant les yeux si seulement le comportement de Marly ne m'énervait pas autant. Elle a décidé d'être agaçante et cruche depuis notre départ, depuis que le bonheur de Jonathan est la priorité de ses vacances.

« Hey. »

Je penche la tête en arrière lorsqu'une goutte d'eau fraiche me tombe sur le front : Thibault aka « maintenant j'ai 20 ans et je suis devenu BG » agite au-dessus de moi des Mister Freeze de toutes les couleurs.

Sa sœur et Jonathan lui sautent presque au cou, s'emparant du butin avant de déchirer le plastique des dents et de jeter le reste dans le sac glacière du jeune homme. Je rehausse ma paire de lunettes pour mieux les juger du regard jusqu'à ce que le blond me tende un Mister Freeze ouvert.

— Goût mangue.

— Mon préféré. Les choses sont bien faites !

— Ou alors je me souviens de ton parfum préféré.

— Pourquoi tu te souviendrais de ça ?

Thibault s'assoit à côté de moi en soupirant avant de sourire et d'aspirer le liquide coloré en train de fondre.

Le jeune homme de 20 ans s'est vraiment bonifié avec l'âge. Passé d'un garçon tout fin, boutonneux à lunette et chiant comme la pluie à un homme musclé à la voix chaude, à la peau impeccable et à la conversation intéressante.

La seule chose qui a changé ou que je n'ai jamais remarquée, c'est cette marque sur son torse maintenant bien travaillé.

— Blessure en urbex, dit-il en répondant à ma question silencieuse.

— Ça se voit tant que ça que je te mate ? Même à travers mes lunettes ?

— Si c'était parce que je te plais, ce serait vraiment flatteur.

— ...Quoi ?

Thibault aspire d'un coup le jus restant dans son Mister Freeze avant de se relever soudainement et de courir vers la rivière pour se jeter dedans.

Et moi je le regarde partir, comme une conne figée par ses paroles mais aussi la vue de son fessier dans son short de bain bleu sombre.

« Est-ce que je suis en train de passer à côté de quelque chose ? C'est moi où Thibault n'arrête pas de balancer des phrases ressemblant fortement à de la drague ?... Est-ce que je l'intéresse ? Mais non, je le connais depuis trop longtemps pour ça et puis c'est Titi le morveux !... » me dis-je pour moi-même.

Alors pourquoi est-ce que je n'arrive pas à décrocher le regard de son corps ?

Pourquoi est-ce que le voir ressortir de l'eau, des gouttes ruisselantes sur son torse et tombant de ses cheveux blonds qu'il secoue comme un chien mouillé, ça me donne des frissons ?

« Hey Mélo ! »

Je sursaute lorsque Marly entre dans mon champ de vision, un grand sourire aux lèvres et une trace de suçon récente dans le cou. Son maillot de bain rouge à pois blancs est sûr le point de tomber à cause d'une bretelle presque détachée mais elle semble s'en foutre éperdument.

— Hey, commencé-je, on se la fait cette partie de cartes que tu m'as promise il y a une heure ?

— À ce propos... Avec Jojo on compte partir en exploration un peu plus loin pour trouve un coin plus... tranquille près de la rivière.

— AH. Donc tu m'abandonnes avec ton frère ?

— Je suis sûr que Thibault ne t'embêtera pas !

— Ce n'est pas pour ça que je suis inquiète...

— Hein ?

— Non rien, vas-y. À tout à l'heure.

La blonde m'embrasse la joue chaleureusement avant de partir au loin avec son Jonathan, me laissant seule à bronzer avec ce jeune homme de plus en plus agréable à mater.

Je dois bien passer une heure comme ça, allongée inconfortablement sur une serviette devenant brûlante et ne remarquant que lorsque j'ai une petite soif que notre coin est très calme. Les adolescents sont partis plus loin, les familles font la sieste à l'écart et le seul encore près de la rivière est Thibault, assied en hauteur sur un rocher.

Le corps brûlant mais aussi l'esprit troublé, je me relève et décide de le rejoindre lorsqu'il me fait signe de venir dans l'eau, lui et son sourire malicieux.

— Alors, tu viens te rafraichir avec moi ? dit-il lorsque je glisse les jambes doucement dans l'eau.

— Obligé, je suis brûlante !

— Tu vas devoir te re-badigeonner de monoï en sortant alors.

— Arf oui, je n'y avais pas pensé ! Et ta sœur qui est encore je ne sais où à faire des choses pas catholiques... Je vais galérer pour m'en mettre dans le dos.

— Ne t'inquiète pas, je pourrais la remplacer. Fais confiance à mes mains.

C'est le pouvoir de l'été, de la chaleur, de l'odeur de monoï et du goût de la mangue encore sur mes lèvres qui m'excite à ce point ou est-ce simplement l'attraction naturelle de Thibault ?

À suivre...

https://youtu.be/UJIHwC5Derk